Établir la garantie d'emploi par l'État employeur en dernier ressort : voilà qui ouvre un débat important en cette période troublée. Nous partageons, madame la rapporteure, l'essentiel de vos constats. Face à un chômage de masse persistant depuis quarante ans, les solutions mises en œuvre ont rarement atteint leur objectif. Sous couvert de créations d'emplois, elles ont souvent contribué à flexibiliser le droit du travail, à réduire les protections sociales et à renforcer les pouvoirs des employeurs. Et le gouvernement actuel, je me dois de vous le dire, monsieur le ministre, a pris sa part de responsabilité en la matière avec les ordonnances travail de 2017.
De telles orientations ont aggravé la précarité des travailleurs, tiré les salaires vers le bas et dégradé les conditions de travail – les chiffres sont connus, je ne les rappellerai pas. Leurs conséquences sur le front de l'emploi sont celles que vous évoquez : exclusion sociale, précarité maximale, chantage à l'emploi pratiqué par le patronat et alignement vers le bas du droit du travail.
Nous vous rejoignons aussi pour constater que le marché privé se refuse à fournir un nombre d'emplois à la mesure de la demande de travail et des besoins de la société – rappelons-nous le million d'emplois promis par le MEDEF, le Mouvement des entreprises de France –, alors même qu'il est massivement subventionné par la puissance publique, qui pratique une politique de l'offre fondée sur des allègements de cotisations sur les bas salaires. Dès lors, tournons-nous vers la puissance publique, qui doit jouer tout son rôle pour satisfaire les besoins sociaux et écologiques. À cet égard, le présent texte a le mérite de proposer une solution alternative aux politiques menées jusqu'à présent.
Si elle s'appuie sur la logique de l'expérimentation « territoires zéro chômeur de longue durée », mise en œuvre depuis 2016, pour la généraliser à l'ensemble des personnes durablement privées d'emploi, la proposition de loi en diffère cependant dans ses modalités d'application, et c'est un point sur lequel nous solliciterons quelques précisions. En effet, alors que l'expérimentation ouvre droit à un CDI pour des chômeurs de longue durée, la garantie d'emploi dont nous parlons se concrétiserait par un CDD renouvelable. Or les politiques de contrats aidés, si utiles soient-elles, notamment dans le secteur associatif et pour les personnes accompagnées, ont parfois montré leurs limites. Nous estimons qu'à chaque fois que cela est possible, il conviendrait de recourir au CDI : rien ne vaut en effet un tel contrat pour bénéficier d'une meilleure protection sociale, d'un accès facilité à un logement ou à un prêt bancaire.
Nous souhaitons également que soit développée la formation, enjeu essentiel pour accompagner les personnes éloignées de l'emploi, afin qu'elles puissent actualiser leurs savoirs et leurs compétences, ce qui est le gage d'une insertion durable.
La garantie d'emploi pourrait enfin constituer un levier de la transition sociale et écologique des emplois. Elle permettrait de flécher les créations d'emploi vers les secteurs où les besoins sont aujourd'hui mal satisfaits : la santé, la perte d'autonomie, l'éducation, la transition agricole. Vous l'aurez compris, c'est avec intérêt et dans un esprit d'ouverture que le groupe de la Gauche démocrate et républicaine aborde ce débat.