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Madame la rapporteure, monsieur le secrétaire d'État, je ne suis pas d'accord. Vous évoquez l'intérêt de l'enfant, mais cet article ne vise en réalité qu'à traiter des conflits entre adultes. La disposition en question revient à se passer du consentement de la mère qui a accouché, et ce – si vous relisez l'article – dans des conditions trop floues. L'appréciation des « motifs légitimes » paraît en effet particulièrement incertaine et source d'insécurité juridique. Et vous ne prévoyez aucune limite temporelle aux AMP qui pourraient être concernées. Le dispositif ne s'appliquera peut-être que pendant trois ans, mais il pourrait concerner des situations très a...
Je ne suis donc pas sûr, mes chers collègues, que vous mesuriez les implications d'un tel article. Au moment de la naissance des enfants dont il est ici question, la loi garantissait à la mère le droit de s'opposer à l'établissement d'un autre lien de filiation, alors que ce texte, tel que vous l'imaginez, pourrait venir le lui imposer rétroactivement, qui plus est dans un contexte de conflit potentiellement ancien avec la mère d'intention. C'est placer l'enfant dans une position très inconfortable, alors qu'il bénéficie déjà d'une filiation naturelle. Je terminerai en m'appuyant à no...
...en particulier lorsque ce tiers a résidé de manière stable avec lui et l'un de ses parents, a pourvu à son éducation, à son entretien ou à son installation, et a noué avec lui des liens affectifs durables. » Le droit prévoit donc déjà cette situation, et il n'est pas besoin de rajouter une nouvelle disposition. Enfin, l'article 9 bis ne vise pas à maintenir un lien, mais impose une adoption à la mère biologique qui la refuse. Cela constitue une atteinte sans précédent à son statut de parent, ce qui me semble vraiment problématique. Votre conception de la famille est une conception contractuelle, qui rassemble des individus qui choisissent librement ce qu'ils veulent ; encore une fois, c'est une conception centrée sur les adultes et sur le droit à l'enfant, mais qui ne tient pas compte de l'in...
...n'a pas à supporter les conséquences d'un conflit entre les deux adultes à l'origine du projet parental. On le sait, les couples connaissent parfois des échecs, et ce n'est pas aux enfants de les subir. Pensez-vous réellement, mes chers collègues, qu'il soit plus sécurisant pour un enfant d'avoir une simple plutôt qu'une double filiation ? Comme l'a rappelé Coralie Dubost, il peut arriver que la mère qui a accouché disparaisse : que deviennent alors ses enfants ?
Nous sommes favorables à l'article 9 bis, pour toutes les raisons évoquées par nos collègues. Nous tenons à réaffirmer la parentalité des deux mères et la possibilité d'une adoption malgré les désaccords entre parents, qui ne doivent pas remettre en cause la sécurisation des filiations. Cela n'a rien à voir avec le cas des PMA faites par des femmes seules, dans lequel la question de la double filiation ne se pose pas. Ici, nous parlons bien de deux mères : l'une qui a porté l'enfant et l'autre qui a participé au projet parental. C'est pourq...
Je l'ai dit, nous avons soutenu le rétablissement de cet article 9 bis , qui permet de garantir la filiation de la mère qui n'a pas accouché, car nous considérons que c'est dans l'intérêt de l'enfant. Cet amendement vise à établir durablement la possibilité offerte par cet article. Nous ne savons pas où nous serons dans trois ans, et il ne faut pas remettre à plus tard ce que nous pouvons faire aujourd'hui. Nous ne devons pas avoir de craintes : si vous considérez que cette mesure est bonne aujourd'hui, elle sera...
...ils seront soumis à autorisation. Actuellement, les parents qui confient leur enfant à l'adoption ont le choix de le remettre à l'ASE ou à un OAA : ces organismes, dont les plus anciens existent depuis le début du XIX
...amental de l'adoption : le recueil du consentement des parents de naissance à l'adoption. Certes, vous m'opposerez que cela concerne peu de personnes chaque année, mais les parents qui confient leurs enfants à l'aide sociale à l'enfance tout en laissant leur identité comptent le plus souvent parmi les plus vulnérables. Quand ils prennent cette décision, les parents – souvent, dans les faits, la mère seule – signent actuellement un procès-verbal de recueil, qui contient un ensemble d'informations ainsi qu'un formulaire de consentement à l'adoption. Désormais, ce consentement exprès ne sera plus demandé. Sur le plan symbolique, la manifestation de ce consentement est pourtant absolument essentielle : du point de vue de l'enfant, elle est la preuve irréfutable de la volonté de la mère de conse...
L'enjeu est important. Après la promesse tenue, celle d'ouvrir l'assistance médicale à la procréation – AMP – aux couples de femmes et aux femmes seules, il convenait de leur permettre d'établir un lien de filiation dès la naissance de l'enfant. Ce dispositif devait garantir la protection de l'enfant mais aussi de chacune des mères, celle qui accouche et celle d'intention, en établissant un lien de filiation qui ne devait pas être fragilisé par la création d'un lien concurrent avec le donneur et qui devait être de même nature à l'égard des deux mères. C'est chose faite avec l'article 4, lequel repose sur trois principes – l'interdit, l'engagement et la reconnaissance – d'ores et déjà applicables aux couples formés par un ...
.... Des aménagements sont évidemment possibles. Le droit a évolué au cours de l'histoire, prévoyant des exceptions. Le droit de la filiation en France n'est en effet pas celui instauré par Napoléon, comme on l'entend parfois. Cependant, en niant la réalité biologique, vous ne consacrez pas la famille sociale, mais la construction sociale des liens de filiation. Vous placez sur un pied d'égalité la mère qui accouche et la mère sociale en permettant à cette dernière de reconnaître l'enfant, alors que la solution de l'adoption, permise par le droit de la filiation, offrait la même sécurité juridique aux deux mères et à l'enfant.
...e à nous. Et c'est à cause de cette obsession que j'ai tant de mal à vous faire reconnaître la spécificité de la femme qui accouche. Je vous rappelle d'où nous partons : au début de la première lecture, Mme Belloubet – votre prédécesseur, monsieur le garde des sceaux – avait déclaré que ce n'est pas l'accouchement qui fait la filiation. Ce sont ses propres mots ! Depuis, vous avez évolué, et la mère qui accouche est désormais rétablie dans ses droits. Tant mieux ! Quoi que vous en disiez, en effet, il demeurera toujours une différence entre elle et la mère d'intention, même si elle n'est pas d'ordre hiérarchique et n'exclut pas l'égalité – ce que l'alinéa 5, du reste, affirme très clairement : « Tous les enfants dont la filiation est légalement établie ont, dans leurs rapports avec leurs par...
Nous saluons le rétablissement de l'article 4 dans la rédaction adoptée par l'Assemblée nationale en deuxième lecture. Nous l'avons souhaité et demandé en commission spéciale. En deuxième lecture, le Sénat a réaffirmé son souhait de faire de la procédure d'adoption le seul moyen, pour la mère d'intention d'un enfant né du recours à l'AMP par un couple de femmes, d'établir un lien de filiation. Il a refusé l'établissement rétroactif de ce lien grâce à une reconnaissance conjointe anticipée effectuée devant notaire. Il était important de rétablir cette nouvelle procédure d'établissement de la filiation ; c'est désormais chose faite. Cependant, nous regrettons qu'elle demeure distincte ...
...la rédaction de l'article 4 adoptée par l'Assemblée en deuxième lecture, rejetant ainsi la proposition du Sénat à laquelle notre collègue Annie Genevard vient de faire référence. Cette dernière solution avait pourtant le mérite de la cohérence dans la mesure où elle ne touchait pas aux fondements du droit de la filiation. Elle permettait à la femme qui accouche naturellement d'être reconnue comme mère, en vertu du principe mater semper certa est. Le second membre du couple pouvait établir la filiation par voie d'adoption. Le nouveau système que vous créez suscite quant à lui des contradictions au sein du droit de la filiation au point de le remettre en cause. C'est le premier grief que nous formulons à l'encontre de cette proposition : elle met en péril tout un édifice juridique. Nous ...
J'aimerais d'ailleurs connaître la position du Gouvernement sur ce point : pourquoi avoir intégré dans ce texte une réforme de la filiation ? Seconde raison : pourquoi la solution de l'adoption simple devrait-elle être rejetée au profit d'une reconnaissance de l'enfant par la mère sociale ? Elle n'offre pourtant pas moins de sécurité, pour le couple comme pour l'enfant. Est-il moins valorisant d'adopter que de reconnaître ? Si tel est le cas, il faut l'expliquer à celles et ceux qui cherchent à adopter un enfant, et qui suivent pour cela un véritable parcours du combattant – même si nous sommes en train de réformer le droit de l'adoption afin qu'il soit désormais plus simp...
Une deuxième filiation s'établit alors pour l'enfant. Une rupture s'est produite au moins avec la mère qui a accouché, madame Genevard.
...l'enfant doit être celui de deux femmes. Or vous savez que cela n'est pas possible. J'ajoute – puisque l'on fait du droit, allons sur le terrain strictement juridique – qu'en introduisant dans le titre VII du livre Ier du code civil des dispositions utilisant le terme « reconnaissance » pour décrire une filiation invraisemblable – deux femmes ne pouvant, en effet, revendiquer de concert être les mères de l'enfant –, le projet de loi va immanquablement susciter du contentieux. Pourquoi ? Soit l'acte accompli par les femmes sera fragilisé par le recours au droit commun de la reconnaissance, soit les reconnaissances relevant du titre VII en général verront leur fondement de vraisemblance remplacé par un fondement volontaire, au point de ne plus être attaquables par la production d'une preuve bio...
...mme ça. C'est d'ailleurs la réponse que je veux faire à M. le garde des sceaux : nous sommes très conscients de vivre en 2021 et qu'il y a des familles recomposées, des familles homoparentales, des familles monoparentales. Le droit doit s'adapter en permanence à cette réalité, nous dites-vous ; et non seulement nous devons le comprendre, mais en plus nous devons le faire rapidement, au cas où la mère qui n'a pas encore procédé à l'adoption décéderait. Mais quand la mère qui procède seule à la procréation décède une fois l'enfant né, on fait de lui un orphelin social, puisqu'aucun lien de parentalité paternel n'aura plus la possibilité d'être établi. Mais alors, monsieur le garde des sceaux, que répondez-vous aux deux hommes qui viennent frapper à la porte de votre ministère et dire : « Nous ...
...e dans un couple lesbien. Il n'y a pas de difficulté : la filiation de l'enfant né d'une AMP ne pourra faire l'objet d'aucune contestation judiciaire. C'est totalement sécurisé, et c'est tout le bénéfice du mécanisme de la reconnaissance conjointe anticipée. Il ne donc faut pas en craindre les effets, mais au contraire encourager son usage, car elle sécurise à la fois l'enfant et chacune des deux mères. C'est très différent d'une situation adultérine – je suis certaine que vous ne ferez pas d'amalgame sur ce point. Monsieur Brindeau, il y a une incohérence dans votre raisonnement. Vous dites que le titre VII est strictement fondé sur la biologie, mais ce n'est pas le cas. La doctrine juridique est très diversifiée sur le sujet. Certains universitaires notent que, quand un homme s'engage, par ...
Madame la rapporteure, je vous retourne le compliment : ne faites pas semblant d'ignorer le rapport entre l'arrêt Mandet et le sujet dont nous parlons. De quoi parlons-nous ? Le droit commun de la reconnaissance est aujourd'hui fondé sur la production d'une preuve biologique. Vous allez changer ce fondement, ne le niez pas, puisque la mère qui n'accouche pas pourra reconnaître l'enfant sans qu'il y ait de lien biologique entre elle et l'enfant. Est-ce à dire qu'il y aura une reconnaissance d'un certain type pour certains couples et d'autres fondements de la reconnaissance pour d'autres couples ? Car c'est ce que veut dire l'arrêt Mandet en réaffirmant le lien biologique entre l'enfant et son père. Cela n'a rien à voir avec l'adultè...
...née sur l'acte de naissance intégral de l'enfant. En commission spéciale, après avoir noté les améliorations du dispositif, nous avons rappelé l'existence d'autres possibilités. La filiation de droit commun – qui permet déjà le don avec tiers donneur, la PMA, la double filiation sans lien biologique et, depuis l'adoption de la loi ouvrant le mariage aux couples de même sexe, la double mention « mère et mère » – aurait pu être étendue, comme le propose l'amendement, aux couples de femmes et aux femmes non mariées ayant recours à une AMP avec tiers donneur. Cela permettrait de conserver intégralement les droits existants pour les couples composés d'un homme et d'une femme ayant déjà accès à l'AMP avec tiers donneur, ainsi que les règles actuelles de contentieux de la filiation pour tous les pa...