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Fiodor Dostoïevski écrivait que nous ne pouvons juger du degré de civilisation d'une nation qu'en visitant ses prisons. Force est de constater que cette proposition de loi tendant à créer un recours devant le juge judiciaire pour les détenus, lorsqu'ils subissent des conditions de détention indignes, vise un enjeu de civilisation. Il faut avant tout rappeler ce qu'est le rôle de la peine de prison : notre code pénal le prévoit clairement en son article 130-1. La peine poursuit trois objectifs : protéger la société, sanctionner l'auteur d'une infraction et favoriser son insertion ou sa réinsertion. En l'espèce, la sanction se traduit par une privation de sa liberté. Or priver un hom...
Je partage plusieurs des propos que vient de tenir le garde des sceaux, alors que nous nous apprêtons à examiner l'article unique de cette proposition de loi tendant à garantir le droit au respect de la dignité en détention, adoptée par le Sénat. Rappelons que, dans sa décision du 2 octobre 2020, le Conseil constitutionnel a considéré qu'il incombe au législateur de garantir aux personnes placées en détention la possibilité de saisir le juge de conditions de détention contraires à la dignité de la personne, afin qu'il y soit mis fin. Le 30 janvier 2020, la Cour européenne des droits de l'homme a condamné l'État fr...
Le débat que nous avons sur les conditions de dignité en détention rejoint les propos de M. le garde des sceaux sur les réductions de peine. Comment faire que la peine, notamment la peine privative de liberté qu'est la prison, soit utile ? Si la sanction n'est pas utile, alors elle est indigne pour l'individu qui la subit. Deux voies s'offrent à nous : celle dont nous discutons aujourd'hui, et qui vise à modifier la situation au bénéfice de l'intéressé, au mini...
Mais ce n'est pas le cas, car la situation en détention est totalement inverse : la liste longue comme le bras, c'est celle des détenus qui veulent travailler et qui ne le peuvent pas.
C'est sûr, vous n'avez pas passé beaucoup de temps en détention, monsieur le garde des sceaux – peut-être pas suffisamment. Allons-y ensemble, à l'occasion.
...ierre Morel-À-L'Huissier, reprend une rédaction proposée par le Conseil national des barreaux. Il vise à compléter celle de la proposition de loi pour la mettre en conformité avec la décision du Conseil constitutionnel. L'esprit général de l'amendement est de simplifier l'accès des détenus au recours judiciaire et de le rendre le plus opérant possible, lorsque ceux-ci ressentent des conditions de détention indignes.
Le débat le mérite, car le sujet touche à la liberté fondamentale qu'est la liberté d'aller et venir. Oui, le texte concerne aussi l'état de la situation pénitentiaire, car une grande partie de la surpopulation carcérale en maison d'arrêt est due à la détention provisoire. En effet, dans bien des cas, c'est ceinture et bretelles, et l'on choisit la détention provisoire plutôt que des mesures restrictives – et non privatives – de liberté, qui seraient possibles hors de la prison. Alors que la norme, c'est la liberté, et l'exception, ce sont les restrictions ou privations, eh bien, dans de nombreux cas, c'est devenu l'inverse du fait des procédures exist...
Or, en matière de procédure et de recours, il y a d'autres parties prenantes : juge des libertés et de la détention, juge d'application des peines, parfois juge d'instruction, procureur de la République, administration pénitentiaire. Il me paraît plus judicieux et nettement plus sécurisant, y compris pour le requérant, de partir du texte proposé par la Chancellerie, et d'y apporter des modifications. C'est l'objet des amendements qui ont été déposés.
...e 2009 : engagement avait été pris de mettre fin aux dérogations au régime de l'encellulement individuel dans les cinq ans, par exemple. En 2014, on estimait qu'il y faudrait dix ans. Nous énumérons dans l'exposé sommaire de l'amendement le nombre de personnes détenues dans une situation indigne, les délais d'attente pour accéder à un parcours de formation, pour bénéficier du service scolaire en détention ou d'une prise en charge psychologique, dans certains centres de détention. Si la définition de la dignité doit peut-être faire l'objet d'un décret, il est aussi de la responsabilité du législateur d'accompagner ce travail pour le rendre plus effectif.
L'amendement pose tout d'abord un problème de rédaction. Nous sommes d'accord : les nombreux critères que vous proposez pour caractériser la dignité en détention doivent être pris en considération. Mais, tel que l'amendement est rédigé, chaque critère devrait être pris en considération individuellement, et il suffirait qu'un seul soit rempli pour caractériser l'indignité de la détention. Or c'est justement un ensemble qui doit être pris en considération par le juge. Sur le fond, je pense que la jurisprudence est le meilleur vecteur pour travailler, en dé...
... visioconférence. Nous souhaitons non pas exclure celles-ci par principe, mais simplement permettre aux personnes prévenues ou condamnées de les refuser, sauf si leur transport paraît devoir être évité en raison de risques graves de trouble à l'ordre public ou d'évasion. Une mesure similaire est actuellement en vigueur, pour les audiences relatives aux remises de peine ou à une prolongation de la détention provisoire. Il s'agit d'une liberté fondamentale. Nous parlons bien ici de traitement indigne. Il me semble que le recours en la matière étant particulièrement grave – nous ne devrions pas avoir à imaginer des recours de cette nature – , il demande une attention particulière. Or nous constatons tous aujourd'hui, au cours de nos réunions, que la visioconférence n'est pas la mieux adaptée pour con...
Nous avons déjà évoqué en commission la question de la visioconférence, qui est autorisée en droit commun, dès lors que le justiciable a donné son accord, dans les deux situations particulières que vous rappelez : quand il s'agit de statuer sur le placement en détention provisoire, ou sur la prolongation de celle-ci. Ce sont donc à chaque fois des moments très importants. Or, ici, nous demandons plutôt à l'administration pénitentiaire et à la justice d'agir urgemment. Le dispositif prévu me semble donc tout à fait adapté et permettra de faire gagner la procédure en efficacité. Comme moi, vous avez dû visiter récemment des parloirs équipés pour la visioconférenc...
Madame la rapporteure, monsieur le garde des sceaux, si je vous remercie pour ces précisions, je trouve votre argumentation assez paradoxale. Si nous sommes aujourd'hui réunis dans l'urgence, c'est bien pour défendre un droit fondamental, avec ce recours visant à lutter effectivement contre les conditions indignes de détention.
Ce n'est pas attenter au dispositif général que vous proposez et auquel je souscris sur de nombreux points que d'imaginer que le détenu puisse voir le juge s'il le veut, quand il considère que ses conditions de détention sont indignes. Le juge est présent pour trancher le litige, mais aussi pour voir les parties.
...ion carcérale étant illettrée ou éprouvant de grandes difficultés de lecture et d'écriture, ces amendements visent à les faire bénéficier de dispositifs d'accès au droit et de l'aide d'écrivains publics bénévoles. Ceux-ci sont présents dans certains endroits mais pas partout. Il faut également veiller à garantir l'accès à une documentation mise à jour dans les bibliothèques des établissements de détention.
La rédaction actuelle du texte dispose que la requête doit se fonder sur un « commencement de preuve » que les conditions de détention sont contraires à la dignité humaine. L'amendement vise à remplacer ces mots par « des indices », afin que la responsabilité de la présentation d'éléments appuyant la requête ne repose pas uniquement sur le détenu et que le magistrat puisse demander les éléments d'investigation nécessaires à la recherche de preuves. Cette modification ne changerait rien au caractère obligatoirement circonstancié...
Il vise à clarifier l'alinéa 7 de l'article unique, afin de distinguer les deux étapes de la procédure – le prononcé de la recevabilité puis la décision de son caractère fondé ou non – , de fixer les délais et de préciser les éléments de recevabilité ou d'irrecevabilité de la requête que doit prendre en considération le juge des libertés et de la détention ou le juge de l'application des peines.
Il ne vise pas à définir ce que peuvent être des conditions indignes de détention, comme ont souhaité le faire un peu plus tôt nos collègues du groupe Socialistes et apparentés – ce qui aurait pu avoir un intérêt. Il consiste à dire que, pour déterminer si la détention se passe dans des conditions correctes, le juge peut analyser la situation au regard des éléments suivants, dont la liste n'est pas exhaustive, mais qui donnent une direction : le taux d'occupation de l'établiss...
Il vise à appeler l'attention du magistrat sur différents éléments qui peuvent conduire à caractériser, ou non, des conditions indignes de détention. Le fameux terme « notamment » – que chacun ici connaît bien – garantit au juge qu'il garde toute sa liberté de magistrat. Il s'agit, pour ceux qui liront la loi après son adoption, en particulier les détenus et leurs conseils, de savoir quels peuvent être les éléments à signaler pour faire valoir l'indignité des conditions de détention. En adoptant cet amendement, on ne bloquerait rien, on perme...
La liste n'est pas limitative, mais elle est superfétatoire. Les critères que vous avez inscrits dans l'amendement sont parfaitement connus des magistrats. Il faut faire confiance aux juges, qui connaissent très bien leur métier. L'expression « conditions de détention indignes » n'est pas nouvelle : elle est inscrite depuis très longtemps dans le paysage judiciaire. Il ne sert à rien de rendre la loi trop bavarde ; cela peut même avoir l'effet inverse : apporter de la rigidité.