Mardi 4 juin 2019
L'audition débute à dix-huit heures trente-cinq.
Présidence de Mme Jacqueline Dubois, présidente de la commission d'enquête
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La commission d'enquête sur l'inclusion des élèves handicapés dans l'école et l'université de la République, quatorze ans après la loi du 11 février 2005, procède à l'audition de M. Saïd Acef, représentant le Collège des directeurs généraux des agences régionales de santé (ARS), directeur délégué à l'autonomie à l'ARS Nouvelle-Aquitaine.
Mes chers collègues, nous achevons cette séquence d'auditions par celle de M. Saïd Acef, directeur délégué à l'autonomie à l'ARS Nouvelle-Aquitaine, qui représente le collège des directeurs généraux des agences régionales de santé (ARS). Je vous souhaite la bienvenue.
Les ARS jouant un rôle important dans la mise en oeuvre de l'inclusion des élèves en situation de handicap, en particulier à travers les conventions de partenariat qu'elles peuvent conclure avec les rectorats, ainsi qu'à travers les projets régionaux de santé (PRS), nous souhaitions recueillir votre point de vue sur cette question.
Avant de vous donner la parole, conformément aux dispositions de l'article 6 de l'ordonnance du 17 novembre 1958, je vais vous demander de prêter le serment de dire la vérité, toute la vérité, rien que la vérité.
M. Saïd Acef prête serment.
Bienvenue à vous. Notre commission d'enquête ne pouvait faire l'impasse sur l'expertise et la compétence des ARS. Ayant le plaisir de présider un conseil territorial de santé depuis de nombreuses années, je mesure à quel point il peut être utile de décliner à l'échelle d'un territoire, en fonction de l'évaluation des besoins de santé, des dispositifs mieux coordonnés dans une proximité renforcée.
Nous souhaitons en savoir un peu plus sur la mise en place et l'évaluation du décret d'avril 2009 relatif à la scolarisation des enfants, des adolescents et des jeunes adultes handicapés, ainsi que sur les mutations envisagées pour les instituts spécialisés, que l'on appelle à une révolution dans le domaine de la transition inclusive. Nous avons auditionné les instituts nationaux de jeunes sourds et de jeunes aveugles, qui nous ont fait part de leur inquiétude sur l'avenir et de l'importance de préserver leurs missions.
Merci Madame la présidente, Monsieur le rapporteur. Je me prêterai au jeu des questions-réponses. Si vous en êtes d'accord, je vous enverrai des éléments complémentaires au nom de l'ensemble des agences régionales de santé.
Bien sûr. Nous souhaitons que vous vous exprimiez tout d'abord dans le cadre d'un court exposé, puis nous passerons aux questions-réponses.
En premier lieu, je vous adresse les remerciements de toutes les agences régionales de santé pour nous avoir conviés devient cette commission d'enquête parlementaire. Je vous prie d'excuser l'absence des directeurs généraux d'ARS, lesquels m'ont chargé de les représenter. J'ai fait préalablement un « tour de piste » des ARS pour essayer d'avoir un écho. Il ne s'agit pas d'un inventaire exhaustif, mais je tenterai de vous apporter en toute transparence les éléments de progrès, les points de blocage, les difficultés, les enjeux et défis qu'il nous reste à relever pour rendre cette école encore plus inclusive et faire en sorte que les compétences médico-sociales contribuent à de meilleurs parcours de scolarisation des élèves en situation de handicap.
Je suis directeur délégué à l'autonomie à l'ARS Nouvelle-Aquitaine, donc chargé des politiques dites médico-sociales : grand âge et perte d'autonomie liée au handicap. Les ARS ont à leur main un certain nombre de leviers et de moyens. Vous citiez le cadre du conventionnement entre les ARS et les rectorats, ainsi que le projet régional de santé (PRS), qui couvre 10 ans ; il y a aussi sa déclinaison opérationnelle, le schéma régional de santé (SRS), lequel couvre cinq ans. Les SRS, qui ont été arrêtés l'année dernière par les directeurs généraux d'ARS, présentent quelques nouveautés sur les réponses à apporter aux situations de handicap, y compris la transition inclusive.
Les principaux leviers d'une agence régionale de santé dans le cadre des politiques médico-sociales sont le pilotage et la régulation de l'offre, soit l'autorisation des établissements et services, leur contrôle et la planification sur les territoires des prestations médico-sociales au plus près des besoins des personnes et des familles – avec l'objectif de réduire les inégalités et des inéquités historiques – et l'efficience des prestations mises en oeuvre par les établissements et services médico-sociaux.
Un levier très spécifique, celui de la contractualisation, prend toute son importance dans le cadre de la transition inclusive avec les contrats pluriannuels d'objectifs et de moyens (CPOM), d'une durée de cinq ans. La loi de financement de la sécurité sociale pour 2016 a prévu leur généralisation à l'ensemble du champ médico-social, à quelques exceptions près. Les CPOM doivent être signés par 100 % des gestionnaires d'ici à 2021. Pour la première fois, nous voyons s'y inscrire des objectifs quantifiés et qualitatifs de l'offre médico-sociale, ce que nous connaissons depuis plusieurs années dans le champ sanitaire.
L'un des objectifs consiste à transformer l'offre médico-sociale de façon que, pour les enfants comme pour les adultes, 50 % des prestations offertes le soient par des services. C'est un élément de complexité de la transition inclusive vue sous l'angle de la contribution du secteur médico-social à l'inclusion scolaire. En Nouvelle-Aquitaine, 70 % des places installées dans le secteur médico-social le sont en établissement (semi-internat, accueil de jour, internat séquentiel ou complet) et 30 % le sont en services – les SESSAD.
L'objectif fixé par Mme Sophie Cluzel, secrétaire d'État placée auprès du Premier Ministre chargée des personnes handicapées, est d'atteindre à échéance des SRS et donc des CPOM, soit d'ici à 2022, le seuil de 50 % de ces prestations en services, avec une priorité forte donnée aux compétences médico-sociales « sortant des murs » c'est-à-dire se transportant au domicile des familles pour accompagner les enfants et dans les lieux de socialisation de droit commun, dont, en premier lieu, l'école.
Un autre objectif quantifié des CPOM – qui, de ce fait, génère des difficultés et pose des enjeux de politiques croisées entre les ARS et les rectorats – porte sur le nombre d'élèves en situation de handicap accompagnés par un établissement ou un service médico-social devant bénéficier d'une solution de scolarisation en milieu ordinaire. La cible est ainsi fixée : en 2020, 50 % des enfants bénéficiant actuellement d'un accompagnement médico-social devront bénéficier d'une telle inclusion ; en 2022, ce sera 80 %.
Nous sommes à la croisée des chemins – lors des débats relatifs à la création de la commission d'enquête, vous évoquiez, Madame la présidente, le fait que nous étions au milieu du gué. Du point de vue des ARS, nous sommes dans une équation à quatre dimensions relativement connues, qu'il faudra gérer dans une temporalité qui ne mette pas en risque et en fragilité le parcours des élèves et des familles. Il y a un vrai risque à cet égard, pour ce processus de transition inclusive qui s'accélère.
L'une des dimensions est « l'alignement des planètes » entre les politiques mises en oeuvre par l'Éducation nationale et celles des ARS – les conventions cadres sont quasiment toutes signées entre les ARS et les rectorats – avec des enjeux concrets de mise en oeuvre, au niveau des territoires académiques et de l'infra-départemental, et de cohérence entre l'offre scolaire et une offre médico-sociale venant en appui de l'inclusion scolaire.
La mise en oeuvre des PIAL pose de façon cruciale la question de l'alignement de l'offre et des compétences médico-sociales avec les cartes scolaires et la localisation des enfants en situation de handicap devant bénéficier d'une inclusion ordinaire accompagnée, individuelle ou collective. Les PIAL interrogent la façon dont le secteur médico-social appuie, renforce et facilite les actions d'accompagnement par les AESH et AVS.
Le deuxième enjeu a été largement évoqué par tous les experts, les associations, les autorités indépendantes et les services de l'État que vous avez auditionnés. Il s'agit de l'équilibre entre l'accompagnement individualisé – la compensation individuelle – et l'accessibilité. Il faut identifier la façon de conjuguer un accompagnement individualisé, nécessaire pour un certain nombre d'enfants, et l'accessibilité : au savoir pédagogique, aux services médico-sociaux d'un point de vue territorial, mais également physique. Les enjeux d'accessibilité convoquent la responsabilité des agences régionales de santé dans la mise à disposition des moyens médico-sociaux au service de l'école.
La troisième dimension touche à la meilleure prise en compte de l'expertise des familles dans la construction des réponses et la valorisation de leurs droits. À cet égard, le droit des personnes et le principe d'autodétermination sont le socle des choix de vie des enfants, notamment pour l'expression du projet de vie dans les dossiers déposés en MDPH ; or au-delà même du droit – de son principe et son effectivité –, certaines familles rencontrent des difficultés à construire leur parole et à faire valoir leurs droits, ce qui nécessite une assistance à maîtrise d'ouvrage. Il revient au secteur médico-social d'aider ces familles qui, dans le champ scolaire ou dans d'autres domaines de la vie, connaissent leurs droits mais ne sont pas forcément en capacité de les défendre.
Enfin, la transition inclusive dans le domaine de la scolarisation ne doit laisser personne au bord du chemin. Il nous faut parvenir à construire des solutions combinant de l'inclusion individuelle accompagnée et des dispositifs collectifs – ULIS, UEE, etc. – que l'on puisse combiner utilement. S'agissant d'élèves en situation de polyhandicap dont on sait que l'accès aux apprentissages pose des questions d'adaptation pédagogiques, mais aussi de dispositifs collectifs de scolarisation, le nombre d'unités d'enseignement en institut médicalisé éducatif (IME) ou en école ordinaire demeure faible. Je n'en connais pas le nombre total, mais en Nouvelle-Aquitaine, nous en avons deux.
Les quatre dimensions sont donc bien cernées à ce stade.
Nous rencontrons des difficultés dans la transformation de l'offre médico-sociale – je n'oublie pas votre question sur les INJ « S » ou « A » – instituts nationaux de jeunes sourds ou de jeunes aveugles –, qui fait suite à des rapports récents et à une évolution de la politique publique touchant à leur positionnement dans l'offre médico-sociale régionale, le statut de leur personnel et les modalités de leur régulation, nationale ou régionale. Même si le nombre d'élèves augmente, des questions demeurent sur la qualité de l'inclusion : qu'en est-il de la durée des parcours d'inclusion ? Ces parcours sont-ils facteur d'apprentissage ? Servent-ils un projet de vie pour les jeunes adultes sortant de l'obligation scolaire qui leur donne toutes les chances d'avoir le parcours le plus autonome en restant accompagnés ?
Des difficultés résultent également de contraintes architecturales lorsqu'il faut installer de nouveaux dispositifs de scolarisation en milieu ordinaire. Il en existe aussi au regard du financement des transports. Sans remettre en cause les conséquences de la loi NOTRe sur la responsabilité des autorités organisatrices de transport (AOT), un certain nombre de conseils départementaux nous alertent sur le fait ce qu'ils sont responsables du trajet entre le domicile et l'école ordinaire dans le cadre d'une scolarisation individuelle, sur la base du règlement d'aide sociale qu'ils édictent, et que la transformation de places d'IME en places de SESSAD ainsi que l'augmentation – légitime – du nombre d'élèves en situation de handicap scolarisés génèrent des tensions sur l'organisation des transport et sur la prise en charge des frais qui vient en compensation des dépenses supportées par les familles.
Vous nous dites que lorsque l'enfant est scolarisé à l'intérieur du service médico-social, par exemple en IME, le transport est financé par l'IME. Qu'en est-il lorsqu'il s'agit d'un SESSAD ou d'une unité externalisée ?
Pour le trajet entre le domicile et l'école ordinaire, dès lors que la modalité de scolarisation est individuelle – que l'enfant soit en inclusion avec une AESH et l'intervention d'un SESSAD, ou dans un dispositif de type ULIS, qui relève en propre de l'Éducation nationale –, sous réserve des critères de dérogation à la carte scolaire, la dépense que la famille aurait à engager est compensable par le département, sur dossier.
Pour le trajet entre le domicile et un établissement médico-social, la dotation globale de l'établissement, financée par l'assurance-maladie, prend en charge les frais de transport.
Pour le trajet entre le domicile et une unité d'enseignement – quand bien même elle est localisée dans une école ordinaire –, la charge financière du transport relève de l'établissement gestionnaire de cette unité.
C'est pour l'établissement un enjeu de régulation de l'organisation des transports, et cela pèse sur la somme globale dont il dispose pour l'accompagnement de l'enfant. En Nouvelle-Aquitaine, nous constatons que la transformation des places d'IME en SESSAD et la multiplication des trajets domicile-école génèrent une augmentation de la dépense, non objectivée au niveau de l'ARS. Nous avons des interpellations politiques en ce sens de la part des conseils départementaux.
Il me semble que vous avez auditionné l'ADF…
Le deuxième enjeu financier porte sur la « gestion transitoire de la transition inclusive » – je m'excuse pour cet effet de style. Il faut appuyer le changement pour les équipes médico-sociales, et accompagner les familles et les élèves pour éviter de fragiliser davantage leur parcours de vie et de scolarisation.
Par exemple, dans le cadre du CPOM que nous signons avec le gestionnaire de l'IME, nous disons que les places d'IME doivent être transformées à échéance de cinq ans, ce qui conduira à faire sortir des personnels d'accompagnement de l'établissement vers le milieu ordinaire, qui passeront en SESSAD. Un certain nombre des enfants accompagnés par l'IME pourront bénéficier de cette transition et de l'inclusion scolaire correspondante, en accord avec les familles. Pour d'autres, parce ce que leurs familles ont un vécu compliqué des parcours de scolarisation et qu'elles considèrent qu'un établissement est un cadre protecteur, grâce à l'équipe médico-sociale et à la scolarisation interne, il existe un risque de fragilisation.
Par ailleurs, si l'on propose à un enfant accueilli en établissement sur la base d'une durée spécifiée, une scolarisation accompagnée par un SESSAD, on doit lui garantir à la fois une qualité d'accompagnement et un temps de scolarisation et d'accompagnement médico-social au moins équivalents à ceux dont il bénéficiait au sein de l'établissement. On voit donc émerger des enjeux touchant à la qualification de la quotité horaire de scolarisation et à son suivi, objectif doit être partagé entre l'ARS et le rectorat au-delà du nombre d'élèves et des modalités de scolarisation. Dans l'indicateur relatif à la proportion des enfants accompagnés par un dispositif médico-social qui devront bénéficier d'une inclusion scolaire (qui a pour cible 50 % en 2020 et 80 % en 2022), figure l'objectif de mesure cette quotité, porté par la Caisse nationale de solidarité pour l'autonomie (CNSA) et la direction générale de la cohésion sociale (DGCS).
En résumé, d'une part, la phase transitoire de la transition inclusive doit éviter de fragiliser les parcours et, d'autre part, le basculement de l'offre des établissements vers les services sera acté d'ici à cinq ans dans la totalité des CPOM mais verra ses effets concrets apparaître dans un délai plus long que ces cinq ans.
Nous devrons probablement inventer des mécanismes financiers non pérennes – une sorte de « fonds d'investissement de transition – pour sécuriser cette transition du point de vue des personnels, des enfants, des établissements et des équipes qui sont confrontés à des transformations profondes.
Le sujet étant très large, nous comprenons parfaitement l'étendue de votre exposé.
Nous avons été interpellés par des parents dont les enfants sont affectés de troubles dys sur le fait qu'il ne peut être recouru au forfait d'intervention précoce au-delà de l'âge de six ans. Cette limite devrait être levée pour les troubles dys puisqu'ils sont souvent détectés après.
J'aimerais avoir votre point de vue sur la mise en place des réseaux autisme départementaux, sur leur déploiement et sur la façon dont les ARS les accompagnent.
Je m'interroge sur les équipes pluriprofessionnelles des SESSAD : sont-elles au complet ? Par ailleurs, j'ai observé que le SESSAD se limite parfois à un accompagnement d'une ou deux heures hebdomadaires. Pensez-vous que cela suffit ?
Quel rôle les équipes médico-sociales peuvent-elles jouer dans la formation des équipes enseignantes et des AESH ? L'ARS est-elle disposée à financer ce genre de formation ?
Vous évoquiez la violence que peut représenter pour les parents le fait d'être invités de manière volontariste – pour ne pas dire plus – à envisager que le cheminement de leur enfant conduise à les sortir d'un établissement pour aller en milieu ordinaire, notamment pour les parents d'enfants ayant rencontré des échecs en milieu ordinaire. Nous sommes en commission d'enquête. Vous avez la liberté complète de parole. La question du libre choix des parents doit attirer notre attention.
De nombreuse personnes auditionnées, notamment la Fédération des orthophonistes, ont souhaité que l'école s'ouvre à l'intervention des professions libérales dans le temps scolaire, notamment pour éviter que les familles, après la journée d'école, ne doivent consacrer encore du temps à la dispensation des soins –elles ont souvent des agendas de ministre –, ce qui est discriminant. Quel est votre point de vue ?
Hier, j'ai visité une École de la Deuxième Chance à Caen. Les enfants avaient des parcours différents, mais tous avaient décroché de l'école. J'ai pris le temps de les faire parler et j'ai été surpris par le nombre de ceux qui m'ont dit qu'un problème de santé grave a conduit à leur déscolarisation, car la scolarisation à l'hôpital n'était pas au rendez-vous. Or l'ARS a la tutelle des établissements de santé.
J'ai une expérience locale. Je me réjouis que le dialogue entre les ARS et les rectorats se formalise dans des conventions cadres. Toutefois, le service de médecine scolaire et les moyens mis à disposition des rectorats sont insuffisants. Qu'en pensez-vous ?
J'aime beaucoup quand vous parlez de période transitoire de cette transition inclusive. Je citerai un cas concret existant dans ma circonscription. Un papa a créé de toutes pièces un collège, au départ pour sa fille qui devait entrer en 6e et qui présentait un certain nombre de handicaps, mais ouvert à d'autres familles qui y trouvent ce qu'elles ne trouvaient pas ailleurs. Selon les dires des parents, ces enfants disparaissaient des écrans radars de l'Éducation nationale.
La semaine dernière, j'ai eu l'occasion d'interroger M. Jean-Michel Blanquer, ministre de l'Éducation nationale, et j'ai découvert que, dans le processus de mise sous contrat de ces établissements d'enseignement privé, l'ARS avait un rôle important. En effet, pour ce qui concerne l'Éducation nationale, il doit s'écouler un délai de cinq ans avant toute mise sous contrat. Or l'article R. 442-75 du code de l'éducation prévoit une possibilité pour l'ARS de conventionner ce type d'établissement dans un délai d'un an, ce qui est peu connu. Je n'invente rien : l'information provient directement du cabinet de M. Blanquer. Vraisemblablement, la rectrice n'était pas informée : si elle l'avait été, elle aurait utilisé cette possibilité, car elle souhaite accélérer la mise sous contrat du collège dont je parlais à l'instant.
Pratiquez-vous cette mise sous contrat accélérée ? Sur un cas précis comme celui-ci, seriez-vous à même d'avancer avec les rectorats ?
Je m'interroge régulièrement sur les différences entre les territoires au regard de l'offre médicale et médico-sociale. Comment les ARS procèdent-elles pour corriger au mieux ces problèmes de densité médicale ?
N'y aurait-il pas des soucis dans la communication aux services de l'État des informations relatives aux investissements, au déploiement des moyens par territoire ?
En évoquant les investissements, me demandez-vous si les services et les opérateurs de l'État ont connaissance de la dépense publique globale sur le sujet qui nous intéresse ?
Je suis d'accord. Il vous a été dit que les services et opérateurs de l'État n'ont pas connaissance de l'effort de la Nation en matière d'investissements liés aux réponses aux besoins des personnes en situation de handicap. Votre question est-elle posée sous cet angle ?
Madame la présidente, lorsque vous mentionnez les réseaux autisme départementaux et la, évoquez-vous la question des diagnostics de proximité en lien avec les centres ressources autisme, ou plutôt les systèmes de coopération ?
D'accord. S'agissant des plateformes de coordination et d'orientation, le point positif est une véritable avancée vers la solvabilisation d'interventions libérales qui, jusqu'alors, n'étaient pas connues par l'assurance-maladie : pourront désormais être prises en charge les interventions de psychomotriciens, d'ergothérapeutes et de psychologues, dans un cadre juridique que vous a exposé la délégation interministérielle à l'autisme.
La deuxième avancée – qui n'est pas simple à mettre en oeuvre – est l'élargissement à l'ensemble des troubles du neuro-développement (TND) de ce qui existait auparavant dans le champ déjà très hétérogène des troubles du spectre de l'autisme (TSA). Il y a un fort enjeu de santé publique, notamment chez les enfants de 0 à 6 ans, mais comme les associations, notamment la FFDYS, l'ont évoqué, les enfants qui présentent des risques ou des troubles dys avérés posent un problème particulier. Parmi les recommandations de bonnes pratiques de la Haute autorité de santé (HAS) dans les différentes catégories de handicaps relevant par les TND, celle qui porte sur le diagnostic et les interventions sur les troubles dys évoque une première procédure de diagnostic autour de 7 ans, compte tenu de la corrélation entre la reconnaissance d'un trouble dys et les apprentissages.
Les plateformes de coordination nous permettent d'agir jusqu'à 6 ans révolus. Peut-être parviendrons-nous à ne pas passer à côté des enfants qui présentent un trouble dys – lesquels sont un angle mort historique de la politique publique sur le handicap. Les raisons en sont la diversité des troubles et des réponses en termes de compensations pédagogiques ou d'accompagnement médico-social, les diagnostics erronés et l'absence de diagnostic, etc.
Il conviendra de penser l'avancée que représente la prise en charge par l'assurance-maladie de prestations de libéraux qui sont hors nomenclature, comme devant être accompagnée par un module supplémentaire pour ces enfants et ces familles, permettant d'aller au-delà de six ans révolus, faute de quoi nous renforcerons l'inéquité.
Le deuxième enjeu lié à la mise en place des plateformes porte sur la façon dont les professionnels de santé et médico-sociaux, en lien avec les associations de familles, pourront mettre au point une approche transversale des TND sans jamais sacrifier à la spécificité des procédures de diagnostic et des interventions liées à chacun des troubles. Aujourd'hui, il n'existe pas de recommandation de la HAS sur les bonnes pratiques dans le champ large des troubles du neuro-développement – ce qui est normal car il s'agit d'un champ nouveau. Les ARS s'appuient donc sur des recommandations par type de handicap. Elles doivent pouvoir continuer à mettre en oeuvre et à demander aux acteurs de santé et médico-sociaux de mettre en oeuvre ces recommandations.
En Nouvelle-Aquitaine, nous avons prélabellisé cinq premières plateformes, trois en Gironde, une en Pyrénées-Atlantiques et une en Vienne. Nous avons lancé le deuxième appel à manifestation d'intérêt pour une deuxième vague de labellisation en juillet. Les dispositifs pour les quatre territoires restant à couvrir seront labellisés d'ici à la fin de 2019. L'ensemble des textes ont été pris : ceux qui fixent le montant que percevront les libéraux et ceux qui fixent les prestations et les actes. Pour les ergothérapeutes et les psychomotriciens, seront remboursées l'évaluation et l'intervention ; à ma connaissance, pour les psychologues libéraux, seule l'évaluation le sera. Telle est la complexité de mise en oeuvre des plateformes de coordination.
Sur les réseaux départementaux autisme hors équipes de diagnostic du centre de ressources autisme, nous sommes loin d'avoir réussi à relever le défi de ces réseaux très structurés qui permettent à des enfants ou des adultes affectés par un TSA d'accéder à un guichet unique ou une plateforme de services les accompagnant sur l'accès aux droits et aux dispositifs utiles. Parmi les missions des centres autisme, figure le développement de ces réseaux de proximité. Toutefois, ils ne peuvent agir seuls. Je ne dis pas qu'il n'existe pas de démarches de coopération et d'intégration de pratiques entre les différents acteurs, mais nous avons ce défi supplémentaire. Celui-ci a d'ailleurs été mentionné dans le rapport de la Cour des Comptes contributif à l'évaluation du 3e Plan Autisme, lequel appelait à la mise en oeuvre de ces réseaux territoriaux de coopération, avec la désignation de ce qui était appelé un opérateur de cohérence. Son rôle serait de gérer la complexité en lieu et place des familles, qui se trouvent confrontées à une offre qui, malgré les efforts de l'action publique et des ARS, reste largement améliorable.
Les difficultés de recrutement de certains professionnels, comme les orthophonistes, sont réelles et affectent les équipes pluridisciplinaires en SESSAD : l'exercice en libéral peut bien sûr être un choix, mais l'attractivité financière du secteur médico-social est insuffisante. Pour un orthophoniste, les propositions de salaire au sein des services médico-sociaux ne sont jamais à la hauteur de ce qu'elle peut tirer d'une activité en libéral, avec la prise en charge des actes par l'assurance-maladie, quel que soit le territoire. La même difficulté existe pour le recrutement à l'hôpital de certaines professions paramédicales.
Les leviers d'une ARS sur la démographie médicale sont ceux que lui offre la politique publique. Il existe des mesures d'incitation à l'installation individuelle ou d'exercice regroupé avec les équipes de soins primaires, le développement des maisons de santé pluriprofessionnelles, les communautés professionnelles territoriales de santé (CPTS). Les collectivités locales sont aussi très impliquées pour favoriser ces installations, éviter les départs et trouver des remplacements. On en est là…
Le reste du débat vous appartient en grande partie. Je ne le dis pas explicitement, mais vous voyez les enjeux avec le débat sur les contraintes à l'installation, les retours d'expérience et les analyses européennes, etc.
Je peux seulement répondre que nous mettons en oeuvre tous les leviers à notre disposition, notamment les dernières mesures pour l'installation de 400 médecins généralistes.
Le développement éventuel de la présence des professionnels libéraux dans les écoles doit être vu dans au moins deux dimensions : le fait qu'un intervenant libéral puisse obtenir de l'Éducation nationale l'autorisation d'intervenir au sein d'une école, et le fait d'éviter que les parents aient à emmener l'enfant chez l'orthophoniste ou le psychomotricien après la journée d'école.
Si l'on met de côté la question de la disponibilité des locaux, les leviers à la main de l'ARS sont les pôles de compétences et de prestations externalisées (PCPE) – qui ne concernent pas toutes les professions paramédicales. Ce dispositif a été inventé en 2016 pour répondre aux revendications légitimes des parents d'enfants avec TSA. Ceux-ci ont fait valoir auprès de l'État qu'ils recouraient à certaines prestations en secteur libéral – psychologues, éducateurs, psychomotriciens, etc. – non remboursées par l'assurance-maladie, dans le cadre d'interventions de qualité et respectant les recommandations de la HAS. Il a été demandé à l'État d'assurer une forme de remboursement et de régulation de cette offre. Une centaine de PCPE se sont développés en France, dont certains très spécifiques sur l'autisme et d'autres portant sur les situations critiques de handicap – on a dû vous parler de la mise en oeuvre des plans d'accompagnement globaux et des groupes opérationnels de synthèse. Un PCPE est constitué d'une équipe d'intervenants libéraux indépendants régulés par une plateforme médico-sociale – c'est tout à fait équivalent aux plateformes de coordination pour les TND – autorisée et financée par les ARS, donc légitimes à se présenter sous cet angle auprès des établissements scolaires. Nous les agréons et pouvons désigner aux partenaires de l'Éducation nationale ces dispositifs comme donnant toutes garanties pour intervenir en milieu scolaire.
S'agissant du volontarisme de la transition inclusive, je ne voudrais pas que le propos que j'ai tenu tout à l'heure soit mal interprété. Lorsque nous négocions avec les gestionnaires d'établissements et de services médico-sociaux la transformation de places et la sortie des compétences des personnels médico-éducatifs hors des établissements, nous ne fixons aucune contrainte – je sais que des informations contraires circulent parfois. Nous ne contraignons pas à opérer une désinstitutionalisation sauvage entre juin 2019 et la rentrée scolaire 2019, ni à « sortir » un nombre donné d'enfants car 20 places d'IME seraient transformées en 40 places de SESSAD. Les familles et les personnels des établissements ont cette crainte et s'en font l'écho aux ARS. Nous répétons systématiquement qu'il n'existe pas de contrainte. Les opérations de transformation de l'offre s'inscrivent sur la durée du CPOM, soit 5 ans, et ne visent pas à fermer la totalité des places d'établissement, mais à opérer un effort pour passer de 30 % à 50 %, qui conduira à maintenir 50 % des capacités médico-sociales en établissement pour les enfants et adolescents qui ont besoin d'un accompagnement et d'un accueil institutionnel transitoire ou durable.
En Nouvelle-Aquitaine, des mobilisations légitimes de collectifs associatifs de parents et de gestionnaires ont lieu dans trois ou quatre territoires.
Le libre choix des familles est fondamental. Nous pourrions nous satisfaire en disant que nous disposons de tous les outils juridiques avec la loi de 2005 – je n'entre pas dans le débat portant sur son éventuelle évolution, qui est de votre responsabilité. Le problème porte sur l'effectivité. Le rapport d'une famille à la MDPH ou aux opérateurs médico-sociaux au regard des besoins qu'elle exprime pour son enfant est profondément asymétrique – je ne mets pas en cause les équipes en affirmant ceci. Pour que le principe de libre choix soit effectif, il faut inventer une assistance à maîtrise d'ouvrage qui soit indépendante de l'accompagnement prescrit par les MDPH ; elle pourrait reposer sur des assistants à projet de vie qui seraient aux côtés des familles et s'adressent à une ARS, un conseil départemental ou une MDPH dans une forme de plaidoyer, afin que les propositions formulées répondent aux besoins et aux demandes et ne soient pas sous contrainte d'offre. Une telle démarche implique de mettre un peu de « poil à gratter » dans le système, y compris les ARS.
Si vous le permettez, Madame la présidente, je garde votre question et je déroule celles que vous m'avez posées.
La prise en soins en milieu scolaire relève de la responsabilité première de l'Éducation nationale dans le cadre des PAI, mais, du côté de l'ARS, cela suppose que, dans le cadre de l'éducation à la santé, certaines compétences médicales ou sanitaires soient disponibles à proximité. Il peut s'agir des problèmes de maladies chroniques liées aux élèves ou de problématiques de santé mentale et de troubles psychologiques ou psychiques.
Nous sommes quelques-uns à considérer que nous devrons utiliser les Écoles de la Seconde Chance – qui sont prévues par le code de l'éducation pour les 16-25 ans et instaurent une sorte de droit au savoir différé pour des enfants et des adolescents abîmés par la vie – pour un certain nombre d'adolescents en situation de handicap qui n'ont pu bénéficier d'apprentissages académiques ou sociaux afin de leur offrir une seconde chance d'une trajectoire plus inclusive à l'âge adulte. L'ARS connaît des opérateurs médico-sociaux très impliqués et le mouvement associatif plaide en faveur du droit au savoir différé. Nous pourrions avancer concrètement pour créer ces dispositifs de l'École de la Seconde Chance pour des jeunes adultes en situation de handicap.
Je ne connais pas l'article R. 442-75 du code de l'éducation. Peut-être que mes collègues d'autres ARS et dans mes équipes le connaissent. Néanmoins, à l'échelle de mes fonctions à l'Agence régionale de santé depuis trois ans et dans mes fonctions antérieures, je n'ai jamais eu connaissance d'un usage de cet article. Je le lirai avec attention pour examiner sa portée. S'agit-il d'une forme de double conventionnement Éducation nationale et ARS compte tenu du public accueilli ? Ou est-ce une prérogative spécifique des ARS que de conventionner une école en lieu et place de l'Éducation nationale dans un délai d'un an après ouverture ?
J'en ai eu connaissance grâce aux recherches du cabinet de M. Jean-Michel Blanquer. La rectrice de l'académie de Lyon n'était pas informée. Je pense que l'ARS Rhône-Alpes-Auvergne ne l'était pas non plus. Donc je tire mon chapeau au cabinet du ministre qui a su dénicher ce texte.
Je cite : « Les établissements ou services sociaux ou médico-sociaux privés peuvent passer avec l'État un contrat simple dans les conditions prévues par [ici est mentionné un autre article du code]. Ce contrat peut porter sur une partie ou sur la totalité des classes de l'établissement. Ce contrat est conclu pour un an. » Le rectorat mandaterait l'ARS pour évaluer les locaux et l'offre de soins. Votre expertise médico-sociale fait que le rectorat, au lieu de devoir respecter le délai de cinq ans pour la mise sous contrat, peut le réduire à un an. Mais la préfecture entre également en jeu.
Je comprends mieux. Je ne connaissais pas cet article du code de l'éducation, mais je connais ce mécanisme. Il est question d'établissements médico-sociaux privés. Tout à l'heure, vous évoquiez les écoles.
Nous avons des situations d'établissements médico-sociaux privés de fait – j'ai des exemples en matière de polyhandicap ou d'écoles ouvertes par des parents mettant en oeuvre l'éducation conductive. Il en existe une en Auvergne Rhône-Alpes, en Normandie et en Bourgogne Franche-Comté. L'ARS et l'Éducation nationale se sont trouvées dans la situation que vous évoquez : des parents ouvrent, de leur point de vue, une école ; l'Éducation nationale considère qu'elle n'en est pas une au regard de son fonctionnement et de ce qui est proposé, même s'il peut y avoir des enseignements et des acquisitions académiques ; l'ARS est sollicitée pour conventionner, voire autoriser, car il s'agit d'un établissement médico-social de fait. Nous connaissons ce mécanisme. Un certain nombre d'ARS sont confrontées à ce sujet, qui doit être vu sous l'angle d'établissements médico-sociaux privés mettant en oeuvre des apprentissages scolaires, mais qui ne sont pas immédiatement identifiés par l'Éducation nationale comme des écoles sous contrat.
D'abord hors contrat, mais avec la vocation d'une mise sous contrat dans laquelle les ARS entreraient en jeu.
Ceci dit, elles peuvent avoir un agrément d'écoles privées sous contrat sans avoir le label ARS.
En Nouvelle-Aquitaine, je n'ai pas rencontré de telle situation depuis mon entrée en fonctions il y a trois ans, mais je sais que l'ARS Normandie a dû le gérer depuis 2016, ainsi que l'ARS Bourgogne-Franche-Comté sur les écoles d'éducation conductive, y compris avec des sollicitations d'un certain nombre de parlementaires dans le cadre de questions orales et écrites portant sur le statut de ces dispositifs et leur régularisation par l'Éducation nationale ou les ARS.
S'agissant des INJ, vous avez pris connaissance du rapport IGAS-IGEN et des suites données dans le cadre de la politique publique. En Nouvelle-Aquitaine, un INJS est implanté à Gradignan. L'ARS a signé avec lui un contrat d'objectifs et de moyens –ce n'est pas forcément le cas pour tous les INJS et INJA. Nous y avons inscrit de premières mesures allant dans le sens du rapport. Nous considérons donc que les INJS doivent – nous ne faisons ici que paraphraser le rapport – entrer pleinement dans le périmètre d'une régulation d'offre médico-sociale portée par une ARS : les INJ A ou S ont une expertise et un rôle particulier qui doivent entrer dans cette dynamique régionale.
Les INJ sont confrontés à plusieurs phénomènes : l'évolution des publics accueillis ; l'externalisation des dispositifs de scolarisation et de coopération avec l'Éducation nationale ; la bonne articulation avec les MDPH sur le parcours des élèves accueillis ; une fonction ressource sur les situations plus complexes liées à la déficience sensorielle qui est leur champ de compétences.
Ils font également face à des problèmes de ressources humaines liés au statut des personnels éducatifs et enseignants. Il ne m'appartient pas d'arbitrer le débat consistant à savoir si les enseignants doivent rester dans le périmètre du ministère des Affaires sociales et de la Santé ou s'ils doivent passer dans le giron de l'Éducation nationale. Du point de vue des ARS, il s'agit de passer des contrats d'objectifs et de moyens avec les INJ.
Votre question va me permettre de faire le lien avec le sujet des créations de places. Pour la première fois dans la politique publique figurent – nous les répercutons dans les CPOM – des objectifs d'efficience et de performance médico-sociale. Dans la négociation d'un CPOM, nous analysons la santé financière du gestionnaire. Dans certains cas, en toute objectivité, le gestionnaire ne parviendra pas à assumer financièrement les objectifs fixés au contrat : la transition inclusive, l'accompagnement des situations complexes, une meilleure coopération territoriale, etc. En revanche, certains ont largement la surface financière pour assumer ces opérations de transformation et d'accompagnement du changement.
Nous sommes parfois conduits à prendre des mesures. Dans certains cas, non seulement nous ne versons pas de financements, mais nous serions légitimes à en reprendre à ceux qui ont stocké durant des années en fonds propres des crédits publics liés à des excédents structurels pour les verser à d'autres qui, objectivement, n'ont pas la surface financière pour payer des formations, accompagner les personnels, assumer les coûts de transports majorés liés à la transition inclusive, aménager les locaux, renforcer les personnels, etc. Il faut regarder aussi sous cet angle le sujet de la transition inclusive.
Si je mets de côté la stratégie autisme et TND avec les mesures spécifiques et les dotations prévues dans ce plan, les leviers financiers des ARS en mesures nouvelles sont liés à l'instruction du 2 mai 2017 sur la stratégie quinquennale de transformation de l'offre. On y retrouve les incitations financières à la transition inclusive et le fait de pouvoir renforcer et compléter l'offre sur les situations les plus complexes avec deux focus sur le populationnel handicap psychique et polyhandicap.
Il s'agit de 180 millions d'euros sur cinq ans, soit 20 millions d'euros pour les outre-mer et 160 millions d'euros pour la métropole. En Nouvelle-Aquitaine, cela représente environ 15 millions d'euros de crédits nouveaux à affecter sur mesure aux gestionnaires qui en ont besoin, et non à l'aveugle. En responsabilité, il faut aussi que nous puissions regarder cela.
Pour les INJ, nous avons perçu la spécificité du handicap sensoriel et la distance encore plus grande qui sera à accomplir au sein de l'Éducation nationale pour rendre accessible le savoir à un élève qui se trouve privé de la vue et auquel on demande de comprendre ou de dessiner une carte. En raison de cette distance et du besoin éducatif particulier pour apprendre à se déplacer, les parents sont très inquiets de ce qui pourra être offert à leur enfant dans la transformation. Comment leur répondre ?
Le sujet sur les INJ est assez similaire à ce que j'ai évoqué sur la fragilisation des parcours et les craintes des familles quant au passage d'un plateau spécialisé vers l'école ordinaire.
Les formations croisées territorialisées entre les collègues de l'Éducation nationale, y compris les AESH, et les personnels médico-sociaux sont insuffisantes, bien que certaines ARS soient exemplaires sur ce sujet. L'ARS Nouvelle-Aquitaine n'est pas forcément la plus avancée, contrairement à celle d'Auvergne Rhône-Alpes et de Normandie. Le temps dégagé pour la formation des personnels éducatifs n'existe pas : avec les collègues inspecteurs d'académie ou conseillers des recteurs, on bidouille, on prend sur les demi-journées d'animation pédagogique. Pour les AESH, il y a les 60 heures d'adaptation à l'emploi, et il faut essayer de construire quelque chose derrière. En tout état de cause, je ne connais pas une ARS qui refuserait de répondre favorablement à un rectorat qui voudrait organiser des formations croisées sur le territoire avec les équipes médico-sociales, voire la MDPH.
L'ARS de Nouvelle-Aquitaine a dit aux trois rectorats être prête à financer, via les établissements et les services médico-sociaux, des programmes de formations croisées en faveur de l'inclusion scolaire des enfants en situation de handicap. Il s'agit de pouvoir positionner des équipes médico-sociales en leur versant des crédits non reconductibles afin qu'elles ouvrent ces formations sur les territoires aux collègues de l'Éducation nationale. Nous sommes prêts à actionner ce levier qui fait partie des feuilles de route concrètes dans des conventions cadres.
S'agissant de la fonction ressource des INJ que j'évoquais précédemment, il faut mettre à la disposition des territoires les plateaux techniques experts et la compétence éducative, enseignante et médico-sociale qui existe au sein des INJ. Il faut parallèlement réserver l'accueil en internat dans les INJ aux situations complexes qui excèderaient la capacité de prise en charge de l'Éducation nationale ou d'autres opérateurs médico-sociaux quelle que soit leur montée en compétence. C'est un équilibre à trouver.
Historiquement, les INJ disposaient de l'ensemble des modalités sur un même plateau technique au sein de l'établissement. Une partie a vocation à sortir des murs, mais il faut en préserver une autre partie pour gérer les situations complexes et assumer cette fonction d'expertise pour l'Éducation nationale et d'autres opérateurs médico-sociaux. Nous avons fait ce travail sur le réseau d'influence de l'INJS de Gradignan en mettant celui-ci en synergie avec d'autres acteurs médico-sociaux qui ont un agrément sur la déficience auditive afin de permettre ce travail en réseau et cet appui expert de l'INJS vers d'autres partenaires.
La question n'est pas un « tout ou rien », mais porte sur le placement du curseur relatif à cette mission des INJ – qu'ils assumaient déjà, mais qu'il convient de renforcer.
L'audition s'achève à dix-neuf heures cinquante-cinq.
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Membres présents ou excusés
Réunion du mardi 4 juin 2019 à 18 heures 30
Présents. – Mme Géraldine Bannier, Mme Blandine Brocard, Mme Danièle Cazarian, Mme Béatrice Descamps, Mme Jacqueline Dubois, Mme Agnès Firmin Le Bodo, M. Olivier Gaillard, M. Sébastien Jumel, Mme Catherine Osson, Mme Béatrice Piron, Mme Cécile Rilhac, Mme Sabine Rubin
Excusés. - M. Christophe Bouillon, M. Bertrand Bouyx