Cette proposition de loi ne signifie pas la fin de toute tarification sociale dans les transports. Il existe déjà de très nombreuses mesures destinées à soutenir les dépenses de transport des personnes vivant en France, qu'elles soient de nationalité française ou en situation régulière sur le territoire. Je pense aux bénéficiaires de la CMU – couverture maladie universelle – , aux seniors, aux jeunes, aux personnes en situation de handicap, qui sont autant de bénéficiaires de tarifs aménagés.
Cette proposition de loi n'est pas non plus contraire à nos principes d'accueil et d'asile : la gratuité totale des transports est accordée de fait pour les trajets sanitaires à partir du moment où un étranger en situation irrégulière est bénéficiaire de l'aide médicale d'État. Ce n'est pas un phénomène à sous-estimer, puisque près de 320 000 étrangers en situation irrégulière bénéficient de l'AME, dont plus de la moitié sont rattachés à une caisse primaire d'assurance maladie d'Île-de-France selon l'inspection générale des finances et l'IGAS– inspection générale des affaires sociales.
Cette proposition de loi n'est pas non plus injuste, au contraire : élu d'une ville de banlieue et usager quasi-quotidien des transports en commun, je sais la difficulté de ceux qui respectent les règles et surveillent leur budget à l'euro près. Je vous mets au défi de leur expliquer pourquoi les personnes présentes illégalement sur notre territoire ont droit à des aides attractives – et pas eux. J'habite au pied d'une gare RER et je vois chaque jour la fatigue des abus et des micro-agressions de ceux qui fraudent ou bénéficient de passe-droits.
Enfin, cette proposition de loi n'est pas le symbole d'une France hostile à toute immigration ou favorable à la fermeture totale des frontières comme le soutient maintenant jusque sur les bancs de la France insoumise. Elle n'a aucunement vocation à restreindre la tarification sociale aux seuls individus de nationalité française. Elle met simplement fin à une incohérence, à un appel à l'illégalité, alors que tant d'individus entreprennent des démarches en bonne et due forme pour un séjour régulier dans notre pays.
En revanche, cette proposition de loi nous conduit à mettre la majorité parlementaire devant ses responsabilités, au premier rang desquelles figure celle d'accompagner le Président de la République dans son combat désormais assumé contre l'immigration irrégulière. Elle rejoint même un objectif gouvernemental. Le Président Macron disait encore début novembre sa volonté de renforcer le dispositif de « policiers, gendarmes, militaires et CRS mobilisés contre l'immigration clandestine ».
En septembre 2019, Emmanuel Macron appelait ses soutiens à « être humains et efficaces » et à « sortir de certaines postures dans lesquelles nous sommes enfermés », entre « bonne conscience » et « faux durs ». Nous avons aujourd'hui avec cette proposition de loi une bonne occasion d'être collectivement justes et cohérents, sans fausse dureté.
Aucune raison ne justifie cette prime à l'illégalité, que constitue une aide sociale supplémentaire dispensée à des personnes qui sont présentes de façon illégale sur notre sol. Pour citer à nouveau le Président de la République, « pour continuer à accueillir tout le monde dignement, on ne doit pas être un pays trop attractif. » « Et ensuite, on doit reconduire beaucoup plus efficacement les personnes qui n'ont pas vocation à rester sur le territoire parce qu'elles y sont entrées illégalement. » Cette proposition de loi est cohérente avec une politique migratoire qui encourage le respect de nos lois : accueillir, oui, mais pas à n'importe quel prix, pas dans n'importe quelle condition.
Selon le même Emmanuel Macron, « la difficulté qui est la nôtre, c'est que nous sommes face à un phénomène nouveau : les flux d'entrée n'ont jamais été aussi bas en Europe et les demandes d'asile jamais aussi hautes en France. Je crois dans notre droit d'asile, mais il est détourné de sa finalité par des réseaux, des gens qui manipulent. [… ] Ce que je vous demande sur le débat immigration – disait-il à sa majorité – , c'est de dépasser les clivages et les tabous. »
Quand on veut bien accueillir, mes chers collègues, on n'encourage pas l'irrégularité sur notre sol au risque de générer de l'exclusion et de la précarité. Quand on veut bien accueillir, on ne joue pas avec le feu et avec la dignité des personnes en proclamant « bienvenue aux réfugiés » sur les réseaux sociaux, puis en cherchant à les chasser des centres-ville en faisant mine de ne pas y toucher.