Office parlementaire d'évaluation des choix scientifiques et technologiques

Réunion du mercredi 9 décembre 2020 à 11h00

Résumé de la réunion

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La réunion

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Office parlementaire d'évaluation des choix scientifiques et technologiques

Mercredi 9 décembre 2020

La réunion est ouverte à 11 heures.

Audition, ouverte à la presse, du Pr. Elisabeth Bouvet, membre du Collège de la Haute Autorité de santé (HAS) et présidente de la commission technique des vaccinations, et de Mme Michèle Morin-Surroca, cheffe du service « Évaluation économique et santé publique » de la HAS

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. – L'Office parlementaire d'évaluation des choix scientifiques et technologiques (OPECST) a engagé très récemment une étude sur la stratégie vaccinale contre la Covid-19 en vue du débat qui aura lieu le 16 décembre à l'Assemblée nationale et le 17 décembre au Sénat. Il a décidé d'organiser dans ce cadre plusieurs auditions publiques, en visioconférence. La première est celle de la Haute Autorité de santé (HAS), qui a un rôle éminent dans l'élaboration de la stratégie vaccinale.

Sont connectés plusieurs membres de l'Office, au premier chef les quatre rapporteurs désignés pour cette étude : les sénatrices Sonia de La Provôté (Union centriste) et Florence Lassarade (Les Républicains), et les députés Jean-François Eliaou (La République en marche) et Gérard Leseul (Socialiste). Je rappelle qu'il s'agit d'une audition publique, diffusée sur le site Internet de l'Assemblée nationale et à laquelle peuvent donc assister des journalistes, des citoyens, et toute personne désireuse d'en savoir davantage sur la stratégie vaccinale. Toutes ces personnes ont la possibilité de poser des questions sur la plateforme Slido via un lien qui a été rendu public. En temps utile, je me chargerai de relayer ces questions auprès des personnes que nous entendons.

Aujourd'hui, nous auditionnons la Haute Autorité de santé, qui est représentée par le professeur Élisabeth Bouvet, membre du collège et présidente de la commission technique des vaccinations, et par Mme Michèle Morin-Surroca, cheffe du service Évaluation économique et santé publique.

Nous savons à quel point la stratégie vaccinale contre la Covid-19 est un enjeu majeur pour la nation. Les questions et débats qu'elle suscite ne sont pas seulement liés à la science, mais également à la logistique, à la confiance et à la défiance. C'est pour cela que ces auditions se tiennent dans la plus grande transparence possible.

Je donne à présent la parole à Sonia de La Provôté pour engager l'échange entre les rapporteurs et la Haute Autorité de santé.

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Sonia de La Provôté, sénatrice, rapporteure

. – Je vous remercie d'avoir accepté cet échange.

La première question porte sur les objectifs qui ont motivé l'organisation de la stratégie en plusieurs phases, en fonction de l'âge et des risques professionnels. Telle qu'annoncée, cette stratégie peut-elle s'inscrire dans le calendrier prévu ?

Ma deuxième question porte sur les différents types de vaccins qui sont à l'étude et dont certains sont en passe d'arriver sur le marché. J'imagine que vous avez déjà commencé à considérer une adaptation de la stratégie dans le temps, afin de choisir une typologie de vaccin en fonction des populations qui pourraient être vaccinées.

Ma troisième question porte sur ce que serait, pour vous, le scénario idéal en termes de comportement de l'épidémie et de propagation du virus, par exemple une éventuelle saisonnalité similaire à celle que l'on connaît pour la grippe. Sommes-nous déjà dans cette configuration ? Existe-t-il un calendrier idéal de vaccination pour obtenir une immunité collective, sachant que nous vivons un moment de transition, après deux vagues épidémiques, un plateau et la perspective d'une troisième vague, que nous n'espérons pas, mais qui pourrait arriver.

Ma dernière question porte sur les doses disponibles. Quelles sont les doses réellement disponibles pour la première phase de la stratégie qui a été proposée ? Avons-nous de la visibilité sur les doses qui seront disponibles d'ici l'été, par rapport à l'objectif fixé en termes de nombre de personnes à vacciner ?

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Pr. Elisabeth Bouvet, membre du collège de la Haute Autorité de Santé

. – Merci pour votre première série de questions, déjà très complète. Nous ne pouvons pas répondre à tout, parce que nous ne savons pas tout. Il y a un an, le risque n'existait pas et il y a trois mois, il n'y avait pas de vaccin. Il faut bien voir que nous avons travaillé en prenant en compte, au fur et à mesure, les informations disponibles sur l'épidémie, le virus et les potentiels vaccins. Tout cela a abouti à la proposition de stratégie que nous avons publiée la semaine dernière.

Dès le printemps, nous avons commencé à imaginer l'existence d'un vaccin et à définir une stratégie. Il existe deux types de stratégie vaccinale. La première vise à vacciner un nombre suffisamment important de personnes pour ralentir l'épidémie et limiter la transmission du virus. Dans le cas où ce ne serait pas possible, la seconde vise à protéger les personnes les plus vulnérables. Comme vous le savez, depuis le début de l'épidémie, il existe des facteurs de risque de forme grave et de décès : la maladie Covid peut-être extrêmement bénigne et souvent asymptomatique chez les personnes jeunes n'ayant pas de maladie sous-jacente, alors qu'elle touchera préférentiellement les personnes âgées et celles ayant d'autres maladies.

Nous avons donc commencé à réfléchir à ces deux possibilités et à les expliquer dans une note de cadrage publiée au mois de juillet. Il s'agissait soit d'agir sur l'immunité collective, soit d'agir en visant les personnes les plus à risque, l'objectif essentiel étant alors de réduire la morbi-mortalité en stimulant l'immunité individuelle des personnes vaccinées.

Pour raisonner en termes d'immunité collective, il faut avoir des données et la certitude que les vaccins soient actifs sur la transmission du virus. Pour l'instant, ce n'est pas le cas avec les vaccins disponibles actuellement. Nous avions réfléchi sur plusieurs scenarii : le virus continuait de circuler dans tout le pays de façon active ; il n'y avait que des foyers épidémiques assez localisés ; il n'y avait plus de circulation du virus ou celle-ci était très modérée, etc. Nous avons réfléchi à ce que nous pourrions proposer en fonction de chaque scénario. Assez rapidement, au sortir de l'été, il est apparu que l'hypothèse d'une circulation à nouveau intense sur tout le territoire national se vérifiait et qu'il fallait donc raisonner sur cette base. Compte tenu de ce que nous savions des futurs vaccins, la proposition dès lors la plus logique était de cibler les personnes les plus à risque vis-à-vis de l'infection, c'est-à-dire les personnes âgées – nous pourrons préciser à partir de quel âge il est considéré qu'il y a un surrisque –, ainsi que les personnes atteintes de comorbidités.

Cela nous a conduits à faire pratiquer des travaux très importants de modélisation. Il fallait étudier de façon extrêmement précise les facteurs de risque, à partir des données d'hospitalisations et de décès. L'âge est apparu comme le facteur de risque principal, puisque l'incidence des formes graves augmente à partir de cinquante ans. À partir de 65 ans, la pente s'infléchit sensiblement et l'aggravation du risque est encore plus importante au-delà de 75 ans. Ce qui ressort également des données de Santé publique France – qui a largement étudié les modèles utilisés –, c'est que l'âge est le principal facteur de risque à la fois pour l'apparition des formes graves et pour la mortalité. C'est extrêmement important.

Un travail a été réalisé, avec Santé publique France et des modélisateurs, sur les données de la littérature française, mais surtout internationale, qui sont plus riches, pour déterminer les facteurs de risque que l'on ne peut pas lier à l'âge. Cela nous a permis de définir les populations qui sont les plus vulnérables à l'infection et de les dénombrer.

L'autre partie du travail consistait à savoir quels étaient les vaccins qui se profilaient à l'horizon. Nous avons très vite su qu'un certain nombre de candidats vaccins franchissaient les différentes étapes – phase 1, phase 2, phase 3.

La plupart des vaccins dont nous avons connaissance, qui arrivent au stade de la production de masse où il sera possible de les utiliser sur la population française, ont été évalués sur leur capacité à protéger les personnes des formes graves. La démonstration d'efficacité porte sur ce que l'on appelle la morbi-mortalité, c'est-à-dire sur l'incidence des formes symptomatiques et des formes graves de l'infection. Les deux premiers vaccins – qui sont des vaccins ARN – n'ont pas fait la démonstration qu'ils agissent sur la transmission du virus. En revanche, nous savons que chez les personnes vaccinées, le taux d'infection symptomatique et le taux d'infection grave sont très significativement diminués par rapport aux personnes qui ont reçu le placebo. Le taux d'efficacité, de protection par rapport aux formes symptomatiques et graves est de l'ordre de 95 %. À vrai dire, c'était une bonne surprise, parce que nous ne nous attendions pas à un tel taux d'efficacité. Pour le vaccin antigrippal, les taux d'efficacité sont de l'ordre de 60 % à 70 %, guère plus.

Nous avions donc la perspective de disposer de vaccins agissant essentiellement sur la morbidité, les formes symptomatiques, mais de ne disposer que d'une quantité limitée de doses, au moins au début – nous pourrons y revenir. En effet, les fabricants sont dépendants des capacités de développement et de production de leur vaccin. Dans les premiers mois de 2021, le nombre de doses de vaccins pourrait ne pas dépasser trois ou quatre millions. Comme ces vaccins nécessitent deux injections, ils ne pourraient être utilisés que pour 1,5 à 2 millions de personnes.

Enfin, il fallait intégrer à l'analyse le risque d'être exposé au virus. Évidemment, les établissements pour personnes âgées – les EHPAD ou d'autres types d'établissements – sont les lieux où la probabilité d'être exposé au virus est la plus élevée. D'ailleurs, par l'étude de l'épidémiologie des infections Covid, nous savions que 15 % des clusters sont survenus dans les EHPAD et qu'environ un tiers des décès est survenu chez des résidents d'EHPAD.

Le vaccin agissant essentiellement sur la morbi-mortalité, la quantité de doses étant limitée, les facteurs de risque principaux étant l'âge et les comorbidités, et les personnes âgées étant très exposées au virus : tous ces éléments ont convergé vers la proposition de stratégie que nous avons formulée, à savoir prioriser les établissements accueillant les personnes âgées.

Un autre élément important de notre raisonnement concerne les professionnels de santé au contact des populations : ils ont davantage de risques d'être infectés. Ils ont le risque d'être exposés et malades, mais également de transmettre l'infection. Comme je vous l'ai dit, à ce stade, nous n'avons pas beaucoup d'informations sur l'efficacité des vaccins en termes de transmission du virus. Néanmoins, par principe de réciprocité, d'exemplarité et dans le but de préserver le système de santé, c'est-à-dire pour faire en sorte que les professionnels de santé soient le plus épargnés possible et que le système de santé puisse continuer de fonctionner, il nous a semblé important d'associer la vaccination des professionnels de santé aux priorités liées à la vulnérabilité.

Nous avons élaboré une stratégie structurée en plusieurs phases. La première phase est centrée sur les établissements de santé pour personnes âgées et le personnel y travaillant, en priorisant les professionnels de santé ayant un risque pour eux-mêmes, c'est-à-dire qui ont soit des facteurs de risque, soit un âge supérieur à 65 ans. Ensuite, nous déclinons cette priorisation en descendant en âge et en rejoignant la population générale et ambulatoire : les personnes âgées de 75 ans et plus, les personnes entre 65 et 75 ans, les personnes avec comorbidité, puis le reste des professionnels de santé : d'abord ceux âgés de plus de cinquante ans, puis les plus jeunes.

Voilà la façon dont nous avons réfléchi et raisonné, en nous fondant sur les données de l'épidémiologie pour apprécier le risque de vulnérabilité et le risque d'être exposé au virus, afin de viser en priorité la morbi-mortalité. Le but est de faire baisser les hospitalisations et la mortalité et de protéger le système de santé pour qu'il puisse fonctionner par ailleurs. L'un des problèmes de la Covid est que pendant la première vague, et à nouveau maintenant, l'afflux de personnes dans les services hospitaliers a contraint le système de santé à se pencher uniquement sur ces malades. Il n'a donc pas pu prendre en charge correctement les patients qui présentaient d'autres pathologies, ce qui a eu de graves conséquences sur les soins en général.

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Michèle Morin-Surroca, cheffe du service Évaluation économique et santé publique

. – Comme l'a souligné le Pr Bouvet, il s'agit de recommandations encore préliminaires. La HAS met en œuvre un processus continu d'évaluation des données produites et il y a encore des questions auxquelles nous n'avons toujours pas de réponse. C'est dans ce contexte – notamment une mise à disposition progressive des doses – que nous avons établi ces éléments de stratégie visant à allouer les premières doses de vaccin. Le premier objectif de la vaccination est de réduire les formes graves et les décès et de maintenir le système de santé à flot en période d'épidémie, d'où l'approche progressive en différentes phases. C'est un continuum qui vise à permettre la vaccination des personnes en partant des plus vulnérables, qui s'appuie sur les données des études disponibles aujourd'hui et qui conduit à cette stratégie très progressive, parallèlement à la mise à disposition de manière plus élargie des vaccins qui vont arriver.

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. – Je vous remercie. Nous allons continuer avec les questions des autres rapporteurs.

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. – Les questions que je vais poser à la suite de votre exposé très clair, Madame Bouvet, seront complémentaires à ce que vous avez indiqué, avec Mme Morin-Surroca. Dans un premier temps, je voudrais parler de logistique, notamment du conditionnement des doses et de l'organisation qui en découle. J'ai vu que pour un vaccin, les doses étaient conditionnées par lots de 500. Comment organiser la vaccination sur le terrain ? Cela pose des problèmes à la fois logistiques, pour acheminer les doses, mais également organisationnels, pour convoquer nos compatriotes et organiser la chaîne de vaccination.

Dans le domaine de la logistique, quelles seront les personnes – pharmaciens, personnels soignants, etc. – qui vaccineront ? C'est très important. Lors de la dernière grande campagne de vaccination, des décisions ont été prises mais n'ont pas été vraiment très efficaces. Je voudrais avoir votre avis sur les leçons qu'il faut tirer de la dernière campagne de vaccination « de masse », même si je n'aime pas ce mot.

Sur un plan sanitaire, vous avez dit qu'il y avait deux objectifs : soit une protection populationnelle ou collective, soit une réduction de la morbi-mortalité des personnes considérées comme étant à risque. Y a-t-il une nécessité physiopathologique de distinguer le groupe des personnes âgées et le groupe des personnes à risque ? Je parle là des personnes avec une certaine obésité, du diabète ou les différents facteurs de risque qui sont largement évoqués. Est-ce que ce sont les mêmes catégories de personnes ? Recevront-elles le même type de vaccin, puisque d'autres vaccins vont arriver sur le marché ?

Si nous disposons de vaccins permettant d'induire une protection collective ou populationnelle, comment envisage-t-on les choses en fonction de la capacité du vaccin à induire une immunité locale ? La HAS prévoit-elle de faire un suivi des anticorps post-vaccinaux ? L'immunité collective passe également par un suivi de la production d'anticorps efficaces, c'est-à-dire neutralisant le virus, après l'injection du vaccin.

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. – Je suis le seul rapporteur non médecin et je remercie mes collègues qui m'éclairent avec compétence. Je vous remercie également, Madame Bouvet, d'avoir répondu par avance à l'une de mes questions. Elle concernait l'acceptabilité sociale de la vaccination, qui pourrait notamment passer par la vaccination du personnel médical.

J'appuie par ailleurs la question de mon collègue Jean-François Eliaou : qui va assurer cette vaccination, y compris dans les résidences pour personnes âgées ? Cela sera-t-il un personnel infirmier ou uniquement des médecins ? Nous nous interrogeons en effet non seulement sur la logistique de la vaccination, mais également sur l'organisation médicale.

Ma deuxième question porte sur la méfiance vis-à-vis de la stratégie annoncée. Cette méfiance n'est sans doute pas fondée, mais il nous faut la réduire. La question de la relation des autorités avec les laboratoires est souvent posée sur les réseaux sociaux. Il pourrait être utile que des autorités comme la vôtre donnent des précisions sur les contrats passés entre les États membres, l'Union européenne et les différents laboratoires, y compris en termes de responsabilité en cas de vaccins défectueux. Ce sont des questions qui me sont souvent remontées. Peut-être pourrions-nous recommander que ces contrats soient publiés.

Le Premier ministre et le président de la République ont annoncé qu'il y aurait des concertations, des consultations et qu'un comité citoyen serait créé au niveau national. Afin de renforcer l'acceptabilité sociale de la vaccination, ne serait-il pas utile de créer de tels comités au niveau départemental ? Ils permettraient d'associer la communauté médicale ainsi que les patients.

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Florence Lassarade, sénatrice, rapporteure

. – La stratégie est contrainte par le fait que les vaccins sont peu disponibles. Si cette contrainte n'avait pas existé, auriez-vous d'emblée vacciné les populations jeunes ? Je pense en particulier à la population jeune intervenant en EHPAD.

Deuxièmement, l'un des enjeux logistiques majeurs sera le transport des vaccins, en particulier celui qui se conserve à -80 degrés. Cela concerne à la fois les congélateurs et les moyens de transport, parce qu'il existe peu de camions suffisamment réfrigérés pour transporter de tels vaccins. Je me suis posé la question du conditionnement : Pour quelle raison y a-t-il cinq ou dix vaccins par conditionnement ? Pourquoi pas un conditionnement monodose ?

Réfléchissons-nous à une stratégie de protection ou d'éradication de la maladie ? Je suis pédiatre et a priori, en vaccinant, on cherche à éradiquer la maladie, ce que nous n'avons pas toujours réussi à réaliser, notamment pour la rougeole.

Ma dernière question concerne l'industrie pharmaceutique. Je sais que les vaccins chinois sont des vaccins inactivés. Les avons-nous délibérément écartés de notre stratégie vaccinale ? Après tout, dans quelques mois, nous aurons peut-être une évaluation suffisante de leur efficacité et de leur sécurité. Y a-t-il un lien avec le fait que le candidat vaccin français est également inactivé ? Ce sont peut-être des questions politiquement incorrectes, mais je les pose tout de même.

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. – Je rappelle que ceux qui assistent à cette audition peuvent poser des questions via la plateforme Slido, dont vous trouverez le lien sur le compte Twitter de l'OPECST. N'hésitez pas à insister, par exemple si vous trouvez que certaines réponses ne vont pas assez loin.

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Pr. Elisabeth Bouvet

. – Je vais essayer de répondre à toutes les questions, mais il faut préciser que le rôle de la Haute Autorité de santé est clairement défini. Sa mission consiste à définir la stratégie vaccinale, puis à établir des recommandations d'utilisation pour chaque vaccin qui aura obtenu une autorisation de mise sur le marché. Les questions portant sur la logistique ne sont pas du domaine de la Haute Autorité de santé, mais je vous donnerai les éléments dont je peux disposer.

Ce sont les services du ministère de la santé qui organisent actuellement la logistique. Les conditions de conservation du premier vaccin qui sera disponible, celui de Pfizer, sont assez contraignantes. En effet, il se conserve à -70 ou -80 degrés. Cinq jours au maximum peuvent s'écouler entre le moment où il sort du congélateur et le moment où il est injecté. On organise actuellement l'installation de congélateurs à -80 degrés disséminés sur le territoire national, notamment dans les établissements de santé et un certain nombre de lieux comme des pharmacies. Comme je l'expliquais, dans un premier temps, les EHPAD et les autres établissements pour personnes âgées seront prioritaires. Les EHPAD feront savoir le nombre de personnes qu'ils ont à vacciner et les pharmacies qui détiendront les vaccins prépareront les doses nécessaires, que les EHPAD iront chercher. Ils auront environ une semaine pour vacciner leurs résidents. L'organisation est en train de se mettre en place, avec la livraison des doses dans les sites où seront implantés les congélateurs. À partir de là, le délai sera relativement court pour les livrer aux EHPAD et autres établissements.

Qui vaccinera dans ces établissements ? La vaccination sera toujours sous la responsabilité du médecin, que ce soit le médecin coordonnateur de l'EHPAD ou le médecin traitant – dans beaucoup d'établissements, les médecins traitants suivent leurs patients. Il y aura forcément une consultation médicale préalable. L'administration du vaccin n'a pas forcément besoin d'être faite par un médecin, parce que c'est un geste assez simple. Pourront donc procéder aux injections soit des médecins, soit des infirmiers travaillant dans les EHPAD. Les vaccins qui arriveront ensuite, notamment celui de Moderna, ont des conditions de conservation beaucoup moins délicates. Le vaccin produit par AstraZeneca a des conditions de stockage et de conservation tout à fait habituelles.

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. – Madame Bouvet, vous avez dit qu'il y aura une phase de stockage et que les doses arriveront en masse, en palettes. Une préparation sera donc faite par les pharmaciens à partir de la zone de stockage, puis une distribution. Est-ce cela ?

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Pr. Elisabeth Bouvet

. – La préparation se fera sur place, parce que ce sont des fioles pouvant donner cinq doses. Elle sera réalisée sur le lieu même de l'injection. Dans les EHPAD, les professionnels de santé ont l'habitude de réaliser des dilutions. C'est assez facile, c'est avec du sérum physiologique et cela donne cinq doses de vaccin.

La Haute Autorité de santé a donné les grandes lignes de la stratégie, mais en ce domaine sa mission s'arrête là. Les autorités sont assez au clair sur la phase 1 qui se déroulera essentiellement dans des établissements, et pour laquelle il est assez logique d'utiliser le vaccin Pfizer. Pour les phases ultérieures, qui sont en train d'être organisées et qui se passeront à domicile ou dans des centres de vaccination, d'autres vaccins seront probablement disponibles et la logistique sera beaucoup plus aisée car les conditions de conservation ne seront pas les mêmes.

Je reviens aux personnels susceptibles d'effectuer la vaccination. Dans la première phase, les injections seront essentiellement le fait des médecins, ainsi que des infirmiers et des infirmières car la vaccination fait partie de leurs compétences, mais sous la responsabilité d'un médecin. Pour les phases suivantes, il faudra vacciner des personnes en population générale ; le document que la HAS a mis en ligne et soumis à audition publique et qui va être republié très bientôt fait état du souhait que d'autres professionnels puissent vacciner : les pharmaciens, les sages-femmes dans certaines conditions – quand nous pourrons utiliser des vaccins sur les femmes ayant accouché ou allant accoucher, ce qui n'est pas possible avec les vaccins actuels. Il s'agit d'élargir autant que possible les professionnels qui peuvent vacciner et d'utiliser les canaux habituels que la population française connait pour ses soins, c'est-à-dire ses référents locaux. Il est très important que la campagne de vaccination se déroule avec les intervenants locaux en santé, en lesquels les populations ont confiance : leur médecin traitant, leur pharmacien, etc.

Faudra-t-il revacciner ? Pour l'instant, nous ne le savons pas. Nous ne connaissons l'efficacité des vaccins que sur des durées assez courtes : le recul ne dépasse pas deux mois. Néanmoins, l'on peut probablement considérer que l'immunité sera similaire à celle procurée par les vaccins étudiés pour répondre à d'autres infections à coronavirus – ils n'ont pas été développés davantage, mais ont été étudiés. On peut espérer que l'immunité dépasse six mois, mais il n'est pas certain que ce puisse être davantage.

L'immunité vaccinale vient des anticorps neutralisants, mais il y a probablement aussi une immunité cellulaire, que nous n'avons pas la capacité de mesurer actuellement. Elle pourrait apporter une contribution beaucoup plus importante à la protection que les seuls anticorps neutralisants. Seul le temps et un recul supplémentaire permettront de savoir quelle protection effective auront les patients.

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Pr. Elisabeth Bouvet

. – Non, la HAS l'a demandé mais ce n'est pas de son ressort. Cependant, des cohortes de vaccination sont en train d'être construites et la HAS est impliquée dans les groupes de travail constitués autour de ces cohortes.

L'acceptabilité sociale de la vaccination revêt plusieurs dimensions. Le personnel soignant est un gage important, s'il est bien associé à la campagne. Or l'acceptabilité des professionnels de santé n'est pas forcément excellente, la méfiance étant forte vis-à-vis de la vaccination. Vous savez que la France est l'un des pays où la méfiance vaccinale est la plus importante. Je pense que l'on peut quand même agir et qu'il ne faut pas être défaitiste. La confiance devra être gagnée par la transparence et l'information, quand la campagne débutera. Je compte beaucoup sur les médecins et les professionnels de proximité pour créer la confiance. Il faut que les médecins soient eux-mêmes destinataires d'une information et d'une formation extrêmement importantes. Il faut que très vite, nous complétions ce que nous avons engagé en apportant les informations aux médecins qui seront les futurs vaccinateurs et, surtout, les futurs promoteurs de la vaccination. Ils doivent absolument être partie prenante de ce processus de vaccination.

Il nous revient que l'acceptation de la vaccination par les médecins est assez élevée pour eux-mêmes et pour les patients – davantage pour leurs patients que pour eux-mêmes, mais elle est assez élevée. Plus de 70 % des médecins sont prêts à se faire vacciner dès maintenant et plus de 85 % sont prêts à vacciner leurs patients. Nous pouvons compter sur les médecins, mais il faut vraiment les engager dans ce processus et leur apporter tout ce dont ils ont besoin en termes d'informations et d'outils de confiance en les vaccins. Je crois beaucoup à cela.

Vous avez proposé la création de comités citoyens au niveau local. Cela peut être une bonne idée, mais je ne connais pas bien cet aspect des choses, bien que j'y sois favorable. Vous pourrez en discuter avec Christian Saout, membre du collège de la Haute Autorité de santé. Il s'occupe du conseil pour l'engagement des usagers et a une réflexion très aboutie sur ce sujet. Je crois d'ailleurs que vous allez l'auditionner prochainement.

Pour ce qui est des contrats avec les industriels, nous n'avons pas d'information particulière, si ce n'est sur le nombre de doses précommandées au niveau européen, puis au niveau français. Ce ne sont que des informations assez générales sur le nombre de doses et le type de vaccin selon les fabricants.

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Michèle Morin-Surroca, cheffe du service Évaluation économique et santé publique

. – Je n'ai pas d'informations tellement plus précises. Les négociations se sont faites au niveau européen, afin de garantir un égal accès aux différents vaccins. Au niveau national, une task force interministérielle a été mise en place. Comme on l'a souligné tout à l'heure, la difficulté pour établir une stratégie de vaccination est d'avoir une information stable sur la mise à disposition effective des vaccins. Encore une fois, c'est un aspect sur lequel la HAS n'a pas la main.

La HAS fait des recommandations sur la base de l'analyse des données disponibles aujourd'hui, et intégrera à la stratégie de vaccination les études qui lui seront soumises, après les autorisations de mise sur le marché. C'est notre périmètre d'action et notre mission. Sur les éléments de suivi, de traçabilité, nous avons établi des principes généraux pour l'organisation de la campagne de vaccination, en tirant les enseignements de la campagne précédente. Comme l'a souligné le Pr Bouvet, ce document a été mis en consultation publique. Il consolidera très bientôt le résultat de la consultation, mais il n'a pas vocation à définir la logistique sur le terrain, qui est à la main du ministère, en partenariat avec Santé publique France. Le suivi sera essentiel, ainsi que la communication sur les données collectées. Il faut absolument que l'information soit claire et adaptée aux différents publics concernés par la campagne.

Le Pr Bouvet a souligné l'importance de gagner la confiance ; ceci se fera en ayant une communication très claire sur les informations qui seront collectées au fur et à mesure que la campagne se déroulera.

Une question a été posée sur les vaccins chinois. Le processus impose que les industriels déposent la demande d'autorisation de mise sur le marché et les données la justifiant auprès de l'Agence européenne du médicament, qui a la responsabilité d'octroyer des autorisations. Ensuite, l'ANSM (Agence nationale de sécurité du médicament et des produits de santé) définit l'autorisation de mise sur le marché français. Une fois l'autorisation délivrée, la HAS définit la stratégie d'utilisation des vaccins concernés.

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. – La question portant sur la différence d'approche entre protection et éradication n'a pas encore été abordée.

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Pr. Elisabeth Bouvet, membre du collège de la Haute Autorité de Santé

. – Je poursuis mes réponses. Pour éradiquer une maladie par la vaccination, il faut qu'elle soit à transmission purement interhumaine et obtenir une couverture vaccinale très élevée. Nous ne connaissons pas suffisamment l'épidémiologie du coronavirus ni les capacités des vaccins à induire une immunité prolongée. La rougeole est une maladie immunisante, c'est-à-dire que si vous l'avez eue, vous ne pouvez pas l'avoir à nouveau ; comme le vaccin confère à peu près le même type d'immunité et que la transmission est interhumaine, l'éradication de la rougeole est un horizon envisageable.

Pour la Covid, je crois qu'il est un peu tôt. Premièrement, la transmission est possible par des animaux – ce qui fait que nous ne maîtrisons pas forcément la circulation du coronavirus chez d'autres espèces que l'homme. Deuxièmement, pour l'instant, nous ne maîtrisons pas la durée de protection donnée par un vaccin. Troisièmement, l'éradication suppose un taux de couverture vaccinale extrêmement élevé. Or lorsqu'on vaccine des personnes qui ont peu de risque pour elles-mêmes, on doit tout de même veiller à ce que la balance bénéfices-risque soit suffisamment favorable. Or elle ne l'est pas nécessairement pour une personne jeune qui n'a pas de comorbidité, avec un vaccin encore peu connu, et dont les risques sont probablement faibles mais peuvent être supérieurs à ceux de la maladie. L'adhésion de la population risque d'être mauvaise : beaucoup de personnes jeunes considèrent qu'elles n'ont pas besoin de se faire vacciner, parce qu'elles n'ont pas de risque de développer une forme grave de la maladie.

Il y a encore beaucoup d'inconnues et il est un peu tôt pour envisager l'éradication. On doit plutôt espérer une stabilisation, avec des campagnes de vaccination qui pourraient se poursuivre. Souvenons-nous que c'est une maladie qui n'existait pas il y a un an. Nos réponses ne peuvent être que partielles.

Je ne suis pas certaine qu'on ait réellement écarté les vaccins chinois de la stratégie. De toute façon, la HAS prend les vaccins en considération à partir du moment où ils ont une autorisation de mise sur le marché. La HAS n'a pas pour mission de faire de la prospective sur les vaccins avant qu'ils n'arrivent.

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. – Je vous remercie. Je vais poser un certain nombre de questions : les miennes et celles qui me sont transmises.

J'ai une question de notre collègue Catherine Procaccia, sénatrice membre de l'OPECST : « Les Français pourront-ils choisir leur vaccin quand plusieurs seront sur le marché ? » C'est un sujet d'autant plus important qu'il existe différents types de vaccin : le vaccin à ARN, le vaccin à adénovirus, les vaccins plus classiques. Cela doit-il avoir une influence ? Doit-on ouvrir la possibilité de choisir ? Sur quels facteurs un choix devrait-il ou pourrait-il se baser ?

Une question des auditeurs concerne les personnes les plus âgées, qui seront vaccinées en premier. Comment sont-elles représentées dans les essais actuels ? Il semble qu'elles ne le sont pas, où très peu. Doit-on craindre une moindre efficacité des vaccins chez les personnes les plus âgées ?

Nous avons entendu parler ici et là de passeport vaccinal. Un tel passeport a-t-il un sens, tant que l'on n'en sait pas plus sur le pouvoir du vaccin à empêcher la transmission du virus ?

Une question à laquelle Rose Magazine s'est associé : « Les malades du cancer feront-ils partie des populations prioritaires ? Peut-il y avoir des contre-indications, sachant que certains malades ont des défenses immunitaires affaiblies ? Avons-nous des indications sur le vaccin qui serait le plus adapté pour eux ? » Quelle est l'efficacité des vaccins sur des personnes immunodéprimées pour une raison ou une autre ?

Je vais ajouter mes propres questions.

Madame Bouvet, votre exposé a présenté clairement ce qui a fondé la stratégie proposée. Vous avez dit que le choix se situait entre une stratégie de très large vaccination pour viser l'immunité collective, et une stratégie cherchant à protéger les plus vulnérables. La HAS a choisi cette seconde stratégie pour plusieurs raisons, en particulier le fait que nous avions des garanties assez fortes sur la capacité des vaccins à prévenir les formes graves, alors qu'aujourd'hui, nous n'avons pas de garantie sur le fait qu'ils puissent empêcher la transmission. Par ailleurs, le virus circule beaucoup et il paraît très ambitieux de vouloir empêcher cette circulation, d'autant qu'au début, nous ne disposerons que qu'un petit nombre de doses de vaccins. Vous avez également indiqué qu'il y a eu beaucoup de clusters et de décès dans les EHPAD et qu'il était naturel d'y concentrer l'effort dans un premier temps. Ce sont les éléments qui ont conduit à retenir la seconde stratégie. Si dans les mois qui viennent, de nouveaux éléments apparaissent, la HAS pourrait-elle être amenée à réviser la stratégie ?

S'agissant du nombre de doses et du conditionnement, nous avons entendu depuis hier les chiffres les plus divers. On a évoqué des palettes, des doses arrivant par paquets de 500 et tout à l'heure, nous parlions de quelques doses par paquet. Pouvons-nous clarifier les choses, même s'il n'est pas dans les missions de la HAS d'assurer la logistique ?

Lorsque nous avons préparé les auditions, nous avons remarqué la complexité des structures qui s'occupent de la stratégie vaccinale. Il y a bien sûr la HAS, mais également le Conseil scientifique présidé par Jean-François Delfraissy, le Comité analyse, recherche et expertise (CARE) présidé par Françoise Barré-Sinoussi, le Comité scientifique sur les vaccins avec Marie-Paule Kieny, que nous allons auditionner bientôt, le Conseil d'orientation de la stratégie vaccinale autour d'Alain Fischer, ainsi que les autres institutions comme le Haut conseil de la santé publique (HCSP), Santé publique France, les administrations ministérielles qui vont suivre ce dossier, et la task force interministérielle placée sous la responsabilité de Louis-Charles Viossat. Cette complexité ne crée-t-elle pas de la fragilité ? Nous ne disons pas qu'il faudrait tout chambouler pour simplifier mais il nous faut identifier quels sont les points de vigilance auxquels les parlementaires, qui contrôlent l'action du gouvernement, doivent être particulièrement attentifs. En effet, la complexité ne doit pas déboucher sur la cacophonie ou sur une stratégie illisible.

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Pr. Elisabeth Bouvet

. – Je vous remercie pour toutes ces questions. Pourrons-nous choisir notre vaccin ? Tout dépendra si plusieurs vaccins seront ou pas disponibles au même moment, et de leurs indications – par exemple, un vaccin pourra être beaucoup plus efficace sur la transmission que sur les formes graves, un autre aura démontré une meilleure efficacité chez les personnes âgées. Il y aura donc des indications préférentielles. Le choix pourrait se discuter lors de la consultation préalable, entre le patient et le médecin qui apporte l'information sur les vaccins disponibles, leurs caractéristiques et l'intérêt que la vaccination pourrait avoir pour cette personne. Pendant la première phase, il n'y aura pas de choix, puis il est possible que dans quelques mois, nous ayons un certain choix. Les vaccins n'auront pas la même efficacité, les mêmes contre-indications, les mêmes impacts en termes de transmission, les mêmes problématiques. Par exemple, il y aura peut-être un vaccin nécessitant une seule injection, ce qui pourrait être facilitateur. Tout cela est du domaine de la relation entre le patient et son médecin. Bien sûr, il y aura une certaine latitude si plusieurs vaccins sont présents en même temps et ont des caractéristiques permettant de considérer qu'ils peuvent être efficaces et intéressants pour la personne en question. Certains essais auront peut-être par exemple concerné plus que d'autres des patients atteints de cancer ; on aura donc tendance à les proposer à des personnes atteintes d'un cancer.

Cela me permet de répondre à une autre question : les cancers récents, c'est-à-dire non considérés comme guéris, sont des comorbidités facteurs de risque de forme grave. Les personnes atteintes d'un cancer en cours de traitement seront priorisées.

Les études et les modélisations montrent qu'au-delà de 75 ans, l'influence des cofacteurs ne joue pas. Entre 65 et 75 ans, les facteurs de risque s'additionnent. Pour la tranche d'âge de 65 à 74 ans, il serait donc logique de proposer la vaccination d'abord aux personnes ayant des facteurs de risque et ensuite à celles qui n'en ont pas ou moins.

Il est un peu tôt pour se prononcer sur le passeport vaccinal. Beaucoup de personnes y réfléchissent. Ce qui est important est que nous aurons un certificat de vaccination : chaque personne vaccinée se verra remettre un document attestant qu'elle a été vaccinée. Après, il sera possible que pour faire certains voyages, on vous demande cette attestation de vaccination.

Les vaccins que nous connaissons, à savoir les vaccins ARN ne montrent pas à ce stade de contre-indication. Ce ne sont pas des vaccins vivants ni des vaccins vis-à-vis desquels il faut craindre des phénomènes allergiques. L'intérêt du vaccin ARN est que c'est une molécule tout à fait pure, qui n'est pas le fruit d'une culture cellulaire ou d'un processus biologique. Certains vaccins ultérieurs seront des vaccins à vecteurs. Or quand il y a des vecteurs, ceux-ci peuvent être plus ou moins vivants ou viables. Il pourrait donc y avoir des contre-indications, notamment l'immunodépression, à certains vaccins vecteurs vivants.

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. – Pour être sûr de bien comprendre, les connaissances scientifiques suggèrent que l'immunodépression n'est pas un problème vis-à-vis des vaccins ARN, mais pourrait l'être vis-à-vis des vaccins vecteurs. Est-ce bien cela ?

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Pr. Elisabeth Bouvet, membre du collège de la Haute Autorité de Santé

. – Le problème éventuel ne se pose pas en termes de tolérance, de risque ou de danger, mais en termes d'efficacité. Quand une personne a un déficit immunitaire, la vaccination peut susciter une réponse immunitaire insuffisante. Cependant, l'immunodéficience est un terme extrêmement large qui recouvre des situations très diverses. Dans certaines situations, notamment celles qui portent sur la réponse humorale ou la réponse cellulaire, la vaccination peut être moins efficace que chez les personnes ayant une immunité normale. C'est connu pour tous les vaccins, c'est général.

Sur les vaccins vecteurs, nous n'avons pas de données nous permettant de savoir quelles seraient les contre-indications.

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Michèle Morin-Surroca, cheffe du service Évaluation économique et santé publique

. – L'Agence européenne du médicament travaille actuellement sur le dossier d'évaluation de mise sur le marché de plusieurs vaccins, au fur et à mesure que les laboratoires déposent les données. C'est dans ce cadre, sur la base des résultats des études de phase 3, à plus large échelle, que la HAS pourra disposer d'une image plus précise sur les éventuelles contre-indications. Il faut redire que la stratégie sera élaborée sur la base des données de l'autorisation de mise sur le marché et du périmètre de cette autorisation.

Vous évoquiez la possibilité que la HAS fasse évoluer ses recommandations. Elle prendra en considération les nouvelles connaissances et leur évolution. Sur les productions que nous avons mises en ligne, nous avons pris la précaution d'insister sur le fait que ce sont des connaissances datées et qu'il s'agit de recommandations intermédiaires. Si de nouvelles connaissances étaient susceptibles de faire évoluer les recommandations, elles seraient bien évidemment reprises et actualisées.

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Sonia de La Provôté, sénatrice, rapporteure

. – Avez-vous prévu une actualisation, une information régulière ? Il s'agirait de dire s'il n'y a pas de nouvelle recommandation ou s'il y a une modification, dans le cadre d'un rendez-vous régulier.

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Pr. Elisabeth Bouvet

Nous essayons plutôt de travailler au fil de l'eau. Au fur et à mesure que les vaccins arriveront, nous ferons des recommandations pour ces vaccins. Cela permettra chaque fois de rebalayer les éléments de la stratégie. Je ne crois pas que nous puissions fixer d'emblée une périodicité définie. Ce sont les événements et les informations nouvelles – données épidémiologiques données sur les effets secondaires, caractéristiques des vaccins, etc. – qui nous amèneront à réagir.

Des réunions ont lieu plusieurs fois par semaine sur l'élaboration de la stratégie. La commission technique des vaccinations se réunit tous les mois, ce qui n'était pas le cas avant, et son bureau se réunit tous les quinze jours. Nous faisons en plus des réunions intermédiaires une ou deux fois par semaine. Nous sommes en permanence en contact et prenons en compte toutes les données nouvelles qui arrivent, afin de réagir autant que de besoin.

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Sonia de La Provôté, sénatrice, rapporteure

. – S'il n'y a pas de rendez-vous régulier, il faut une méthode de transmission de l'information ou d'alerte très efficace, notamment auprès des professionnels de santé, de façon que chaque élément que vous jugeriez majeur parvienne rapidement aux bons endroits.

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Michèle Morin-Surroca, cheffe du service Évaluation économique et santé publique

. – C'est ce que nous faisons actuellement.

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. – Je vais compléter la question : quels sont les relais que vous utilisez pour la bonne information des personnels de santé, des médecins, de toutes les personnes qui seront amenées à conseiller ou à administrer le vaccin ?

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Pr. Elisabeth Bouvet

. – Vous avez énuméré les comités mis sur pied dans le cadre de la lutte contre l'épidémie. Nous nous sommes réparti la tâche. Tout ce qui concerne la communication sera plutôt du domaine du conseil d'Alain Fischer, qui aura pour mission principale de coordonner l'information et la communication autour de cette vaccination. La HAS a affirmé un certain nombre de principes en matière de communication. Nous allons travailler sous forme de recommandations et d'information auprès des médecins. Depuis le début de l'épidémie, la HAS a élaboré des réponses rapides sur la prise en charge de patients chroniques, sur l'organisation des soins, etc. Ce sont des documents très simples transmis à tous les professionnels de santé, à la fois par le biais de nos propres canaux, du site Internet de la HAS, et via tous les collèges et autres sociétés de professionnels de santé.

Nous allons désormais élaborer pour les médecins des documents qui seront à la fois des outils les aidant à appréhender la vaccination et à mieux la connaître, des outils d'information pour leurs patients et des outils pratiques sur la mise en œuvre des vaccinations. La HAS compte sur ce travail pour renforcer son lien avec les professionnels de santé, car c'est pour eux que nous travaillons avant tout. En dehors de la stratégie vaccinale, notre mission est de faire des recommandations de bonnes pratiques et d'évaluer le système de santé.

Le reste de l'information est organisé, réfléchi et décliné par les autres instances, notamment Santé publique France et le conseil qui est en train de se constituer autour d'Alain Fischer.

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. – La direction générale de la santé (DGS) sera-t-elle dans la boucle ? La plupart des médecins sont abonnés à un bulletin très régulier de la DGS, qu'ils reçoivent par mail. Ces bulletins ont permis de suivre l'évolution de l'épidémie et les alertes de la DGS. Sera-t-elle l'un des vecteurs de l'information délivrée aux médecins, notamment les médecins généralistes ?

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Pr. Elisabeth Bouvet

. – Oui. D'ailleurs c'est la DGS qui organise la campagne sur le terrain, et elle utilisera ses canaux habituels. Nous sommes très régulièrement en contact avec elle. La HAS se positionne davantage dans un champ technique.

L'abondance des comités rend effectivement les choses un peu compliquées. Nous essayons de faire le lien entre tous ces comités, de ne pas travailler dans notre coin et d'inviter leurs membres. Alain Fischer est venu hier à la HAS afin de participer à une réunion de la commission technique des vaccinations. Nous l'avons invité dès que nous avons appris qu'il était nommé. Nous avons évoqué la façon dont nous allions travailler ensemble, ce qui me paraît extrêmement important.

Lorsque la commission technique des vaccinations se réunit, elle accueille des membres de la DGS, du Haut conseil de la santé publique, de l'ANSM, de Santé publique France. Nous avons l'habitude de travailler ensemble. Je suis, comme vous, très soucieuse de la cohérence et de la dynamique inter-institutions, que je trouve parfois un peu compliquée. La HAS est clairement positionnée sur ce que j'ai dit tout à l'heure, à savoir l'avis sur les vaccins et l'élaboration de la stratégie, tant ses grandes orientations que sa mise en œuvre. Le rôle de la commission technique est de faire des recommandations vaccin par vaccin et d'informer les médecins sur l'aspect pratique et les outils qui leur sont utiles pour vacciner.

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Sonia de La Provôté, sénatrice, rapporteure

. – Qu'en est-il des fameuses doses par paquets de 500 ?

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. – Le conditionnement des doses est un sujet important. C'est la question que j'ai posée tout à l'heure, et je suis resté sur ma faim. En fonction du conditionnement initial sortant d'usines de fabrication du vaccin, si ce sont des paquets de 500 doses, il faut prévoir leur acheminement, ne pas rompre la chaîne du froid, les stocker dans les sites où se trouvent les congélateurs à -80 degrés. En France, il y en a un grand nombre, dans les hôpitaux ou ailleurs. Ils sont relativement bien dispersés. Dans mon service, j'en avais quatre ou cinq. Il n'est donc pas très compliqué d'en avoir.

L'étape suivante, de préparation, est cruciale. S'il s'agit d'un conditionnement de 500 doses, qu'il va falloir administrer de façon individuelle ou quasi-individuelle, il faut prévoir un temps de préparation. Celle-ci requiert un maximum de précautions, parce qu'il s'agit de vaccins. Mes questions sont les suivantes : une telle préparation et-elle effectivement nécessaire ? Se fera-t-elle dans des centres dédiés – cela me semblerait logique ? Est-ce que ce seront les établissements prenant en charge les personnes vulnérables ou âgées qui devront les préparer à partir des solutions de base ? J'insiste sur le fait qu'il s'agit de vaccins à usage humain, pour lesquels la préparation doit être particulièrement précautionneuse.

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Pr. Elisabeth Bouvet

. – Tous ces aspects très importants sont pris en compte et organisés par la Direction générale de la santé, que nous avons entendue hier. Ce que je vous répercute est ce qu'ils nous ont dit hier, parce que ce n'est pas quelque chose que nous organisons nous-mêmes.

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Pr. Elisabeth Bouvet

. – J'ai pour ma part compris qu'il y aurait des palettes réparties dans les sites où se trouvent des congélateurs. À partir de là, les vaccins partiraient sur les lieux d'administration. Seront-ils préparés sur les sites que je viens d'évoquer ou dans les EHPAD ? Je crois que ce sera plutôt près des patients, mais je n'en suis pas sûre et je préfère donc que ce soit la DGS qui réponde à cette question.

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. – Je vous remercie et je continue avec une nouvelle salve de questions.

Voici d'abord une question transmise par Mme Michelle Meunier, sénatrice : « La prise en charge par l'assurance maladie pourrait-elle varier entre les différents vaccins qui seront mis sur le marché ? »

Une autre question de Mme Meunier porte sur le recueil du consentement à la vaccination des personnes âgées, notamment en établissements. La HAS a produit de longue date des recommandations, notamment sur la décision médicale partagée. Il existe un document intitulé « Décider ensemble » datant de 2013. Comment voyez-vous le recueil du consentement dans la campagne qui vient, notamment chez les personnes âgées qui ne sont pas forcément sous tutelle mais pour lesquelles les décisions sont prises dans un échange entre la personne concernée, la famille et l'établissement ?

J'ajoute deux autres questions, liées aux informations et à la façon dont fonctionne le vaccin. Une efficacité très importante a été constatée pour la protection vis-à-vis des formes graves : des taux de 90 % à 95 % ont été mis en évidence. C'est une bonne surprise, car l'efficacité des vaccins antigrippaux est bien inférieure. À quoi peut-on attribuer cette bonne surprise ? Est-ce quelque chose qui s'explique bien ? Si quelqu'un se présente en disant qu'il a du mal à y croire, on lui dit que cela marche beaucoup mieux que prévu, mais on dit également que l'on manque de recul…

Ces derniers jours, on a entendu des prises de parole parfois contradictoires, venant de personnalités médicales, connues ou pas, disant qu'elles n'ont pas tant de confiance que cela, qu'elles manquent de recul et que la quantité de données publiées est insuffisante. Comment réagissez-vous à cela ? Estimez-vous avoir eu toutes les données qu'il vous fallait pour élaborer vos recommandations ?

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Pr. Elisabeth Bouvet

. – Dans la phase actuelle, les vaccins qui sont précommandés et commandés par la France et l'Union européenne sont achetés par l'État et ne passent pas par un processus de remboursement par l'assurance maladie. Ce sera peut-être le cas lorsque la vaccination entrera dans un régime normal, mais pour l'instant, seul l'État est concerné. A priori, les personnes qui ne sont pas inscrites à l'assurance maladie peuvent également bénéficier du vaccin.

La question du consentement est très importante. Une information éclairée doit être délivrée dans les établissements pour personnes âgées. Le médecin donne l'information sur le vaccin et recueille le consentement oral de la personne. Si la personne n'est pas en mesure de le faire, ce sera sa famille. Dans ces établissements, il y a aussi des tiers de confiance qui peuvent répondre pour la personne elle-même. Il est tout à fait essentiel qu'il y ait une information, que le fait que le patient ait été informé soit mentionné dans le dossier médical et que l'on ait recueilli le consentement à la vaccination. À ce stade, nous ne souhaitons pas que le consentement soit écrit. En 2009, le fait d'exiger un consentement écrit a soulevé une certaine défiance, une inquiétude par rapport aux vaccins.

Il est vrai que nous avons été surpris de l'efficacité des vaccins. Pourquoi ces vaccins paraissent-ils si efficaces ? L'une des hypothèses est que ce sont des vaccins ARN, un produit extrêmement pur qui est fabriqué sur la base du code génétique du virus. La protéine Spike qui sera ensuite synthétisée sera très pure – elle reflètera exactement le code génétique du virus –, absolument exacte et non mélangée avec d'autres protéines. C'est probablement pour cela que la réponse immunitaire est tout à fait adaptée et vraiment spécifique de ce que nous injectons. L'avenir nous détrompera peut-être, et les vaccins vecteurs pour lesquels nous n'avons pour l'instant pas de données auront peut-être une efficacité similaire, mais nous nous attendons à avoir des efficacités moindres avec les vaccins plus classiques. Les vaccins chinois sont réalisés avec des technologies classiques, c'est-à-dire avec du virus inactivé. Nous risquons donc de trouver des efficacités plus proches de celles dont nous avons l'habitude, par exemple pour la grippe.

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. – Vous ne remettez aucunement en doute l'efficacité annoncée des vaccins ARN. Vous dites qu'en revanche, le vaccin classique pourrait être moins efficace que le vaccin ARN.

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Pr. Elisabeth Bouvet

. – Oui, mais c'est ma position personnelle.

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Michèle Morin-Surroca, cheffe du service Évaluation économique et santé publique

. – Cette opinion se fonde sur les éléments liminaires qui ont été diffusés. Encore une fois, l'instruction des dossiers avec la totalité des résultats est en cours au niveau européen. À son issue, nous aurons accès aux données sur l'ensemble des populations incluses dans les essais de phase 3 et nous pourrons définir la stratégie de vaccination. Nous pourrons également avoir les données par sous-groupes. C'est à ce moment-là que nous pourrons savoir si ces résultats qui semblent prometteurs se confirment.

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. – Est-ce bien l'EMA, l'Agence européenne du médicament, qui instruit les dossiers ?

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Michèle Morin-Surroca, cheffe du service Évaluation économique et santé publique

. – Pour Pfizer et Moderna, les dossiers d'autorisation de mise sur le marché ont été déposés. Ils sont examinés au fil de l'eau, dans le cadre d'un processus de « rolling commission » qui permet à l'Agence européenne d'examiner les données au fur et à mesure qu'elles arrivent, en premier lieu surtout les données qualitatives. Les autorisations de mise sur le marché sont en cours, et l'agence et les rapporteurs sont en train d'examiner la totalité des données disponibles.

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. – Quand la totalité de ces données sera-t-elle également disponible pour vous ?

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Michèle Morin-Surroca, cheffe du service Évaluation économique et santé publique

. – Les laboratoires ont la possibilité de faire ce que l'on appelle des prédépôts auprès de la HAS, c'est-à-dire des dépôts par anticipation. Cela nous permet de travailler plus rapidement. Nous avons encouragé les laboratoires à y recourir, de sorte que nous soyons au rendez-vous rapidement, une fois que l'autorisation de mise sur le marché sera délivrée.

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Pr. Elisabeth Bouvet

. – Il est vrai que tout va très vite. Les dossiers sont mis en ligne dès qu'ils sont déposés.

Une question a été posée sur les personnes âgées. Le dossier de Pfizer a été mis en ligne par la FDA et nous en avons à peu près le contenu. La part des personnes âgées de plus de 65 ans dans l'effectif des essais n'est pas du tout négligeable – il semble qu'il y en ait eu 3 000. L'efficacité clinique chez ces personnes ne semble pratiquement pas différente de celle chez les tranches d'âge plus jeunes, ce qui est assez rassurant. C'est un élément qui mérite d'être détaillé, notamment sur la distribution en âge de cette population de plus de 65 ans.

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. – Une demande de précision me vient de Virginie Bagouet de l'Agence APM, qui suit cette audition. Lorsque vous parlez d'agence ou d'institution en cours de constitution autour d'Alain Fischer, parlez-vous de ce que l'on appelle le comité vaccins dans la presse ? Je ne sais pas quel est précisément son statut. S'agit-il d'une nouvelle agence ?

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Pr. Elisabeth Bouvet

. – Ce n'est pas une agence, c'est un comité.

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Michèle Morin-Surroca, cheffe du service Évaluation économique et santé publique

. – C'est un comité qui se constitue.

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Pr. Elisabeth Bouvet

. – C'est un comité ad hoc, pour répondre à la crise. Alain Fischer nous a dit que son action serait ciblée sur la communication et la mise en œuvre de la stratégie. Tout cela devrait se passer en très bonne cohérence avec les travaux de la commission technique des vaccinations.

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. – Nous pouvons donc penser que c'est un comité ad hoc temporaire.

Nous n'avons pas encore évoqué les effets secondaires, constatés ou possibles de la version ARN ou d'une version chinoise des vaccins. Avez-vous des éléments sur ce sujet ?

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Pr. Elisabeth Bouvet

. – Les éléments que nous avons sur le vaccin ARN sont assez favorables en termes de tolérance et d'effets secondaires. Il n'y a pas de signal particulier d'effets secondaires graves. Il y a probablement des effets de tolérance locale qui peuvent être un peu désagréables, puisque ce sont des vaccins qui semblent occasionner assez fréquemment une douleur, mais c'est assez banal. Il peut donc se produire des réactions locales notables. Les dossiers sont en train d'être examinés. Il faudra continuer la pharmacovigilance des vaccins de façon très active, afin d'en savoir davantage, mais pour l'instant, il n'y a aucun signal inquiétant ou d'effet secondaire de type général, d'autres pathologies de type auto-immunes, etc.

Pour les autres vaccins, notamment les vaccins classiques chinois, je n'ai aucune donnée sur la tolérance.

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Michèle Morin-Surroca, cheffe du service Évaluation économique et santé publique

. – Ce sujet relève de l'évaluation de la balance bénéfices-risque. Il faut mettre les effets indésirables en regard de l'efficacité qui sera constatée. Cela fera partie des éléments de l'analyse des données dans le cadre de l'autorisation de mise sur le marché. Ce que nous savons est ce qui a pu être publié dans les résultats intermédiaires. L'ANSM qui a la charge de la pharmacovigilance et participe à la commission technique des vaccinations met en place un suivi. Comme l'a dit le Pr. Bouvet, le suivi sera organisé à partir de cohortes de suivi et d'une analyse précise de tous les événements qui seront signalés. Il intégrera tout ce qui a été signalé dans le cadre des essais de phase 3 et la pharmacovigilance sera encore plus intensive. Le document de la HAS sur les principes de l'organisation de la campagne de vaccination encourage à suivre et à tracer tous ces éléments, et à communiquer dessus. Les recommandations de la HAS soulignent l'importance de communiquer au public l'ensemble des données collectées, et les données de pharmacovigilance en font bien évidemment partie.

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. – Sur la base de votre connaissance de l'essai de phase 3, devons-nous distinguer, dans le groupe des personnes prioritaires pour l'administration du vaccin ARN, les personnes âgées sans trop de comorbidités et les personnes présentant des comorbidités importantes de type diabète ou obésité ? L'analyse de la balance bénéfices-risques suggère-t-elle que ces deux parties de la population à risque de développer des formes graves devraient être traitées différemment ?

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Pr. Elisabeth Bouvet

. – Au-delà de 75 ans, le niveau de risque ne dépend pas de la présence ou de l'absence de comorbidités. Il n'y a donc pas de priorisation à faire. Les comorbidités augmentent les risques des personnes ayant entre 65 et 74 ans. Nous ne savons pas de combien de doses de vaccins nous disposerons au moment de passer dans la phase 2, mais il sera peut-être nécessaire de re-prioriser pour commencer par les personnes qui, à la fois, sont dans la tranche d'âge considérée et ont un ou deux facteurs de risque associés, par exemple diabète ou obésité.

Lorsque la HAS rendra son avis sur chaque vaccin – notamment le premier, probablement fin décembre ou début janvier –, elle donnera la liste des personnes éligibles à la vaccination. Celle-ci prendra en compte les situations pathologiques pour lesquelles un surrisque net aura été démontré. Peut-être que pour certains sous-groupes faisant apparaître un surrisque particulier, des comorbidités devront être prises en compte en tant que telles, indépendamment de l'âge de la personne.

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Michèle Morin-Surroca, cheffe du service Évaluation économique et santé publique

. – Cette approche en plusieurs phases a été présentée dans les recommandations. Nous verrons pour chacun de ces vaccins, à la lumière des résultats des études de la phase 3, comment ils s'insèrent ou non dans cette stratégie.

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. – Avez-vous des informations sur la production du vaccin français ? Nous sommes tous un peu chauvins…

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Pr. Elisabeth Bouvet

. – Pour ce qui me concerne, je n'ai aucune information.

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Michèle Morin-Surroca, cheffe du service Évaluation économique et santé publique

. – Nous n'avons pas d'accès particulier à ce genre d'information. Nous suivons la progression des essais des différents vaccins en cours d'élaboration.

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. – Il est clair que la représentation nationale devra se poser des questions sur la compétitivité et l'efficacité de notre système de recherche médicale, en ces temps où le sujet est sous les feux de l'actualité. Nous aurons l'occasion d'y revenir.

Chers collègues, chers amis, nous arrivons au bout de cette audition qui a été fort nourrie. Nous vous remercions, Professeur Bouvet, Madame Morin-Surroca, et à travers vous la Haute Autorité de santé, d'avoir répondu à nos questions en bousculant votre emploi du temps.

Les auditions vont continuer jusqu'à la fin de la semaine, en amont du débat parlementaire. Nous auditionnerons Alain Fischer demain, en fin de matinée. Pour rebondir sur ce qui a été dit, le conseil constitué autour de lui sera composé de scientifiques, à la fois spécialistes de biologies et spécialistes de sciences humaines et sociales, de professionnels de santé et de personnes de la société civile. C'est donc un comité d'une nature un peu particulière qui aura ces questions importantes de communication et de confiance à aborder, comme vous nous l'expliquiez, Madame Bouvet.

L'Office parlementaire d'évaluation des choix scientifiques et technologiques reste à pied d'œuvre pour instruire ce débat important, au confluent entre questions scientifiques, questions de société, et politique. C'est donc avec le sentiment du devoir accompli que je remercie tous les participants, y compris les journalistes et citoyens qui se sont connectés et ont pu poser leurs questions.

La réunion est close à 12 h 45.