Monsieur le président, madame la présidente de la commission, madame la rapporteure, monsieur le secrétaire d'État, ce texte est le fruit d'un travail parlementaire déjà long, entamé en janvier 2015 avec son dépôt devant nos collègues sénateurs par le ministre des affaires étrangères de l'époque. Le texte a été examiné le 2 novembre 2016 par la commission des affaires étrangères du Sénat puis adopté en séance publique au Sénat le 9 novembre 2016. Notre assemblée s'en est saisie le 14 septembre dernier et nous l'avons examiné en commission le 31 janvier dernier.
L'Union des Comores a connu une histoire agitée, mais depuis 2002, un système de présidence tournante – chaque île gouverne à son tour – assure des alternances régulières et une certaine stabilité. Toutefois, la situation économique et sociale est mauvaise. La société est par ailleurs travaillée par des courants radicaux et des influences étrangères.
Principal bailleur bilatéral, la France apporte une aide de 135 millions d'euros sur la période 2014-2020 dans le cadre d'une programmation conjointe avec l'Union européenne. Malgré ces liens, la question de Mayotte, qui a voté contre l'indépendance en 1975 avant de devenir un département français, déchaîne les passions. La communauté française aux Comores compte 5 513 inscrits sur les listes consulaires, dont la grande majorité possède également la nationalité comorienne. La diaspora comorienne en France est estimée à 370 000 personnes pour 790 000 habitants aux Comores. Les transferts de cette diaspora compteraient pour 25 % du PIB de l'archipel.
Les liens croisés entre nos deux pays, fait des résidents français aux Comores, des binationaux et des Comoriens résidant en métropole ou à Mayotte, nécessitent la conclusion d'une convention d'entraide judiciaire. Actuellement, la coopération s'effectue soit au titre du principe dit de courtoisie internationale, soit sur le fondement des conventions de l'ONU. Quelques statistiques : depuis le 1er janvier 2008, la France a transmis vingt-trois demandes d'entraide judiciaire aux autorités comoriennes ; sept d'entre elles n'ont pas été exécutées et sont toujours en cours. Depuis la même date, les autorités comoriennes ont, de leur côté, transmis cinq demandes d'entraide judiciaire à la France.
La convention d'entraide judiciaire avec les Comores, qui comporte les dispositions habituelles en pareil cas, est conforme aux standards français ainsi qu'aux obligations internationales et européennes de la France. De facture classique, elle organise l'entraide judiciaire en matière pénale selon des modalités normales. Les quelques différences tiennent à la mention de techniques spéciales d'enquête – livraisons surveillées, opérations d'infiltration, interceptions téléphoniques – qui répondent clairement à des besoins opérationnels, compte tenu de la proximité ou même, dirais-je, de la porosité avec Mayotte, et qui devraient améliorer l'efficacité de la lutte contre les filières d'immigration clandestine et la criminalité en général.
Jusqu'à présent, la coopération judiciaire avec ce pays a été peu efficace. La convention retient, classiquement, le principe de l'entraide la plus large possible, et organise les modalités de sa mise en place. Elle garantit à la France la possibilité de refuser l'entraide judiciaire dans un dossier qui pourrait aboutir à une condamnation à mort aux Comores, où cette peine existe toujours. La convention prévoit aussi de très larges possibilités d'obtention d'informations en matière bancaire et organise, le cas échéant, l'audition de témoins ou d'experts par vidéoconférence et la mise à disposition de moyens par la France.
En conclusion, le groupe Nouvelle Gauche votera en faveur de l'adoption de ce projet de loi qui devrait fluidifier la coopération judiciaire entre la France et les Comores en encadrant l'émission des demandes, leur mode de transmission et leur exécution. Ce texte appelle dans l'ensemble peu de remarques, dans la mesure où les obligations internationales qu'il contient résultent d'engagements européens et internationaux déjà intégrés dans notre ordre juridique, et où aucune modification des dispositions législatives ou réglementaires en vigueur n'est à prévoir. Néanmoins, son examen doit être l'occasion pour notre assemblée d'évoquer la situation de l'île voisine des Comores, Mayotte, où vivent certainement près de 150 000 Comoriens – pour 100 000 Français – , dont deux tiers probablement en situation irrégulière. Pour aider les Comores et Mayotte, il faut s'appuyer sur l'aide au développement à destination des Comores et développer les services publics à Mayotte afin que nos compatriotes habitant sur l'île se sentent pleinement citoyens et disposent des mêmes facilités qu'en métropole.