Je suis très heureuse d'intervenir devant vous ce matin au lendemain de la réouverture des lieux de culture dans notre pays, au lendemain du déconfinement de la culture – nos routes se sont d'ailleurs croisées, madame la ministre, dans un lieu qui rendait hommage à la puissance créatrice de deux génies. Nous examinons, en deuxième lecture, la proposition de loi de la sénatrice de l'Yonne Dominique Vérien – que je tiens à saluer de manière tout à fait amicale et reconnaissante –, visant à moderniser les outils et la gouvernance de la Fondation du patrimoine. Ce texte a été adopté à la quasi-unanimité en première lecture par notre assemblée, il y a déjà plus d'un an.
Depuis bientôt vingt-cinq ans, la Fondation du patrimoine, dont je veux souligner le rôle fondamental, est un outil très précieux de notre politique de conservation et de restauration du patrimoine. Nous tous ici ne pouvons qu'être sensibles aux dimensions historique, culturelle et mémorielle de notre patrimoine, ainsi qu'à son rôle essentiel dans la définition de notre identité nationale et de nos identités locales et régionales. Toutefois, la crise sanitaire que nous traversons depuis plus d'un an et dont nous espérons tous commencer à sortir progressivement a eu des conséquences aussi sur notre patrimoine, au premier rang desquelles certains retards dans des opérations de conservation et de restauration : à la fin du mois de décembre dernier, par exemple, la société de billetterie en ligne Patrivia évaluait à plus de 50 % la perte du chiffre d'affaires des 44 000 monuments historiques français – et encore cette évaluation avait-elle été établie sans prendre en compte les pertes occasionnées par les frais engagés dans la perspective de réouverture le 15 décembre dernier, perspective qui s'était évanouie.
Dans ce contexte, il semble plus que nécessaire de renforcer le rôle et la mission de la Fondation du patrimoine, qui se charge de mobiliser le secteur privé pour la sauvegarde et pour la valorisation de notre patrimoine non protégé en lui permettant de travailler encore plus efficacement.
Tout récemment, le groupe d'études « patrimoine » de notre assemblée, que j'ai le plaisir de coprésider avec notre collègue Raphaël Gérard, a auditionné le nouveau directeur général des patrimoines et de l'architecture, Jean-François Hebert, et nous avons insisté sur le vif intérêt que nous portons à la mise en œuvre de la politique patrimoniale du ministère de la culture ainsi que sur la très grande vigilance dont cette politique fait l'objet de notre part.
Comme le président de la Fondation du patrimoine, Guillaume Poitrinal, l'a fait récemment dans la presse, je tiens à tirer moi aussi la sonnette d'alarme : nous assistons, depuis plusieurs années, à la multiplication d'incendies qui détruisent notre patrimoine. Inutile d'évoquer l'incendie qui abîma considérablement la cathédrale Notre-Dame de Paris, mais je rappelle que la cathédrale de Nantes a brûlé en juillet 2020, l'église corrézienne Saint-Christophe de Voutezac en janvier 2021, la collégiale Saint-Nicolas d'Avesnes-sur-Helpe, dans le Nord, en avril 2021, et, tout récemment, la petite église Saint-Pierre de Romilly-la-Puthenaye, en Normandie, et l'Hôtel de Dion à Saint-Omer.
Si certains de ces incendies sont d'origine criminelle, les autres sont souvent dus à un déficit d'entretien, faute de moyens financiers. Nous devons à tout prix permettre à la Fondation du patrimoine, qui joue un rôle essentiel dans la collecte de fonds, de déployer ses talents et son énergie d'autant que, cela a été rappelé, l'engouement de nos compatriotes pour le patrimoine ne se dément pas, bien au contraire : même en cette période de relative sortie de crise pandémique, ils manifestent toujours une véritable appétence pour la visite de nos lieux patrimoniaux, et le succès du loto du patrimoine, porté par l'enthousiasme communicatif de Stéphane Bern, est net. Les collectes de dons, qui continuent de connaître un vrai succès témoignent du fait que notre patrimoine est essentiel pour faire nation.
Patrimoine protégé comme non protégé, patrimoine architectural d'origine historique comme patrimoine industriel, grands châteaux emblématiques comme modestes éléments du patrimoine rural, l'intérêt que nos compatriotes leur portent attestent de leur véritable amour pour le patrimoine français.
Comme en commission des affaires culturelles, il y a quelques jours à peine, le groupe Les Républicains votera en faveur de cette proposition de loi déposée par la sénatrice Dominique Vérien, dans les termes adoptés lors de sa dernière lecture par le Sénat et sur la base de l'excellent rapport de notre collègue Béatrice Descamps, dont je souligne la qualité du travail. Nous espérons qu'aujourd'hui encore, comme en commission, cette proposition de loi sera adoptée à une majorité très large afin que la Fondation du patrimoine puisse poursuivre sa mission si importante le plus sereinement et le plus efficacement possible.
La culture est essentielle, et le patrimoine l'est aussi tout à fait.