Intervention de Xavier Breton

Séance en hémicycle du mercredi 2 décembre 2020 à 15h00
Réforme de l'adoption — Discussion générale

Photo issue du site de l'Assemblée nationale ou de WikipediaXavier Breton :

Avec cette réforme de l'adoption, nous abordons un sujet sensible parce qu'il touche à la vie des personnes et qu'il fait appel à des parcours avec des attentes, des espoirs, parfois des déceptions et des souffrances. Dans tous nos propos, nous veillerons à ne pas froisser ceux qui nous entendent et qui peuvent être directement intéressés par la question de l'adoption. Cela dit, il nous faut légiférer, inscrire dans le marbre de la loi certaines dispositions. Si le sujet est sensible, c'est aussi parce que nous allons toucher au droit de la filiation, droit qui s'est établi à travers des décennies et même des siècles et qu'il faut faire évoluer avec toute la prudence qui convient, de façon que la famille demeure toujours la cellule de base de la société, là où on partage une mémoire, une histoire, des épreuves pour le présent et des projets pour l'avenir.

Permettez-moi, au nom du groupe Les Républicains, de remercier la rapporteure pour le rapport qu'elle a rédigé avec la sénatrice Corinne Imbert et pour le travail qu'elle a réalisé lors de la préparation de cette proposition de loi. Comme je l'ai dit en commission des lois, pour avoir assisté aux auditions, je peux dire que son travail, dû à son expérience professionnelle, est reconnu par le monde de l'adoption. Il a débouché sur des propositions concrètes, pragmatiques qui visent à adapter le droit de l'adoption dans le code de l'action sociale et des familles afin qu'il soit plus opérationnel et à lever certains blocages.

Au-delà de ces mesures concrètes et pragmatiques, quelques dispositions nous inquiètent, soit parce qu'elles sont bancales juridiquement, soit parce qu'elles relèvent d'une idéologie qui n'est pas la nôtre.

Tout d'abord, les mesures bancales au plan juridique : je m'associe aux propos de notre collègue Marie-George Buffet qui a regretté la méthode avec laquelle nous allons examiner ce texte. Comme il s'agit d'une proposition de loi, il n'y a pas eu d'étude d'impact permettant d'évaluer les dispositions pour l'avenir, ni d'avis du Conseil d'État qui aurait été précieux quant à la réforme du droit de la filiation. Par ailleurs, l'examen de ce texte fait l'objet d'une procédure accélérée, ce qui est incompréhensible sur un tel sujet car une telle procédure ne permet pas d'avoir cet échange, cette navette indispensable entre notre assemblée et le Sénat pour préciser, voire affiner les points qui le méritent. Par ailleurs, en commission, la rapporteure a présenté non seulement les amendements habituels de cohérence rédactionnelle, mais aussi d'autres amendements sur le fond qui ont montré qu'on était bien en train de modifier le texte à la dernière minute. Enfin, l'absence en commission des ministres tant de la solidarité et de la santé que et de la justice nous a empêché de connaître l'avis du Gouvernement.

Et aujourd'hui, cerise sur le gâteau, l'amendement no 491 prévoit de confier à une ordonnance le soin de rédiger à nouveau l'ensemble du titre VIII du code civil, relatif à la filiation adoptive, parce que nous sommes en pleine improvisation et bricolage juridique sur des sujets qui auraient mérité, pourtant, que nous prenions le temps de bien mesurer ce que nous écrivons. Nous regrettons cette méthode.

Avec l'article 1er, qui vise à définir l'adoption simple, on voit bien que le texte n'est pas encore stabilisé, puisqu'il s'agit, en définitive, d'un mécanisme d'adoption forcée pour les couples de femmes qui ont eu recours à une assistance médicale à la procréation à l'étranger. On est en train d'initier un mode d'établissement de la filiation complètement inédit sans que le dispositif soit assuré au plan constitutionnel.

Les mesures qui posent problème idéologiquement ensuite : je pense, bien sûr, à celles qui renvoient à la conception de la filiation. Nous ne sommes pas favorables à une famille contractuelle qui serait établie uniquement à partir du désir des adultes. On sait qu'au sein des familles peuvent exister des déséquilibres, des pressions, parfois même des violences : or le rôle de la société est d'instituer ce cadre familial pour protéger le plus faible. Nous défendrons des amendements visant à rappeler que le statut juridique de la famille est fait pour protéger le plus faible, notamment l'enfant adopté qui est celui qui a sûrement le plus besoin de protection.

D'autres mesures idéologiques concernent les organismes autorisés pour l'adoption, qui réalisent actuellement un travail formidable : on voulait les supprimer complètement de la loi et on s'efforce maintenant de les rétablir. Alors qu'ils font un travail formidable pour des enfants à besoins spécifiques, notamment les malades ou les handicapés, on s'apprête à donner à l'État le monopole de la gestion de ces enfants et à priver les parents d'origine du choix de leur mode d'éducation.

Le groupe Les Républicains sera là pour améliorer les mesures concrètes, pragmatiques, pour essayer de stabiliser les mesures bancales au plan juridique et pour combattre les mesures idéologiques, en défendant une conception de la famille et de la filiation que nous assumons complètement et qui n'est pas la vôtre.

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