Intervention de Philippe Gosselin

Séance en hémicycle du mardi 10 juillet 2018 à 15h00
Démocratie plus représentative responsable et efficace — Motion de rejet préalable

Photo issue du site de l'Assemblée nationale ou de WikipediaPhilippe Gosselin :

Cela étant, je reconnais volontiers qu'un certain nombre de points de la réforme ne présentent aucune difficulté majeure.

L'article 1er du projet de loi constitutionnelle complète l'article 23 de la Constitution en prévoyant une interdiction du cumul des fonctions ministérielles et des fonctions exécutives. Cela ne nous pose pas de problème particulier, même si l'on peut noter que certains ministres – ou plutôt qu'un certain ministre – , dans les Hauts-de-France, ont eu un peu de mal, avant la rentrée de septembre, à mettre ce non-cumul en application…

L'abaissement à quarante députés ou quarante sénateurs du seuil nécessaire pour saisir le Conseil constitutionnel, que ce soit dans le cadre de l'article 16, de l'article 54, de l'article 61 ou de l'article 88, alinéa 6, de la Constitution, s'inscrit évidemment dans la logique de l'abaissement du nombre de parlementaires, j'y reviendrai. Mais, puisque nous fixons ce seuil dans le cadre d'une loi organique et que l'idée était de rendre la saisine possible, dès lors que 10 % des députés ou des sénateurs la demandent, je pense qu'il aurait été préférable de s'en tenir à ce pourcentage. La loi organique – une simple loi organique – pourrait en effet faire varier le nombre d'élus. Or il est préférable de ne pas avoir à modifier de nouveau la Constitution si la loi organique vient à être modifiée sous d'autres législatures.

La fin de la présence des anciens Présidents de la République au sein du Conseil constitutionnel n'appelle pas non plus, de notre part, de remarque particulière. Nous pouvons du moins saluer une forme d'élégance dans le choix de laisser au Président qui y siège aujourd'hui le droit de continuer à le faire. Peut-être aurions-nous pu envisager, afin de profiter de leur expérience, que les anciens Présidents siègent au Sénat, comme sénateurs inamovibles. Ce débat n'a pas vraiment été ouvert et peut-être, du reste, est-il sage de le refermer immédiatement.

La suppression de la Cour de justice de la République est sans doute plus compliquée. On comprend les hésitations qui ont pu conduire à créer cette juridiction, que l'on peut qualifier de juridiction d'exception, car juger des ministres pour des actes commis dans l'exercice de leurs fonctions n'est certes pas chose aisée, et l'on comprend une partie des hésitations qui auraient pu conduire à son maintien. Finalement, c'est la cour d'appel de Paris qui aura désormais à juger de tels actes – si la réforme va à son terme, ce qui n'est pas encore totalement gagné – , mais avec un droit qui restera pour une part un exorbitant du droit commun. Tout cela me paraît en réalité assez bancal et il me semble que, là encore, on a plutôt voulu satisfaire à l'air du temps, alors que gérer les infractions des ministres est un exercice délicat. Nous n'allons pas nous arc-bouter sur ce point mais, j'insiste sur le fait que cette réforme de la Cour de justice de la République n'est pas une question anodine.

Quant à la réforme du Conseil supérieur de la magistrature, compte tenu des pratiques constatées depuis plusieurs années, il ne s'agit pas d'une vraie réforme. L'existence d'un avis conforme de la formation compétente du Conseil supérieur de la magistrature pour les nominations des magistrats du parquet n'est pas, de mon point de vue, une révolution en soi. Mais je le dis pudiquement puisque quelques collègues de ma propre famille politique ont, sur ce point, une approche différente – et cette diversité, ma foi, me va très bien. Il importe surtout que le ministère de la justice puisse continuer à conduire une politique pénale nationale digne de ce nom et puisse continuer à l'exprimer par des instructions générales qui servent l'égalité devant la loi, comme l'a d'ailleurs rappelé le Conseil constitutionnel, le 8 décembre 2017, dans une décision relative à une question prioritaire de constitutionnalité. Attention aux parquets hors sol, comme il y a des élus hors sol !

Enfin, s'agissant du volet territorial, on est loin, me semble-t-il, du pacte girondin annoncé par le Président de la République. Je ne vois pas vraiment, dans ce texte, la décentralisation de projet que j'ai entendu le Président Macron vanter hier à Versailles. J'en veux pour preuve que la Conférence des territoires, qui doit se réunir le 12 juillet, va s'ouvrir sans l'Association des maires de France, sans l'Assemblée des départements de France et sans l'Association des régions de France. Cela montre bien, chers collègues, que la présidence, la majorité et les collectivités se comprennent parfaitement bien.

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