Intervention de Boris Vallaud

Séance en hémicycle du mardi 28 septembre 2021 à 15h00
Ratification de l'ordonnance relative aux modalités de représentation des travailleurs indépendants recourant aux plateformes — Discussion générale

Photo issue du site de l'Assemblée nationale ou de WikipediaBoris Vallaud :

Je vais vous épargner les redites de mes propos de tout à l'heure, que vous avez tenus pour des caricatures ; mais cela s'appelle le débat parlementaire. Il est toujours préférable de répondre point par point plutôt que par une forme d'invective qui esquive la profondeur des débats.

Vous avez d'abord dit que vous preniez le chemin engagé par la loi relative au travail, à la modernisation du dialogue social et à la sécurisation des parcours professionnels, dite El Khomri, en 2016. C'est tout à fait juste, mais c'était il y a plus de cinq ans. Depuis, il s'est passé bien des choses : il y a eu des travaux de chercheurs, des mouvements de chauffeurs de VTC et de livreurs, la révélation de travail au noir de clandestins, de gens sans droit ni titre. Nous avons vu la réalité économique qui était celle de ces travailleurs des plateformes – je l'évoquais tout à l'heure – devant travailler 60 à 70 heures par semaine pour gagner un SMIC. Et puis il y a eu cette jurisprudence, partout en Europe et en France même, qui a reconnu la réalité de la fausse indépendance.

Je voudrais dire à mon collègue Viry que je suis favorable à la vraie indépendance. Mais ce dont nous parlons, c'est de la fausse indépendance, qui n'est ni la vraie indépendance ni le vrai salariat, mais le vrai tâcheronnage, la vraie précarité, la vraie dureté dans la vie quotidienne, la vraie exploitation par des plateformes numériques d'hommes et de femmes qui n'ont que leur force de travail pour vivre et qui n'en vivent pas. C'est de cela qu'il s'agit.

Alors oui, je crois qu'il faut défendre à la fois le vrai salariat et la vraie indépendance, ainsi que le fait de pouvoir, dans un cas comme dans l'autre, se créer des droits par le travail. Mais ce que vous proposez, madame la ministre, ce sont en réalité les commencements d'un tiers statut. On le voit bien, notamment dans les sujets qui seront soumis au dialogue social. Ce n'est pas l'intégralité des droits sociaux ; mon collègue Quatennens l'évoquait tout à l'heure.

Vous êtes en train de créer une sorte de « lumpensalariat », composé de travailleurs qui n'auront pas les droits intégraux du salariat, mais tout de même suffisamment pour qu'on ne puisse pas faire valoir le faisceau d'indices qui permet au juge la requalification. C'est ce qu'écrit votre rapporteur ; c'est ce que vous défendez en prétendant défendre le modèle des plateformes. Vous dites que ça se fait contre l'avis des travailleurs : je me permettais de rappeler le droit, celui que votre ministère est chargé d'appliquer.

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