Après une très longue attente, à tel point que nous finissions par ne plus y croire, notre assemblée examine enfin le projet de loi de programmation relatif au développement solidaire et à la lutte contre les inégalités mondiales. De programmation, ce projet de loi n'en a d'ailleurs que le titre, étant donné qu'après maints reports il ne programme plus qu'un seul exercice budgétaire, celui de 2022. C'est donc avec regrets que nous constatons qu'il aura fallu attendre la fin du quinquennat pour examiner – en travaillant dans l'urgence – un texte important qui doit mettre en application l'engagement présidentiel de consacrer 0,55 % du revenu national brut à l'aide publique au développement et d'augmenter cette contribution à l'avenir à hauteur de 0,7 %.
Monsieur le ministre, cette promesse devrait être tenue et nous nous en félicitons. Car, au-delà du chiffre un peu totem des 0,55 %, c'est bien l'effort global de la France et son engagement à lutter plus efficacement contre les inégalités mondiales qui sont ici affirmés. Certes, tous les regards sont aujourd'hui portés vers la lutte contre la pandémie mondiale de la covid-19, qui n'épargne aucun continent. Il n'en demeure pas moins que de nombreux pays restent frappés lourdement par la montée de la pauvreté, l'accroissement des inégalités et une détresse humanitaire qui ne peut laisser personne indifférent.
Dans les années à venir, les effets du dérèglement climatique, les conflits et les crises qui se succèdent et se conjuguent accroîtront davantage encore les maux qui frappent les pays en développement et les populations les plus fragiles, d'autant plus que nous devrons aussi faire face à l'un des défis les plus importants à relever pour l'humanité, celui de l'explosion démographique dans le monde et en particulier sur le continent africain.
Alors que la population mondiale s'élevait à 7,3 milliards d'individus en 2017, les prévisions de l'ONU indiquent que l'humanité comptera plus de 8,5 milliards de personnes en 2030 et 11,2 milliards en 2100. C'est en Afrique que l'augmentation de la population sera la plus forte, continent auquel la France accorde une priorité dans l'allocation de son aide publique au développement.
Le continent africain représentera plus de la moitié de la croissance démographique mondiale au cours des trente prochaines années, étant donné que sa population devrait doubler, passant d'un milliard d'habitants aujourd'hui à 2,3 milliards dans moins de trente ans. Cette croissance démographique, non maîtrisée dans de nombreux pays, fera peser sur le monde entier un choc de pauvreté d'une ampleur majeure, lequel engendrera inévitablement une migration plus forte des populations, qui fuiront la misère. Le seul Niger verra sa population tripler, passant de 23 millions d'habitants en 2019 à plus de 70 millions en 2050, ce qui n'est pas sans nous interroger car ce pays est l'un des plus pauvres au monde et que son taux de natalité s'élève à sept enfants par femme.
Il relève donc de notre responsabilité, celle de la France comme de toute la communauté internationale, de participer à l'effort mondial de lutte contre la pauvreté et pour le développement. Il est de notre responsabilité d'accompagner les pays les plus vulnérables vers un modèle de croissance plus prospère, plus durable et plus inclusif et de les aider dans leur transition écologique et énergétique.
Nous l'avons dit à plusieurs reprises, la stratégie de la politique de la France dans le domaine de l'aide au développement doit être clarifiée et son pilotage renforcé, mieux évalué et mieux contrôlé en toute transparence, afin de renforcer sa lisibilité et de mesurer ses résultats. C'est à cette condition que nos concitoyens pourront s'approprier davantage cette politique, qui est l'honneur de la France.
Ces priorités doivent nous amener à concentrer notre aide sur des pays prioritaires figurant parmi les moins avancés, à développer l'aide bilatérale et à apporter des réponses aux défis mondiaux qui touchent tous les continents : le climat et la biodiversité, la santé, l'éducation, l'accès à l'eau et à l'alimentation, les droits fondamentaux et l'égalité entre les femmes et les hommes.
Avec plus de 14 milliards d'euros mobilisés en 2022, nous devons aussi assumer pleinement le fait que l'aide au développement soit un axe important de notre politique étrangère, au service de notre diplomatie et de notre influence. L'aide au développement est essentielle pour garantir la stabilité et la sécurité des pays que nous aidons.