Commission d'enquête sur la situation et les pratiques de la grande distribution et de ses groupements dans leurs relations commerciales avec les fournisseurs

Réunion du lundi 8 juillet 2019 à 19h30

Résumé de la réunion

Les mots clés de cette réunion

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La réunion

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La séance est ouverte à dix-neuf heure heures trente.

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Nous accueillons ce soir Monsieur Thierry Cotillard, Président d'Intermarché et de Netto, Monsieur Claude Genetay, Directeur général d'Intermarché et de Netto, Monsieur Frédéric Thuillier, Directeur des affaires publiques d'Intermarché et de Netto. Nous sommes en séance publique. Peut-être qu'une partie de notre discussion nécessitera un huis clos, malgré le fait que vous n'avez rien à cacher. Je suis accompagné de Monsieur Grégory Besson-Moreau, qui est rapporteur de la Commission d'enquête. Conformément aux dispositions de l'article 6 de l'ordonnance du 17 novembre 1958, je vais vous demander de prêter serment, de dire la vérité, toute la vérité, rien que la vérité.

Monsieur Cotillard, monsieur le Président, veuillez lever la main droite et dire : « Je le jure ».

Merci, monsieur Genetay, veuillez lever la main droite et dire : « Je le jure ».

Monsieur Thuillier, veuillez lever la main droite et dire : « Je le jure ».

MM. Cotillard, Genetay et Thuillier prêtent successivement serment.

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Thierry Cotillard, président d'Intermarché et de Netto

Monsieur le Président, monsieur le rapporteur, mesdames et messieurs les Députés, avant de répondre à vos questions, je crois qu'il est important de vous rappeler qui nous sommes : Intermarché, avec un modèle qui est, vous allez le voir singulier. Je vais prendre le temps de vous expliquer la différence. Le Groupement, ce sont 3 000 chefs d'entreprise qui sont tous propriétaires de nos points de vente. Toutes ces sociétés sont des petites et moyennes entreprises (PME) indépendantes. Je dirige moi-même deux Intermarché à Issy-les-Moulineaux, en région parisienne, et en même temps que je suis exploitant d'un point de vente, je suis associé et actionnaire de ce groupe, qui est la société « Les Mousquetaires ».

Nous sommes indépendants – c'est important de vous le dire – des marchés financiers. Nous sommes évidemment directement impliqués dans la direction et la gestion de notre structure commune. C'est dans ce cadre – j'ai mes deux points de vente – que j'officie en tant que Président de l'enseigne pour la France.

Je crois que c'est important aussi de vous préciser d'emblée que contrairement à tous les patrons de la distribution que vous avez pu auditer ou que vous auditerez cette semaine, je ne suis pas rémunéré dans le cadre de ces fonctions et j'assume donc bénévolement cette présidence, parce que c'est dans le contrat d'adhésion, c'est-à-dire quand on rentre dans le Groupement des Mousquetaires, on doit donner deux jours de son temps chaque semaine, ce qu'on appelle le tiers-temps, pour gérer l'entreprise commune. Dans le cadre de ma fonction, c'est plutôt quatre jours, évidemment, ou trois jours, que simplement deux jours. C'est la raison pour laquelle je suis accompagné, a fortiori c'est totalement justifié d'avoir à mes côtés notre Directeur général, Claude Genetay, qui est en charge des questions plus techniques, plus spécifiques, et puis Frédéric Thuillier, qui est en charge des affaires publiques.

Si l'on parle d'Intermarché et Netto, je vais résumer à l'idée que cela fait 2 150 points de vente : 1 850 Intermarché et 300 Netto. Nous aimons rappeler que nous avons un point de vente tous les 17 kilomètres. Cela vous prouve l'ancrage qui est le nôtre sur le territoire national. Et, bien évidemment, ce n'est pas le fruit du hasard d'avoir un point de vente tous les 17 kilomètres. C'était la vision de notre fondateur, il y a 50 ans, Jean-Pierre Le Roch, qui déjà voulait lutter contre la fracture territoriale et qui a toujours placé dans sa stratégie de développement le point de vente à taille humaine, le supermarché, plutôt en province que le format de l'hypermarché dans les grandes villes.

Je vous ai dit en tout début d'intervention que c'est un modèle singulier, c'est un modèle qui est unique en France, puisque depuis 50 ans, nous avons fait le choix d'intégrer les filières en amont jusqu'à avoir nos propres bateaux, mais aussi beaucoup d'usines pour assurer notre approvisionnement. D'où notre positionnement unique de producteur commerçant puisque côté production, nous sommes le quatrième industriel agroalimentaire français. Cette posture de producteur nous permet évidemment d'être plus armés pour mener le combat de mieux manger puisque cela nous permet de développer des gammes en direct avec nos propres usines, sans additifs. Nous sommes depuis deux ans « en reformulation » de nos produits pour moins de sucre, moins de sel… et évidemment tout ce qu'attendent les consommateurs. Nous avons bien évidemment, depuis quelques années, accéléré sur le bio, les démarches haute valeur environnementale (HVE) aussi en pratiquant – et on en reparlera, je pense – des schémas de contractualisation avec le monde agricole.

L'autre logique, c'est le mieux produire. Pour cela, nous avons une relation étroite et directe avec le monde agricole, puisque notre production – pour que vous ayez un ordre d'idée – représente 50 % des volumes de nos marques propres, que nous fabriquons nous-mêmes. Cela veut dire que nous avons un arsenal de 62 usines dans 10 filières différentes. Dans ces usines, ce sont près de 11 000 salariés qui travaillent. Nous avons tous en tête : « Intermarché, c'est le premier pêcheur de France ! », mais le spectre est beaucoup plus large, puisque cela va de l'usine de couches en passant par des usines d'embouteillage d'eau, des charcuteries évidemment, et une laiterie que nous évoquerons probablement dans la discussion.

Nos liens avec le monde agricole – puisque cela avait été l'un des sujets – ce sont des liens directs et c'est un point important de dire « direct », puisqu'à la différence des autres distributeurs qui doivent acheter à un industriel, qui lui-même travaille avec la ressource agricole, vous avez bien compris que pour la moitié des produits que nous vendons à notre marque, nous sommes en lien direct. On dit : près de 20 000 partenariats avec le monde agricole, et aux bornes du Groupement, c'est-à-dire les achats qu'Intermarché réalise sur les fruits et légumes sur la matière brute, plus les matières premières que nous achetons pour travailler dans ces 62 usines, c'est à peu près 2 milliards d'euros qu'Intermarché achète de matières agricoles.

Cette année est une année particulière. On a créé le groupe en 69 d'une scission avec le groupe Leclerc. Nous avons donc 50 ans. Si je devais résumer ce qui nous caractérise : trois éléments. Certains appellent cela « le capitalisme lent », dans le sens où nous n'avons pas nécessité de créer de la valeur à court terme pour répondre à des injonctions de la Bourse.

Le deuxième facteur très caractérisant – je me l'approprie, mais je pense que le groupe Système U ou un autre indépendant pourrait dire la même chose – je crois que l'on est encore un formidable ascenseur social, car il a permis à de nombreux individus de tous les horizons d'avoir des parcours exceptionnels, même s'il faut préciser que dans notre modèle d'entrepreneuriat, il y a évidemment aussi des échecs.

Enfin le modèle : vous avez compris qu'entre nos points de vente situés sur le territoire et ses 62 usines qui sont également 100 % implantées en France, c'est toute la valeur concrète qui est redistribuée sur le territoire national.

Ce préambule étant fait – je voulais quand même un peu insister sur la singularité d'être aussi producteur et pas simplement distributeur – je vous propose de livrer la lecture qui est la nôtre, la mienne, sur ce premier bilan des négociations commerciales 2018 - 2019. C'est important, je crois, de vous rappeler qu'à Intermarché nous étions dans une logique d'être bien inscrit dans la démarche des États généraux de l'alimentation (EGA). Nous avions la conviction que c'est une opportunité qu'il ne faut pas laisser passer pour changer la donne avec le monde agricole. Nous avons surtout une conviction aussi, et nous l'avons portée plusieurs fois dans la presse, c'est qu'il ne faut pas opposer ce revenu agricole avec le pouvoir d'achat, et c'est évidemment deux principes de base qui ont guidé toutes nos stratégies commerciales 2018 2019.

Si on parle des négociations pures, ce qu'il faut retenir c'est que nous avons eu des postures différenciées dans ces négociations commerciales 2018 - 2019. Tout d'abord, un premier discernement qu'il est important de noter, entre les produits à forte composante agricole française, et l'autre catégorie de produits. Ce qu'il faut retenir, c'est que nous avons acheté à la hausse les produits alimentaires français des entreprises qui s'étaient engagées, comme le prévoyait la loi, à répercuter ses hausses aux agriculteurs.

Un deuxième discernement important, entre d'un côté les PME et de l'autre les multinationales. Pour les PME françaises – je tiens à le préciser – nous n'avons pas eu de déflation et nous avions demandé à ce que le processus de négociation soit simplifié, c'est-à-dire que l'on puisse trouver un accord très rapidement, au bout de trois ou quatre rendez-vous, voire un rendez-vous si nous étions extrêmement efficaces. Pour ce qui est des grandes entreprises, des multinationales, nous considérons qu'il y a encore véritablement un sujet de pouvoir d'achat en France. Nous avons assumé, sur cet exercice, de lutter contre certaines exigences tarifaires de multinationales qui nous proposaient des hausses de tarifs.

Une fois que l'on a parlé des négociations, il y a un sujet évidemment d'actualité qui est la loi « Alimentation ». Cette loi « Alimentation » a été un moyen de recréer de la valeur par la hausse du seuil de revente à perte (SRP) sur les marques nationales. Je pense qu'aujourd'hui personne ne peut le nier. Chacun, chaque distributeur a eu sa politique de réinvestissement. Je crois que si l'objectif de cette commission est d'avancer, il me paraît important de vous dire, cette création de valeur chez Intermarché, où elle a été dirigée.

En ce qui nous concerne, nous avons eu deux destinations, une partie de cette manne est allée aux filières agricoles qui, comme je vous l'ai dit, travaillent directement avec nos outils de production. Nous avons vraiment accéléré le processus de contractualisation. Il y a un an, il y avait quelques dizaines de producteurs qui étaient contractualisés, si je prends l'exemple du porc, c'est-à-dire qui avaient la garantie d'un revenu-plancher. Au moment où je vous parle, c'est près de la moitié des éleveurs qui travaillent avec nos abattoirs en porc qui sont contractualisés. Cela a été une vraie avancée. L'autre partie a été dédiée aux filières agricoles de nos fournisseurs. Nous avons été la première enseigne à signer des accords dans la filière lait pour garantir cette meilleure répartition de la valeur.

C'était en décembre, c'était relativement tôt, et c'était une volonté politique, de manière aussi à donner une impulsion au marché à nos concurrents, mais aussi aux industriels. Vous le savez pour le lait, Bel, Savencia et Dia l'avaient rémunéré et trouvé un accord sur le lait à 370 euros les 1000 litres de lait. Cette première étape de la construction du tarif ayant été acceptée par les industriels, nous avons signé des accords en inflation derrière, en intégrant évidemment cette hausse.

Maintenant que l'on a eu un exemple – l'exemple du lait qui a fonctionné – l'enjeu est de se dire comment on peut généraliser cette démarche à d'autres filières. Nous venons de le faire, hors négociation. Je ne sais pas si vous avez suivi l'actualité, il y a une vraie flambée du prix du porc en ce moment, elle est liée à la peste porcine qui sévit en Chine. Il y a donc une inflation. La préoccupation n'est pas côté monde agricole puisque le cours est à 1,45 quand il était il y a deux ou trois mois à 1,20 euro, mais le vrai sujet, ce sont les industriels de la charcuterie qui lorsqu'ils ont signé avec Intermarché, ont signé sur une base à 1,20 euro. Aujourd'hui c'est 1,45. Tous les professionnels estiment qu'on aura peut-être un cours à 1,80 ou 1,85 en fin d'année. Nous avons donc pris l'initiative – et c'est là que je dis qu'il y a quand même un changement dans l'esprit en tout cas de l'enseigne, c'est de se dire : « Même si nous ne sommes pas contraints, l'esprit de la loi c'est une répartition de la valeur », et donc nous avons invité les industriels à revenir, des très gros comme Nestlé, Herta a signé, mais aussi des petites PME : Loïc Hénaff, etc. Au moment où je vous parle, c'est pratiquement 100 % des accords que nous avons renégociés à la hausse pour être sûrs qu'en fin d'année, il n'y ait pas de catastrophe économique dans le secteur.

Le dernier point, et j'en ai bientôt fini dans mon propos liminaire, c'est finalement l'opportunité que représente cette commission d'enquête, puisque maintenant plus que jamais, je pense que l'objectif est de trouver le bon équilibre entre la rentabilité des différents acteurs de toute la chaîne, pour permettre à juste titre – je crois que c'était la volonté du Président, en tout cas le Président de la République l'avait exprimé – que chacun puisse à court terme vivre de son activité, et à plus long terme exister demain. En tout cas, ce que j'ai envie de vous dire, c'est que l'équation est complexe. Elle n'est pas simple. Et elle va quand même être lourde de conséquences sociales et économiques. Et j'ai envie de vous dire si c'était une solution simple, on l'aurait trouvée, et nous ne serions pas tous là ce soir dans cette commission.

Si je devais résumer, la lecture que j'en ai est la suivante : il y a bien sûr des agriculteurs qui aujourd'hui souffrent, qui sont en incapacité de réinvestir dans leurs exploitations, à un moment où en plus l'agriculture doit réinvestir, c'est-à-dire quitter un schéma un peu productiviste pour aller vers quelque chose de plus qualitatif. Je considère bien évidemment que la rémunération des agriculteurs doit impérativement et réellement s'améliorer à très court terme.

Ensuite, on a des PME – il faut que vous ayez en tête que c'est quand même la très grande majorité en nombre de nos fournisseurs, on en a près de 4 000 – qui produisent, ou leurs marques, ou nos marques propres, nos fameux MDD. Je crois que c'est Yves Puget qui a dit qu'elles n'étaient pas aux mains de quatre centrales, c'est vrai, aujourd'hui elles vont voir chaque distributeur, plus d'autres distributeurs qui arrivent sur le marché : des Grands Frais, des Amazon. Et nous, parce que nous faisons de la marque de distributeur (MDD) avec l'outil de production que je vous ai décrit, nous avons la lecture de leur rentabilité, et leur rentabilité est somme toute faible puisque nous estimons qu'elle est entre 1 % et 3 %.

Un monde agricole qui ne vit pas, des PME qui sont entre 1 % à 3 %, et puis il y a ces dizaines de multinationales qui pèsent pour plusieurs dizaines de milliards de chiffre d'affaires et qui ont des résultats entre 13 % et 18 %, c'est de notoriété publique, c'est publié, c'est dans les comptes. J'ai bien dit résultats, ce n'est ni le chiffre, ni la marge, ce sont vraiment 13 à 18 % de résultats. Vous remarquerez qu'aucune n'a disparu depuis 50 ans, si ce n'est par fusion ou acquisition dans une démarche purement capitalistique. Si nous posons la question : « Qui est en position de force ? » J'ai tendance à penser que oui, face aux PME, Intermarché est en position de force sur le marché français, c'est indéniable. En revanche, je mettrai un bémol face à des acteurs de taille mondiale qui sont pour moi en position de force, puisque vous avez une distribution aujourd'hui qui vacille, en tout cas, certains groupes sont en difficulté. On a en face de nous des multinationales qui affichent des milliards de résultat. Moi, je n'ai aucun problème avec les multinationales. J'ai un profond respect d'une manière générale pour tous les fournisseurs. Avant d'être le Président d'enseigne, j'ai été longtemps à la Direction de l'offre c'est-à-dire dans le service qui les recevait. Je les ai toujours respectés parce que la croissance d'Intermarché, nous l'avons aussi faite avec des industriels. Pensez bien que notre croissance, nous la faisons en vendant les produits de nos industriels. J'ai un total respect pour eux. Mais je pense qu'il appartient aujourd'hui aux autorités de protéger les plus faibles.

La question – j'en ai bientôt fini – c'est, comment faire pour y arriver ? Déjà il faut que l'on soit sûr de savoir qui on doit protéger dans cette équation complexe. En tout cas, je partage l'analyse du Président de l'Association nationale des industries alimentaires (ANIA), qui disait que chaque partie devait faire des efforts. Des propositions, nous en avons à faire, on pourra peut-être vous les présenter.

Pour terminer, je crois que ce travail, votre travail, Messieurs les Députés, c'est une vraie opportunité pour que l'on aille plus loin vers cette transition qui est attendue. En tout cas, si je devais aspirer à un monde meilleur, ce serait un système, une équation, où nous sommes un régime protecteur pour les PME, où le ruissellement – puisque l'on en a souvent parlé, chacun avait sa religion sur la question – sera plus direct, et va vraiment bénéficier aux filières agricoles. Et je l'assume, je pense qu'il faut trouver le point d'équilibre dans la relation avec les grandes multinationales ultras rentables qui n'ont pas pour priorité le pouvoir d'achat. En tout cas, je pense que même si l'union est difficile, elle est aujourd'hui indispensable, et que même si nous avons fait des choses, je considère que tout n'a pas été parfait du côté d'Intermarché, mais en tout cas une impulsion politique a été donnée, j'espère que c'est la bonne. Je crois personnellement, selon mes convictions, que c'est la bonne, de tendre la main et d'essayer de trouver des solutions. En tout cas, j'espère qu'on va pouvoir persévérer et améliorer notre système.

Monsieur le Président, monsieur le rapporteur, mesdames et messieurs les Députés, je vous remercie de votre attention. J'ai été un peu long, mais c'était important de vous expliquer notre différence et nos convictions sur le schéma.

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Vous avez utilisé quinze minutes pour nous expliquer votre métier de commerçant, pour nous dire que vous étiez aussi industriel, que vous étiez producteur. Vous nous avez dit que vous étiez administrateur, que vous aviez une fonction bénévole au Groupement « Les Mousquetaires ». Vous avez oublié de nous dire que vous étiez administrateur de la centrale AgeCore basée à Genève, pour être complet.

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Thierry Cotillard, président d'Intermarché et de Netto

Oui, tout à fait.

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Je voulais rappeler en préambule de nos échanges que cette commission d'enquête n'est pas l'évaluation de la loi consécutive aux États généraux de l'alimentation. Ce n'est pas du tout cela. Il y a une mission d'information parlementaire qui s'occupe des États généraux de l'alimentation.

Vous avez dit votre amour pour les producteurs agricoles, vous avez dit qu'il ne fallait pas opposer le revenu agricole au prix payé par le consommateur, mais notre sujet, nous, ce sont les relations commerciales, les négociations commerciales, le rééquilibrage des négociations commerciales, et notamment dans les négociations commerciales, ce sont les pratiques du secteur de la distribution, et le rôle tenu par les centrales d'achats, les centrales de services. Puisque nous y sommes, pouvez-vous nous parler, monsieur le Président, de votre rôle chez AgeCore et du rôle de la centrale, est-ce d'ailleurs une centrale d'achats ? Une centrale de négociation ?

Commençons par le vif du sujet, puisque c'est ce qui est au coeur de notre préoccupation, les centrales. C'est ce dont vous avez le moins parlé, et c'est ce que nous connaissons le moins. Vous pouvez y aller et être dithyrambique sur le rôle des centrales, de ces pratiques, et puis dire la vérité parce que, je vous le dis ce soir, monsieur le Président, et je le dis devant la commission, devant les membres qui sont présents, certains qui ont été auditionnés nous ont menti. En effet, certains nous ont menti. Peut-être que c'est le cas de ce qui se passe dans les négociations commerciales. Peut-être que l'on se ment. On écrit certaines choses, on en dit d'autres, et on pratique certaines choses, mais je le dis, je suis convaincu, en tant que Président de cette commission d'enquête, et pour avoir participé pratiquement à toutes les auditions, certaines personnes qui ont été reçues par cette commission, qui ont des responsabilités importantes et éminentes nous ont menti. Comme, je pense, elles ont pu mentir à l'Autorité de la Concurrence, à la direction générale de la concurrence, de la consommation et de la répression des fraudes (DGCCRF).

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Administrateur

Nous avons oublié de leur faire prêter serment.

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Si, ils ont prêté serment et puisque vous m'y faites penser, monsieur l'administrateur, celles et ceux qui nous ont menti, ont menti sous serment. Le problème est qu'il faut pouvoir le démontrer.

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Thierry Cotillard, président d'Intermarché et de Netto

Monsieur le Président, nous ne nous connaissons pas, mais j'ai l'habitude d'avoir un franc-parler, donc j'essaierai d'être dans cette droite ligne, a fortiori en ayant prêté serment.

Moi je vais vous donner des parties de réponses et je crois que l'intérêt d'avoir notre Directeur général, c'est de compléter sur des aspects un peu plus techniques. AgeCore, puisque c'est d'elle qu'on parle, est une centrale d'achats européenne qui n'achète pas des produits. Vous avez deux catégories de centrales d'achats, vous avez celle qui est sortie du droit français et qui achète à l'étranger. Nous ne sommes pas dans cette logique-là. Je crois que ce qui est important, c'est de revenir sur la genèse de cette centrale européenne. À Intermarché, nous avons eu de cela il y a une vingtaine d'années un développement à l'international. Cela n'a pas été le cas de tous les indépendants parce que c'est extrêmement difficile d'exporter le modèle. Nous avons été en Allemagne, nous avons été en Italie, nous avons été en Espagne, nous avons été dans les pays d'Europe centrale et orientale. Nous avons pesé, à un moment, sur neuf pays. Nous avions donc une vraie dimension européenne, ce qui n'est pas le cas aujourd'hui et je vais vous l'expliquer. Nous avions une vraie dimension européenne, et la vision de notre fondateur, c'était, et cela a toujours été, la stratégie des achats, c'était de se dire, face à des multinationales qui sont mondiales, il faudra avoir une dimension européenne, faute d'être mondial.

Aujourd'hui quand je vous parle d'international, c'est quoi chez Intermarché ? Ce sont quatre pays. Nous sommes en Pologne, en Belgique, en France évidemment, et au Portugal, les autres pays ayant dû être fermés ou cédés à la concurrence. Ces pays-là représentent 540 points de vente. En volume de chiffre d'affaires, c'est à peu près 3 milliards. Cela correspond à 12 % de notre chiffre qui est fait hors du territoire. Et c'est important de vous le dire, parce que j'ai entendu : « Oui, ils font entre 3 et 5% ». Moi je vais vous raconter ce que l'on fait chez Intermarché, c'est 12 % du chiffre qui est fait à l'étranger.

La centrale AgeCore, c'est une centrale que nous avons connue sous une première forme qui s'appelait Agenor, et qui était une alliance qui nous réunissait avec un allemand, Edeka, et un espagnol. Il y a trois ans, nous nous sommes rapprochés d'une autre alliance européenne, et nous sommes six avec des Italiens, des Suisses, et des Belges. Cette centrale vend des services aux « multinationales » à 71 entreprises multinationales qui sont concernées par des dossiers d'AgeCore. Cette centrale internationale est notre étage pour négocier avec l'ensemble des multinationales.

Claude, je crois que j'ai décrit le périmètre, je ne sais pas si cela répond à la question, mais j'ai envie de vous dire : oui, il y a une présence maintenant vraiment européenne avec l'alliance, avec d'autres enseignes, mais Intermarché a évidemment une présence sur quatre pays européens.

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Comment expliquez-vous, monsieur le Président, que le siège de cette centrale européenne soit situé hors de l'Union européenne. Pourquoi le siège n'est-il pas en France, en Belgique, au Portugal, en Pologne et quel est le rôle que vous tenez dans AgeCore ?

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Thierry Cotillard, président d'Intermarché et de Netto

Nous sommes six. Le choix s'est posé de savoir où l'on mettait le siège, c'est sur un terrain, je dirais « neutre », hors Union européenne. J'imagine que la question derrière c'est : « Est-ce qu'il y a un schéma d'optimisation fiscale ? » Ce n'est pas le cas.

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C'est la question, et ce sont aussi les objections que l'on nous renvoie lorsque l'on veut auditionner des responsables d'AgeCore, des responsables de cette centrale hébergée à Genève qui nous expliquent que nous, « petits parlementaires français », de quoi irions-nous nous occuper des affaires des entreprises suisses qui ont leur siège à Genève, parce que c'est cela, c'est dit en langage diplomatique, mais si ces gens n'avaient rien à cacher, ils viendraient ici nous expliquer un petit peu le rôle de cette économie, que l'on peut qualifier peut-être de moderne, c'est l'époque qui veut que l'on se structure en centrales, et on viendrait nous l'expliquer si l'on n'avait rien à cacher.

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Thierry Cotillard, président d'Intermarché et de Netto

La question est légitime. Je l'ai fait vérifier avant de venir à la commission : l'intégralité de ce qui est facturé aux industriels se retrouve dans les comptes d'Intermarché au niveau France. Donc l'intégralité des produits reçus pour les prestations facturées et les services que l'on propose – la somme je ne vous la donnerai pas ou à ce moment-là, je vous la donne en huis clos, mais vous comprenez bien que mes concurrents sont en train de m'écouter donc je ne vais pas donner cette information – cette somme-là est intégrée au compte de résultat d'Intermarché. On a un résultat qui prend en compte toutes les ressources, cela fait partie des produits qui sont reçus, et évidemment le résultat d'Intermarché est taxé à l'impôt local français. Il n'y a aucun schéma de défiscalisation, puisque j'imagine que c'est la question.

Mon rôle est un rôle, en tant que Président, d'actionnaire puisque le capital de cette société est divisé en six. Nous avons un sixième du capital de cette société AgeCore qui est en gros un prestataire. Moi j'assiste à des boards. Récemment, j'y étais encore la semaine dernière, il y en a deux ou trois par an, selon l'actualité. À mon niveau, le rôle est de fixer les objectifs et d'avoir un suivi budgétaire, et cela se limite à cela. Sur la partie purement opérationnelle, je n'y suis pas. Il n'y a d'ailleurs pas de salariés d'Intermarché, il n'y a pas d'acheteurs qui vont négocier dans ces box. Nous avons en revanche un coordinateur. Ce coordinateur international, qui peut être présent là-bas, a la mission de s'assurer que les services demandés soient retranscrits dans les plans d'affaires français, et les salariés d'AgeCore sont salariés de cette structure et n'étaient pas des salariés d'Intermarché avant de créer AgeCore.

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Je réitère ma question : qu'est-ce qui explique que le siège d'AgeCore soit à Genève ? On nous a parlé d'Intermarché International à Bruxelles. Est-ce qu'il y a un lien entre Intermarché International à Bruxelles et la centrale AgeCore à Genève ?

Vous avez dit votre amour pour les PME tout à l'heure, puis vous avez décrit les multinationales comme étant des ogres qui ont des résultats. Mais quand on regarde votre organisation, avouez que, même si vous êtes à Issy-les-Moulineaux, si on s'y intéresse de près, entre Genève, Bruxelles, en deux ou trois minutes, il y a de quoi s'y perdre.

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Thierry Cotillard, président d'Intermarché et de Netto

Je le reconnais. Je pense que c'est une organisation miroir, aussi par rapport à l'organisation de nos multinationales.

La Suisse, je vous le dis – cela peut être vérifié – n'est pas un schéma d'optimisation fiscale. Il se trouve que nous avons un partenaire qui est en Suisse, qui est Coop Suisse. Le choix a été fait – cela aurait pu être en Espagne ou en France, il se trouve que c'est sur le territoire suisse. Il y a une structure que vous venez d'évoquer, ITM Belgium, qui elle – je vais peut-être te laisser la parole Claude – a une autre finalité, qui par rapport à la genèse de l'international que l'on avait, est d'aborder la négociation concernant les quatre pays Mousquetaires.

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Claude Genetay, directeur général d'Intermarché et de Netto

Effectivement, avant de vous parler d'Intermarché Belgique, ce que vous appelez « de quoi s'y perdre », c'est-à-dire la Belgique, la Suisse, il faut peut-être revenir sur l'objectif de ces négociations. En fait, ces négociations, que ce soit AgeCore ou Intermarché Belgique, qu'est-ce que cela concerne ? Cela concerne les 71 plus grosses multinationales. Nous travaillons avec 156 multinationales chez Intermarché. Nous avons considéré qu'il y en a 156 qui sont très puissantes. En moyenne, nous pesons moins de 1% du chiffre d'affaires de ces multinationales. Ils ont un pouvoir dans nos linéaires qui est extrêmement puissant. Pour atteindre nos deux objectifs majeurs – je vais y revenir – nous avons considéré qu'il était très important d'avoir plusieurs points de négociation : le local, le périmètre d'Intermarché à l'international, cela s'appelle « Intermarché Belgique », c'est la France, la Belgique, le Portugal et la Pologne. Et ensuite, parce que cela ne suffit pas face à la puissance de ces multinationales, c'est d'aller s'allier avec d'autres distributeurs indépendants européens qui portent les mêmes valeurs que nous.

Pour poursuivre, deux objectifs. Le premier objectif est très simple, quand on pèse 15 % de part de marché en France face à ces multinationales, c'est tout simplement l'objectif de continuer à exister, par rapport à nos concurrents historiques, mais c'est surtout par rapport à tous ces nouveaux concurrents qui arrivent. Le marché n'augmente pas en France, donc à chaque fois qu'il y a un nouveau concurrent, il vient prendre de la part de marché, il vient prendre des clients, et tous ces nouveaux concurrents, je pense à Amazon, je pense à Action, ils travaillent le prix bas. Eux, ils négocient à l'international. Il est évident que nous, pour continuer à exister, le jour où nous proposons des prix qui sont complètement décalés à nos clients, vous aurez à la place des magasins Intermarché des « casiers », des points de retrait Amazon. Notre objectif est de continuer d'exister.

Et puis le deuxième, qu'est-ce que c'est ? Ces multinationales qui, de nos points de vue – mais c'est une question de point de vue – ont déjà des rendements, des rentabilités qui sont très importantes, ont des velléités tarifaires qui nous paraissent parfaitement incompatibles avec la situation du pouvoir d'achat en France. Je peux vous citer un chiffre. Ces fameuses 71 multinationales, les plus grosses, elles nous ont exigé en moyenne sur les trois dernières années, pour être précis, 14,37 % d'augmentation de tarif. Face à cette demande de 14 % d'augmentation de tarif, quand on pèse 15 % en France, on n'a pas les moyens de lutter contre cela. Cela nous apparaît être dans notre rôle de lutter contre ces augmentations de tarifs qui, si elles sont parfaitement légitimes pour les PME et pour les filières issues du monde agricole français, pour des multinationales qui ont déjà un niveau de rentabilité très élevé, nous pensons que c'est de notre responsabilité de se donner les moyens de lutter contre ces hausses de tarifs. Ça sert à cela.

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Est-ce que vous pouvez répondre à la question : quelle est la différence entre la centrale AgeCore et Intermarché International ?

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Claude Genetay, directeur général d'Intermarché et de Netto

Il s'agit de questions de périmètre. À chaque fois, il y a des négociations qui sont différentes, avec des services qui sont pour le même fournisseur différents. Chacune de ces entités a mandat pour aller négocier des services et obtenir une rémunération de ces services. Une, dans le cadre d'une alliance avec six alliés, et l'autre, au périmètre des pays Intermarché. À chaque fois, ce sont donc des contrats avec des services différents et des rémunérations différentes, évidemment.

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Ce que vous appelez des services, l'objectif est de récupérer des contreparties financières, c'est cela en fin de compte. Si je vous ai bien compris, vous ne vous considérez pas suffisamment en position de force pour négocier les achats, donc vous organisez un niveau de service et de prestation à plusieurs étages, on va dire, de façon à ce qu'il y ait plusieurs rounds de négociation par étage, par centrale. Plusieurs rounds à Bruxelles, plusieurs rounds à Genève. L'objectif : vous vendez des services ! J'essaie de savoir, y compris auprès du Délégué général de la Fédération du commerce et de la distribution (FCD), la nature précise des services et des tarifs, mais on voit bien que ce n'est pas très précis. L'objectif est d'obtenir des contreparties financières, c'est bien cela ?

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Claude Genetay, directeur général d'Intermarché et de Netto

Bien sûr. Quand nous vous parlons de continuer à exister, de lutter contre les hausses de tarifs, effectivement, ce sont des contreparties financières qui nous permettent cela. Je peux vous dire de quoi il s'agit.

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Il faut que l'on donne les bons mots. Vous nous dites « avec des services, on veut une contrepartie, il y a du résultat dans les entreprises types multinationales, donc on veut une contrepartie financière ». Dans ce que je comprends, c'est : « ils ont de l'argent, donc je veux une contrepartie. Puisqu'ils ont de l'argent, je vais aller demander de l'argent ! ». Là on vous parle de services, vous ne nous répondez pas « Voilà les services que l'on offre, du coup on essaie de les accompagner à un développement international » – d'ailleurs apparemment, on est passés de x pays à plus que quatre pays. Et vous ne parlez pas de ça, vous nous parlez de contreparties financières depuis le début. « Ils ont de l'argent, nous avons besoin de cet argent, on va chercher l'argent ».

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En fait pour vous, si on vous comprend bien, ce qui fait l'objet de la négociation et de l'achat, ce n'est pas tant le produit, la nature du produit, la qualité du produit, sa qualité nutritionnelle, le respect de l'environnement, la responsabilité sociale de l'entreprise qui met en distribution ce produit. Si je vous comprends bien, c'est à la tête du client, c'est-à-dire que si vous considérez que le résultat de l'entreprise est entre 13 et 18 %, ce que vous affirmez être le cas des multinationales, là vous vous dites : « Il y a de l'argent à récupérer, on peut négocier dur ». Si vous considérez ou que vous identifiez une PME comme plutôt fragile avec 1% de résultat, ou 2% ou 3% de résultat, vous vous dites : « Il faut quand même qu'on les protège, que l'on fasse un peu plus attention ».

On est loin de la recherche de la qualité du produit et d'un rapport produit prix pour le consommateur. On comprend mieux, moi d'où je suis, je comprends mieux la déconnexion totale entre le prix payé par le consommateur, et le prix payé aux producteurs, puisque M. Cotillard a déclaré sa flamme pour les producteurs dans son propos introductif, ce dont je ne doute pas.

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Claude Genetay, directeur général d'Intermarché et de Netto

Pas du tout, puisque vous m'interrogez sur les négociations AgeCore et Intermarché Belgique et là, oui, la négociation est quand même relativement décalée de la qualité intrinsèque du produit, de tous nos objectifs de mieux manger. Cela se fait au niveau local. Il y a toutes ces discussions sur le produit. D'ailleurs, un compte clé international n'est pas capable de discuter de cela avec nous, ni nos négociateurs internationaux. Ces discussions-là ont bien lieu au local.

Oui, effectivement, il y a ces négociations à l'internationale, avec l'objectif de limiter l'impact des hausses de tarifs. Pour ce faire, nous proposons des services et nous négocions une rémunération contre ces services.

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Comme le disait très bien M. le Président au début, vous nous dites des choses, ou en tout cas j'ai l'impression que vous allez peut-être nous dire des choses. J'espère que vous allez nous dire des choses différentes de ce que l'on a déjà entendu, et on a eu de très nombreuses auditions qui ont pour la plupart, pas toutes, expliqué les mêmes choses. Je vais vous citer quatre exemples. J'aimerais une réponse sur ces exemples.

– « L'équipe n'ayant pu trouver d'accord avec AgeCore, nous avons subi des sanctions sous la forme de déréférencement au niveau local durant quatre mois. »

– Une autre entreprise, exemple de contrepartie dérisoire : « 400 000 euros payés à Intermarché alimentaire International pour une bannière pop-up sur leur site de commandes, qui a duré une semaine. »

– Une autre entreprise : « Tant que l'accord AgeCore n'est pas réglé, il ne peut pas y avoir de négociation au local »

Ils estiment que ce sont des contreparties fictives qui dans le cadre du contrat AgeCore en tant que tel ne font rien obtenir. Elles représentent environ 3% du chiffre d'affaires de l'industriel.

Enfin je vous en cite une dernière, mais j'en ai des pages :

– « AgeCore – alors celle-là, il faudra bien nous l'expliquer aussi – a demandé une dérive de 1%, contre 0,5% auparavant. » suite à la participation de cette dite société industrielle qui nous a expliqué cela, parce qu'ils sont rentrés chez Eurelec. Parce qu'ils sont rentrés chez Eurelec, AgeCore a doublé le montant du taux de services » comme vous les appelez, auprès de l'industriel, sans aucune explication. S'ils ne le font pas, on ne négocie pas au local.

Est-ce que vous pouvez me donner une réponse sur ces quatre points s'il vous plait ?

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Thierry Cotillard, président d'Intermarché et de Netto

Ce qui est important de préciser, je ne l'ai pas dit, c'est que nous avons aussi fait le choix, puisque l'on parle d'alliance, de sortir d'une alliance que nous avions au niveau national. Moi je vais défendre quelque part mon territoire, mais réellement, quand je fais 15 %, je dois discuter avec des industriels qui ont en face d'eux un Leclerc qui fait 21, qui ont en face d'eux Carrefour 20, et puis en France, les deux autres se sont associés. D'où l'importance – pour vous donner la psychologie et la compréhension des choses – de cette négociation au niveau international, parce qu'au niveau national, je ne pèse plus, je n'ai qu'à leur vendre, parce qu'un industriel, il faut comprendre qu'il y a deux choses qui l'intéressent : évidemment la taille, parce que quand vous avez un gros réseau, c'est de la diffusion, et puis la croissance. J'ai fait ce choix assumé – c'est un commun accord quand vous êtes allié avec un concurrent – de se dire : nous étions en capacité, parce que cela fait deux ans qu'Inter avait une belle croissance, avec notre anniversaire et plein d'opérations commerciales, nous avons des choses à vendre, et autant être indépendants et seuls pour le vendre.

Étant seuls en France, je ne vous cache pas que pour mon compte d'exploitation où j'ai des indépendants, le résultat est entre 1,5 et 2, c'est ce qui vous a été dit aussi par un autre groupe d'indépendants, c'est à peu près cela. Quand les hausses de tarifs arrivent à 4 %, et que je n'ai pas prévu de les répercuter à 100 % pour le consommateur, comprenez que la marge de manoeuvre, il faut que je propose des choses et je m'inscris en faux. Il faut un plan d'affaires avec des contreparties qui sont détaillées – la loi nous l'impose – de manière à obtenir des baisses de tarifs pour limiter l'inflation.

Une fois que je vous ai dit cela, la réalité est que oui, il y a des arrêts commande. Il y a des arrêts commande. C'est une réalité. Ce serait mentir que de dire l'inverse. On vous l'a dit. Je vais vous expliquer pourquoi cela s'opère ainsi. Nous considérons que sur un marché, si vous prenez par exemple le pet food, vous allez avoir deux ou trois acteurs, et que bien évidemment, il y a une compétitivité entre chacun de ces acteurs. Chacun veut, comme moi je veux récupérer de la part de marché à Carrefour et à Leclerc, eux quand ils sont sur leur marché, veulent évidemment prendre de la part de marché aux autres. Donc ils ont tout intérêt à avoir le plus de contreparties possible chez Intermarché, chez Leclerc, pour prendre la part de marché à son concurrent.

Ce qui peut arriver, et nous l'assumons, c'est que nous faisons des arrêts commande parce que nous faisons un choix économique de rentabilité, c'est-à-dire que pour un même besoin, on peut avoir un fournisseur qui propose la même chose, et nous faisons le choix de gamme. C'est un choix, je dirais, de commerçant, parce que de toute façon un industriel quand il fait son boulot – et la plupart le font très bien – il arrive avec des innovations pour créer de la valeur. Nous avons 45 000 références sur nos entrepôts en général, la réalité dans un point de vente qui fait 2 000 m², c'est 15 000 références. À un moment, quand on a ces contraintes d'espace...

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Là vous êtes en train de répondre à la première question que je vous posais, vous me parlez de références, etc. parce que vous avez des espaces restreints, un rayon reste un rayon.

Ma question n'était pas celle-ci. Je la répète, peut-être que vous n'avez pas eu le temps de la noter : « L'équipe n'ayant pu trouver d'accord avec AgeCore – sur le fait qu'ils ne voulaient pas payer parce qu'ils ne voulaient pas des services – nous avons subi des sanctions sous la forme de déréférencements au niveau local durant quatre mois. »

Ce n'est pas une question de « est-ce que l'on a le bon prix, pas le bon prix, comment se place-t-on sur le scope ». C'est : « Je n'ai pas trouvé d'accord avec AgeCore, donc je ne suis pas passé au niveau local ».

Est-ce que celui que vous avez mis en place, votre coordinateur, il vous dit : « Attendez, moi, ça n'a pas payé là-haut, donc au niveau local on stoppe » ? C'est important de le dire parce que je ne l'ai pas eu une fois, je l'ai eu plusieurs fois, on l'a eu plusieurs fois. Je voudrais être sûr de la réponse que vous allez apporter.

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Claude Genetay, directeur général d'Intermarché et de Netto

Cela paraît être une évidence, c'est-à-dire qu'il y a les fournisseurs, parmi ces 71 plus grosses multinationales, avec qui nous trouvons un accord, et là forcément, pour ces fournisseurs-là, il y a des développements de chiffre d'affaires, des développements, etc. Et forcément quand on ne trouve pas d'accord, mais cela, comme tout un chacun dans une négociation, ce ne sont pas les fournisseurs avec qui on va être enclin à développer le chiffre d'affaires. Donc forcément, il y a des réductions d'assortiments, mais cela paraît logique, c'est tout l'objet de la négociation. La négociation, c'est un équilibre économique qui est fait entre des prix, soit des produits, des services, et la taille du business, l'offre. J'entends parfaitement que les multinationales sont passées ici vous dire que les services proposés par AgeCore étaient, comme vous l'avez dit, des contreparties fictives, moi je ne crois pas du tout à cela. La raison pour laquelle ils viennent chercher ces contreparties, c'est parce qu'ils veulent plus de services. Comme l'a dit Thierry, ils sont dans une guerre acharnée de parts de marché et ils viennent chercher des services additionnels.

Je vais vous citer un chiffre important : sur les 71 multinationales, ils ont en moyenne sur les trois dernières années – le temps d'existence d'AgeCore – enregistré une croissance de 8,27 %. Alors, contrepartie fictive, services trop chers, etc. OK, cela génère quand même de la croissance qui est, comme vous le savez, très largement supérieure au marché, parce qu'ils ont obtenu ces services. Je ne partage pas du tout l'analyse qui vous a sans doute été faite par ces multinationales. Ils vont chercher de la valeur parce qu'ils ont de la croissance, très largement supérieure au marché.

J'ai passé 15 ans dans les multinationales avant de travailler dans la grande distribution. Et je sais que l'objectif d'un compte-clé international est de toujours venir dire qu'il en veut plus pour moins, c'est comme cela, les achats. Donc quand un compte clé international rentre dans une négociation chez AgeCore ou Intermarché Belgique, il dit : « Je veux plus pour moins !». Et comme nous ne sommes pas d'accord pour plus pour moins, on met parfois du temps à se trouver, et donc oui, les négociations sont parfois difficiles avec ces 71 plus grosses multinationales.

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Cela reste des services. Le principe d'un service, on l'accepte ou on ne l'accepte pas. Je ne parle pas de l'anniversaire du magasin, ou quand on a une licence pour un personnage Disney, par exemple, ou autre, où on demande de participer. Là, on nous parle de data sharing. On a eu des exemples de ce qu'est un data sharing, USAP. On nous parle de réunions catégorielles. On nous parle de bannières sur des produits qui ne sont vendus qu'en France par des industriels internationaux, mais qui ne développent des produits qu'en France, où vous allez chercher des taux de « x % » pour des services à l'international alors qu'ils ne vendent leurs produits qu'en France et ils nous disent : « Nous, on n'en veut pas, on ne veut pas de ces services ».

Pour vous aujourd'hui, 100 % de ces industriels vous disent : « Moi, je veux de ces services ». Et eux, quand ils viennent nous voir ils nous disent : « Nous, on leur dit qu'on n'en veut pas des services, la réunion catégorielle, nous n'en voulons pas. Les pop-ups sur Internet, de toute façon d'un produit qu'on ne vend qu'en France, on doit dire qu'on le vend à l'international, mais nous n'en voulons pas du tout, et le data sharing, nous ne l'utilisons même pas ». Ces entreprises, certaines entreprises viennent nous dire cela. Quand ils vous le disent, normalement, vous devriez leur dire : « Tu ne veux pas de service, on ne t'en donne pas ». Cela vous est-il déjà arrivé, ou l'achètent-ils tous ?

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Claude Genetay, directeur général d'Intermarché et de Netto

Cela nous arrive au quotidien. Pas à moi, mais au quotidien des acheteurs. Il y a une parfaite symétrie entre nos organisations et les organisations des fournisseurs, c'est-à-dire qu'ils ont des patrons des négociations européennes, des patrons des négociations mondiales. Ces gens, leur « boulot » – je sais de quoi je parle ce fut mon travail à une époque – leur objectif est de venir dire que « le service est trop cher ». Ils veulent ces services bien sûr, parce qu'encore une fois, ces services leur permettent de générer la croissance que je viens d'évoquer avec vous, mais leur boulot est de dire : « c'est trop cher ». Cela s'appelle la négociation. Notre boulot à nous, c'est de dire : « Non, ce n'est pas assez cher ». Cela s'appelle la négociation et à un moment, on se trouve, avec les fournisseurs, et on signe des accords. Cela s'appelle le jeu de la négociation entre une alliance internationale et les 71 plus grosses multinationales, c'est comme cela dans les box.

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L'écosystème que les distributeurs ont créé depuis quasiment un demi-siècle maintenant, moi je l'analyse comme créant chez le consommateur – vous nous dites toujours, vous, Michel Edouard Leclerc et consorts, que c'est pour le bien du consommateur, le prix bas et ainsi de suite. Je pense même que ce n'est pas faux. Mais est-ce qu'il n'y a pas un problème quand même, est-ce que nous ne sommes pas dans l'absurde, lorsque votre système de négociation, les services... lorsqu'il y a une déconnexion totale du rapport au produit ?

Lorsque par exemple Intermarché propose du Nutella avec une promotion de 70 %, où est-ce que vous avez vu un produit dévalué de 70 % ? On fait croire que finalement les denrées alimentaires, même si elles ne sont pas indispensables, ne valent rien. Rien que cela, je trouve que c'est grave parce que vous êtes partis dans une machine infernale. Je comprends bien, vous venez du secteur de l'industrie et M. le Président nous l'a rappelé tout à l'heure, vous nous avez expliqué : « On a la lecture de la rentabilité de nos interlocuteurs », c'est-à-dire que vous avez vous-même construit un écosystème qui vous permet d'avoir un tarif à la carte. Il y a de l'argent à prendre, je vais en prendre le maximum. Il y en a moins, je ne vais pas en prendre ou je vais en prendre moins. Tout cela, je trouve que c'est insensé, cela n'a plus de sens. Et vous avez utilisé le mot valeur, il y en a d'autres qui l'ont utilisé avant vous, quand je sais qu'ils nous ont menti, je me dis : mais quelles sont les valeurs qui animent ces personnes ? Certainement l'argent, cela je veux bien le croire. Si j'avais un grief à faire aux distributeurs structurés en centrale d'achats, c'est d'avoir totalement dénaturé la relation du consommateur aux produits qu'il achète, notamment aux denrées alimentaires. Et cela, je trouve que c'est très grave et c'est la responsabilité des distributeurs et du système que vous avez monté, que vous avez créé.

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Claude Genetay, directeur général d'Intermarché et de Netto

Monsieur le Président, quand vous dites que le système est absurde, sans doute, c'est vrai que si demain...

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Expliquez-moi la promotion sur le Nutella, cela ne vous dérange pas, quelque part ? Alors bien sûr vous n'avez pas été sanctionnés. Est-ce que ce n'est pas gênant ? Cela ne vous gêne pas de dire : un produit, allez, 70 %.

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Thierry Cotillard, président d'Intermarché et de Netto

Ce que nous n'avons pas mesuré pendant l'opération Nutella – et je pense que si c'était à refaire, nous l'avons dit, nous ne le referions pas – nous n'avions pas mesuré l'incivilité et tout ce qui s'est passé derrière tout cela. L'idée, ce n'était pas de montrer que nous pouvions tout péter et que les choses n'avaient pas de prix. L'idée était que nous étions persuadés, au moment où la loi était en train de se décider, qu'il y avait un vrai sujet de pouvoir d'achat en France. Cela s'est manifesté par ce que nous avons vu, mais il y a des familles en France qui malheureusement toutes les semaines ne peuvent pas se payer du Ferrero, du Nestlé et du Coca-Cola et elles vont dans d'autres circuits de distribution pour trouver d'autres produits. Sur le fond, nous assumons le rôle d'un distributeur, nous ne pouvons pas être accusés de rendre accessible la grande consommation au plus grand nombre, c'est la réalité. Par contre, au moment où je vous dis cela, je crois qu'il y a deux tendances lourdes. Une que l'on cautionne, parce que nous-mêmes nous fabriquons, c'est que c'est en train de pivoter, les choses sont en train de changer.

Les premiers chiffres sont en train de le démontrer en France, je ne sais pas si vous les avez, c'est-à-dire que c'est une consommation qui régresse en volume, et qui progresse en valeur et elle progresse en valeur, pas par l'inflation – il y a une légère inflation – mais c'est parce qu'en fait l'offre est plus valorisée, c'est du bio.... On ne peut que se satisfaire de cela, mais cela concerne la très grande tranche de la population qui y aspire et on le voit dans les chiffres nationaux. Mais vous avez aussi – et cela a été dit par d'autres interlocuteurs – 15 % des Français, c'est 8 millions de Français, qui ont du mal à boucler leurs fins de mois. Donc nous ne sommes pas élitistes, nous ne sommes pas dans le centre-ville de Paris, nous avons des zones qui sont aussi défavorisées. Nous devons trouver le juste milieu. Après, les marges de manoeuvre ne sont pas énormes. On parle du pourcentage.

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Vous avez des parlementaires exclusivement de territoire. Vous disiez : « Nous ne sommes pas élitistes ». Ce n'est pas pour les parlementaires qui sont là puisque vous n'avez que des parlementaires des territoires. On a pris l'exemple du Nutella, mais le système va tellement vers l'absurde, que certains d'entre vous sont capables, par exemple – vous parliez du bio – certains sont capables de vendre du lait bio moins cher que le lait conventionnel, tellement vous êtes arrivé à un système absurde. C'est là où l'on dénature totalement la relation du consommateur aux denrées alimentaires, je dis notamment aux denrées alimentaires parce que c'est peut-être ce qui est le plus important. Un kilo de beurre, un kilo de viande, un litre de lait, un kilo de fruits, cela a du sens, l'alimentation.

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Thierry Cotillard, président d'Intermarché et de Netto

Si vous me permettez, avant que Madame la Députée s'exprime. Il faut faire le distinguo sur le bio entre – même si c'est compliqué, j'entends, intellectuellement – le prix payé aux producteurs et le prix aux consommateurs. Le rôle du distributeur, c'est la démocratisation du bio, on l'accepte ou pas, mais c'est la réalité. À un moment, si le distributeur ne fait pas des prix attractifs, cela ne sera qu'à une population élitiste, puisque c'est 15 ou 20 % plus cher que le conventionnel.

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Oui, mais de là à vendre le bio moins cher que le conventionnel.

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Thierry Cotillard, président d'Intermarché et de Netto

Non, ça, c'est une connerie.

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Ça s'est vu cette année 2019 dans certains rayons. On peut vous retrouver les documents, on les a dans les bureaux, on les a présentés au début de nos auditions, il y a trois mois.

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Thierry Cotillard, président d'Intermarché et de Netto

Sur le lait bio qu'on fabrique à la laiterie Saint-Père, cela nous arrive de le mettre en promotion, mais le prix de l'agriculteur, c'est important de le dire, n'est pas au rabais, on ne lui achète pas en promo son prix payé à la ferme.

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Non, mais les marges et les montages financiers qui sont les vôtres vous permettent de vendre du lait bio, enfin, un produit bio au prix d'un produit moins cher qu'un produit conventionnel. Cela doit interpeller un être normalement constitué, parce que l'on encourage les producteurs et chacun des acteurs, y compris les industriels, à se tourner vers l'excellence, la haute qualité nutritionnelle, la haute qualité environnementale et la responsabilité sociale, et parce que vous avez des démarches abracadabrantesques qui visent à récupérer l'argent là où il y en a, vous dénaturez totalement la relation des consommateurs aux produits.

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Pour rebondir sur ce que vous venez de dire, la guerre des prix au bout d'un moment elle a aussi un impact sur l'emploi des gens. C'est-à-dire que plus vous allez aller dans cette guerre des prix, moins vous allez permettre à des industriels de vivre, et plus vous allez détruire des emplois en France.

Parce que quand vous nous dites que vous soutenez les PME françaises, que vous avez vous-mêmes vos usines en France, c'est très bien, mais vous n'êtes pas le seul. Il y a des grands industriels dans les 71 marques que vous avez et qui sont internationaux, mais qui ont aussi de la production en France, qui s'engagent aussi. Ce que je n'arrive pas à comprendre, c'est pourquoi ce serait valorisé dans des PME, et pas quand ce sont des industriels qui, vous dites, ont des chiffres intéressants, mais qui ont des chiffres surtout consolidés à l'internationale, parce qu'on ne voit pas leurs chiffres au niveau national à tous ces gens-là. On aimerait bien le voir nous aussi, on est d'accord, mais on ne les voit pas forcément.

Toujours est-il qu'ils produisent aussi en France, il y a des emplois qui sont en jeu et à chaque fois qu'on joue avec les prix et qu'on fait de la « surpromotion », on joue avec les emplois des gens qui achètent. Or vous avez vos MDD, vous avez votre propre marque de distributeur, vous devriez plus accentuer quelque part encore que les autres qui ne sont pas forcément producteurs, pour proposer des choses de bonne qualité à des prix plus abordables, et pas forcément toujours tirer sur les marques parce que finalement ce n'est pas forcément rendre service à tout le monde. Ça, c'était une remarque globale.

Je voulais savoir dans tout cela comment vous vous positionnez avec la marque Netto, qui a un distributeur hard discount, vous n'en avez pas parlé, monsieur, vous avez parlé tout à l'heure de la concurrence que vous subissiez par des gens comme Action qui nous arrivent en ce moment très fort, on a des Lidl, des gens comme cela qui sont installés dans le paysage depuis plus longtemps, vous avez vous-même une marque hard discount, j'aimerais savoir comment Intermarché se positionne par rapport à cela, comment trouvez-vous l'équilibre ?

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Thierry Cotillard, président d'Intermarché et de Netto

Je vais essayer de répondre au sujet de fond qui est celui de la guerre des prix. Ce qui est important de comprendre quand on a ce réseau Intermarché, c'est que l'on a fait le choix, je l'ai dit en introduction, du supermarché. D'entrée, quand vous commencez le modèle, vous avez un coût de distribution logistique qui évidemment est plus coûteux que de livrer 400 hypermarchés. C'est un point fondamental parce que je ne sais pas si l'on vous a donné le chiffre, mais dans notre structure de charges, 70 % des coûts chez un distributeur, c'est le transport, c'est de la logistique. Le choix que nous avons fait et que nous assumons totalement pour être justement dans tous les territoires, lutter contre la fracture territoriale, et parce qu'il y a aussi de la consommation là où on est, c'est un coût de distribution qui est aujourd'hui supérieur à un format qui ne ferait que des hypermarchés. C'est évidemment un point qui est important.

Après, une fois que je vous ai dit que notre performance finalement, le prix que l'on constitue auprès d'un consommateur, ce sont deux choses : c'est à quel prix on l'achète et quel coût cela va nous coûter de distribuer. Comprenez bien aujourd'hui que face à des gens qui sont plus gros que nous – le leader aujourd'hui est à 22 %, donc on peut imaginer que lorsque je vous ai dit que l'on vend la taille et la croissance, il achète mieux, quand nous avons aujourd'hui évidemment un coût logistique qui est un petit peu plus coûteux parce que nous avons joué la proximité – nous n'avons pas le choix que de faire le maximum pour rester dans la compétitivité. On ne vit pas seul. On vit avec des concurrents et Intermarché, ce sont les courbes de prix qui le montrent, n'a jamais alimenté la guerre de prix. Nous essayons évidemment d'être le plus compétitifs possible en France, parce que c'est dans l'ADN. Il y a 50 ans, nous étions avec Leclerc, donc bien évidemment notre succès nous l'avons fondé sur le côté accessible des produits, mais je tiens quand même à préciser que nous sommes aussi raisonnables sur ce sujet, nous n'avons pas fait n'importe quoi, quand bien même, et je l'assume, nous avons probablement fait une connerie avec le Nutella. C'est un point.

Vous parliez de la qualité, je vous rejoins. Le schéma que nous avons donné, nous venons de faire une convention avec les 62 usines, avec les confédérations de producteurs et nous leur avons dit : le chemin, la trajectoire, c'est plus de qualité. C'est-à-dire que c'est du HVE c'est de la conversion en bio, et cela, ce sont des schémas où les agriculteurs nous disent : « oui, mais vous êtes gentils, nous avons déjà du mal à vivre, comment on va convaincre la vente », donc on leur fait des contrats à 12 ans sur le porc pour « passer en bio », à 6 ou 4 ans sur le lait pour la conversion en bio. Notre combat est de se dire : nous devons porter le mieux manger à l'ensemble des Français et nous devons faire la différence avec les autres, parce que justement nous avons notre outil de production. Si l'on parle de modèle, à un moment, c'est notre problème de compresser la marge de l'industriel que nous sommes avec le distributeur pour rendre accessible des cahiers des charges qui doivent être de meilleure qualité. Cela, Madame, soyez rassurée, l'ambition d'Intermarché est d'être sur ce créneau-là. Cela met du temps, mais en tout cas, nous sommes sur cette conversion de fond.

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Claude Genetay, directeur général d'Intermarché et de Netto

Netto répond à une partie de nos clients. C'est le succès du hard discount en France, que ce soient les Allemands ou toutes les nouvelles enseignes très agressives en France, il n'est plus à démontrer. Il nous a semblé important, c'est notre rôle dans les territoires, d'apporter une réponse différente, en tout cas en termes de consommation, à Netto et avec Intermarché avec une offre différente et certes plus accessible.

Je vous entendais tout à l'heure, Madame la Députée dire : « tirer sur les marques ». Il ne s'agit pas de tirer sur les marques. Les marques, les multinationales, nous avons besoin de ces produits-là. Il ne s'agit pas de cela. Il s'agit de faire un constat qui est simple : nous sommes dans une crise du pouvoir d'achat. Nous devons accepter des hausses de tarifs sur les PME. Nous devons accepter des hausses de tarifs sur toutes les filières agricoles françaises, il n'y a pas le choix. D'abord parce que c'est la loi, et parce que ce sont nos convictions également. Le point, c'est : est-ce qu'on peut rajouter une autre couche à cela, avec les hausses de tarifs des multinationales ? Là, on ne partage sans doute pas le même constat. Notre conviction, en tout cas, c'est que ce n'est pas nécessaire pour ces multinationales, parce qu'elles ont des résultats qui sont déjà suffisamment importants. Donc pour arbitrer sur le pouvoir d'achat, nous pensons que c'est un bon choix. Cela s'appelle le discernement.

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Je voudrais que l'on reste sur la question de Cendra Motin. J'ai beaucoup insisté lors de la première partie de nos positions sur la relation du consommateur au produit qu'il achète. Je voudrais revenir sur la question de Cendra Motin, parce qu'en tenant ce discours que vous tenez de manière unanime, les fournisseurs nous ont expliqué que la France était le pays où les négociations commerciales étaient les plus difficiles. Si on pousse votre raisonnement à l'extrême, et là je rebondis sur ce que vient de dire Madame Cendra Motin, parce que je veux avoir votre réponse, les entreprises, cela peut être des PME, mais cela peut surtout être aussi des groupes internationaux, les multinationales. Elles vont cesser leur développement en France, elles vont arrêter d'investir en France – ce qu'a dit Cendra – on va perdre de l'emploi industriel, elles vont avoir intérêt à se délocaliser hors de France pour répondre à vos desiderata. Ce qui me fait penser que le consommateur, finalement il creuse sa tombe et il fragilise l'arsenal industriel français, parce qu'un certain nombre de distributeurs ont décrété les prix bas, les prix bas à tout prix, à n'importe quel prix, à n'importe quelles conditions. Je voudrais savoir quelle est votre vision. Vous parliez tout à l'heure d'aménagement du territoire. Quelle est votre vision des effets que peuvent avoir ces négociations poussées à l'outrance qui visent à limiter l'investissement industriel en France et à l'encourager à l'extérieur pour répondre à vos désirs de prix bas et de marges supplémentaires ?

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Thierry Cotillard, président d'Intermarché et de Netto

Les négociations les plus dures au niveau européen se font en France, pourquoi pas. Je n'ai pas de comparatif, je n'ai pas été distributeur en Allemagne ou ailleurs. Ce que l'on sait, c'est que – et cela c'est un observatoire des prix – les prix publics en France de l'alimentation ne sont pas moins chers. C'est cela qui est quand même assez incroyable, c'est que l'on vend en moyenne – on a remis des éléments ? Nous sommes à 110, 115. Après, en fait, quand on est à 115, il y a deux possibilités : soit on est des noeuds de distributeurs, c'est-à-dire que l'on distribue de manière très chère, et je pense que la distribution française, si elle sait exporter des groupes comme Carrefour, c'est que je pense qu'il y avait une expertise donc je ne crois pas que ce soit dans cette proportion. Je veux bien croire que le coût de transport soit peut-être moins cher en Allemagne, mais je n'y crois pas. Le coût de main-d'oeuvre, il y a peut-être des différences, mais pas dans cette proportion. On est à peu près intimement convaincus que le prix du même produit, parce qu'il y a des produits qui sont somme toute standard au niveau européen, est vendu plus cher par l'industriel en France. J'ai cette intime conviction, et je vais vous dire pourquoi j'ai cette conviction.

Certains de nos concurrents ont fait le choix de s'associer avec un distributeur allemand pour non pas vendre des services, mais pour acheter en commun en dehors du territoire français. Ces gens-là sont extrêmement performants. S'ils le font, c'est qu'il y a bien un écart de prix probable à l'achat entre le prix vendu à un distributeur allemand, versus à un distributeur français. Cela pose quand même un problème de fond, parce que bien évidemment si le même produit est vendu plus cher en France, vous comprenez que les négociations sont peut-être plus âpres, parce que le point de départ est beaucoup plus haut. C'est quand même un point qui est extrêmement important.

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Vous imaginez vous ce que vous êtes en train de dire là ? Vous êtes en train de dire : « Moi, je représente 20 % du chiffre d'affaires d'un industriel, j'estime qu'ils en ont encore sous la pédale parce qu'ils ont des résultats qui sont corrects, pour peu que l'on connaisse leurs résultats, donc on continue », puisque de toute façon, vous avez une telle puissance, pour certains industriels vous êtes entre un quart et un cinquième de leur chiffre d'affaires, ce qui est colossal. Vous dites : « Tant que l'on a encore de la puissance, nous Intermarché, nous estimons qu'ils ont encore un peu de réserve sous la pédale, parce que l'on a des chiffres sur des indices de comparatif de produits ». D'ailleurs je vous rappelle que cet indice comparatif produit, ce n'est pas un indice comparatif marques. C'est un indice comparatif typologies de produits. L'Allemagne coûte moins cher, parce que l'Allemagne n'a que du hard discounter qui est sur une verticalité puisqu'ils ont intégré leurs produits. Mais on pourrait en discuter pendant des heures. On a déjà eu cette discussion avec la Commission européenne.

Donc parce qu'ils en ont encore sous le pied, parce que vous estimez qu'il faut continuer d'appuyer sur la pédale… Mais il y a encore quelques semaines, on s'est tous tapé dans le dos quelques mois en disant qu'on allait avoir une charte de bonnes pratiques, qu'on allait avancer ensemble, qu'on allait pouvoir rétribuer un petit peu plus d'argent aux agriculteurs et pourtant là vous nous dites : « En fait, on peut encore continuer, ils ont encore de l'argent. Donc on va continuer de mettre un peu plus de pression puisqu'on va aller chercher de l'argent en Europe ». C'est ce qu'on est en train de comprendre, en Suisse ou en Belgique, pour vous d'ailleurs, c'est en Suisse.

Effectivement, le ruissellement, cela ne fonctionne pas sur les agriculteurs. Cela fait cinq ans que vous êtes en déflation. Cela fait cinq ans qu'on est en déflation, cela fait cinq ans que le groupe Intermarché achète en déflation. Vous allez me dire : « Oui, mais pas tous les produits ». Je les connais déjà vos statistiques. Les trois-quarts de vos produits sont en déflation.

À un moment donné, il faut avoir un discours qui soit logique. C'est là où l'on n'arrive pas à comprendre. Vous nous dites clairement : « Ils en ont sous la pédale. On continue d'appuyer ».

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Claude Genetay, directeur général d'Intermarché et de Netto

Nous avons signé une charte de bonnes pratiques, encore une fois, les PME et les produits issus des filières agricoles françaises ont vu leur prix d'achat augmenter. C'était cela l'objectif. Moi, je n'ai pas lu que l'objectif de la loi EGAlim était d'augmenter la rentabilité des multinationales françaises.

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L'objectif d'EGAlim, monsieur Genetay, c'était d'augmenter les revenus du monde agricole. Je tiens à rappeler que les alliances locales que l'on met tous sur la première page du prospectus que l'on reçoit, une alliance locale, cela représente en moyenne – vous allez peut-être me dire que ce n'est pas la même chose pour vous – entre 0,5 et 2 % du chiffre d'affaires de la grande distribution. Si payer un petit peu mieux 0,5 à 2 % du chiffre d'affaires de la grande distribution, cela ne représente pas 100 % du monde agricole, parce que ces mêmes alliances locales ne représentent pas 100 % du monde agricole. À un moment donné il faut être logique avec soi-même. Lorsque l'on augmente effectivement les PME, comme vous le faites – je vais vous dire une chose, je me suis déplacé régulièrement. Je suis allé les voir les magasins. Les alliances locales, heureusement que vous êtes là, je vous le dis, heureusement que vous êtes là pour les clubs de foot, pour les clubs associatifs heureusement que vous êtes là. Mais il faut savoir aussi payer les autres, pour qu'ils puissent payer les agriculteurs, parce que ce sont eux qui représentent la majeure partie des agriculteurs. Je ne veux pas entendre un discours aujourd'hui qui ne parle que de PME. Je ne comprends pas votre vision.

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Claude Genetay, directeur général d'Intermarché et de Netto

Jamais je ne me serais permis ici de venir vous parler des 1,5 ou 2 % du chiffre d'affaires. Il ne s'agit pas de cela. Quand je vous dis que nous achetons les produits issus des filières agricoles plus cher cette année. Je vous parle de Bel, je vous parle du groupe Sodiaal, je vous parle du Groupe Savencia. Je vous parle de ce que l'on vient de faire sur le porc avec Herta, c'est cela la réalité. Oui, nous avons fait une distinction entre les fournisseurs qui ont des liens étroits avec toutes les filières agricoles françaises, et les autres. Nous considérons dans la crise de pouvoir d'achat qu'il faut faire des arbitrages. Est-ce que nous pouvons aujourd'hui dire à nos concitoyens que nous pouvons augmenter tous nos prix d'achat et les répercuter ? Notre vision, mais peut-être que l'on se trompe, c'est non. Encore une fois, quand vous avez 15 % des Français qui sont à 1 euro près, si j'applique la hausse que j'évoquais avec vous tout à l'heure, mes fameux 14 %, en fait, cela fait plus d'un euro. Nous considérons qu'il y a des priorités. Un, les PME, deux les filières agricoles françaises. Et là, il ne s'agit pas d'alliances locales, ce sont tous les fournisseurs concernés par ces discussions, à chaque fois que nous avons pu trouver un accord. Et puis après, il y a les multinationales qui n'ont pas de lien avec les filières agricoles françaises et qui, on pense, on n'a pas besoin de ponctionner le pouvoir d'achat des Français pour améliorer leurs résultats.

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Claude Genetay, directeur général d'Intermarché et de Netto

Quand vous faites du DPH, quand vous faites du Coca-Cola, il n'y a pas de lien. Quand vous faites de la bière, il n'y a pas de lien, quand vous faites des shampoings… On pense qu'il n'y a pas de lien, peut-être que l'on se trompe, il faudra que l'on regarde les produits. On a su avoir du discernement là-dessus parce qu'on ne se sentait pas – nous sommes tous les jours au contact avec des clients – d'aller leur dire : « Payez plus cher sur tout !». Il faut faire des choix.

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Notamment sur l'alimentaire. Prioriser l'alimentaire.

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Thierry Cotillard, président d'Intermarché et de Netto

Peut-être que ce qui n'a pas aidé, parce qu'évidemment avec ce changement de loi il y avait beaucoup d'attentes pour que les négociations se passent différemment. Nous sur le secteur frais, les négociations sont en inflation, c'est-à-dire qu'on a acheté plus cher. Mais par contre, ce qu'il faut avoir en tête, c'est que je pense que l'erreur que certains industriels – et heureusement pas tous – ont peut-être commis, c'est qu'ils se sont dit : « C'est l'aubaine, c'est une belle occasion de passer des tarifs que je n'ai pas passés depuis trois ans ! ». Cela a à mon avis a un peu crispé les relations. Là je regardais, les multinationales, c'est 12 % de tarifs les trois dernières années, celles qui sont à AgeCore, nos PME en général c'est 8%. Déjà, d'une manière, sur les mêmes conjonctures, c'est peut-être avec des volumes différents, mais vous voyez qu'il y a des écarts de niveau de tarifs demandés dès le départ. Après, il y a eu des fournisseurs – je ne vais pas donner la marque – l'un qui est fabricant de soda est arrivé cette année avec 8% d'augmentation, d'inflation. Depuis deux ans, le sucre a baissé de 50 %. Ce que je veux vous dire c'est qu'en fait certainement que les distributeurs ne sont pas parfaits, mais malheureusement, il y a aussi quelques multinationales qui en abusent un peu. C'est-à-dire que ce n'est vraiment pas raisonnable de venir avec + 8.

De la salle : Inaudible, hors micro

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Thierry Cotillard, président d'Intermarché et de Netto

Et le point de départ, quand vous commencez à ne plus suivre, pour se retrouver, il est long. Il faudrait que l'on soit plus raisonnables.

Quand Claude parle de discernement, c'est vrai que l'on devrait peut-être se dire – vous m'avez dit que la loi Alimentation n'était pas le sujet, mais cela conditionne quand même nos relations commerciales et la relation avec les industriels – « Il faut que l'on aille plus loin », et se dire : au sein d'un groupe comme Nestlé, vous avez une filière qui est en lien direct, cela s'appelle Herta. Herta, je peux vous assurer que ce n'est pas une critique, ils font un peu de sourcing à l'étranger, je pense que quand ils le font, c'est aussi parce qu'économiquement ils sont en difficulté. Ils ne le font pas par plaisir. Aujourd'hui Herta, on a l'impression que c'est une marque formidable, etc., ils sont à deux doigts de mettre la clé sous la porte. Cela prouve qu'au sein d'un groupe aussi puissant, une filière industrielle agricole est en danger. Pour Herta, on devrait avoir une attention particulière aux tarifs. J'ai vu Arnaud de Belloy, donc là on a fait quelque chose dans le cadre du problème du prix du porc, mais on devrait se dire : « Arnaud, si tu convertis encore plus d'achats de porcs en France qui sécuriseraient justement les débouchés français, etc. on va accepter des hausses de tarifs ».

Je pense que le discernement est vraiment là, parce que chez Nestlé, vous avez Perrier. Perrier avec le monde agricole, je ne vois pas trop. Vous voyez, c'est une usine. Il faudrait peut-être que l'on aille encore plus loin pour se dire « Faisons preuve de discernement ». Quand c'est une multinationale – on ne va pas cristalliser sur les multinationales, ce n'est pas le sujet – que ce soit PME ou multinationale, il y a une verticalité avec le monde agricole parce que cela représente au moins 30 % du coût du produit, là, on doit avoir une autre approche en termes de négociation.

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Vous avez 71 groupes qui sont à l'international, il y en a d'autres qui en ont 82, c'était dans la partie publique donc on peut se permettre de le dire. Et ma question – mais vous venez pratiquement d'y répondre – nous n'avons pas le discernement aujourd'hui entre ces 71 industriels avec lesquels vous travaillez et ceux qui sont réellement dans le monde agricole et qui sont complètement dépendants du monde agricole. On a quand même vu dans nos entretiens, des gens qui sont considérés dans ces 71, et qui ont des niveaux de marge nets inférieurs à 1 % et qui subissent les mêmes pressions que les grands groupes internationaux dont vous parlez. On comprend qu'il y a vis-à-vis d'eux un certain nombre de discernements à essayer d'avoir. En ce qui concerne un certain nombre de nos industries agricoles en Bretagne, il y en a qui sont en grande souffrance à cause de la politique que vous menez contre eux.

La deuxième chose, c'est le problème des promotions. La loi EGAlim limite les promotions. Je voulais savoir si vous étiez totalement dans cette démarche-là. Moi je considère que les promotions, hormis celles qui sont faites lorsqu'il y a des excédents de production à certains moments, mais c'est surtout pour les produits frais, je ne vois vraiment pas l'intérêt de faire des promotions, sinon de dévaluer le produit.

La troisième chose. Vous parlez de l'exploitation HVE, moi je veux bien, mais vous savez combien il y a d'exploitations HVE en Bretagne, par exemple ? Il y en a qu'une ! Lorsque vous parlez d'HVE, c'est vrai pour mon collègue rapporteur qui est dans le champagne et chez des viticulteurs, mais chez les éleveurs et les producteurs de légumes bretons, il n'y a pas d'exploitation HVE aujourd'hui.

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Thierry Cotillard, président d'Intermarché et de Netto

Je ne fais pas une fixation sur HVE, mais il est vrai que nous avons une filière viticole et effectivement c'est pour la marque Hauller, où on a des viticulteurs, il y en a sept ou huit qui ont basculé. Derrière HVE en fait, je mets toutes les démarches qui vont être qualitatives, c'est de cela dont on parle, et nous essaierons, nous à Intermarché, de le faire le plus vite possible pour être mieux-disant.

Sur la promo, j'avais assez vite eu une position qui avait été la suivante : j'avais mis en garde sur deux choses. J'avais dit : « attention aux produits saisonniers ». On a des volumes incroyables en historique à passer sur les foies gras, sur des champagnes. Le champagne, je ne suis pas inquiet, parce qu'en fait c'est une filière, j'imagine qu'elle a l'export, ce n'est pas le problème. Sur la filière foie gras où on a eu notre usine, qu'on n'a pas gardée, on a fait une JV parce que nous avions un problème d'équilibre matière, je sais que le sujet peut être compliqué.

Donc, produits saisonniers, ce serait bien d'amender pour modifier, et certaines PME sont preneuses de taux de promo – cela va peut-être vous paraître surprenant – plus agressifs, en tout cas de changements de règle du jeu. Je vais vous donner un exemple très précis, parce que vous allez voir que c'est vrai. Le marché du café, vous avez trois ou quatre très grandes marques. Et puis il y a des petits faiseurs. Je pense à la marque Legal. Il a encore envoyé un courrier pour qu'on le reçoive et que l'on fasse le point où il nous demande des lignes additionnelles en promotion. Comprenez que lui, en fait, c'est une PME. Il n'a pas les moyens de passer à la télé pour faire de la pub ! Il n'a pas de force de vente pour avoir 150 commerciaux qui arrivent dans les Intermarché et les Leclerc pour remettre les produits en avant. Le moyen pour faire du volume – et il a un système industriel, donc il faut que ça tourne et que cela produise – c'était d'être en prospectus chez nous et chez nos concurrents. Aujourd'hui en étant limité à 34 %, il est un peu moins présent, mais surtout quand il le met à 34 %, il en vend un peu moins et donc son historique de production est compliqué et cela le met en difficulté. Je ne suis pas en train de dire que pour toutes les PME il faut le faire, en tout cas pour certaines PME qui sont « promo dépendantes » dans leur modèle économique, faisons attention pour être sûr que la loi n'en condamne pas quelques-uns, ce ne sera pas une généralité, mais ce sera toujours une de trop.

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Il ne faut pas profiter de quelques-uns qui sont quand même assez marginaux pour considérer que cela doit être appliqué de manière systématique. On a vu dans certaines filières des taux de 60 ou 70 % de promotion qui sont totalement aberrants. Mais vous ne m'avez pas répondu sur la différenciation dans les 71 entre ceux qui sont purement agricoles et les autres. Est-ce que vous avez une idée ? J'ai regardé vos tableaux. C'est vrai que la plupart ne sont quand même pas totalement du monde agricole.

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Thierry Cotillard, président d'Intermarché et de Netto

C'est vrai que nous avons eu un traitement différencié parce qu'un Savencia, c'est une multinationale, elle est dans le secteur laitier. Nous avons des demandes aujourd'hui de l'ANIA de faire attention à quelques filières. Nous pensons à la filière céréales. Derrière, vous avez des gros groupes comme Barilla qui font le pain de mie et qui évidemment achètent du blé, mais aussi on a des choses à taille plus « franco-françaises », comme le groupe Pasquier. Il faut que l'on étudie le dossier, on va faire preuve de discernement et on va sûrement le faire en dehors des négociations. J'ai déjà rencontré le dirigeant de chez Pasquier, et on va voir comment on peut accompagner le marché, sachant que la difficulté est qu'il faut que le message passe auprès de tous les distributeurs pour que cela ne soit pas un écart de compétitivité négatif pour Intermarché. On ne peut pas être le seul à le faire. La démarche, il faut qu'elle soit, j'espère, plus générale.

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J'ai été interpellé par la phrase que vous avez dite : « On a une lecture de la rentabilité de nos fournisseurs », c'est quand même quelque chose. Et puis vous confirmez ce propos, parce que finalement, la négociation est à la tête du client. On a l'impression que vous vampirisez le client, que vous lui laissez un petit peu d'oxygène parce qu'il faut qu'il respire, mais on négocie au plus dur et quand on voit que c'est dur pour lui, on le laisse respirer, parce qu'il ne faut pas qu'il y ait trop de morts.

Monsieur le Directeur général, vous avez dit tout à l'heure : « je sais très bien comment fonctionnent les industriels, notamment les multinationales, j'y étais ». Je veux venir sur la question de la confidentialité des données parce qu'il y a beaucoup de femmes, beaucoup d'hommes, qui travaillent pour le compte des centrales, compte tenu des alliances et des mariages, des remariages des démariages, on peut imaginer qu'un industriel aujourd'hui il a comme interlocuteur Monsieur « X » pour telle centrale, et l'année prochaine il retrouve pour la centrale d'à côté. Se pose quand même une question de confidentialité. D'ailleurs, c'est sans doute ce qui explique que vous avez une lecture de la rentabilité de vos fournisseurs, parce qu'un certain nombre de négociateurs doivent être issus des rangs de l'industrie et notamment des grosses industries. Il y a un questionnement autour de la confidentialité autour de la concurrence, de la non-concurrence. Quand certains députés posent la question de dissiper cet oligopole, certains l'appellent même un cartel, ils n'ont pas forcément tort. Il y a peut-être un petit peu d'ordre à mettre dans tout cela quand même. Parce que moi, depuis une heure que l'on vous écoute, j'ai compris que la négociation était en fonction de l'état de santé financier de votre fournisseur. Quelqu'un qui est en bon état et en bonne santé financière, parce qu'il a un savoir-faire, parce qu'il est innovant, parce qu'il a de la recherche et développement, en fait parce que c'est un bon, donc vous allez les cognez au maximum. Les fragiles, vous essayez de les ménager. Et s'ils sont sur le point de mourir éventuellement vous reprenez leur outil industriel. C'est aussi une grille de lecture, parce que vous avez expliqué tout à l'heure que vous étiez industriel. Je comprends, et vous avez envie de vous payer des multinationales, mais on a envie de vous dire où est-ce que vous allez vous arrêter, parce que vous avez quelques outils industriels, dans quelques années – là, on débat parfois de l'accaparement des terres agricoles – qui pourra acheter des terrains agricoles ? Les centrales ? La grande distribution ? Les banques ? Les multinationales. Celles et ceux dont vous estimez qu'ils gagnent trop d'argent.

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Claude Genetay, directeur général d'Intermarché et de Netto

Pour répondre sur la confidentialité et votre premier point, il y a des mouvements entre les entreprises de distribution. Il y a des mouvements tout aussi similaires entre les différents fournisseurs. Il y a également des mouvements – j'en suis la preuve – du fournisseur au distributeur ou inversement. Je pense que c'est tant mieux pour le développement des hommes, pour le développement des carrières. Là, vous touchez à quelque chose qui est lié à l'éthique et au juridique. De mon point de vue, d'une manière générale, je n'exclus pas qu'il y ait des exceptions, que ce soit d'un point de vue juridique, il y a des clauses de confidentialité. Il y a parfois des clauses de non-concurrence, pas tout le temps, et une certaine éthique. À ce stade, je ne vois pas en tout cas de déséquilibre entre la façon dont cela se fait dans l'industrie et la façon dont cela se fait dans la grande distribution. S'il y avait des problèmes de ce type – vous semblez suggérer qu'il y ait une porosité avec des différends – je pense que les fournisseurs si prompts à venir vous voir vous l'auraient dit, et je pense que ce n'est pas le cas. À ma connaissance, en tout cas, il n'y a aucune porosité. C'est le marché du travail qui est ainsi fait.

Vous avez utilisé, c'est votre deuxième sujet, le terme « cogner ». C'est blessant. Cogner sur un fournisseur, c'est tellement loin de nos façons de faire. C'est même blessant. Moi je suis le patron d'acheteurs, de jeunes acheteurs, de plus anciens acheteurs. Thierry, tu es le patron d'adhérents négociateurs. Franchement, se dire que l'on reçoit les gens pour les cogner, ce n'est pas du tout dans nos valeurs.

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N'utilisez ni ce ton-là, ni la manière dont vous les recevez, parce que l'on nous a expliqué comment vous les aviez reçus, on leur demande de laisser sacs, bagages, à la porte, de venir avec un iPad, un minimum de matériel et les négociations qui durent et qui durent et qui durent. Et on vous met au frais pendant deux heures, et vous revenez. Ce n'est pas la peine de jouer sur la corde sensible et les sentiments. D'autres l'ont fait, et je vous dis, ils nous ont menti. Le problème que j'ai, c'est qu'il faudra prouver qu'ils ont menti. Ce sont des marioles donc j'imagine comment les négociations commerciales doivent se passer et le mot cogner, il n'a certainement pas dû vous choquer, loin de là.

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Claude Genetay, directeur général d'Intermarché et de Netto

Si.

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Oui, oui, eh bien si vous voulez. Si vous voulez.

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Claude Genetay, directeur général d'Intermarché et de Netto

Je peux vous confirmer qu'à la demande de Thierry Cotillard, le brief qui est fait, on peut avoir des rapports économiques, on peut ne pas être d'accord, mais cela doit toujours se faire dans le respect des personnes et le terme « cogner », cela veut dire cela. Il ne s'agit pas de cogner sur des multinationales. Il s'agit d'abord de lutter contre leurs velléités de hausses de tarifs qui nous apparaissent – mais là encore une fois peut-être que l'on se trompe – incompatibles avec...

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Disproportionnées. Les demandes de hausse vous apparaissent disproportionnées.

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Claude Genetay, directeur général d'Intermarché et de Netto

Oui, + 14 % en trois ans, cela nous apparaît disproportionné. Je vous l'accorde, c'est une question de point de vue. Encore une fois, c'est une question d'arbitrage. Nous pensons qu'il est parfaitement valable de devoir malheureusement...

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Je serais curieux de voir une négociation. Je serais curieux d'avoir des éléments où on vous demande 14 % en trois ans. Je serais curieux. Alors que tout le monde nous explique que les négociations ont lieu de toute façon en déflation.

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Dans la réponse que vous allez apporter au Président, tout à l'heure je vous ai posé une question qui n'était peut-être pas assez claire. Sur la déflation, quel est aujourd'hui le pourcentage de déflation si on reprend les cinq dernières années ? Est-ce que vous avez signé à 20 % en déflation la globalité de vos fournisseurs, ou 75 % la globalité de vos fournisseurs et ce depuis les cinq dernières années par exemple ?

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Claude Genetay, directeur général d'Intermarché et de Netto

Je n'ai pas ce chiffre précis, particulièrement pas pour les cinq dernières années. Je n'ai pas d'historique de ce type en tête. Si je dois vous donner un chiffre pour les négociations de cette année, je dirais moitié-moitié à peu près. Encore une fois, je n'ai pas de chiffres sous les yeux. On pourra vous le confirmer si vous le souhaitez. Je dirais moitié moitié, moitié en inflation, moitié en baisse, en gros.

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Pour vous aujourd'hui le Groupe Intermarché – parce que nous avons des chiffres qui reviennent, de certains de ces 71, comme vous les appelez. Je parle des marges. Je vais vous parler des plus gros industriels qui représentent le plus gros du chiffre d'affaires. Sur ces plus gros industriels, les 71, ou même sur Intermarché International, les 100 et quelques, est-ce que vous avez signé plutôt en déflation, plutôt flat, ou plutôt en inflation ?

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Claude Genetay, directeur général d'Intermarché et de Netto

En dehors des fournisseurs issus des filières agricoles – il y en a un dans ces multinationales, les Bel, les Savencia, etc. – plutôt en déflation.

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Tout à l'heure vous nous parliez de « cogner », etc. de choses disproportionnées, « 14 % en trois ans c'est disproportionné ». Signer depuis cinq ans en déflation avec des industriels qui ne sont pas, pour vous, des industriels en relation avec le monde agricole parce qu'ils sont gros, c'est ce que vous nous avez dit tout à l'heure, vous avez expliqué que les gros industriels multinationaux vous ne les avez pas fait rentrer dans vos statistiques de ceux qui sont en direct avec le monde agricole donc vous avez pu continuer à négocier. C'est ce que vous nous avez expliqué tout à l'heure, monsieur le Président. D'ailleurs, il hoche de la tête positivement. Vous pour vous, c'est proportionné de signer en déflation depuis cinq ans. Vous voyez la différence ? Pour vous ce n'est pas proportionné de signer en inflation. En revanche, signer en déflation depuis cinq ans, ce n'est pas un problème.

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Claude Genetay, directeur général d'Intermarché et de Netto

La déflation n'est pas le seul critère d'analyse. Tout dépend d'où l'on part. Et l'on part de quoi, d'une situation des prix. On a un peu une vision. On n'a pas du tout acheté, ce n'est pas du tout notre objectif, au même prix une marque nationale qu'une MDD. Il y a de la valeur. Vous avez parlé de R&D tout à l'heure, vous avez parlé de « valeur de marque », de marketing, cela il n'y a pas de problème, il faut que ce soit payé. Dans notre lecture, il y a encore – ce n'est pas le cas partout – sur une partie de ces multinationales de la matière à de la déflation. Je pense que l'étude sur les prix qui a été faite en moyenne européenne, l'Allemagne est à peu près comme la France, et vous savez, dans nos magasins frontaliers s'ils traversent la France, nos clients pour aller acheter les produits de marques nationales, c'est qu'il y a quand même un intérêt pour y aller. Cela dépend d'où l'on part. Cela dépend du travail sur les prix, évidemment, tout est une question d'analyse dossier par dossier. Mais oui, sur certains dossiers, si on part de traités hauts avec des prix qui sont déconnectés du marché, cela ne me choque pas qu'il puisse y avoir, dans certains cas, cinq années de déflation. Cela dépend d'où l'on part.

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Puisque l'on parlait de proportions. Nous sommes d'accord sur le fait que le déréférencement existe chez Intermarché, vous l'avez appliqué. Le déréférencement, vous l'avez assumé tout à l'heure, on n'en parle plus.

Les pénalités logistiques. On nous explique que cela prend là aussi, des proportions très importantes. Est-ce que vous pouvez nous parler des pénalités logistiques, parce qu'apparemment, c'est quelque chose de récurrent chez vous ? Et les demandes de paiement pour compensation de marge, est-ce que vous pouvez nous en dire aussi un mot ?

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Thierry Cotillard, président d'Intermarché et de Netto

Si vous permettez, sur des questions aussi techniques, ce n'est pas que je veuille me défausser, mais c'est un peu technique, donc je préfère que ce soit M. Genetay qui vous réponde.

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Claude Genetay, directeur général d'Intermarché et de Netto

À ma connaissance, Intermarché n'a pas la réputation d'être celui qui va chercher le plus de pénalités logistiques. C'est encore, à ma connaissance…

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Est-ce que l'on doit en déduire – je vous coupe – qu'il y a une compétition entre vous, pour comparer celui qui réussit à obtenir le plus de compensations liées aux pénalités logistiques ?

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Claude Genetay, directeur général d'Intermarché et de Netto

Bien sûr que non. Il ne s'agit pas de compensation. Il faut savoir à quoi servent les pénalités logistiques, et particulièrement sur les promotions. Ce sont des risques pour tout le monde. L'idée, c'est une mesure qui est incitative pour être livrée, conformément à l'engagement qui est le nôtre avec nos clients et à l'engagement que nous pouvons avoir avec les fournisseurs. Ces pénalités logistiques font l'objet d'une négociation qui est réalisée par notre filiale logistique, entre nos logisticiens à nous et les logisticiens des fournisseurs, et ils se mettent d'accord sur un objectif de taux de service. Un pour le fond de rayon, qui n'est jamais 100. Nous n'avons pas d'objectif pour le fonds de rayon.

Pour la promotion, un taux de service qui est de 100, puisque, comme ce sont des décisions qui sont prises très en amont – la promotion, cela se décide très en amont – et qu'évidemment cela nous met dans une situation très délicate en termes de publicité mensongère et encore plus délicate au contact de nos clients quand nous avons imprimé des catalogues et qu'ils viennent nous les réclamer, là, il y a un taux de service. L'objectif de négociation des équipes est de 100, et le reste, ils discutent. Il y a un objectif de taux de service qui est négocié, dossier par dossier. Je n'ai pas le détail de tous ces dossiers, c'est l'équipe logistique qui s'en charge, mais cela fonctionne comme cela.

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Thierry Cotillard, président d'Intermarché et de Netto

Une information complémentaire, parce que cela nous avait été proposé en Conseil d'administration et que nous avions validé. Nous ne sommes pas à l'abri d'une exception, d'un fournisseur que nous n'aurions pas traité. Il y a des objectifs, mais nous avons connu une situation très particulière l'année dernière. Nous avons manqué de chauffeurs. Cela a été très compliqué nous-mêmes de livrer les magasins. À un moment, nous avons pris la décision d'ajourner les pénalités logistiques, parce que pour le coup, cela aurait été quand même assez malhonnête de les facturer parce que nous-mêmes n'arrivions pas à livrer nos points de vente. Je ne sais pas si vous avez eu des remontées. Nous sommes preneurs à ce moment-là des critiques qui auraient pu être faites, parce que notre lecture, en tout cas la décision que nous avions prise au niveau du Conseil d'administration, c'était de faire un ou deux mois à blanc, c'est-à-dire sans refacturer l'intégralité des pénalités puisqu'il y avait une raison conjoncturelle liée au problème de transport.

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Justement, est-ce que les pénalités logistiques, on pourrait convenir qu'elles soient supprimées, que ce soit quelque chose qui est vraiment exceptionnel, parce que c'est quelque chose qui se contrôle en plus difficilement. Tout dépend où est-ce qu'on livre, si c'est dans un dépôt, si c'est directement au magasin. Est-ce que parmi les propositions que l'on pourrait être amenées à faire, est-ce qu'il ne pourrait pas y avoir purement et simplement la suppression des pénalités logistiques ? Parce qu'il y a tout d'abord le montant des pénalités. Et puis il y a tout le temps que vous passez, il y a un enjeu pour vous parce que c'est une recette, mais l'entreprise va finir par être obligée d'avoir un service spécifique qui ne fait que négocier avec différents clients.

On a évoqué des pénalités logistiques, les demandes de paiement pour compensation de marge.

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Thierry Cotillard, président d'Intermarché et de Netto

Je reviens sur le sujet logistique. J'entends votre lecture qui est de dire on supprime. Nous avons cette croissance qui est de l'ordre de 2, 2,5. On sait que le marché c'est 1 % de croissance. En fait, tous les distributeurs en ce moment, vous avez des taux de rupture de 5, 6, 4 %. En gros, cela tourne à 5 %. J'imagine que chaque distributeur fait l'exercice que nous faisons, on regarde quelle est la responsabilité de l'industriel, quelle est la responsabilité de nous-mêmes, c'est-à-dire notre base qui n'a pas été livrée, etc. Et en fait, abandonner la pénalité logistique, on a en général la lecture que c'est un bon tiers, voire 40 % de notre taux de rupture à nous. Abandonner, alors qu'on objective... Nous en points de vente, nous ne supportons pas de ne pas avoir le produit, puisque quand nous n'avons pas le produit, nous ne faisons pas le chiffre. À juste titre, nos adhérents nous mettent la pression en disant : « Je suis mal livré, j'ai plein de non servis ». Pour la première fois, on a objectivé nos équipes à dire : nous n'allons pas pouvoir faire le chiffre, si déjà on ne livre pas les magasins. Il y a une part de responsabilité des fournisseurs, mais aussi de notre outil logistique. Dans nos bases, on a aussi fixé des objectifs pour avoir les camions, etc. Ce que je suis en train de vous dire c'est que l'objectif est crucial, parce qu'en fait faire 1 % de croissance en France et se dire : « Si j'ai 5 % de rupture, c'est quand même beaucoup, enfin en tout cas, il faut essayer d'améliorer ce taux-là pour pouvoir faire notre chiffre », et donc faire le choix aujourd'hui de se dire que les pénalités logistiques sont finalement abandonnées en amont alors que l'on sait que cela représente 40 % de notre taux de rupture à nous en bout de chaîne, c'est prendre un risque que l'on ne fasse pas notre croissance, et que même l'industriel ne fasse pas non plus...

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On n'imagine pas un industriel rompre la livraison par plaisir. S'il y a un marché, s'il y a une appétence pour un produit, l'industriel va produire, il n'y a rien à faire, c'est son intérêt, votre intérêt est partagé. Si les pénalités logistiques sont supprimées, cela va poser une exigence pour les distributeurs, c'est de gérer de manière différente les réserves et les stocks. C'est cela que ça va poser comme problème. Moi je trouve que c'est à réfléchir. Je le partage avec vous, parce qu'il y a dans cette affaire beaucoup de pénalités qui sont disproportionnées, tant sur les volumes envisagés que sur les sommes. Cela simplifierait la négociation. Parce que si un fournisseur n'est pas en mesure de vous fournir le produit de manière récurrente, qu'est-ce qui se passe pour les circuits courts ? Localement, on défend le circuit local. C'est exactement le problème. On dit aux producteurs : « Il faut être en mesure de m'assurer en volume et en qualité de manière constante », c'est une des équations à résoudre pour les producteurs locaux. Je parle de vos fournisseurs, les industriels, ceux qui sont vos partenaires traditionnels. Cela pourrait être un sujet.

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Thierry Cotillard, président d'Intermarché et de Netto

Vous aurez peut-être une position à prendre sur le sujet. Moi je vois la différence. Nous avons mis pour la première fois – je viens de vous le dire – un objectif managérial sur toute la structure de salariés en disant : « Nous, en point de vente, nous voulons être livrés ». Je vois la différence, c'est-à-dire cette année 2019 – alors, c'est mieux en transport, il y a un peu plus de routiers – mais cela a amélioré. J'ai peur que si on enlève la pénalité logistique, l'industriel et le contre-effet... Nous, nous sommes en train de nous améliorer parce que nous mettons un objectif en interne et que lui se relâche peut-être un peu, quand bien même, j'entends…

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Lui il va produire et vous, vous allez avoir à gérer les stocks de manière partagée avec lui.

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Thierry Cotillard, président d'Intermarché et de Netto

J'entends. Après, on a des modèles où le supermarché n'a pas des réserves immenses. Moi, je serais un peu pénalisé pour le coup, et là je vais défendre ma paroisse, je n'ai pas des réserves de 5000 m². J'ai des adhérents qui ont de toutes petites réserves, et donc difficile de porter le stock.

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Le taux de 100 %, pour moi c'est vivre dans un monde parfait. Le monde industriel, ce n'est pas un monde parfait. Le monde de la grande distribution, ce n'est pas un monde parfait. Et là, vous nous dites que 40 % – c'est votre estimation – du taux de rupture est dû au retard de l'industriel. À un moment donné, c'est-à-dire que 60 % du taux de rupture est de votre erreur.

En l'occurrence, l'industriel, lui, n'est pas rémunéré parce que son produit n'est pas en rayon. On est d'accord ? Si 40 % c'est l'erreur de l'industriel, les 60 % de taux de rupture restants, c'est de votre faute. Lui ne peut pas le voir. Il ne voit pas les pénalités. 100 %, c'est quelque chose pour moi d'impossible. Pourtant, vous avez appliqué.

Quel est aujourd'hui le montant des pénalités au global du groupe Intermarché qui sont appliquées à l'industrie agroalimentaire dans sa globalité : PME, ETI, etc. Quel est le montant aujourd'hui de cela, et quel est le chiffre d'affaires perdu ? Puisque l'on a l'impression que ces montants-là sont des pénalités colossales, disproportionnées – on parlait de proportions tout à l'heure, j'ai l'impression que nous n'avons pas la même vision des proportions – mais on parle souvent du « trois net », « quatre net », « cinq net », nous, ce qui nous est dit aujourd'hui, c'est que là on parle d'un « six net » maintenant.

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Thierry Cotillard, président d'Intermarché et de Netto

Le chiffre, vous m'autorisez à vous le donner en huis clos pour ne pas créer d'écarts de compétitivité ?

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Tout à fait.

Sur les demandes de paiement pour les compensations de marge.

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Claude Genetay, directeur général d'Intermarché et de Netto

Les demandes de compensation de marge sont absolument interdites chez Intermarché. En tout cas dans le brief qui est fait aux équipes c'est cela, mais je pense que ce que n'aiment pas les fournisseurs – alors, une partie des fournisseurs, excusez-moi d'être manichéen, ce n'est pas du tout le cas de la totalité des fournisseurs, mais une partie des fournisseurs – c'est que l'on constate l'évolution de la marge. Cela, jusqu'à preuve du contraire, en tout cas dans une relation d'affaires, on a le droit de regarder où nous en sommes. Point. ! Et c'est l'exigence que nous avons avec tous les acheteurs. Nous constatons, point. Mais il n'y a pas de demande de compensation de marge. Suite à cette constatation, on peut effectivement prendre des décisions sur la gamme, mais cela nous regarde. Et cela ne regarde pas la discussion sur la marge. Nous pouvons constater ensemble avec le fournisseur qu'il y a des problématiques de marge. Point.

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Cela veut dire que pour vous, au niveau des négociations dans les box, un industriel avec une nouvelle référence, nouveau produit, etc. qu'il veut mettre en place, ce n'est jamais arrivé qu'un acheteur lui dise : « On va prendre ton produit, mais tu comprends sur le reste, on n'a pas fait ce qu'il fallait, donc cela va coûter tant pour qu'on puisse mettre ce nouveau produit ». Pour vous, il n'y a jamais eu de pratique comme cela ? On n'a aucun document qui pourrait nous permettre de dire qu'il y a ce genre de demande qui a été effectuée ?

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Claude Genetay, directeur général d'Intermarché et de Netto

Je vous confirme que ce n'est pas du tout dans la politique d'Intermarché et c'est même un brief qu'il y ait zéro demande de compensation de marge. Moi, je n'étais pas présent dans tous les box, si cela a été le cas, c'est une erreur. C'est de ma responsabilité, en tant que Directeur général de corriger cela. Je vous confirme, encore une fois, que ce n'est pas la politique d'Intermarché.

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Ce n'est pas la politique, ce n'est pas dans le brief, mais cela peut très bien arriver.

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Claude Genetay, directeur général d'Intermarché et de Netto

J'ose espérer que non. Sinon je ne sers pas à grand-chose.

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Monsieur le Président, vous êtes Directeur de deux Intermarché. Qui est propriétaire du magasin ? Est-ce que c'est vous-même, Thierry Cotillard, en propre ? D'une manière générale, est-ce que ce sont les directeurs qui sont propriétaires de leur magasin, de la réserve ? Ou alors, est-ce qu'il y a un consortium, une SCI, une structure juridique qui possède l'outillage, l'équipement ?

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Thierry Cotillard, président d'Intermarché et de Netto

Le terme exact n'est pas directeur puisque nous sommes des adhérents à ce système. Nous sommes l'actionnaire principal de la société d'exploitation du point de vente.

Je vais prendre mon exemple, cela va être concret. À Issy-les-Moulineaux, le premier Intermarché que j'ai, c'est une société qui s'appelle SADA, j'ai 100 % du capital, avec une seule action qui appartient à ITM Entreprises, qui est la holding du groupe, et que nous avons voulue, de manière à juridiquement se protéger et avoir un droit de préférence à la fin du contrat d'adhésion évidemment de l'adhérent. C'est le schéma standard pour tous les des adhérents Intermarché.

Moi, par exemple, dans mon organisation, je vous l'ai dit, cela me prend les trois quarts de mon temps. J'ai bien sûr un directeur, pour le coup qui est salarié, qui est dans mon organisation au même titre que j'ai un chef de rayon. Après, en cascade il a toute son organisation. Mais le terme de directeur ne correspond pas véritablement. On est plutôt actionnaire, propriétaire, donc, et c'est important là je vais aller sur votre deuxième partie de question, non pas propriétaire des murs, mais propriétaire du fonds de commerce de la société d'exploitation.

Sur les murs, le choix a été fait il y a de cela presque 50 ans – c'est ce qui a fait la différence aussi de point de vue entre les deux groupes que vous connaissez – d'avoir une logique, d'avoir un amont qui soit fort. Chez Intermarché, la plupart des adhérents ne détiennent pas l'immobilier. C'est un choix politique. Nous avons une foncière qui détient les actifs que sont essentiellement les points de vente, mais également les outils logistiques, et notre outil de production. Cette foncière est aux mains dans l'actionnariat de la holding, la fameuse société Les Mousquetaires, et les adhérents peuvent aussi à titre personnel investir dans cette foncière. Mais ils ne sont aucunement propriétaires de leur immobilier. Quand cela arrive, c'est un peu l'exception, et on aime à dire que c'est à peu près 30 % des Intermarché qui sont détenus par des personnes physiques et non pas la foncière du groupement.

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La société d'exploitation est amenée à payer des charges ou le loyer à...

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Thierry Cotillard, président d'Intermarché et de Netto

J'imagine, je me mets à votre place, la question que vous vous posez. Nous ne sommes pas dans un écosystème très large. L'adhérent à Intermarché quand il rentre dans notre groupement, il doit vivre de son exploitation. C'est pour cela que nous avons un système très particulier. Je rappelle aux adhérents, je leur dis : « nous avons l'obligation de servir un positionnement prix, de manière à rester compétitifs, mais aussi une marge qui permette de payer sa structure de charges puisque son seul écosystème est l'exploitation du point de vente ».

Pour certains, quand c'est une création, nous avons la possibilité aujourd'hui, quand par exemple nous allons ouvrir un point de vente qui n'existe pas, nous avons ouvert la règle, nous avons vu que beaucoup de gens qui rentraient dans le système souhaitaient aussi capitaliser sur le long terme. Notre foncière, elle a un niveau d'actifs suffisant. Toutes les créations, les transferts agrandissements aussi. Par exemple, vous êtes en province, vous avez à un endroit un Intermarché, nous allons le transférer à un autre rond-point. Nous autorisons aujourd'hui l'adhérent à être propriétaire d'immobilier. Cela fait que là où nous avions les 10 %, nous sommes plutôt aujourd'hui à 30 %, et la tendance serait – notre Président du groupe n'est pas là, mais il vous le confirmerait – la tendance est à ouvrir, et à terme probablement céder lorsque c'est possible, l'immobilier aux adhérents. Pourquoi ? Simplement parce que nous sommes face à des concurrents qui, lorsqu'ils sont indépendants, détiennent l'immobilier. Ils ont un écosystème plus large, et ils ont probablement un raisonnement de rentabilité immobilière SCI foncière, plus SA d'exploitation. Cela peut être une tendance sur laquelle nous allons nous orienter.

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Pour moi, les centralisés ne possèdent plus leurs magasins, mais quand vous dites les concurrents, de qui s'agit-il ?

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Thierry Cotillard, président d'Intermarché et de Netto

Nous allons les citer, je pense à Leclerc et à Système U qui n'ont pas une foncière collective et c'est un choix qui leur est propre. On ne va pas se comparer au Carrefour ou Auchan puisqu'on ne parle pas de la même chose. C'est un groupe qui est coté en bourse, qui consolide ses résultats, c'est une tout autre approche.

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J'avais une observation. Michel-Edouard Leclerc s'est exprimé sur le principe des alliances entre enseignes de la grande distribution en concluant : « à quel moment Leclerc et Intermarché sortiront ils du placard ? » Comment faut-il analyser cette sortie, cette diatribe ?

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Thierry Cotillard, président d'Intermarché et de Netto

Je crois que M. Leclerc est invité comme moi à venir à cette commission. Il vous expliquera ce qu'il fallait lire entre les lignes. Je reconnais beaucoup de qualités à mon concurrent, notamment celle d'être très brillant en communication. Je pense que c'était plus un pied de nez aux industriels qui probablement s'inquiétaient des futurs mouvements de concentration en France. Je pense que c'était sur le ton de la boutade, parce qu'aucune discussion, si c'est la question de fond, n'a eu lieu entre nos deux groupements. On se respecte bien évidemment par nos origines, on se respecte par les performances des uns et des autres, mais si la question c'est : y a-t-il une actualité Intermarché Leclerc à se rapprocher et à acheter ensemble, la réponse est non.

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Puisque vous êtes administrateur chez AgeCore, c'est un Conseil d'administration, combien y a-t-il de salariés et quel chiffre d'affaires AgeCore génère-t-il ?

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Thierry Cotillard, président d'Intermarché et de Netto

Claude, tu vas compléter, il y a un Directeur général et je pense qu'il y a cinq ou six salariés. Peut-être dix ?

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Claude Genetay, directeur général d'Intermarché et de Netto

Dix ou quinze, oui.

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Thierry Cotillard, président d'Intermarché et de Netto

Pour moi, il y a une dizaine de salariés.

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Qui génère une activité donc un chiffre d'affaires...

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Claude Genetay, directeur général d'Intermarché et de Netto

Le chiffre d'affaires détaillé, je n'en ai aucune idée. Je connais bien le chiffre pour Intermarché, on pourra en parler tout à l'heure à huis clos. Au global, aucune idée.

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Thierry Cotillard, président d'Intermarché et de Netto

On a un coût de fonctionnement de la structure. C'est un chiffre qui évidemment, m'étant facturé, que je connaîtrai, donc que je pourrai ultérieurement vous communiquer.

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Thierry Cotillard, président d'Intermarché et de Netto

M. Ferrari est Directeur général d'AgeCore. Il a en charge la coordination des pays et l'animation de la structure AgeCore, tout simplement.

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J'essaie de comprendre. Je pense que nous aurons sûrement des chiffres, mais d'après les petits calculs que nous avons faits rapidement avec la Commission, AgeCore, c'est plusieurs centaines de millions d'euros au total. Je ne parle pas d'Intermarché, je parle d'AgeCore. Tout à l'heure nous parlions d'AgeCore. Nous avons fait le cumul du nombre d'employés pour AgeCore. Sachant que logiquement c'est du service, au final c'est du data sharing, donc on récupère de l'information en France qu'on redistribue, on fait des bannières. Vous dites qu'une entreprise avec 10-15 personnes qui fait plusieurs centaines de millions d'euros, c'est quelque chose de logique ? Comment vous expliquez un chiffre d'affaires qui approche plutôt la barre des 500 ? On verra si les avocats, M. de Navacelle qui est avocat aux barreaux de Paris et New York, ou le département, donc le ministère des Affaires étrangères suisse, daignent nous répondre. Peut-être que l'on saura à peu près combien de centaines de millions cela représente, mais vous dites que c'est normal pour 10-15 personnes ?

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Claude Genetay, directeur général d'Intermarché et de Netto

On ne peut pas faire le rapport comme cela, puisqu'il y a l'activité de négociation des équipes AgeCore menée par M. Ferrari. Et puis après, il y a les effets, des effets qui se produisent en France. Ce n'est pas une entité qui est là, elle travaille en coordination, notamment en ce qui concerne les services, avec les équipes d'Intermarché, et surtout ce qu'il faut voir derrière tout cela, c'est la croissance, et une croissance qui est encore une fois largement supérieure au marché. Et c'est cela qu'ils vont chercher là.

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Vous me parlez de croissance. Là on parle de centrales de services. Vous me parlez de négociation.

M. Ferrari, à mon avis, dans ce qu'il a à faire dans sa mission – puisque l'on parle de services – il doit juste négocier avec des entreprises la typologie de services dont elles ont besoin pour pouvoir faire de la croissance. Il n'y a pas une logique de pourcentage de chiffre d'affaires, c'est : « Moi avec ce service-là, tu vas pouvoir faire plus de chiffre ». Il ne négocie rien pour vous. Les centrales d'achats, elles sont en France. Il est juste là pour négocier des services. Je vous pose la question, est-ce que d'après vous, un groupe comme celui-ci, 10 ou 15 personnes, qui fait peut-être entre 300 et 500 millions d'euros de chiffre d'affaires, il n'achète pas, c'est juste du conseil ?

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Cela vous paraît normal. Ce n'est pas une question de la croissance qu'ils ramènent, c'est : « je fournis un service ». Le service fourni, ce n'est que des pages et des tableaux Excel, alors même si cela rapporte 10 % de croissance, cela ne reste qu'un travail. On travaille tous, normalement, huit heures par jour. Les parlementaires, pas vous. Mais vous voyez ce que je veux dire. Cela a un coût. 400 000 euros de l'heure pour une réunion, cela ne vous paraît pas un peu... ?

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En complément, est-ce que vous avez la liste des services qu'AgeCore propose pour Intermarché ? Les fameux services. Qu'est-ce que vous demandez à AgeCore de proposer qui soit si extraordinaire que cela et qui vaille autant d'argent que cela ? Il y a bien une liste de services avec des montants afférents.

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Claude Genetay, directeur général d'Intermarché et de Netto

Est-ce que je suis choqué par les négociations AgeCore ? Non, pas du tout. Les services en tant que tels, ce n'est pas l'objectif du fournisseur. Le fournisseur, il achète des services pour générer de la croissance. Du service pour du service. Imaginez un service qui coûte beaucoup moins cher que ce que vous évoquez là, mais qui ne génère pas de croissance. Ces services-là, pour un fournisseur, en tout cas, tel que je le vivais quand je travaillais dans une multinationale, c'est bien, in fine, d'avoir du business. Il s'avère que ces fournisseurs-là ont enregistré de la croissance. Au regard de la croissance qui a été générée, non, je ne suis pas choqué.

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Juste pour bien comprendre, vous êtes en train de nous expliquer que ce pourcentage de chiffre d'affaires qui est demandé aux industriels n'est pas en fonction de services qui sont donnés, mais d'une croissance qui est générée. Je vous repasserai entre guillemets la bande, mais c'est exactement ce que vous m'expliquez. Cela s'appelle de la marge arrière, et c'est interdit par le droit français.

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Claude Genetay, directeur général d'Intermarché et de Netto

Effectivement, vous pourrez vous repasser la bande, ce n'est pas ce que j'ai dit. J'ai dit quel était l'objectif poursuivi par les fournisseurs derrière le service. Ce n'est pas de réaliser des services pour du service. Le service est un moyen, un levier, si vous préférez, qui leur permet d'atteindre l'objectif de tous les industriels qui, je vous le rappelle, sont dans une guerre acharnée de parts de marché contre leurs concurrents. Ils réclament des services additionnels. On parlait de promotion tout à l'heure, ils viennent tous nous voir en nous demandant des promotions additionnelles.

Pour rebondir sur ce que vous évoquiez tout à l'heure, la liste des services. Il y a différents types de services. Je vais pouvoir vous en parler tout à l'heure plutôt à huis clos puisque c'est un petit peu notre façon de faire, mais il y a des services qui sont réels, et que l'on juge, de notre point de vue, parfaitement proportionnels, particulièrement au regard de la croissance additionnelle qu'ils vont chercher grâce à AgeCore.

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Juste pour revenir sur une question tout à l'heure que je vous avais posé – je sais que nous sommes repartis sur d'autres questions après – quand un groupe me dit : « AgeCore demande environ 0,5 % de dérives, là on est passé à 1% parce qu'on a signé, ou on va signer chez Eurelec ». Est-ce que vous êtes au courant de cela ? Est-ce que vous avez entendu parler de cela ? Oui ou non ?

Je voudrais savoir si depuis que la Commission d'enquête s'est créée – un peu plus peut-être la semaine dernière – vous aviez eu M. Ferrari au téléphone, monsieur le Président ?

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Thierry Cotillard, président d'Intermarché et de Netto

Je réponds à la question. M. Ferrari, oui, m'a appelé, pour savoir si j'étais informé et pour le coup, Frédéric, tu as déjà dû me donner l'information qu'il était convoqué puisque je crois que c'est une information d'ordre public. Je l'ai eu au téléphone. Il me dit : « Mais qu'est-ce qu'il faut que je fasse ? », j'ai dit : « Écoute, c'est ta responsabilité et tu prends tes responsabilités ». Je lui ai simplement expliqué rapidement quel était le sens même de la commission.

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Comment interprétez-vous le refus de M. Ferrari de se rendre ici à cette audition de commission d'enquête ?

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Thierry Cotillard, président d'Intermarché et de Netto

Je ne sais pas, je n'ai pas l'information.

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Moi je vous dis que M. Ferrari nous a écrit, par l'entremise de ses avocats, qu'il ne viendrait pas à l'audition de cette Commission d'enquête. Parce que s'il n'a rien à cacher... Déjà que nous avons des interrogations sur le fait que cette centrale de négociation soit hébergée à Genève, en Suisse, je suis encore plus interrogatif quant au fait que M. Ferrari ne veuille pas venir expliquer son rôle, ce que fait sa centrale, ses équipes, les valeurs qui l'animent.

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Thierry Cotillard, président d'Intermarché et de Netto

(Inaudible, hors micro).

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Juste pour préciser, il a envoyé son avocat Stéphane de Navacelle qui est aux barreaux de Paris et de New York, avec en copie ce que l'on appelle le Département fédéral des affaires étrangères, l'équivalent du Ministère des Affaires étrangères, puisque ce qui l'inquiète c'est de devoir donner des chiffres résultants du résultat de l'entreprise AgeCore en Suisse, alors que nous le convoquions avec le Président pour qu'il nous explique le fonctionnement des négociations. C'est pour cela que nous ne comprenons pas son refus.

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Claude Genetay, directeur général d'Intermarché et de Netto

Ce que je crois comprendre, mais je ne suis pas un spécialiste du droit suisse, c'est qu'il y a une incompatibilité avec les règles du droit civil. Je vous parle vraiment sous réserve, parce que ce n'est pas mon boulot. Et moi je comprends parfaitement le souci de M. Ferrari de s'assurer que s'il vient ici, ce sera en parfaite conformité avec le droit suisse. Encore une fois, sous réserve, je ne suis pas un spécialiste du droit suisse. Si vous me le permettez, monsieur le rapporteur, je voudrais bien commenter les taux plutôt à huis clos, vu que mes concurrents nous écoutent.

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Moi je comprends surtout parfaitement qu'une centrale de ce genre soit hébergée en Suisse, justement pour qu'il y ait une totale dimension hermétique entre les activités de cette centrale et vos activités en France. Imaginons, par exemple, comment l'Autorité de la Concurrence, comment la DGCCRF peut contrôler les activités de cette centrale. Comment contrôle-t-on le fait que l'intégralité des sommes récoltées par AgeCore revienne intégralement dans les magasins Intermarché ? Comment contrôle-t-on cela ? Impossible, et vous le savez très bien, et c'est certainement pour cela que ce type de centrale est hébergé en Suisse. Sinon ce serait en France. Vous êtes patriote, monsieur Cotillard. Est-ce que cela vous est venu à l'esprit, en tant que membre du conseil d'administration de cette centrale, d'évoquer ce sujet et de dire : « Il faut que la centrale internationale dont est membre Intermarché soit hébergée dans un pays de l'Union européenne » ? Est-ce que c'est quelque chose qui vous a traversé l'esprit ou est-ce que c'est plutôt confortable de « faire vos petites affaires » à Genève ?

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Thierry Cotillard, président d'Intermarché et de Netto

Cela m'a traversé l'esprit là quand j'ai préparé la commission, mais très honnêtement, non. Je suis très à l'aise et je vous le redis, parce que je sais que l'intégralité de la ressource revient non pas dans les magasins, mais dans la structure ITM Alimentaire, la centrale. Moi je sais qu'il n'y a aucune évasion, il n'y a pas de sujet d'évasion fiscale.

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Cela revient dans la Centrale internationale à Bruxelles ou ici en France ?

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Thierry Cotillard, président d'Intermarché et de Netto

En France. ITM Intermarché Alimentaire International, c'est le nom de la structure juridique qui est en France. Elle s'appelle « International » parce qu'elle peut avoir des ressources qui viennent notamment d'AgeCore. Moi j'ai la lecture – et je peux vous l'assurer et j'ai prêté serment – que l'intégralité des sommes d'AgeCore sont redescendues dans une ligne qui s'appelle produits AgeCore, et qui sont donc...

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Thierry Cotillard, président d'Intermarché et de Netto

J'en suis sûr, je peux vérifier.

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Je n'arrive pas à comprendre. Vous nous parlez de prix bas, de prix accessibles, et vous avez raison, les prix doivent être accessibles même si ma définition du bon prix, du prix juste, ce n'est pas le prix bas. On pourrait en discuter pendant très longtemps. Moi j'ai l'impression que ces centrales, l'argent qu'elles vous reversent, qui plus est vous ne les maîtrisez pas puisque vous avez délégué cela à quelqu'un qui ne fait même pas partie d'Intermarché, vous n'avez qu'un sixième de cette centrale, donc vous ne le maîtrisez pas. C'est un électron libre ce directeur, vous ne le maîtrisez pas. Il fait ce qu'il veut. J'ai cette sensation-là. Maintenant, vous allez peut-être m'expliquer comment vous faites pour le contrôler. Est-ce que vous êtes au courant des taux qu'il préconise ? Il va falloir m'expliquer. Ou est-ce que vous ne le maîtrisez pas, comme certains ne maîtrisent pas d'autres centrales d'achats ?

Ce qui m'étonne c'est qu'en fait, cet argent-là, vous me parlez de prix bas, mais il ne revient jamais au final au consommateur. Puisque vous me dites que cela arrive dans Intermarché à la maison-mère. Donc cela n'arrive pas au final à Intermarché, cela n'arrive pas au consommateur.

Je vais vous poser une question : est-ce que sans cette négociation internationale d'un groupe à 90 % français, qui peut représenter x % du chiffre d'affaires d'un industriel – je dis bien « x % », c'est plus de 1, voire 2, voire 3 – est-ce que sans ces services aujourd'hui le groupe Intermarché survivrait ?

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Thierry Cotillard, président d'Intermarché et de Netto

Cela redescend pour le consommateur, les sommes ne sont pas isolées, mais il faut que vous compreniez que notre centrale, contrairement à d'autres systèmes qui veulent être très décentralisés, nous avons une structure amont qui va acheter les produits aux industriels et les revendre à nos adhérents. Quand nous les revendons aux adhérents – c'est ce que je vous disais – nous avons la particularité d'assumer un positionnement prix qu'on veut compétitif, et un niveau de marge pour que l'exploitation puisse sortir. Dans le compte d'exploitation d'Intermarché de la structure mère, en fait, entre le moment où j'achète cette bouteille et où je la revends au consommateur, vous avez ce que l'on appelle la contribution. Il y a une partie évidemment qui est gardée pour le point de vente, puisque l'on revend le produit et que l'on garde une partie de marge pour payer la structure amont. Je vous l'ai dit, l'essentiel est évidemment du transport. Il y a aussi de la publicité, il y a les structures de nos collaborateurs, les bases, etc.

Aujourd'hui, le résultat d'ITM Alimentaire International, c'est en gros l'équilibre. Résultat de gestion, vous irez voir. En tout cas, on ne parle pas de 100 millions d'euros. Si vous le voulez précisément, je vous donnerai le chiffre à huis clos, mais on est très proche de l'équilibre. Le seul résultat, nous n'avons pas développé, mais c'est le résultat des exploitations de 1,5 à 2 %. Je crois qu'un concurrent a dit 1,5. On est dans cette fourchette-là, avec des points de vente qui gagnent et d'autres qui perdent.

Quand nous sommes à l'équilibre au niveau de la centrale d'achats, il y a bien sûr dans les ressources que nous disposons, le produit qui vient d'AgeCore. Je ne donnerai pas le montant, mais c'est un montant qui est là. Si vous me l'enlevez, demain, on dit : « On arrête ». Qu'est-ce qui va se passer ? Deux choses : soit j'arrête d'investir dans des éléments de structure, soit je me positionne en prix. C'est inévitable. Ces produits-là reçus me positionnent en prix dans la proportion que je vous donnerai tout à l'heure, et cela touche l'indice de manière tout à fait importante.

Ce que je voudrais souligner – ce n'est pas moi qui l'ai dit – évidemment pour préparer la commission, j'ai regardé un peu les verbatim des différents interlocuteurs, la Commission européenne, je crois, est venue vous dire que c'est plutôt bénéfique, et ça l'est, je peux vous l'assurer par rapport aux consommateurs. Raisonnons par l'inverse : si je me retire, et je suis franco-français, je vous ai vendu les PME, l'agriculture française, et je dis : « J'assume, j'ai cassé mon alliance en France, je sors aussi de l'Europe et je n'aurai pas de centrale européenne ». Je me mets en danger, parce que je perds un avantage qui n'est pas négligeable en termes de compétitivité prix. Si demain nous ne sommes pas à l'abri qu'un concurrent – nous ne sommes pas opéable, vous voyez ce que je veux dire, mais imaginez que ce soit une position de toute la distribution française. On dit : « On sort », plus de centrales européennes. Réellement, on est à la proie quand il y a des résultats qui sont quand même très compliqués pour certains groupes à intégrer, non pas indépendants, mais à intégrer, on sera en écart de compétitivité par rapport aux Néerlandais, aux autres. De toute façon, la Commission européenne, vous l'avez entendue comme moi, ne statuera pas d'arrêter ces centrales. Après, il y a effectivement, qu'est-ce qu'on y fait, jusqu'où on va, etc. Mais en tout cas, penser qu'on puisse en sortir serait irresponsable, parce que cela me crée un écart de compétitivité et un danger. Mes adhérents sont chez Intermarché parce que l'on s'entend bien, mais c'est aussi parce que le modèle leur permet de vivre. Si demain ils ne sont plus passés en prix, ils sont plus chers que Leclerc, que U, que Carrefour, ces gens-là en fin de contrat me disent : « Mais Thierry, tu es gentil, mais je vais peut-être passer à la concurrence » et c'est ce que nous voulons évidemment éviter. Nous voulons exister demain, nous voulons qu'ils soient tous chez Intermarché.

Pour résumer, oui, cette somme est importante pour l'équilibre économique d'Intermarché à date.

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Ce qui est quand même bizarre, c'est que l'on continue encore, mais on ne parle jamais de qualité de service fourni ou quoi que ce soit. Vous nous dites : « ces services-là, cet argent qui ruisselle, nous en avons besoin pour vivre, pour survivre ». Normalement, un service, on fait une marge avant dessus. Sauf que là c'est vital. Pour que ce soit vital, la marge doit être colossale. Je le ressens vraiment comme cela. C'est-à-dire que pour que le groupe soit compétitif, on a besoin d'aller chercher l'argent là où il est.

Un de vos concurrents nous a dit : cette « masse ». Le mot était très important. Cette masse financière. On parle de masse à réintégrer dans le compte de bilan. Vous voyez, quoiqu'il arrive, on ne parle jamais depuis le début de cette audition – presque deux heures – de qualité de service ou d'accompagnement à l'international, pas une seule fois vous m'avez sorti ce mot là, vous comprenez ?

Et sur le sujet AgeCore, par rapport à ce que vous venez de dire, ma question est là. Vous nous dites qu'une partie de ce montant qui ruisselle d'AgeCore va à l'intégration des produits. Je vous fais confiance. J'y crois. Est-ce qu'au final, le montant que vous percevez des 71 entreprises qui sont chez AgeCore, vous le reversez uniquement dans les 71 typologies références de produits de ces industriels ou est-ce que ce que vous percevez d'AgeCore ruisselle sur l'intégralité des référencements ? Parce que là, je me dirais, cela veut dire que les industriels comme vous listez depuis tout à l'heure, qu'ils fassent du shampoing ou des barres chocolatées, j'ai l'impression qu'ils payent aussi pour la MDD et pour les PME.

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Claude Genetay, directeur général d'Intermarché et de Netto

Les produits de ces industriels-là sont incontournables dans nos points de vente. Ils sont vraiment souhaités par nos clients, donc évidemment que cela descend sur ces produits. Sinon, il arriverait une chose qui est simple – pour répondre à votre question – si vous interdisez demain ces centrales internationales, ce sera immédiatement, ce sera clair, ce sera net, une hausse des prix sur les produits concernés. Donc oui, ces investissements-là descendent sur ces produits-là, puisque cela nous permet de faire des prix pour continuer à exister sur ces produits. Demain, si nous sommes décalés sur ces produits-là qui sont, encore une fois, souhaités par les consommateurs... Oui, effectivement, ce serait clair et net.

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Le ruissellement de ce que vous percevez d'ITM International et d'AgeCore revient-il uniquement au prorata de ce qu'ils investissent, tout comme le prorata du montant que vous leur demandez sur le prorata de leurs références, ou est-ce que l'intégralité des sommes AgeCore et ITM International reviennent dans un pot commun qui permet de redistribuer cela sur l'intégralité des produits, de l'intégralité des références que vous achetez chez Intermarché, voire produisez ?

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Claude Genetay, directeur général d'Intermarché et de Netto

Il faudrait que je voie techniquement s'il y a un pot commun ou pas, mais dans la réalité économique, ces sommes-là, ces négociations-là, au travers de services qui nous procurent une rémunération, nous permettent d'être placés en prix sur ces produits-là. Sinon, je ne peux pas lutter contre les demandes de hausses de tarifs. C'est cela qui arrivera. Il y aura impérativement une hausse de tarif.

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Thierry Cotillard, président d'Intermarché et de Netto

J'espère bien répondre à la question. Il y a bien sûr des choses, mais on vous les donnera plutôt à huis clos. Il y a des choses qui font business, la présence d'une innovation dans les six pays, dans tous nos pays Mousquetaires, cela fait du chiffre. Un prospectus, cela fait du chiffre. Par rapport à la somme, parce que là je vais revenir sur le focus, cette somme-là, on la redescend, elle est évidemment le compte de la société X. Elle peut être investie dans les prix pour rester compétitif. Ce que l'on ne mesure pas, c'est l'effet induit. Vous allez peut-être me dire que c'est un peu tiré par les cheveux, mais c'est la réalité, c'est un service que l'on rend à l'industriel que de positionner son produit à un prix accessible. Parce que si je suis « dépositionné » par exemple de 3 ou 4 % par rapport au marché le plus compétitif, le produit ne se vendra pas. Moi pour avoir un magasin, je peux vous assurer qu'il y a une élasticité entre le prix et la demande, et à même produit surtout pour ces multinationales qui ont des produits que l'on appelle psychologiques, qui sont hyper connus. C'est-à-dire que le client est capable de vous dire le prix du Nutella, du Coca, etc. Si nous ne sommes pas positionnés en prix, ils vont aller ailleurs ! Le premier service que nous rendons à l'industriel, c'est de faire des volumes, parce que le prix est intéressant.

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Ce que je veux vous dire, parce que vous ne répondez toujours pas à la question, un industriel qui a autant de références avec un autre industriel, vous lui demandez un pourcentage de son chiffre d'affaires, non pas le nombre de références, non pas est-ce qu'il a fait plus de services ou moins de services – on parle de service. Un service, c'est un document, le data sharing, c'est le même pour tout le monde. La bannière publicitaire, c'est la même pour tout le monde. C'est la même taille de l'écran, c'est tout pareil. Sauf que vous lui demandez un pourcentage de son chiffre d'affaires. Est-ce que par exemple, si demain vous prenez « x % » sur l'industriel n°1, est-ce qu'une partie de cet argent-là, qui au final est pris sur son pourcentage de chiffre d'affaires peut aller sur une promotion ou sur un prix un peu plus bas, d'une PME, d'un produit MDD, ou d'un autre industriel pour que l'on soit encore plus compétitif sur cette industrie ? En gros, est-ce que cette manne financière, cette masse financière est forcément un avantage-prix, c'est-à-dire les références exclusives de l'industriel ou non ?

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Claude Genetay, directeur général d'Intermarché et de Netto

Je réfute vraiment le terme de manne. Quand on regarde les résultats d'Intermarché, je ne vois pas tellement le terme manne. Encore une fois, oui, parce que cela descend sur ces produits-là, parce que cela nous permet d'être compétitifs sur ces produits-là. C'est indispensable. Si nous n'avons pas ce niveau de négociation, ces produits-là verront immédiatement leur prix augmenter. Je vous le confirme, cela nous sert. C'est là qu'il faut être compétitif. Vous avez parlé des produits de PME. Il y a un enjeu de compétitivité qui est beaucoup moins important, parce qu'il y a moins de marketing, parce qu'il y a moins de publicité à la télévision. D'abord parce qu'ils sont variés, ils sont moins psychologiques, donc c'est vraiment sur ces produits-là que nous avons besoin d'être compétitifs, évidemment.

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Je vais la reposer différemment : est-ce que des industriels qui ne font pas partie de ces 71 d'AgeCore peuvent profiter d'un bon prix ? Quand vous envoyez ces prix vers le bas, vu que ce sont vos adhérents qui viennent acheter à la centrale, est-ce que cela fait partie de ce pot commun de dégressivité de prix parce que vous négociez bien, sur les autres ? C'est cela la réalité. Est-ce que quand vous prenez 3 % chez les industriels A, ces services viennent uniquement sur ces 3% ?

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Thierry Cotillard, président d'Intermarché et de Netto

Si votre question c'est « est-ce que cette somme négociée pourrait alimenter une guerre des prix et baisser les prix d'un industriel qui ne serait pas dans le cadre d'AgeCore ? », cela n'est pas possible. Techniquement, cela n'est pas possible puisqu'il y a une descente de prix deux net, trois net, quatre net, cinq net. Ce n'est évidemment pas possible. Ce qui est quand même important de préciser, c'est qu'il ne faut pas avoir l'idée que le taux est fixe. D'un dossier à l'autre, le taux varie et il y a des prestations qui sont différentes. C'est une réalité, et M. Ferrari, si vous l'entendez, va vous le confirmer.

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J'ai levé le doigt il y a un moment en écoutant M. Genetay parce que j'ai l'impression que vous considérez que ces services sont les seuls qui permettent à une entreprise de progresser au niveau de ses ventes. Je pense que dans une entreprise, il peut y avoir des innovations, il peut y avoir de la recherche, il peut y avoir des services qui sont aussi porteurs et qui sont intéressants pour nous au niveau du développement de notre pays. Je voudrais essayer de comprendre comment vous arrivez à différencier ce que vous faites ? – vous et ce que fait l'industriel, parce que je trouve que s'attribuer la totalité du développement d'un produit chez vous, cela me paraît un peu présomptueux.

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Claude Genetay, directeur général d'Intermarché et de Netto

Vous avez parfaitement raison, monsieur le député, si je me suis exprimé ainsi, merci de me reprendre, parce que ce n'est pas du tout le fond de ma pensée. La croissance sur nos catégories est liée à différents facteurs. Nous sommes sur des marchés matures donc le consommateur ne consomme pas plus en volume. Le premier vecteur de croissance est évidemment l'industriel, par son marketing, par ses investissements publicitaires, par l'innovation liée effectivement à sa R&D. Et nous venons contribuer à cela. Notre humble ambition au travers de ces services est d'être accélérateur de croissance, mais vous avez raison, à la base, s'il n'y a pas le travail qui est réalisé par le fournisseur, il n'y en aura pas. C'est bien lui – et encore une fois, merci de me reprendre sur le sujet – qui est à l'initiative de la croissance. Nous sommes là pour accélérer la croissance.

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Avant de passer au huis clos dans quelques minutes, ce qui est surprenant c'est que, monsieur le Président, vous êtes un jeune dirigeant et je suis surpris parce que finalement les centrales de négociation telles que vous les présentez, cela s'apparente plus à un centre de profits, qui a pour objectif d'obtenir le maximum d'argent, quel que soit le produit d'ailleurs, il faut en obtenir, à partir du moment où on a jaugé le résultat ou la capacité à faire du résultat de notre interlocuteur. Vous êtes finalement tous pareils, vous créez des centrales de négociation, vous êtes dans une relation de confrontation, alors que ce qu'expliquait le rapporteur tout à l'heure et ce que nous constatons, c'est qu'on pourrait être en France exemplaires et être dans une relation de collaboration, une relation collaborative. Vous venez de m'expliquer, monsieur le Président : « grâce à nos prix bas, les industriels, les multinationales, ils vont gagner de l'argent, on leur assure du développement ! ». Mais est-ce que ce ne serait pas beaucoup plus pertinent d'être dans une relation collaborative ? À l'heure où on parle de responsabilité sociale de l'entreprise, que ce soit au niveau des centrales nationales ou internationales, être dans une coopération où on essaie de voir, y compris avec une multinationale, ce qu'on peut faire ensemble pour le bien du consommateur, pour le bien de notre pays, pour le bien de l'entreprise, pour le bien de vos entreprises, pour le bien des activités économiques de vos fournisseurs, ce serait quelque chose qui m'apparaît plus responsable.

Je vais terminer puis nous passerons aux huis clos. J'aurais voulu que vous puissiez me dire le salaire moyen d'un de vos collaborateurs qui met en rayon chez Intermarché. Vous avez parlé des valeurs, puis vous avez parlé beaucoup de pouvoir d'achat, donc c'est que vous considérez qu'en France, le pouvoir d'achat n'est pas suffisamment élevé. C'est-à-dire que les salaires ne sont pas suffisamment élevés. Donc je voulais vérifier si chez Intermarché quelqu'un qui a un peu d'expérience, une vingtaine d'années, peut s'acheter des produits qui ne sont pas que des produits au rabais.

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Thierry Cotillard, président d'Intermarché et de Netto

Je vous remercie de me poser la question. Finalement, la question, c'est : « Est-ce qu'on est capable de réinventer la relation industrie commerce ? ».

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Ce sont des jeunes comme vous qui doivent le faire. C'est ce que je pense.

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Thierry Cotillard, président d'Intermarché et de Netto

Quand j'ai préparé la commission, j'avais deux programmes en tête. Je n'ai pas voulu vous en parler, pour ne pas faire le jeune président qui incarne des choses, mais bien évidemment, c'est une des choses que j'ai demandées à Claude Genetay. Je suis effaré. J'ai 45 ans, mais cela fait quand même 20 ans que je suis dans ce métier-là. Il y a un truc qui n'a pas bougé, c'est cette relation industrie commerce.

J'ai dit à Claude et à la personne qui était là avant, j'avais dit : « Essayons d'innover. Pourquoi on ne fait pas un nouveau truc !». Nous avons fait quelque chose d'intéressant qui s'appelle le « Club PME ». Nous avons pris nos dix PME avec lesquelles il y a une relation historique, et nous faisons des choses incroyables, des « trucs dingues » ! Ce sont des boîtes qui sont dans les territoires. Ce sont des gens avec qui, aujourd'hui, nous faisons des appels d'offres communs pour les aider à avoir le plastique moins cher. Nous avons fait des choses extraordinaires et je me suis dit : « Mais le club PME, vous les avez partout, vous les avez chez Carrefour, tout le monde fait cela ». Et j'ai aussi dit : « Pourquoi n'avons-nous pas l'ambition avec les multinationales de bâtir quelque chose ? ». Dans mes mandats aujourd'hui je suis Président d'Intermarché, d'AgeCore, j'ai été Président de l'IFM, c'est l'institut qui rassemble les distributeurs et les industriels. J'étais administrateur et j'en ai pris la présidence, parce que je me suis dit qu'il y avait un truc qui ne tournait pas rond en France. On est peut-être la distribution la moins intelligente avec le monde industriel, puisque l'on casse de la valeur. Fort de cette conviction, j'ai dit : « Ce que nous faisons sur les PME, pourquoi on ne le fait pas sur les multinationales ? » On a créé depuis deux ans, 18 mois, c'est concret, mais deux ans dans l'idée, le club « Open innovation ».L'idée d'Open innovation, c'est de se dire : il y a un tsunami qui arrive, cela s'appelle Amazon. Nous ne savons pas quand, ni à quelle sauce on va se « « faire bouffer », surtout nous les indépendants, donc comment fait-on avec le résultat que l'on fait qui ne donne pas beaucoup de marge de manoeuvre, face à un géant mondial qui a des milliards à investir en R&D – de toute façon la techno, le service, on n'aura pas les moyens – comment on va faire ?

On s'est dit : l'industriel que moi je considère dans la plupart des cas comme un partenaire, c'est comment on peut réfléchir à inventer ce commerce de demain. C'était génial, ils sont venus comme ils auraient fait le grand oral de l'ENA dans un amphi, ils sont venus expliquer qu'ils avaient des moyens en digital. Il avait surtout plein d'idées, plein de projets et nous en avons retenu huit ou neuf et ce ne sont pas des petits, c'est Procter & Gamble, c'est Barilla. On a dit : on fait des use case, on prend des cas concrets d'innovations du comportement du consommateur et on réfléchit ensemble à craquer le modèle. Il y a quatre ou cinq « trucs hyper intéressants ». Je vais vous donner un exemple, je viens de citer Procter & Gamble, on s'est dit : « On est à la menace d'un Amazon qui va livrer directement chez les gens. Anticipons cela et mettons en place l'abonnement ». C'est-à-dire, la jeune maman, une fois qu'elle a fait le choix de marque, elle va garder la même marque et elle va l'accompagner jusqu'à ce qu'elle arrête d'acheter des couches. Nous sommes en train d'écrire un modèle et nous sommes en train de tester avec Procter & Gamble l'abonnement des couches en France. On n'en parle pas, parce qu'on ne veut pas être copié – là c'est perdu pour ce soir – mais on essaie évidemment d'inventer un truc.

Nous avons fait autre chose avec un industriel, cela a été : « On va faire un frigo intelligent, il y aura quelqu'un qui viendra... » Des initiatives comme cela, moi j'en demande et j'en redemande, parce que déjà quand personne ne le fait justement, il n'y a pas de sujet de prix. Le « mec » qui a un coup d'avance sur une innovation « servicielle » ou autre, cela a un vrai intérêt. Je ne peux être que porteur de cela parce que je me dis qu'à 45 ans, si moi je ne le fais pas – avec tout le respect que j'ai évidemment pour tous mes concurrents qui sont très compétents – je me dis que oui, nous avons le droit de réinventer. C'est aujourd'hui sur un petit périmètre. J'ai voulu quitter la PME, parce que justement nous sommes déjà protecteurs du monde PME, je me suis dit : « Il faut qu'on le passe aussi avec les multinationales ». Il n'y a que sept ou huit multinationales. Je rêve d'un monde où l'on puisse élargir à cela. Par contre, je reste dans un monde aussi compétitif avec des acteurs qui sont français. Demain, peut-être internationaux. Et j'ai cette responsabilité vis-à-vis de mes adhérents d'exister demain. J'aimerais bien en faire plus, mais en tout cas, je peux vous assurer que ce que je vous dis est vrai. Vérifiez-le. C'est une réalité.

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Thierry Cotillard, président d'Intermarché et de Netto

Le salaire, il y a une convention collective. La FCD travaille dessus, nous l'appliquons. Un employé libre-service c'est le SMIC, 1400, 1500 euros. Il y a un treizième mois dans la convention collective. C'est très bien ! En fait, ce que font à mon avis pas mal les indépendants, Leclerc le fait très bien et nous aussi, quand la situation économique le permet, il y a un système d'intéressement. Cela commence au niveau managérial total, c'est-à-dire le directeur, les chefs de rayon et les employés, et il y a des primes qui viennent en complément du treizième mois, parce qu'a fortiori en province, le transport, etc. cela coûte. Donc oui, nous avons une politique salariale, nous essayons d'aller au-delà de la convention collective parce que nous sommes indépendants. La première richesse, des adhérents d'Intermarché le disent, Leclerc vous le dira aussi, quand tu as un bon boucher, tu n'as pas intérêt à ce qu'il parte. Nous avons intérêt à mettre un peu plus que la convention pour les garder.

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Une dernière question avant de passer au huis clos. Si la France prenait la décision que tout le monde soit au même niveau et que l'on interdit ces centrales de service au niveau européen, y compris Amazon, y compris une fiscalité différente pour Amazon – parce que tout le monde doit avoir les mêmes règles du jeu – si demain on appliquait cela, nous France parce que nous sommes les premiers industriels de l'agroalimentaire et créateurs de la grande distribution, vous, c'est quelque chose que vous êtes prêts à accepter en tant que Président, de dire : « Oui ces centrales de services, on les abandonne !». C'est quelque chose que vous êtes prêts à risquer ?

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Thierry Cotillard, président d'Intermarché et de Netto

La réponse est importante parce que je sais que ce que nous allons dire peut avoir une action concrète. On a souvent dit que les GAFA, c'était un danger. Vous venez de voter la taxe GAFA. Nous ne pouvons être que satisfaits, puisque c'était un facteur de discrimination compétitive. Merci pour cela.

Sur cette question-là, ce qui importe, c'est l'écart de compétitivité qui ne doit pas exister entre les acteurs. C'est ma réponse. Entre français, mais pas que. Il faut se préparer aussi à ce que la distribution française soit une proie aux distributeurs internationaux. Cette règle devrait être équitable pour préserver notre capitalisme français.

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Pour vous, bien sûr qu'un étranger qui arrive sur le territoire s'il négocie des prestations de service au niveau européen, c'est quelque chose que vous seriez prêts à accepter sur le fait que toute personne qui vient sur le territoire français où vous et l'intégralité du monde de la grande distribution française n'avez pas le droit d'appliquer des marges comme cela ou des prestations de service au niveau européen, vous êtes prêts à signer en bas de la page ?

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Thierry Cotillard, président d'Intermarché et de Netto

Je vous le redis, je suis prêt, si c'est la règle qui s'applique à tous. J'aurais la frustration par rapport à certains d'avoir 540 points de vente à l'étranger, 3 milliards, et de me dire que j'ai quelque chose à leur vendre, mais ce n'est que propre à Intermarché. L'important c'est que la règle soit la même pour tout le monde.

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Claude Genetay, directeur général d'Intermarché et de Netto

Si cela pouvait s'assortir d'outils qui permettraient la modération tarifaire de ces dites 71 multinationales – parce qu'il y a réellement une question de pouvoir d'achat derrière. Encore une fois, moi je ne pense pas que le pouvoir d'achat des Français pourrait « se taper » 14 % de plus en trois ans ! Je pense qu'effectivement s'il y avait à la fois cela pour limiter l'impact sur le pouvoir d'achat et puis ce que vous venez de dire, la situation serait idéale pour tout le monde.

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On va passer au huis clos, mais moi ce qui me rassure dans ce que vous me dites, c'est qu'effectivement le modèle de la grande distribution est à protéger de la part de ces industriels qui sont peut-être aussi leaders sur le marché. Ce qui me rassure, c'est ce que ces centrales de service européennes ne servent à rien puisque l'on peut s'en passer. Vous pouvez passer au huis clos.

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On savait jusqu'à présent que nous avions les meilleurs agriculteurs du monde en France. Cette commission d'enquête a révélé ou a confirmé que nous avions aussi de très belles PME et de très belles entreprises de taille intermédiaire. Il y a aussi de très grands groupes internationaux. Quid du gigantisme financier ? Parce que c'est un petit peu cela que vous dénoncez. Vous êtes patron de grande distribution, vous êtes membre de centrale internationale et en quelque sorte, vous avez pointé, tout au long de cette commission d'enquête, les multinationales. Le mot a été employé, et je crois qu'il n'a jamais été autant employé dans cette commission que ce soir. C'est une façon de dénoncer le gigantisme financier. Moi, je dirais que vous avez une responsabilité dans cette affaire. Moi je serai heureux le jour où ces centrales, tant qu'elles existent, auront leur siège dans l'Union européenne, si possible en France, ce serait bien. C'est un sujet. Et puis surtout faire évoluer les négociations commerciales, les relations commerciales pour qu'elles soient beaucoup plus collaboratives. Je pense que c'est de votre responsabilité. Vraisemblablement, on ne pourra pas laisser impunément poursuivre l'activité de ce type de centrales qui s'apparentent plus à des centres de profit qu'à des centrales de négociation. Parce que finalement ce dont m'avez convaincu ce soir, c'est que ces centrales servent à capter l'argent, mais on parle surtout peu de services et encore moins des produits concernés par les membres de ces dites centrales. Nous allons maintenant passer au huis clos.

La séance se poursuit à huis clos et s'achève à vingt-deux heures quinze.

Membres présents ou excusés

Réunion du lundi 8 juillet 2019 à 19 h 30

Présents. – M. Thierry Benoit, M. Grégory Besson-Moreau, Mme Cendra Motin, M. Hervé Pellois

Excusé. – M. Arnaud Viala