Intervention de Fabien Roussel

Séance en hémicycle du mardi 18 septembre 2018 à 15h00
Lutte contre la fraude — Article 9 bis

Photo issue du site de l'Assemblée nationale ou de WikipediaFabien Roussel :

Dans la foulée du débat que nous venons d'avoir sur le plaider coupable, avec lequel il n'y a pas de procès public, voici venue l'heure de débattre de la convention judiciaire, avec laquelle il n'y a pas de condamnation. Vous voulez mettre en place un dispositif qui fausse complètement votre objectif d'assouplir le verrou de Bercy, car vous voulez en quelque sorte, avec cet assouplissement, resserrer les mailles du filet et attraper les fraudeurs mais, en même temps, ceux-ci vont pouvoir transiger, négocier, éviter d'être condamnés et être dispensés de sanctions s'ils ont fraudé et organisé de la fraude fiscale.

Ce dispositif de convention judiciaire permet au procureur de proposer une transaction à l'entreprise fraudeuse : on condamne les personnes physiques, mais pas les entreprises. Lorsque la négociation débouche positivement, l'entreprise verse une amende au Trésor public, la convention est rendue publique... et c'est tout. Il n'y a rien d'autre derrière : aucune reconnaissance de culpabilité, aucune condamnation, aucune inscription à un quelconque casier judiciaire, aucune interdiction d'accès aux marchés publics ni retrait, même temporaire, de licence bancaire lorsqu'il s'agit d'une banque comme HSBC ou la Société générale. En un mot, payer l'amende vaut absolution. C'est laver ses péchés sans même, finalement, être condamné à avoir péché. Vous proposez aux entreprises, en signant un chèque, d'effacer l'ardoise et de repartir à zéro.

C'est très dangereux, car c'est le symbole d'une justice à deux vitesses, qui alimentera encore le sentiment d'un « deux poids, deux mesures » insupportable – « Selon que vous serez puissant ou misérable », disait Jean de La Fontaine… Il suffit, pour s'en convaincre, de voir quel tollé ont suscité les conventions judiciaires signées par HSBC et la Société générale.

Le signal que vous envoyez en permettant de négocier, notamment avec les banques, invite à continuer ces agissements : c'est business as usual. Puisque l'ardoise est effacée, ces amendes n'effraient pas les banques: elles seront payées par l'entreprise ou par les bénéfices qui seront enregistrés. Voilà pourquoi nous demandons la suppression de cet article.

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