Tout en m'inscrivant dans la ligne des arguments de Fabien Roussel, je tiens à souligner que nous prenons très au sérieux ce projet de loi. Nous l'avons dit : s'il est insuffisant, il constitue néanmoins un progrès. Toutefois, notre vote en faveur de ce texte, vote qui lui permettrait de faire l'unanimité, dépendra de la suppression ou du maintien des articles 9 et 9 bis. Nous estimons en effet ces deux articles contradictoires avec les avancées du texte.
L'extension à la fraude fiscale de la procédure de reconnaissance préalable de culpabilité – le « plaider coupable » – a d'autant plus de conséquences que le texte ne fait que partiellement sauter le verrou de Bercy. Le procureur pourra entrer dans une sorte de négociation avec le contrevenant, une forme de donnant-donnant, pour lui éviter un procès s'il accepte la peine qu'il lui propose. Or je tiens à rappeler que le procureur n'est pas indépendant du ministère de la justice : cette filiation, ce lien politique susciteront nécessairement un doute sur les décisions qui seront prises, surtout si le contrevenant est important. Ainsi, une grande multinationale souhaitant éviter un procès public aura des atouts, y compris face aux pouvoirs publics, si elle est en mesure d'exercer un chantage à l'emploi.
De plus, Fabien Roussel a raison, si l'objet de la disposition est de désengorger les tribunaux, outre qu'il convient de leur accorder plus de moyens – nous reviendrons sur le sujet dans le cadre de l'examen du projet de loi de finances – , il est possible de viser d'autres champs que celui de la fraude fiscale, d'autant que certaines fraudes peuvent s'élever à plusieurs centaines de millions d'euros, voire à plusieurs milliards. Ce ne sont pas les procès pour fraude fiscale qui doivent servir de variable d'ajustement prioritaire pour désengorger les tribunaux, la gravité du sujet faisant l'unanimité parmi nous.
Enfin, si un accord est trouvé avant un procès, la procédure sera bloquée : or, comme l'ont montré plusieurs affaires récentes, c'est souvent le déroulement même de la procédure qui permet de trouver de nouvelles pièces et d'éclairer les dossiers.
Pour toutes ces raisons, nous vous demandons de supprimer l'article 9.