Dans le cadre de la commission élargie, la commission des affaires économiques a examiné pour avis, sur le rapport de M. Serge Letchimy, les crédits de la mission « Outre-mer » (voir le compte rendu officiel de la commission élargie du 30 octobre 2017, sur le site internet de l'Assemblée nationale) (1)
À l'issue de la commission élargie, la commission des affaires économiques a délibéré sur les crédits de la mission « Outre-mer ».
La commission examine l'article 29, elle est saisie de l'amendement n° II-CE64 de M. Serge Letchimy.
Je demande à M. Serge Letchimy de bien vouloir présenter son amendement.
Les Antilles françaises ont récemment connu deux catastrophes consécutives avec le passage des ouragans Irma puis Maria, dont les vents ont respectivement dépassé 250 kmh et 300 kmh. Les dégâts engendrés sont considérables, notamment en matière de logements. Pour rappel, la reconstruction des immeubles d'habitation et des maisons individuelles avait pris plus de dix ans en Guadeloupe suite au passage de l'ouragan Hugo en 1989. Aujourd'hui, de nombreuses familles logent dans des habitations de fortune, qui ne procurent pas de protection face aux vents forts.
C'est dans cette optique que j'invite le Gouvernement non seulement à mettre en oeuvre les actions d'urgence prises habituellement après ce type de catastrophes, mais également à déployer des politiques de plus long terme. En effet, si des aides existent en faveur de l'amélioration du parc de logements privés en matière de salubrité, via l'Agence nationale de l'habitat, aucune aide n'est prévue pour le renforcement de la résistance des habitations face aux risques cycloniques et sismiques. Cette situation est incompréhensible. Mon amendement propose d'y remédier en débloquant 5 millions d'euros, transférés du programme 138 au programme 123. Surtout, il ouvre une porte pour inciter le Gouvernement à créer une ligne de crédits en faveur de ce type de travaux.
Sur le fond, votre amendement est totalement justifié. Effectivement, comme l'a rappelé Madame la ministre, il n'existe pas de crédits destinés à la consolidation des habitations contre les risques sismiques et cycloniques. Or, ces risques s'imposent de plus en plus fortement à nos territoires ultramarins. La réflexion mérite donc d'être poussée plus loin en ce sens.
Cependant, les dispositifs de défiscalisation existants mentionnés aux articles 199 undecies A et 199 undecies C pourraient être étendus pour permettre de répondre à cet objectif. Je déposerai donc, devant la commission des finances sur les articles non rattachés, des amendements qui vont dans ce sens. Dans cette optique, nous sommes défavorables à l'adoption de votre amendement.
Mon collègue Olivier Serva a bien souligné l'intérêt de mon amendement sur le fond mais il s'est trompé sur la manière d'atteindre l'objectif souhaité. La défiscalisation dont il parle n'est applicable qu'aux logements de plus de 20 ans et n'est, par nature, ouverte qu'aux personnes qui payent des impôts. Malheureusement, étant donné qu'environ 22 % de la population active des territoires concernés est au chômage, le nombre de personnes susceptibles de bénéficier de la défiscalisation est limité. Dès lors, les personnes les plus démunies, qui sont également celles qui vivent dans des habitations les plus vulnérables, ne perçoivent aucune aide. L'amendement que je dépose vise donc à répondre à cette situation. Je ne comprends pas pourquoi, par ailleurs, le Gouvernement ne dédie aucun fonds spécial en faveur de la reconstruction des habitations à Saint-Martin. L'adoption de l'amendement permettrait d'enclencher une démarche dans cette voie, par sens de responsabilité et d'anticipation face à ce genre de catastrophes.
Je soutiens cet amendement qui vise à accompagner les personnes dont l'habitation n'est pas assurée et qui ne sont pas imposables, et devraient donc être aidées. Cela participerait à la politique de prévention qui doit être mise en place contre ces événements majeurs que sont les séismes et les cyclones, dont les dangers ont été mis en évidence au cours du mois de septembre. L'amendement que nous discutons, à la différence des dispositifs de défiscalisation, concerne les personnes les plus défavorisées.
En réalité, la défiscalisation sur l'habitat social individuel concerne justement des personnes, souvent âgées, aux revenus très modestes, qui touchent moins de 900 euros par mois. Le dispositif de la défiscalisation leur permet, pour des habitations de plus de 20 ans, de rénover significativement leur habitation. L'amendement que je déposerai devant la commission des finances sur les articles non rattachés vise à étendre ce dispositif aux travaux de consolidation face aux risques sismiques et cycloniques. Les personnes démunies pourront donc bien bénéficier de ces mesures.
L'amendement II-CE 64 est rejeté.
Je demande à M. Serge Letchimy de bien vouloir formuler un avis sur les crédits de la mission « Outre-mer ».
La commission émet un avis favorable à l'adoption des crédits de la mission « Outre-mer ».
, nous sommes à présent saisis d'un amendement portant article additionnel après l'article 57.
La commission examine l'amendement n° II-CE65 de M. Serge Letchimy.
Il s'agit d'un amendement d'appel pour ouvrir la discussion concernant le crédit d'impôt pour la compétitivité et l'emploi (CICE). Deux enjeux se présentent à nous.
Premièrement, le Gouvernement a décidé de mettre fin au CICE et de le transformer en réduction de charges, sans que nous ne connaissions les modalités précises de cette transformation et ses conséquences sur l'activité et l'emploi. Pour l'outre-mer, le Gouvernement ne nous apporte pas de réponse très précise sur la question de savoir si ces baisses de charges vont se substituer ou non aux dispositifs de défiscalisation prévus par la loi pour le développement économique des outre-mer. Or, la compétitivité économique est un sujet essentiel dans nos régions ultramarines. En outre, nous considérons, comme l'affirme M. Olivier Serva dans son rapport spécial sur le présent projet de loi de finances, qu'il est indispensable de créer un moratoire sur la fin des dispositifs de défiscalisation, notamment s'agissant du dispositif destiné à la réhabilitation des logements de plus de 20 ans, dont nous venons de parler et qui doit s'éteindre fin 2017. Je note d'ailleurs qu'il n'est pas certain que les habitants de Saint-Martin éligibles à cette défiscalisation pourront en bénéficier, ce dispositif s'éteignant très prochainement.
En second lieu, nous considérons qu'il est inutile que le CICE s'applique aux centres commerciaux, aux concessionnaires de voitures, à La Poste et aux banques, qui ne devraient pas en bénéficier. À travers cet amendement demandant la production d'un rapport, nous demandons, en sens inverse, que le CICE s'applique à l'hôtellerie, et au tourisme en général, à un taux suffisamment élevé pour assurer la compétitivité de ce secteur.
Mon collègue Serge Letchimy a tout à fait raison de constater que le tourisme fait partie des industries les plus importantes, souvent même la plus importante, dans les outre-mer ; elle doit donc être soutenue. Le tourisme, l'hôtellerie en tout cas, doit faire face à des coûts salariaux bien supérieurs à ceux constatés dans l'environnement caribéen. En ce sens, nous avons d'ailleurs mené une réflexion commune et échangé avec des acteurs du secteur dans les outre-mer.
Cependant, cet amendement pose trois problèmes. En premier lieu, porter le taux du CICE à 50 % pose un problème de réglementation européenne en matière d'aides d'État, qui doit être purgé. En deuxième lieu, le taux lui-même ne fait pas l'objet d'un accord de tous les acteurs du secteur : alors que semblait émerger un consensus au départ, il est aujourd'hui beaucoup moins évident. En dernier lieu, les Assises des Outre-mer, qui vont débuter, vont être l'occasion de réfléchir sur ce sujet et de tenter d'aboutir à une position commune sur le taux et les secteurs concernés, comme le tourisme, et l'hôtellerie en particulier. Il s'agira là d'une décision de plus long terme que ce que propose cet amendement.
Pour ces raisons, nous sommes défavorables à l'adoption de l'amendement.
M. Olivier Serva a anticipé la discussion des amendements que je déposerai, en commission des finances sur les articles non-rattachés et en séance publique, pour porter le CICE à un taux élevé dans le secteur du tourisme. N'oublions pas que de nombreuses chambres d'hôtels ont été fermées dans les Antilles françaises ces dernières années, que la compétitivité de l'hôtellerie y est catastrophique, les coûts fixes étant bien plus élevés qu'en République dominicaine par exemple, que la saisonnalité a des effets désastreux, que la bataille du désenclavement aérien, tant avec l'Europe qu'avec l'Amérique, n'est toujours pas gagnée et, enfin, que le secteur touristique dépend encore très largement des touristes venant de l'hexagone.
Je précise que l'amendement que nous discutons actuellement ne prévoit pas de porter le CICE à 50 % dans le secteur du tourisme mais demande simplement qu'un rapport soit rédigé à ce sujet.
La commission rejette l'amendement n° II-CE65.
Membres présents ou excusés
Réunion du lundi 30 octobre 2017 à 23 h 05
Présents. - Mme Sophie Beaudouin-Hubiere, M. Éric Bothorel, M. Anthony Cellier, Mme Michèle Crouzet, M. Yves Daniel, Mme Sophie Errante, Mme Christine Hennion, Mme Marie Lebec, M. Roland Lescure, M. Serge Letchimy, Mme Monique Limon, Mme Graziella Melchior, M. Jean-Baptiste Moreau, Mme Valérie Oppelt, M. Benoit Potterie, Mme Bénédicte Taurine, Mme Huguette Tiegna
Excusés. - Mme Marie-Noëlle Battistel, M. Daniel Fasquelle, M. Dominique Potier
Assistaient également à la réunion. - M. Olivier Serva, Mme Hélène Vainqueur-Christophe
/1 () http://www.assemblee-nationale.fr/15/budget/plf2018/commissions_elargies/cr//