Publié le 10 décembre 2020 par : Mme Thill.
Cet amendement a été déclaré irrecevable après publication en application de l'article 98 du règlement de l'Assemblée nationale
L’Europe fait face à une pression migratoire d’une ampleur exceptionnelle et sans équivalent depuis la seconde guerre mondiale. Dans ce contexte et dans la plupart des cas depuis quelques années, les Mineurs non accompagnés (MNA) ne sont pas des jeunes arrivant de pays en guerre et relevant du droit d’asile. Il s’agit majoritairement d’une immigration économique, venant surtout du Maghreb et d’Afrique de l’Ouest, régions qui offrent des opportunités financières aux trafiquants d’êtres humains. D’après des sources policières, le passage en France d’un majeur s’élève entre 7 000 et 9 000 euros, celui d’un mineur jusqu’à 15 000 euros.
Le droit des MNA se révèle aussi complexe que débattu. Le problème de la gestion par les départements de ces mineurs (ou supposés tels) qui sont sans protection familiale ne cesse de soulever des polémiques sur fond de drames et de difficultés administratives et financières.
Les MNA représentent entre 15 et 20 % des mineurs pris en charge par l’Aide sociale à l’enfance (ASE – cet acronyme sera utilisé par la suite). Le coût de la prise en charge d’un MNA au titre de l’ASE est estimé en moyenne à 50 000 euros par mineur et par an, couvrant le logement, la nourriture, les frais d’éducation et de formation.
Les départements qui prennent en charge les mineurs étrangers jusqu’à leur majorité, et souvent au‑delà, sont démunis face à des arrivées massives et plus importantes que prévues : le phénomène de saturation des structures d’accueil s’accentue, la vérification de la minorité est sujette à des controverses. Les exemples récents de fraudes à la détermination de la minorité deviennent légion et l’on ne compte plus les cas où des hommes ayant visuellement bien plus de 18 ans sont considérés comme des MNA.
L’attentat du 25 septembre 2020, qui visait à nouveau le journal « Charlie Hebdo » a rallumé nos souvenirs les plus tragiques et nous a rappelé que nous sommes encore et toujours sous la menace permanente et très difficilement prévisible d’attentats islamistes.
Mais cette attaque met également en lumière un problème de sécurité récurrent. En effet, l’auteur présumé de ces attaques se serait fait passer pour un mineur afin d’être pris en charge par l’aide sociale à l’enfance du Val‑d’Oise, alors qu’il était déjà, et depuis longtemps, majeur.
Emblématique, ce cas n’est pourtant pas isolé. En effet, 16 760 mineurs ont ainsi été confiés à l’ASE par décision judiciaire en 2019. Ajoutés au nombre de mineurs isolés étrangers qui étaient déjà pris en charge, 40 000 jeunes au total seraient considérés comme des mineurs non accompagnés.
Or, il ressort du rapport d’information sur la prise en charge sociale des mineurs non accompagnés du 28 juin 2017, rédigé par les sénateurs Élisabeth Doisneau et Jean‑Pierre Godefroy, qu’environ 60 % de ces mineurs non accompagnés sont en réalité majeurs.
Ces derniers savent qu’ils ont parfaitement le droit de refuser un examen médical pour masquer leur majorité. Il apparaît donc urgent de les responsabiliser en posant une présomption de majorité, dès lors que l’intéressé refuse de se soumettre au test.
Cette mesure vise à mieux faire appliquer la loi, tant pour les présumés majeurs qui seront soumis au régime qui leur est applicable, que pour les mineurs, qui bénéficieront ainsi d’une meilleure allocation des ressources publiques non détournées.
Enfin, afin de garantir les droits des intéressés en amont comme en aval de l’examen médical, il semble utile de fixer dans la loi certaines dispositions comme la nécessaire information de l’intéressé, le doute qui lui bénéficie, ou l’exclusivité des unités médico‑judiciaires pour procéder à ces tests.
Réjouissons‑nous que les lois protègent les mineurs, mieux et plus que les autres : un mineur est en effet une personne vulnérable mais pour ce faire, encore faudrait‑il savoir si la personne est mineure. Si ce n’est qu’aux seules fin d’obtenir toutes les protections que nous lui devons et qui lui sont dues.
En conséquence, cet amendement vise à réécrire l’article 388 du code civil.
Les alinéas 2 à 3 maintiennent la version actuelle de cet article, en vigueur depuis la loi du 14 mars 2016.
L’alinéa 4 établit qu’en cas de refus de l’intéressé de se soumettre au test, celui‑ci est présumé majeur. Ce nouvel alinéa vise à responsabiliser l’intéressé, et renverse la présomption de minorité révélée par la décision de principe du Conseil d’État du 1er juillet 2015 (n° 386769) pour le seul cas où l’intéressé ferait valoir son droit de refuser l’examen médical de son âge.
L’alinéa 5 établit que la possession de documents falsifiés ou qui ne peuvent pas être valablement certifiés conformes entrainent de‑facto la demande d’examens médicaux tels que stipulés dans les alinéas 9 et 10.
L’alinéa 6 établit, conformément à l’article L. 1111‑4 du code de la santé publique, que l’intéressé doit être :
– consentant à l’examen ;
– informé de ses modalités et de ses conséquences en termes de prise en charge ;
– informé dans une langue dont il est raisonnable de penser qu’il la comprend.
L’alinéa 7 impose également l’obligation d’information sur la présomption de majorité en cas de refus de se soumettre à l’examen médical.
L’alinéa 8 dispose que le doute, au vu des conclusions de l’examen médical, bénéficie à l’intéressé, maintenant ainsi une disposition déjà présente dans l’article actuel et qui se trouve conforme à la note technique « La détermination de l’âge » émise par l’UNICEF en janvier 2013.
L’alinéa 9 précise que l’examen doit être effectué exclusivement au sein d’une unité médico‑judiciaire. Il transforme en disposition de nature législative une disposition émanant de la circulaire interministérielle du 25 janvier 2016 « relative à la mobilisation des services de l’État auprès des conseils départementaux concernant les mineurs privés temporairement ou définitivement de la protection de leur famille et les personnes se présentant comme tels. »
L’alinéa 10 précise la nature de l’examen qui doit être réalisé sur la base d’un protocole unique et opposable intégrant : des données cliniques, des données dentaires, des données radiologiques de maturité osseuse, afin de réduire au minimum la marge d’erreur.
L’alinéa 11 dispose que, en cas de doute sur la minorité de l’intéressé, il ne peut être procédé à une évaluation de son âge à partir d’un examen du développement pubertaire des caractères sexuels primaires et secondaires.
L’alinéa 12 dispose que si l’intéressé est déclaré mineur, alors il ne peut être accueilli que dans une structure adaptée qui le protège, l’encadre, l’éduque et le surveille, comme tout mineur y a droit. Il s’agit ici de s’assurer que le mineur n’est pas livré à lui‑même dans un hôtel ou autre hébergement en totale autonomie.
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