Publié le 5 octobre 2020 par : M. Diard, Mme Boëlle, M. Brochand, Mme Bouchet Bellecourt, M. Marleix, M. Perrut, Mme Trastour-Isnart, M. Rolland, M. Saddier, M. Rémi Delatte, M. Dive, Mme Meunier, Mme Kuster, M. Quentin, M. Pauget, Mme Brenier, Mme Serre, M. Viry, Mme Beauvais, M. Vatin, M. Dassault, Mme Guion-Firmin, M. Reda, Mme Corneloup.
Après l’article L. 214‑9‑1 du code rural et de la pêche maritime, il est inséré un article L. 214‑9‑2 ainsi rédigé :
« Art. L. 214-9-2. – La castration à vifs des porcelets est interdite sur l’ensemble du territoire au plus tard au 31 décembre 2021. »
Dans l’Union européenne, 100 millions de porcelets sont castrés sans anesthésie ni analgésie dans les 7 jours de leur naissance. Cette pratique cruelle a pour seul objectif d’éviter l’odeur de verrat de la viande. Pourtant, seulement 3 % des porcs mâles sexuellement matures produisent des substances chimiques (androstérine et scatol), rendant la viande porteuse d’odeurs ou d’un goût indésirables.
L’animal est saisi et immobilisé par un opérateur qui procède à deux incisions dans la zone du scrotum. Les testicules sont libérés et extraits pour être éliminés en coupant le cordon spermatique, le tout sans anesthésie. Le porcelet, stressé et mutilé, est remis dans son enclos sans que la plaie ne soit refermée ou soignée. Le cochon est traité comme un produit de consommation alors qu’il effectue avec succès le test du miroir, preuve pour les scientifiques de son extrême intelligence. Le cochon serait ainsi l’un des animaux les plus intelligents, nul doute ce faisant que sa capacité à ressentir la douleur est proche de celle de l’humain.
L’INRA reconnaît « l’existence d’une douleur aigüe pendant la castration puis des douleurs fortes pendant quelques heures et ensuite modérées les quelques jours qui suivent ». Les scientifiques de la Commission européenne le confirment également.
Cette pratique cruelle est pourtant autorisée par :
- les articles 19 et 20 de la directive 98/58/CE du 20 juillet 1998 concernant la protection des animaux dans les élevages
- l’annexe 8 de l’arrêté du 16 janvier 2003 établissant les normes minimales relatives à la protection des porcs
- l’annexe 8 de la directive 2008/120/CE du Conseil européen en date du 18 décembre 2008 établissant les normes minimales relatives à la protection des porcs
L’Europe souhaite pourtant interdire cette pratique et nombre de pays ont signé dès 2010 une déclaration européenne commune.
Depuis de nombreuses années, des associations de protection animale et ONG comme PETA et Welfare avec sa campagne Couic de 2018 souhaitent son interdiction. Selon un sondage Yougov de 2017, 85 % des consommateurs français sont défavorables aux mutilations pratiquées sur les cochons.
Depuis 2018, l’agence européenne de la sécurité alimentaire demande une révision de la loi.
De nombreux pays voisins interdisent la castration à vif des porcelets : la Belgique en pays Wallon, la Norvège depuis 2002, la Suisse en 2010 et la Suède en 2016. Cette pratique barbare n’existe pas au Royaume Uni, ni en Irlande, en Espagne et aux Pays Bas. L’Allemagne est favorable à son interdiction.
La grande distribution met en place des alternatives en ne commercialisant plus de viande de porc mutilé. Ainsi, le groupe coopératif COOPAL invite depuis 2012 ses éleveurs de porcs adhérents à ne plus castrer.
De nombreux facteurs de risques d’odeur peuvent aisément et avec un poids économiquement neutre être évités : il suffit d’améliorer le bien-être des porcs en évitant les salissures avec des enclos propres et secs, des aires de couchage distinctes des lieux de déjection etc.
Le ministre de l’Agriculture et de l’Alimentation avait annoncé, en octobre 2019, que la castration à vif des porcelets serait interdite à compter de fin 2021. Sans que son annonce ne soit suivie d’explications quant aux alternatives à valider ainsi que sur les conséquences pour les entreprises du secteur visé, le ministre de l’Agriculture et de l’Alimentation valide cependant les avancées sur le sujet.
Dès lors pourquoi attendre fin 2021 ? En effet, des alternatives sans coût pour la filière porcine existent :
- Des nez (humains ou mécanisés) sentent la viande dans les abattoirs. Des emplois sont ainsi créés. Les carcasses odorantes sont dirigées vers des circuits type salaison ou plats cuisinés.
Sur le plan économique, les porcs mâles non castrés ont un meilleur indice de consommation : pour un même poids, leur engraissement demande moins de frais. Un gain de 5 euros est estimé par animal en élevage.
- L’immuno-castration ou administration d’un médicament préventif type Improvac.
Cette pratique est validée par l’ANSES et l’EFPA : aucun résidu de ce médicament ne se trouve dans la nourriture. La Commission européenne a délivré une autorisation de mise sur le marché de l’improvac.
Sur le plan économique, malgré le prix d’achat du vaccin, l’immuno-castration permet un gain de 3 euros par animal.
Les consommateurs sont de plus en plus vigilants quant au bien-être animal et font de cette question un critère déterminant pour leurs achats. Loin de préparer une réglementation contraignante supplémentaire, cette proposition de loi est une opportunité de modernisation de notre agriculture du 21ème siècle.
Les éleveurs, conscients de la violence que représente la castration à vif des porcelets, sont volontaires pour changer cette pratique, compte tenu des souffrances psychologiques qu’elle engendre sur eux. Pourtant, faute de formation et d’informations, ils continuent à pratiquer la castration à vif, pensant qu’elle est le seul moyen de poursuivre leur activité. Cet amendement vise donc à interdire la castration à vif des porcelets pour l’ensemble des filières, afin de montrer les alternatives qui s’offrent aux éleveurs et de les accompagner pour leur permettre de concilier le bien-être animal et une activité viable et pérenne.
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