qui représentent près de 300 000 personnes dont un tiers est sédentaire, un autre tiers, nomade, et un dernier tiers, semi-sédentaire.
La carotte donc pour les élus, mais une carotte en forme de mirage lorsque vous proposez de dispenser les communes de moins de 5 000 habitants appartenant à un EPCI constitué lui-même uniquement de communes de moins de 5 000 habitants de réaliser des aires ou des terrains sur son territoire alors que celles-ci sont imposées par le schéma départemental.
La carotte encore, quand le texte précise que le schéma départemental ne peut obliger à la réalisation d'aires ou de terrains sur le territoire d'une commune « que si le taux d'occupation moyen des aires et terrains existants dans le même secteur géographique d'implantation, constaté au cours des trois dernières années, est supérieur à un seuil défini par décret ».
La carotte enfin, avec la suppression de la procédure de consignation pour les communes ou les EPCI ne respectant pas leurs obligations, ce qui revient à priver le préfet de tout moyen de pression.
Mais surtout le bâton, mes chers collègues, pour ces populations qui ont choisi un mode de vie différent du nôtre, et qui sont souvent victimes de préjugés. Selon un rapport de 2011 de la Commission nationale consultative des droits de l'homme, 10 % des victimes de racisme en France sont des gens du voyage.
Le bâton encore, brandi de manière outrancière, lorsque les emplacements des aires permanentes d'accueil sont ajoutés à la liste des éléments assimilés à des logements locatifs sociaux pour permettre aux élus d'atteindre les objectifs de construction fixés par la loi SRU. Face au mal-logement, une telle disposition est insensée. Elle permettra non pas d'alléger l'obligation de 25 % de logements sociaux prévue par la loi SRU, mais de s'y soustraire.
Le bâton enfin, ou plutôt le fer, s'agissant des sanctions en cas d'occupation sans titre d'un terrain. Je cite pêle-mêle : la suspension du permis de conduire pendant trois ans ; l'enlèvement et la rétention de caravanes ou autres véhicules utilisés comme logement, en totale contradiction avec le principe de non-confiscation des véhicules destinés à l'habitation ; ou encore, et bien plus insultante, l'interdiction de séjour alors que cette peine est réservée à certaines infractions graves.
Votre proposition s'inscrit à contre-courant des lois progressistes adoptées ces dernières années, en particulier celle de 2017 qui abroge plusieurs dispositions discriminatoires, à la suite de la décision du Conseil constitutionnel du 5 octobre 2012 déclarant contraires à la Constitution les dispositions de la loi du 3 janvier 1969 relatives aux obligations de se munir, selon les cas, d'un livret spécial de circulation, et de faire viser les titres de circulation à des intervalles réguliers ainsi que les dispositions imposant le rattachement ininterrompu dans la même commune pendant plus de trois ans.
Mes chers collègues, les dernières lois cherchaient à résorber les inégalités, directes ou indirectes, dont les gens du voyage sont victimes, à résoudre leurs difficultés à accéder à certains biens et services – obtention de prêts bancaires, ouvertures de comptes courants, contrats de téléphonie mobile et accès à internet – , et à lever les obstacles à leur accès à l'emploi, celui-ci étant souvent incompatible avec le besoin de flexibilité et d'adaptabilité que peut induire le nomadisme. Elles visaient à réduire les discriminations liées à leur origine ou leur mode de vie tout en garantissant l'accompagnement des élus locaux.
Il n'est pas souhaitable de revenir sur les avancées positives des lois précédentes et notamment de celle de 2017 qui ne demande qu'à faire la preuve de sa capacité à accompagner les communes et les gens du voyage.
Mes chers collègues, il serait tout aussi dommageable d'oublier que, bien souvent, la qualité de l'hôte fait celle de l'invité.