Publié le 28 janvier 2019 par : Mme Frédérique Dumas, M. Guy Bricout, Mme Firmin Le Bodo, Mme Sanquer.
Supprimer cet article.
Cet article a pour but d'ajouter dans l'arsenal juridique une interdiction administrative de manifester. Il est utile de rappeler que l'interdiction de manifester est une faculté dont disposent déjà les juges en matière pénale. Ils peuvent la prononcer sous forme d'une peine complémentaire conformément à l'article L. 211‑13 du code de sécurité intérieure.
De plus, un vrai manque de contradictoire a lieu dans la rédaction proposée actuellement avec notamment l'absence de voie de recours spécifique pour contester le prononcement d'une telle mesure. Cette disposition implique une atteinte à la liberté d'aller et venir, liberté fondamentale ; dès lors, une voie de recours à la hauteur doit être prévue.
Lors des manifestations contre la loi travail en 2016, dix arrêtés d'interdiction de manifestation avaient été prononcés à l'encontre de militants antifascistes. Les arrêtés étaient motivés par le préfet de police de Paris par le fait que la participation de ces personnes à plusieurs manifestations violentes concluait qu'il y avait lieu d'interdire leur présence à un futur rassemblement.
Sur ces dix affaires portées devant le juge administratif, neuf arrêtés ont été suspendus car le juge a estimé que le préfet de police ne produisait aucun élément ne permettant de retenir que les intéressés avaient personnellement participé à ces dégradations et ces violences. (Ordonnance n°1607418/9 du 17 mai 2016).
Outre, les craintes quant à une possible contestation de la constitutionnalité de la disposition, le risque de suspension systématique par le juge administratif de telles décisions est donc réel. En conclusion, un arsenal juridique permet déjà sur le plan judiciaire d'ordonner de telles mesures, donner au pouvoir administratif une telle faculté fait courir un risque d'inconstitutionnalité mais aussi, et surtout, une inapplication des mesures dans les faits.
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