Office parlementaire d'évaluation des choix scientifiques et technologiques

Réunion du jeudi 14 mai 2020 à 9h30

Résumé de la réunion

Les mots clés de cette réunion

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  • covid
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  • phénomène
  • pollution
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  • épidémie

La réunion

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Office parlementaire d'évaluation des choix scientifiques et technologiques

Jeudi 14 mai 2020

La visioconférence est ouverte à 9 h 45.

Veille sur l'épidémie de Covid-19 : point de situation et examen d'une note sur pollution de l'air et Covid-19

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Gérard Longuet, sénateur, président de l'Office

. – Nous poursuivons notre veille sur les conséquences de l'épidémie actuelle en entendant ce matin la présentation par Jean-Luc Fugit d'une note relatiev aux liens entre la pollution de l'air et le Covid‑19.

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. – Monsieur le président, Monsieur le premier vice-président, mes chers collègues, il y a deux semaines, vous m'avez confié le soin d'évaluer les interactions entre la pollution de l'air, les gaz à effet de serre et la crise sanitaire liée au Covid‑19. Je vais vous présenter une photographie de l'état des connaissances sur ces interactions, dans le but de fournir des éléments d'information fiables à la représentation nationale et, au-delà, au grand public. En fin de note est présentée la liste exhaustive des personnes et organismes entendus.

Compte tenu de l'ampleur du sujet, nous avons fait le choix d'une présentation en deux parties, consacrées d'une part à l'impact du confinement sur la pollution de l'air et les gaz à effet de serre, d'autre part à la pollution de l'air en tant que facteur aggravant de l'épidémie de Covid‑19.

La pollution de l'air est suivie par l'intermédiaire de plusieurs polluants que sont les oxydes d'azote et les particules fines ainsi que le monoxyde de carbone (CO) et l'ammoniaque (NH3). Nous ne parlerons pas nécessairement d'ozone, car le printemps n'est pas une saison suffisamment chaude pour s'y prêter, en dépit de températures plutôt élevées en avril. L'objectif est également d'observer les gaz à effet de serre tels que le dioxyde de carbone (CO2) et le méthane (CH4), qui ont un impact climatique avéré mais pas d'impact sanitaire. Je pourrai vous apporter des précisions sur ces sujets si vous le souhaitez, puisque je suis aussi président du Conseil national de l'air.

Le confinement a débuté, en France, le 17 mars à 12 heures. Il a créé une situation inédite et a eu des effets quantifiables sur les activités anthropiques les plus polluantes. D'après les premières estimations, le trafic routier a diminué de 60 à 80 %, en fonction du moment de la journée, et le trafic aérien de 90 %, alors que le chauffage a été utilisé à 15‑20 % de plus que la moyenne avant le confinement, en raison d'une deuxième quinzaine du mois de mars relativement fraîche, avec des gelées matinales dans certaines régions. Le confinement a donc renforcé l'utilisation du chauffage individuel. Cette situation générale a eu une incidence sur la qualité de l'air, à différentes échelles, dans le monde, en Europe ou en France.

Pour suivre les indicateurs de pollution, des moyens complémentaires sont utilisés : mesures satellitaires, modélisation (par des organismes tels que l'Ineris en France), ou mesures au sol. Ces moyens ont permis de caractériser les effets de la baisse du trafic sur les gaz à effet de serre d'une part, et les polluants d'origine multiple d'autre part. Les particules fines, par exemple, ont des origines diverses : les transports, mais également l'industrie, le secteur résidentiel et les activités agricoles.

En ce qui concerne les gaz à effet de serre, la dynamique observée du fait des deux mois de confinement provient essentiellement de travaux de modélisation. Nous rencontrons des difficultés à évaluer les concentrations car il faut différencier les effets liés à l'activité anthropique du CO2 présent de manière naturelle. De plus, les flux de CO2 peuvent varier au cours de l'année, en fonction notamment de l'activité photosynthétique de la végétation. Les résultats doivent donc être contextualisés, mais il apparaît que la baisse moyenne estimée des émissions de CO2 s'élève à 5 % en Europe et 7 % pour la France. Il faut apprécier cette estimation à l'aune des limitations drastiques d'activité associées au confinement et des objectifs de réduction des émissions de gaz à effet de serre auxquels la France a souscrit. Nous observons donc une baisse de 5 à 7 % dans une période marquée par une forte réduction de l'activité, alors même que le respect de l'Accord de Paris supposerait, pour atteindre la neutralité carbone d'ici 2050, de réduire les émissions de CO2 en France de 3 % par an d'ici 2025.

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Gérard Longuet, sénateur, président de l'Office

. – À quelle période cette diminution de 5 à 7 % correspond‑elle ?

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. – Elle est appréciée depuis le début de l'année, et donc en tenant compte du confinement, par rapport à 2019.

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Gérard Longuet, sénateur, président de l'Office

. – Il s'agit donc du premier trimestre.

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. – Globalement, oui. Le taux de diminution est fonction des pays. Il s'agit par ailleurs de tendances. Je rappelle que dans la note scientifique que j'avais élaborée et que l'Office avait adoptée à l'automne 2019 sur « les satellites et leurs applications », le sujet du CO2 était évoqué. En effet, nous ne disposons pas aujourd'hui de mesures satellitaires fiables permettant de suivre les flux de CO2 de manière performante. Fin 2021, nous devrions disposer, dans le cadre du projet Microcarb , de moyens permettant de réaliser de telles mesures de flux de CO2 et de distinguer ainsi entre les émissions anthropiques et les émissions biogéniques de CO2 ; ceci permettra de vérifier si les engagements pris par un pays sont tenus.

Le projet Merlin, quant à lui, permettra le suivi du méthane, émis par les bovins mais aussi par des activités humaines. La contribution de ce gaz à l'effet de serre n'est pas négligeable, et nous avons donc besoin de satellites permettant d'en mesurer les concentrations. Ce projet devrait être prêt pour un lancement fin 2021.

S'agissant des polluants (dioxyde d'azote, particules fines, monoxyde de carbone), la diminution des activités les plus polluantes telles que le trafic routier et le trafic aérien a eu un impact mesurable sur les concentrations atmosphériques en oxydes d'azote et en monoxyde de carbone. Je rappelle que celui‑ci n'a pas d'impact sur la santé dès lors que l'on n'est pas en milieu confiné. L'intoxication au monoxyde de carbone s'explique par le fait que celui‑ci prend la place du dioxygène sur l'hémoglobine, qui ne peut donc plus jouer son rôle de transporteur d'oxygène. En revanche, en air extérieur, un risque sanitaire en raison du monoxyde de carbone est quasiment impossible. Le monoxyde de carbone apparaît dans des phénomènes de combustion incomplète et contribue à former du CO2, donc à alimenter l'effet de serre, mais aussi l'ozone de la troposphère, qui est agressif. Les émissions de monoxyde de carbone ont connu une diminution de 50 % en Chine sur la période observée, ce n'est pas surprenant, puisque le charbon y est très utilisé en temps normal. En Italie du Nord ou aux États-Unis, les diminutions sont moindres et n'atteignent que 10 à 20 %. Pour les oxydes d'azote, qui constituent le polluant principal du trafic routier à énergies fossiles, une diminution moyenne de 30 % a été observée en Europe et une diminution de 50 % dans les 100 plus grandes villes françaises. En région parisienne, la diminution a été de 30 à 40 %.

Concernant les particules fines, il ne fallait pas s'attendre à une diminution importante des émissions. Nous avons tendance à penser qu'elles sont associées au trafic routier. En réalité, 20 % seulement sont émises par le trafic routier, et 80 % par d'autres sources, naturelles ou anthropiques : chauffage résidentiel non performant, épandages agricoles, brûlage de déchets verts, etc. La baisse de certaines activités a, en l'occurrence, suffi pour observer une diminution significative de ces particules. En revanche, un pic de pollution a été observé dans la région Hauts‑de‑France, avec des valeurs assez élevées. Ce pic était lié à des poussières telluriques venues d'Europe de l'Est, au début des épandages agricoles printaniers. Si un tel pic était survenu en juillet ou novembre, sa teneur en particules aurait été moins élevée, mais il y aurait eu davantage d'ozone. En fonction du polluant et de la saison, l'impact n'est pas le même. Tous les polluants, en effet, n'ont pas le même comportement tout au long de l'année.

L'ammoniac est un précurseur des particules fines, fortement lié à la pratique des épandages agricoles. Il réagit avec les oxydes d'azote, qui sont principalement émis par l'activité routière. En conséquence, des particules se sont formées. Il n'a pas été observé de chute importante des émissions de particules fines issues d'ammoniac.

Certains acteurs du suivi de ces pollutions ont fait part d'un autre aspect positif du confinement : la baisse du trafic routier et d'une partie de l'activité économique a permis de mieux caractériser et quantifier les autres sources de pollution aux particules. En particulier, le Latmos a indiqué avoir pu mieux caractériser certaines spécificités régionales, notamment en Île‑de‑France.

En conclusion de cette première partie, si le confinement a eu des effets quantifiables sur la qualité de l'air, la réponse diffère en fonction du polluant considéré, des phénomènes météorologiques et du moment. Il est donc nécessaire d'expliquer clairement les phénomènes observés et de poursuivre les recherches et le suivi observationnel. Il sera intéressant d'étudier les impacts du déconfinement progressif sur le plus long terme, notamment sur le secteur aérien, dont la reprise sera probablement progressive et très lente.

La seconde partie de la note porte sur l'impact de la pollution de l'air sur la résistance au virus et sur la propagation du virus. Les articles de presse ont montré une certaine confusion.

Le premier sujet consiste à savoir si la pollution de l'air favorise ou non la propagation du virus. La note rappelle que le mode de propagation du virus est plutôt interhumain, de proximité, et qu'il repose sur les gouttelettes émises par les personnes contaminées et inhalées, directement ou non, par les personnes saines, d'où l'importance des gestes barrière et de la désinfection. Il ne semble pas que les polluants de l'air puissent jouer un rôle dans la propagation du virus, mais une étude italienne a mis en évidence une relation possible entre le niveau de pollution aux particules fines et la progression du nombre de cas de Covid‑19. L'idée que les particules fines soient un vecteur facilitant le transport du virus n'est cependant pas retenue à ce stade par les experts, faute d'éléments suffisamment probants. L'étude italienne établit un lien entre les deux variables que sont la concentration en particules fines et les nouveaux cas de Covid, mais une corrélation n'est pas une causalité. On peut notamment remarquer que les régions les plus polluées sont aussi les plus peuplées. La densité de population pourrait sans doute expliquer la dynamique de propagation du virus en Italie du Nord. Rien n'est donc démontré à ce jour en matière de transport du virus par les particules. La question de la viabilité du virus sur les particules n'est d'ailleurs pas tranchée. Des doutes persistent et des études sont nécessaires sur ce sujet.

Le deuxième sujet consiste à savoir si la pollution de l'air aggrave l'épidémie en rendant le Covid‑19 plus mortel pour les personnes atteintes. Cette question mérite d'être posée, en raison des effets sanitaires d'ores et déjà bien connus de la pollution de l'air. La France doit en effet déplorer 48 000 morts par an dues à la pollution de l'air, il y en a 500 000 en Europe, et l'impact financier peut être évalué à plusieurs dizaines de milliards d'euros, comme en atteste un rapport du Sénat de 2015. Les pics de pollution sont des déclencheurs de problèmes sanitaires : irritation de la sphère ORL, aggravation des maladies respiratoires chroniques, etc. L'exposition prolongée à des polluants atmosphériques est aussi la cause de multiples pathologies, comme l'asthme, les accidents vasculaires ou la capacité de l'organisme à se défendre. Santé publique France suit ces sujets. Une étude chinoise avait établi que, lors de l'épidémie de SARS de 2002‑2003, le risque de décès était fortement augmenté dans les régions connaissant un niveau élevé de pollution. Pour le Covid‑19, il convient de se poser deux questions : d'une part, l'exposition à une pollution atmosphérique immédiate forte aggrave‑t‑elle la crise, augmente‑t‑elle la mortalité et entraîne-t-elle un pic d'épidémie ? D'autre part, l'exposition chronique (la pollution habituelle à laquelle beaucoup d'entre nous sommes soumis) augmente‑t‑elle l'impact du Covid‑19 pour les personnes malades ? Les travaux conduits offrent des débuts de réponse.

L'effet d'une exposition de court terme aux polluants sur la mortalité par le Covid‑19 est assez peu documenté. Une étude chinoise en cours de publication laisse à penser qu'il existe un lien positif, mais certains biais devraient être éliminés, notamment l'exposition à long terme. Nous avons donc besoin de travaux complémentaires en la matière, ainsi que d'une grande rigueur scientifique. Je suis d'ailleurs préoccupé par les nombreuses publications scientifiques qui ont été rendues publiques sans être revues par les pairs.

Le rôle de l'exposition chronique, de longue durée, commence à être mis en évidence. Une étude assez complète, publiée par des chercheurs de Harvard, tend à montrer qu'une variation même assez faible du niveau d'exposition chronique aux particules très fines entraîne une hausse de 8 % de la mortalité par le Covid‑19. La méthodologie choisie pour cette étude tend à neutraliser les autres paramètres pour atteindre un résultat fiable. Une étude chinoise conclut elle aussi qu'un niveau plus élevé de particules fines entraîne plus de mortalité par le Covid‑19. D'autres études concluent que le dioxyde d'azote serait responsable, dans des proportions encore plus importantes, d'un excès de mortalité par le Covid‑19. Notre note cite une étude allemande, une étude chinoise et une étude récente de l'Université de Cambridge. Les premiers résultats de ces études laissent donc à penser que les polluants atmosphériques ont un effet délétère sur les patients atteints de Covid‑19.

Toutes ces études doivent cependant être appréhendées avec prudence, en ce qu'elles n'ont pas fait l'objet d'une revue par les pairs. Nous disposons néanmoins d'une masse importante d'informations sanitaires environnementales qui devraient permettre d'affiner ces analyses dans les mois et les années à venir. En fin d'année, l'Office pourrait analyser à nouveau ces éléments. En connaissant mieux l'impact des polluants atmosphériques en période de crise sanitaire, les autorités pourront ajuster l'arsenal des réponses à la crise et élaborer des stratégies de confinement différentes en fonction du niveau et des caractéristiques de la pollution atmosphérique dans différents territoires. Dans cette optique, et conformément à l'orientation prise depuis plusieurs années autour des questions de santé environnementale, il conviendra probablement d'assurer une meilleure interconnexion entre les systèmes d'information sur les questions de qualité d'air et ceux sur les données de santé.

En conclusion, ces premières études ont permis de mettre en évidence des interactions entre la pollution de l'air, les gaz à effet de serre et la crise sanitaire liée à l'épidémie de Covid‑19. Ces informations restent cependant partielles, et sont donc probablement incomplètes. Le travail doit dès lors être poursuivi, amplifié et comparé. Les travaux de recherche devraient être revus par les pairs. Le ministère de l'Enseignement supérieur, de la Recherche et de l'Innovation, doit aider les instituts et organismes de recherche à poursuivre leurs travaux. En 2003, plus de six mois après l'épisode caniculaire, il a été démontré qu'une proportion non négligeable des décès enregistrés au cours de l'été n'étaient pas liés à la chaleur mais à l'ozone. Les fortes températures avaient fait augmenter la concentration en ozone à des niveaux extrêmement élevés entre le 3 et le 14 août 2003. Dans certaines villes, 70 à 75 % des décès étaient liés à l'impact direct de l'ozone, substance très agressive pour l'organisme, qui réduit la taille des vaisseaux sanguins et perturbe fortement le système respiratoire.

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Gérard Longuet, sénateur, président de l'Office

. – Je vous remercie pour cette contribution importante qui, j'en suis persuadé, stimulera le débat, avec une tonalité à la fois apaisée, profonde et rigoureuse, qui ne ferme aucune piste.

Je souhaiterais avoir quelques précisions sur le système de détection par satellite qui pourrait permettre de distinguer le CO2 anthropique et le CO2 naturel. Par ailleurs, la décroissance absolue que nous avons vécue ces deux derniers mois n'est pas une solution pour atteindre la neutralité carbone. Il faudrait donc plutôt envisager des politiques plus actives d'investissement et d'équipement dans cette perspective. Concernant la propagation du virus, votre exemple sur l'ozone terrestre est très intéressant. Qu'en est‑il des fumeurs, dont il a été dit qu'ils étaient plus ou moins protégés ?

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. – Je ne me prononcerai pas sur le sujet des fumeurs. Un débat scientifique a été ouvert sur un éventuel effet protecteur de la nicotine à l'égard du virus. Mais il ne faut pas laisser penser que les fumeurs sont moins impactés par l'épidémie que les non-fumeurs.

Concernant la mesure du CO2, les acteurs du secteur spatial affirment que l'avenir de la Terre se joue depuis l'espace. Effectivement, les mesures effectuées depuis l'espace sont nécessaires pour améliorer nos connaissances, notamment dans le milieu agricole. Les agriculteurs savent d'ailleurs très bien s'adapter. Nous devons pouvoir mesurer les flux de CO2 sur une année complète, pour réaliser un solde intégrant toutes les saisons. L'objectif de neutralité carbone en 2050 suppose de pouvoir fixer, par les forêts et l'agriculture, la quantité totale de CO2 émise. Si la totalité du CO2 émis est absorbée par l'agriculture et nos forêts, un équilibre s'établit. Aujourd'hui, le déséquilibre existe. Il faut donc à la fois favoriser une agriculture et un entretien des forêts qui permettent de fixer le CO2 et, certainement, produire moins de ce gaz. Il existe plus qu'une nuance entre la décroissance et la sobriété. La sobriété, par exemple, peut s'exprimer par l'arrêt des éclairages des commerces de ville la nuit, qui entraînerait une substantielle économie d'énergie.

Le secteur spatial peut contribuer à un suivi plus rigoureux des émissions de CO2. Nous n'utilisons que des modèles. S'il est souhaitable de fixer des objectifs d'émission de CO2, encore faut-il être en mesure de vérifier s'ils sont atteints. Pour ceci, il faut être capable de mesurer les flux, c'est-à-dire les déplacements de CO2 émis à un temps donné, dans une zone industrielle dense, une zone de production énergétique ou de transports routiers intenses, etc. Aujourd'hui, nous ne pouvons effectuer que des estimations. Les outils de mesure à venir seront donc extrêmement intéressants. Il en va de même pour le suivi des émissions de CH4, puisque la fonte du permafrost augmentera sensiblement ces émissions. Le CH4 a un pouvoir d'effet de serre qui est bien plus important que celui du CO2.

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. – Merci beaucoup pour ce travail. Vous avez insisté sur la difficulté d'évaluer l'effet de la pollution sur l'épidémie, car il s'accompagne toujours d'autres facteurs : activité économique, densité de population, etc. Il est très délicat de tirer une causalité d'une corrélation. De plus, il existe de nombreux modes de mesure de la pollution, comme vous l'avez indiqué. Ce travail d'analyse peut demander un temps important, qui va au‑delà de la médiatisation actuelle des études scientifiques. Nous participons aussi au fait que des publications qui ne sont pas encore revues par les pairs se trouvent placées sur le devant de la scène. Quelle est selon vous la bonne attitude à adopter face à cette situation ?

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. – Nous devrions laisser du temps à la pédagogie. Les phénomènes de pollution sont entremêlés à des problèmes de météorologie, de réactivité chimique entre les composants de la troposphère, etc. Le CO2 n'est pas émis que par nos activités : il fait l'objet d'un cycle de formation-destruction qui se trouve perturbé par l'intervention d'oxydes d'azote, qui sont aux deux‑tiers formés par les activités humaines, et par celle d'hydrocarbures dont l'origine est à la fois végétale et anthropique. Il est nécessaire de prendre le temps d'expliquer ces éléments.

À titre d'exemple, j'ai été agréablement surpris d'entendre rappeler sur France Info, mardi soir, que le brûlage de 50 kg de déchets verts émet autant de particules fines qu'un trajet de plusieurs milliers de kilomètres avec un véhicule diesel ou essence. Il est parfois délicat d'aborder ces sujets. Cette thématique a été traitée par la station à la suite de la fermeture de certaines déchetteries et de phénomènes de dépôts sauvages, d'une part, et de brûlage de déchets verts, d'autre part. Ce sujet est sensible. La loi relative à l'économie circulaire l'a traité grâce à l'adoption d'un amendement que j'avais porté.

L'une des difficultés réside dans le fait que, dans le monde actuel, la population souhaiterait une absence totale d'incertitudes. Airparif mesure la pollution sur la région parisienne au quotidien. Sa directrice explique avoir reçu au cours des 15 premiers jours du confinement de très nombreux appels de Franciliens qui s'étonnaient de l'absence de baisse de la pollution par les particules fines. Il a fallu leur expliquer que les particules résultent de plusieurs phénomènes : épandages agricoles, transports, etc. Pour beaucoup de personnes, la pollution aux particules se résume au trafic de voitures, alors que seuls 20 % des émissions sont liés à celui‑ci. En l'occurrence, le confinement est intervenu dans une période particulière au regard des épandages agricoles, et le niveau des particules n'a dès lors pas subi d'impact majeur de son fait. Ces sujets sont complexes, et il faudrait prendre le temps de les expliquer, pour faire comprendre les messages. Je regrette que les notions de pollution ne soient pas davantage enseignées en faculté de médecine.

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. – Cette intervention restera, dans la mémoire collective, une démonstration de la distinction nécessaire entre la pollution aux particules fines et le trafic automobile.

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. – Quand j'ai été rapporteur du projet de loi sur les mobilités à l'Assemblée nationale, j'ai souhaité que les zones à faibles émissions que voulait mettre en place le gouvernement soient nommées « zones à faibles émissions de mobilité ». En effet, j'ai craint que la première appellation laisse à penser que tous les problèmes de pollution seraient résolus par l'installation d'une zone à faibles émissions basée sur les voitures. En réalité, la résolution de ces problèmes suppose d'en traiter d'autres : par exemple, le chauffage au bois non performant est assez important, y compris en région parisienne. Cette nuance que j'ai souhaité inscrire dans la loi était donc un symbole.

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. – Ma question porte sur la deuxième partie de la note. Je m'interroge sur l'absence de référence faite au pollen. S'explique‑t‑elle par le fait que celui‑ci ne s'inscrit pas dans le champ de la pollution de l'air ou par l'absence de travaux en la matière ? Ce sujet reste en lien avec la qualité de l'air, puisque l'on peut suspecter une affinité entre les grains de pollen et le virus, notamment du fait de la taille de ces grains et de la présence de protéines de surface sur leurs parois végétales, qui pourraient interagir avec les protéines du virus.

Puisque nous sommes en pleine période de pollinisation, on peut aussi s'interroger sur les interactions entre le virus et les phénomènes allergiques. Au travers des réactions allergiques, l'inflammation des muqueuses et les symptômes de toux, d'éternuement et de démangeaison des yeux sont de nature à favoriser la contamination par le virus.

J'aurais pu élargir cette question au travail qui est actuellement mené au sein de l'Office sur la pollution par les plastiques, dans le cadre duquel j'ai découvert avec Angèle Préville, co-rapporteure, que la présence de microparticules plastiques dans l'air constitue également un sujet.

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. – Nous n'avons pas recensé de travaux de recherche sur le sujet du pollen en lien avec le Covid‑19. Les études sur les liens entre l'environnement et l'épidémie n'en sont qu'à leur début, puisque celle-ci est encore relativement récente. L'activité des médecins et des scientifiques consiste à s'intéresser aux pollutions qui sont directement le fruit de l'activité humaine. Le sujet du pollen est néanmoins très intéressant, d'autant plus que la période printanière a commencé. Certains problèmes liés à l'ambroisie sont d'ailleurs apparus dans certaines régions. Le sujet doit probablement être davantage abordé du point de vue de la résistance de l'organisme au virus – puisque le pollen contribue à affaiblir le système respiratoire – que du point de vue de la propagation du virus. Le pollen se trouve à l'extérieur de l'organisme ; il serait donc nécessaire qu'une personne éternue sur les grains de pollen, qui seraient ensuite inhalés par une autre personne. Une telle transmission semble peu probable, mais le sujet pourrait néanmoins être évoqué à l'occasion d'échanges avec l'Institut Pasteur. Je pense en outre que les associations de surveillance de la qualité de l'air sont en relation avec les médecins sur ces sujets. Elles ne l'ont cependant pas évoqué d'elles-mêmes lors de nos échanges, parce qu'elles ne le jugeaient probablement pas prioritaire.

Le plastique dans l'air est un sujet moins étudié, à ce stade, que celui des oxydes d'azote ou des autres particules. Il pourra probablement être intégré dans des études plus larges sur les particules.

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Florence Lassarade, sénatrice

. – J'ai été très sensible à cette note. En Nouvelle-Aquitaine, le pollen est partout en cette saison. Il s'agit chaque année d'un problème de santé publique, et il ne semble pas qu'il ait favorisé les infections, puisqu'il y a très peu de cas de Covid‑19. En revanche, lorsqu'il est envisagé de replanter des arbres en ville, il faut être très attentif au choix des essences. De nombreux platanes d'origine américaine ont été plantés en ville et ont déclenché des problèmes de santé qui n'avaient pas été envisagés. Il est donc nécessaire de choisir des espèces peu allergisantes.

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. – Les végétaux, pour se défendre, émettent des particules, des isoprènes, et chez certaines espèces, les émissions sont très fortes – c'est le cas d' eucalyptus globulus. Ces espèces contribuent à former beaucoup d'ozone, notamment dans le bassin méditerranéen. En fonction des essences plantées, il est effectivement possible de favoriser des phénomènes annexes, qui peuvent contribuer un accroissement local de la pollution. Pour les asthmatiques, le sujet est très important. Je suis donc tout à fait d'accord avec le fait que le choix des essences plantées doit être bien pensé.

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Catherine Procaccia, sénatrice

– Je me réjouis de la note et de la discussion de ce matin, qui m'ont beaucoup appris et qui méritent d'être relayées car cela permettrait d'éviter la diffusion de quelques contre-vérités. La note évoque le nombre de morts dus à la pollution chaque année. Peut-il être soustrait du nombre de morts actuellement comptabilisés en relation avec le coronavirus ?

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. – Une étude finlandaise parue la semaine dernière, à laquelle la note ne fait pas référence et qui doit donc être considérée avec prudence, conclut que les mesures de confinement liées au Covid‑19 auraient permis d'éviter 11 000 décès liés à la pollution en Europe, et 1 230 en France. Les décès dits « liés à la pollution » s'inscrivent souvent dans un phénomène d'accélération, c'est‑à‑dire touchent des personnes qui connaissent déjà des faiblesses. Cette accélération s'observe d'ailleurs aussi sur les végétaux : un surplus estival d'ozone les conduit à vieillir plus rapidement et produit des nécroses sur les haricots verts, ainsi qu'une chute du rendement agricole du maïs de 10 à 30 %, etc.

Par ailleurs, la note n'évoque pas la qualité de l'air intérieur, qui est un sujet majeur, puisque, dans les modes de vie occidentaux, un individu passe en moyenne 80 à 90 % de son temps en intérieur. Le confinement n'est pas nécessairement synonyme d'une qualité d'air parfaite, qui dépend de plusieurs paramètres.

Il est donc possible que l'impact sanitaire de la pollution soit moindre en raison d'une baisse globale de la pollution. D'un point de vue médical, les consultations pour pathologies autres que le Covid‑19 ont diminué au cours de la période, ce qui pourrait conduire à des pertes de chance et un phénomène de surmortalité potentielle.

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. – Je souhaiterais une précision concernant la pollution en provenance de l'Europe de l'Est. Cette pollution est-elle liée au fait que la France a appliqué le confinement avant l'Europe de l'Est, ou bien aux incendies qui s'y sont déclarés ?

Par ailleurs, la pollution est un phénomène global qui a des sources multiples, et la population confond la pollution liée à la mobilité et celle issue d'autres sources. Dans le Lot, nous rencontrons par exemple des difficultés avec les méthaniseurs. Lors des épandages, des difficultés respiratoires apparaissent, mais le discours ambiant affirme qu'en l'absence de circulation routière dans nos campagnes, l'air y est sain. Cette contradiction fait donc débat chez les citoyens.

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. – L'air à « pollution zéro », ultra pur, a été mesuré en Laponie. Des lichens et des mousses, très sensibles à la pollution, ne poussent que dans cette contrée. En Europe de l'Est, plusieurs phénomènes se sont combinés : une période de sécheresse, des vents dominants ayant soulevé de la poussière, et l'utilisation de charbon dans certains pays tels que la Pologne. Des remontées d'air importantes se sont produites depuis l'Europe de l'Est, comme il en vient parfois du Sahara. Pour apprécier une situation de pollution, il est nécessaire de tenir compte de tous les paramètres. À Paris, il peut s'agir des particules provenant de l'Est de l'Europe, des particules qui sont le fruit de l'oxyde d'azote émis par les véhicules de la région et se combinent avec les effluves des épandages agricoles, des vents qui favorisent le déplacement, ou de l'absence de vent qui favorise la stagnation et l'accumulation des polluants, etc. L'homme doit faire le maximum pour réduire les sources anthropiques. Nous sommes tous contributeurs.

Les méthaniseurs sont très intéressants pour l'économie locale, puisqu'ils permettent d'utiliser les déchets produits sur place pour en faire du méthane, donc de l'énergie. En revanche, il faut s'assurer de l'absence de fuite de méthane, car ce gaz contribue à fabriquer de l'ozone. C'est la raison pour laquelle, en milieu rural, des taux d'ozone assez élevés peuvent être atteints l'été.

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Stéphane Piednoir, sénateur

. – Merci pour la clarté de cet exposé. Je crains que les chiffres affichés dans la note n'aboutissent à desservir certains objectifs vertueux. Ils montrent en effet qu'après une quasi suppression de l'activité humaine, les effets sont assez minimes sur les émissions de gaz à effet de serre. Je crains que nous n'envoyions ainsi un message mitigé, notamment pour le déploiement des plans de relance pour les véhicules électriques ou la méthanisation.

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. – Des constructeurs automobiles pourraient effectivement utiliser cet argument, considérant que la suppression des véhicules à moteur thermique n'améliorerait pas la qualité de l'air.

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Stéphane Piednoir, sénateur

. – Nous sommes le législateur et nous devons nous poser la question de savoir si notre combat pour abaisser les émissions est prioritaire, ou s'il s'agit avant tout de s'attacher à faire appliquer les règles, par exemple concernant les lumières nocturnes dans les commerces ou le brûlage des végétaux. Peut-être les déchetteries pourraient-elles s'ouvrir aux professionnels, alors qu'aujourd'hui, lourdement taxés, ceux‑ci tendant parfois à brûler les déchets par eux-mêmes.

Nous pourrions également nous pencher sur les conséquences des changements d'habitudes provoqués par l'épidémie. Le développement du télétravail, par exemple, supposera un renforcement des réseaux numériques, la consolidation de data centers, etc. Ces éléments pourraient peser dans l'évaluation globale de la crise actuelle.

Enfin, la note indique que nous ne disposons pas de mesures satellitaires fiables sur le CO2. Mesurons-nous correctement le rapport « bénéfice environnemental / empreinte carbone » associé au déploiement de ces satellites ? En tant que président de l'agglomération d'Angers, j'ai pu apprécier l'ampleur des ressources – moyens humains et matériels – qu'il fallait mobiliser pour permettre ces mesures satellitaires. Il pourrait être utile de s'attacher avant tout au bon sens et au respect des règles.

Pour ce qui concerne les véhicules à énergie fossile, le CO2 n'est pas le problème principal : il n'a pas d'effet sanitaire mais un effet climatique global ; en revanche, les oxydes d'azote sont un sujet sanitaire important. Je suis d'ailleurs très satisfait que les zones à faibles émissions soient définies sur la base des émissions de ces polluants et non sur des critères relatifs au CO2. Pendant des années, la pollution des véhicules a été considérée uniquement à travers l'émission de CO2. Il est vrai que les véhicules qui émettent le moins de CO2 sont généralement ceux qui émettent le moins d'oxydes d'azote. Par ailleurs, l'analyse de l'impact environnemental des véhicules doit prendre en compte l'ensemble du cycle de vie. Nous avons inscrit un certain nombre de dispositions à ce sujet dans la loi Mobilités.

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. – Je propose à l'Office de publier la note, après qu'auront été apportées quelques précisions issues de nos échanges.

Il me semble que cette proposition recueille un consensus. Un grand merci collectif à Jean-Luc Fugit, pour cette présentation.

Je propose à présent de présenter un court résumé des auditions conduites ces derniers jours. Nous avons eu une audition, déjà très commentée dans la presse, de Guillaume Poupard, directeur général de l'Agence nationale de la sécurité des systèmes d'information (ANSSI), sur les questions du traçage algorithmique, confirmant tous les points que nous avions eu l'occasion d'évoquer précédemment et insistant sur la tension entre les grands opérateurs américains (Google et Apple, en tant que fabricants des systèmes d'exploitation des téléphones) et la puissance publique. Guillaume Poupard pointait en particulier le risque de conflit d'intérêts si un opérateur, qui dispose déjà de nombreuses informations sur la santé des individus grâce aux objets connectés (notamment les montres), prend la décision de se lancer dans une activité d'assurance ; cela peut conduire à un risque de distorsion de l'ensemble du système. Guillaume Poupard a également évoqué les tensions entre les promoteurs des différents protocoles : le centralisé (Robert), le décentralisé (DP3T), et un protocole qui voudrait faire une sorte de « synthèse » entre les deux précédents (Désiré), etc. Il a également insisté sur le fait que le code de Robert allait être rendu public, pour une mise en service début juin. Les articles de la presse spécialisée publiés jusqu'à présent mettent en exergue le fait que seules quelques portions limitées de code ont été à ce stade publiées, jugées décevantes.

Plusieurs auditions ont mobilisé des interlocuteurs étrangers, notamment Ali Nouri, président de la Fédération des Scientifiques américains, ainsi qu'un collectif néozélandais réuni autour de Peter Gluckman, fondateur et président du réseau international des conseillers scientifiques de gouvernement (INGSA). D'un continent à l'autre, les approches sont très différentes. Aux États-Unis, le tableau dépeint était assez apocalyptique : un déconfinement sans concertation d'un État à l'autre, des États républicains déconfinant plus rapidement que les États démocrates (ceux‑ci insistant sur la santé, les premiers sur l'économie), des thèses complotistes circulant dans les États républicains, des discours de Donald Trump se traduisant par des sommets de confusion, un système général de santé qui n'est pas prêt déploiement des opérations de traçage, des tests qui peinent à s'organiser, une parole publique très contradictoire, etc. Malgré ce tableau calamiteux, la confiance affichée par les Américains envers leur gouvernement est supérieure à la confiance affichée par les citoyens français envers le leur, ce qui nous en dit davantage sur le pessimisme français que sur les politiques et gouvernements respectifs.

Ali Nouri et les scientifiques néozélandais insistaient également sur le fait que la parole scientifique se fait beaucoup entendre, mais dans un contexte tournant rapidement à la polémique lorsqu'elle ne s'appuie pas sur des personnes déjà identifiées et habituées au débat public. Ces polémiques entraînent une certaine confusion eu égard à la parole scientifique. La science est par ailleurs gênée par une exposition publique excessive, qui suscite des études bâclées, des prises de parole trop rapides, des publications qui se retrouvent sur le devant de la scène sans avoir été revues par les pairs, et une certaine confusion.

Les scientifiques néozélandais insistaient en outre sur le fait que les communications politiques efficaces en ce temps de confusion sont celles qui mettent l'accent sur l'explication et l'empathie. Dans tous les pays, on observe une hausse de l'inquiétude, de la tension et des problèmes de santé mentale. L'OMS a ainsi émis une alerte sur une forme de pandémie mondiale de problèmes de santé mentale. Globalement, les tensions internationales sont en nette augmentation et les institutions internationales sont affaiblies. Malgré cela, une grande partie de la population affiche un vrai désir de discuter de l'avenir, dans une époque où se pose la question de la relance. L'épidémie de Covid‑19 a renforcé les tendances qui structurent les sociétés ; dans les sociétés où la cohésion est bonne, elle s'est retrouvée renforcée ; inversement dans les sociétés fragiles ou fracturées, les divisions ont été aggravées.

En Nouvelle-Zélande, l'essentiel des mesures prises pour lutter contre l'épidémie sont des restrictions imposées aux personnes venant de l'extérieur, et les conséquences majeures sur l'économie concernent le tourisme. Dans ce pays, le dialogue démocratique a été très bien maintenu, avec un système de Parlement télévisé, des communications très régulières et une opposition qui se fait entendre et qui est régulièrement prise en compte par le gouvernement.

Une audition de Santé publique France, qui portait en particulier sur l'organisation du traçage, a montré que le dispositif français de traçage était extrêmement complexe d'un point de vue organisationnel, avec trois niveaux de traçage dans lesquels les acteurs (Santé publique France, les ARS, la CNAM, la médecine de ville, les maires et les préfets) se coordonnent grâce à des systèmes d'information interconnectés. Il nous a été impossible de comprendre exactement combien de personnes étaient impliquées. Nous avons compris qu'un protocole très clair et des règles très précises avaient été élaborés, mais cela ne rassure pas véritablement sur la capacité opérationnelle des ressources humaines et sur la visibilité du processus. Nous devrons être très vigilants sur la ressource qui sera déployée sur le terrain et la capacité de traçage, mais également sur la vitesse de remontée des informations. D'autres auditions ont montré à quel point les remontées et le croisement d'informations médicales et hospitalières pouvaient être complexes et lentes. Or 30 % au moins des contaminations du Covid‑19 résultent de personnes asymptomatiques. Le suivi devra donc être extrêmement réactif, et donner des résultats dans un délai de 24 à 48 heures au maximum. La question s'est posée de savoir si la complexité institutionnelle du montage sera compatible avec l'efficacité souhaitée et si les remontées d'informations seront suffisamment rapides. Nous devrons nous en assurer par d'autres auditions, en particulier de la CNAM et des ARS.

Permalien
Stéphane Piednoir, sénateur

. – Je souhaite vous remercier pour la variété des auditions, qui nous offrent un regard assez complet sur cette épidémie et son traitement.

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. – Pendant toute cette période, l'Office a pu compter sur un groupe important de parlementaires motivés et impliqués sur toutes ces discussions. Nous avons tous été surpris par la variété de sujets que le coronavirus nous a amenés à aborder.

La visioconférence est close à 11 h 30.