Publié le 20 novembre 2020 par : M. Rupin, Mme Pouzyreff, Mme Silin.
Supprimer cet article.
L’article 3 de la présente proposition de loi vise à prévoir un écart d’âge maximum de 45 ans entre les enfants adoptés et les parents adoptants.
Si l’objectif de cet article (permettre pour les enfants adoptés d’avoir un parent adoptif le plus à même de répondre à tous ses besoins lorsqu’il grandit) est louable, cette disposition ne semble pas appropriée dans les faits. Elle entrainerait en effet une barrière d’âge qui paraitrait arbitraire et injuste pour les familles.
A titre d’exemples, en appliquant cet article, une personne de 45 ans ne pourrait plus adopter un nourrisson, et un enfant de 5 ans ne pourrait plus être adopté par un adulte de 50 ans.
Cette disposition serait non seulement préjudiciable aux enfants adoptables, potentiellement privés de parents candidats à l’adoption dont les profils seraient par ailleurs appropriés, mais également aux parents souhaitant adopter, qui seraient confrontés à un obstacle supplémentaire dans un parcours d’adoption déjà long et éprouvant. Il est proposé de ne pas ajouter encore une difficulté pour ces parents potentiels dont le chemin vers la fondation d’une famille est parfois déjà douloureux.
Cette disposition créerait en outre une situation d’inégalité supplémentaire entre parents dits « naturels » et parents adoptants. Comme le relevait elle-même Madame Limon dans son rapport « Vers une éthique de l’adoption – Donner une famille à un enfant », «force est de constater que dans les familles recomposées, les hommes deviennent parfois à nouveau père au-delà de 45 ans et que pour une femme, une grossesse est possible naturellement à 47-48 ans ». Pour les hommes, comme pour les femmes, cette situation n’est en outre pas limitée aux familles recomposées et, dans les familles comprenant plusieurs enfants, il n’est pas rare que les derniers enfants soient conçus par les parents à un âge plus avancé. Or nul ne songerait à interdire à ces parents de concevoir un enfant au-delà d’un certain âge.
Enfin, il faut accepter le fait que, dans le cas de parents adoptants, lesquels entreprennent souvent les démarches d’adoption après des tentatives infructueuses de concevoir un enfant naturellement ou par assistance médicale à la procréation, ces démarches peuvent être commencées à un âge plus élevé. Les statistiques de l’Agence Française de l’Adoption révèlent ainsi qu’en 2018, 68% des hommes candidats et 65% des femmes candidates avaient entre 35 et 44 ans au début de ces démarches (signature du « Projet de mise en relation ») et que, respectivement, 25% et 22% avaient déjà plus de 45 ans.
En outre, compte tenu de la longue durée des démarches d’adoption, 59% des hommes candidats et 49% des femmes candidates avaient finalement plus de 45 ans au jour de la délivrance du visa permettant l’arrivée de l’enfant en France (en provenance donc de pays extérieurs à l’espace Schengen).
Il serait extrêmement regrettable que la présente proposition de loi en vienne à priver ces potentiels parents, et les enfants concernés, de leur rencontre et de la possibilité de fonder une famille. Il serait également inopportun qu’une personne considérée comme parfaitement apte à adopter un enfant soit, d’un jour à l’autre, contrainte de renoncer à cette adoption et à l’ensemble des démarches entreprises pendant de nombreuses années, pour le simple fait d’avoir franchi l’écart d’âge maximal autorisé.
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