Il faut en effet bien voir qu'avec cet article, le projet de loi est une fusée qui, à l'instar des fusées lunaires, comporte deux étages. Elle en a même trois si l'on compte les ordonnances – nous en reparlerons à l'article 4, monsieur le rapporteur.
Le premier étage, ce sont les mesures fortes justifiées par une situation exceptionnelle censée conduire obligatoirement à l'état d'urgence sanitaire. Si nous, Les Républicains, ne contestons pas la réalité de la situation, nous contestons les moyens de droit utilisés en ces circonstances. Admettons ce premier étage et passons le cap qui nous mène jusqu'au 16 février – mais pas du tout : l'article 2 prévoyant la sortie de l'état d'urgence au 1er avril, nous entrons en réalité dans le tunnel de l'état d'urgence pour six mois ! Le Conseil constitutionnel, dans sa fameuse décision du 9 juillet 2020, n'a pas dit autre chose. Il concède que le régime juridique de sortie de l'état d'urgence – celui dont nous débattons à cet article – , c'est de l'état d'urgence dégradé… mais c'en est toujours un, donc toujours un régime d'exception qui doit protéger un objectif à valeur constitutionnelle, celui de la protection de la santé de nos concitoyens, mais qui foule aussi aux pieds des droits fondamentaux tels que la liberté d'aller et de venir, la liberté de culte, la liberté de réunion et d'association, la liberté du commerce, etc. Une telle prorogation mérite donc toute l'attention de notre assemblée. Peut-être faudra-t-il s'y résoudre pour des raisons précises, mais que l'on puisse au moins en débattre ici, en janvier par exemple, selon cette fameuse clause de revoyure. On ne peut pas envisager la sortie en même temps que l'on vote l'état d'urgence sanitaire !