Commission d'enquête sur la situation et les pratiques de la grande distribution et de ses groupements dans leurs relations commerciales avec les fournisseurs

Réunion du mercredi 10 juillet 2019 à 19h00

Résumé de la réunion

Les mots clés de cette réunion

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La réunion

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La séance est ouverte à dix-neuf heures.

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Nous accueillons pour cette audition M. Ludovic Châtelais, directeur général de Cora, M. Lionel Barbaras, directeur général exécutif de la société Provera, et Mme Annabelle Guidi, directrice juridique.

Nous sommes en audition publique ouverte à la presse. Si une partie de nos échanges nécessite un huis clos, nous pourrons l'organiser sans difficulté. Ces échanges seront consignés, mais ne figureront pas dans le rapport définitif présenté par le rapporteur au mois de septembre.

Je suis accompagné de Grégory Besson-Moreau, rapporteur de notre Commission d'enquête, et avec les membres présents, nous allons procéder aux échanges et questions.

S'agissant d'une commission d'enquête, il me revient, conformément aux dispositions de l'article 6 de l'ordonnance du 17 novembre 1958, de vous demander de prêter serment, de dire la vérité, toute la vérité, rien que la vérité. Monsieur Ludovic Châtelais, monsieur Lionel Barbaras et madame Annabelle Guidi, veuillez lever la main droite et dire « Je le jure ».

M. Ludovic Châtelais, M. Lionel Barbaras et Mme Annabelle Guidi prêtent successivement serment.

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Ludovic Châtelais, directeur général de Cora

Je représente en tant que directeur général la société Cora France, une filiale du groupe belge Louis Delhaize, fondé en 1875. Cora France est un acteur historique de la distribution en France et présente quelques singularités.

Nous sommes les plus petits acteurs de la grande distribution française avec 2,6 % de part de marché et 61 hypermarchés exploités en France. Nous sommes un groupe intégré avec un mode de fonctionnement décentralisé avec comme principe directeur pour chaque magasin le « marketing de site », qui vise à mettre en place un assortiment le plus adapté à son environnement et qui se traduit par un référencement local important.

Cora France emploie 18 000 collaborateurs, soit près de 300 par magasin, majoritairement implantés sur le quart nord-est de la France, principalement dans des villes de taille moyenne, faisant de nos magasins des acteurs importants à l'échelle locale, avec des emplois non délocalisables. Le chiffre d'affaires (CA) 2018 de Cora France est de 4,4 milliards (carburants compris) et 3,6 milliards (hors carburants). La taille moyenne de nos hypermarchés est de 8 000 m². Nous évoluons actuellement sur le format le plus délicat de la grande distribution, notre mix de chiffre d'affaires alimentaire et non alimentaire étant historiquement équilibré.

Mais ces dernières années, avec la dématérialisation de certains supports (CD, DVD), la montée en puissance du e-commerce et l'arrivée de nombreux spécialistes sur ces secteurs d'activité, le chiffre d'affaires non alimentaire s'effondre, nous obligeant à repenser notre modèle.

Ce phénomène n'échappe pas à l'alimentaire, avec les nouveaux entrants sur nos zones de chalandise : Action, Grand Frais, Lidl, qui multiplient les implantations dans les villes moyennes.

Ce format souffre également d'un écart de compétitivité par rapport à ses concurrents en raison de contraintes fiscales propres à la surface et aux valeurs du chiffre d'affaires que n'ont pas ces nouveaux concurrents comme la taxe sur les surfaces commerciales (TaSCom), la taxe locale sur les enseignes et publicités extérieures (TLPE) et la contribution foncière. Ce format ne se développe donc plus et fait face à l'arrivée massive de formats de moins de 1 000 m².

Notre taille critique, avec un faible pouvoir de négociation face aux concentrations des grands industriels dans un contexte de guerre des prix depuis 2014, nous a contraints à chercher des alliances à l'achat afin de maintenir notre compétitivité. Le rapport de force évoqué entre grande distribution (GD) et grands industriels est loin d'être une réalité pour nous et je suis à votre disposition pour développer en huis clos cette situation actuelle.

En l'absence d'alliance à l'achat, notre décrochage en termes de conditions d'achat avec ces grands groupes internationaux et de compétitivité en aval aura été fatal à notre enseigne, au point d'être présent ce jour pour évoquer ce sujet avec vous.

Je vais développer en quelques points notre fonctionnement achats avec Carrefour sur la structure Interdis. Les caractéristiques de l'adhésion Interdis avec Carrefour ne concernent que les principaux fournisseurs, au nombre de 209, à savoir 179 sur la partie alimentaire et 30 sur le non alimentaire. Par fournisseurs principaux, j'entends les fournisseurs internationaux avec un portefeuille de marques. Ces 209 fournisseurs représentent 4 % de nos 7 000 fournisseurs et réalisent 49 % du chiffre d'affaires. Vis-à-vis de ces énormes groupes, nous avons disparu de la négociation. Nous apportons nos petites parts de marché à Interdis. L'accord est un accord d'adhésion aux centrales de Carrefour pour négocier l'accord-cadre annuel avec les fournisseurs. Il garantit le maintien de concurrence en aval et aux positions géographiques de nos deux enseignes. Par ailleurs, chacune des enseignes est autonome sur la mise en oeuvre des dynamiques promotionnelles et des nouveaux instruments promotionnels (NIP). Les logistiques sont également indépendantes.

En dehors de ces accords, Cora a mandaté la société Provera, filiale de Louis Delhaize, représentée par Lionel Barbaras, qui négocie directement auprès des fournisseurs de taille intermédiaire et régionaux.

Provera négocie avec 2 094 fournisseurs qui pèsent 30 % du chiffre d'affaires, dont 904 en alimentaire et 1 190 en non alimentaire.

Enfin, Cora achète et négocie directement pour ses magasins via les achats effectués par nos managers de rayon auprès de 4 743 fournisseurs locaux, pour 21 % du chiffre d'affaires.

En conclusion, dans un marché d'hypermarchés très chahuté, sans cette compétitivité « achats » via nos adhésions aux centrales d'achat, les consommateurs n'entreraient plus dans nos magasins, ce qui aurait pour conséquence leur fermeture et la perte d'emploi de nos 18 000 collaborateurs, et priverait tous nos fournisseurs locaux de ces débouchés. Le consommateur trouverait toujours les produits de grande consommation de ces fournisseurs industriels chez nos concurrents, mais pas les offres de ces fournisseurs locaux, qui sont des produits différenciés.

Les conséquences d'une perte de compétitivité à l'achat induiraient la concentration du nombre d'acteurs sur le marché de la grande distribution par la disparition des petits acteurs.

Au-delà de l'intérêt pour le consommateur et celui de son pouvoir d'achat, la diversité du paysage des enseignes de la grande distribution contribue à garantir l'équilibre des relations commerciales.

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Il est vrai que votre cas comporte une spécificité due au fait que vous avez de grands magasins, des hypermarchés, peu nombreux (61) et que vos fournisseurs sont locaux pour la plupart.

Comment expliquer que le groupe Cora soit resté uniquement au stade des hypermarchés ? Maintenir exclusivement des hypermarchés alors que le monde du commerce évolue est-il un choix stratégique ?

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Ludovic Châtelais, directeur général de Cora

L'enseigne Louis Delhaize exploite en France les supermarchés Match, et nous sommes restés sur le marché des hypermarchés. Nous avons récemment ouvert deux magasins sur des formats un peu plus modestes par rapport à la taille habituelle de nos hypermarchés. Effectivement, il s'agit de deux mondes différents.

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Lorsque vous avez parlé des négociations et notamment des centrales, vous avez évoqué Interdis, une centrale nationale. Des négociateurs de Cora négocient-ils directement dans cette centrale ou est-ce Carrefour qui négocie pour vous ?

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Ludovic Châtelais, directeur général de Cora

Nous adhérons à Interdis et Carrefour négocie entièrement pour nous. C'est pour cela que j'ai déclaré que nous avions « disparu » de la négociation avec l'ensemble de ces fournisseurs.

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Ma question est double. Pourquoi n'avez-vous pas été invités ou n'avez-vous pas négocié pour rentrer dans Envergure ? Carrefour le fait avec Système U. Pourquoi ne le ferait-il pas avec vous ?

Le chiffre d'affaires de Carrefour s'élève à environ 90 milliards d'euros et celui de Cora à 4,4 milliards. Est-ce pour profiter d'un alignement des prix avec Carrefour ? Pour bien comprendre, appliquez-vous les mêmes prix que Carrefour ?

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Ludovic Châtelais, directeur général de Cora

Pour répondre à la première question sur Envergure, nous adhérons à Interdis. Carrefour ayant contracté avec U sur la structure Envergure, nous n'avons pas du tout de relation dans cette dernière.

Concernant la deuxième partie de la question, notre objectif aujourd'hui est de retrouver une compétitivité à l'achat que nous n'avions pas. Nous pourrons entrer dans des détails concrets pour vous expliquer à quel point nous étions décrochés en termes de compétitivité. Avec un décrochage de « X » sur les achats, la survie de notre entreprise est engagée.

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Pour bien comprendre, si on prend l'exemple d'une bouteille d'eau, Carrefour la négociait à 1 € et vous à 1,10 €. Le fait de vous être associés fait que les prix peuvent être alignés et que la bouteille s'achète à 1 € chez les deux.

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Lionel Barbaras, directeur général exécutif de la société Provera

Nous avons adhéré à la centrale Interdis comme auraient pu le faire des indépendants chez eux. À ce titre, nous bénéficions de leurs conditions.

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Cela permet, plutôt que d'acheter à 1,10 € et de rogner sur vos marges ou sur l'entretien des magasins par exemple, d'acheter au même prix que Carrefour.

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Lionel Barbaras, directeur général exécutif de la société Provera

Nous avons effectivement bénéficié des conditions d'Interdis.

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Par conséquent, cela implique une possibilité d'alignement des prix.

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Ludovic Châtelais, directeur général de Cora

Je n'ai pas parlé d'alignement des prix. Nous bénéficions de la compétitivité Carrefour à l'achat, qui nous permet de maintenir des positions de prix compétitifs dans nos magasins en termes de prix de vente.

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Mais il n'y a pas de distinction dans la négociation avec un fournisseur entre un produit qui aura la destination du magasin Carrefour ou du magasin Cora, c'est-à-dire que si un négociateur d'Interdis négocie un certain nombre de produits comme du chocolat, ce même produit est négocié de la même manière. D'un côté, il ira dans les enseignes Carrefour, et de l'autre dans les 61 magasins Cora.

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Ludovic Châtelais, directeur général de Cora

C'est bien cela.

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Lionel Barbaras, directeur général exécutif de la société Provera

Nous faisons partie intégrante de la convention Interdis au même titre qu'une enseigne Carrefour.

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Interdis est 100 % Carrefour, de même pour Envergure. Nous parlons ici de 61 hypermarchés qui représentent 4,4 milliards de chiffre d'affaires. De l'autre côté, nous parlions de Système U, qui comprend une pléthore de petits supermarchés de proximité de bonne qualité. Encore de l'autre côté, on voit un géant qui fait 89 milliards d'euros et tout le monde est au même prix. C'est ce que j'appelle un alignement des prix et des conditions commerciales similaires. Peu importe l'entité qui vend, celle qui achète passe le message pour obtenir les mêmes conditions commerciales. Ce que vous nous dites est extrêmement important.

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Lionel Barbaras, directeur général exécutif de la société Provera

À la nuance près que je vous en ai parlé pour Interdis. J'apporte mon plan d'affaires à Interdis qui lui-même, faisant partie globalement, avec Provera, d'Envergure, apporte le plan d'affaires dont je fais partie à Envergure. Je ne vous ai jamais parlé d'alignement des prix chez Envergure entre Système U et Interdis. Je n'en fais pas partie et je ne peux pas vous le dire.

Mon plan d'affaires est apporté de façon pleine et entière chez Carrefour ou Interdis, si vous voulez, qui lui-même apporte globalement son plan d'affaires par enseigne ou modèle de Carrefour, plus Cora, plus Supermarchés Match.

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On nous a expliqué que pour éviter ce mécanisme d'alignement des conditions commerciales, lorsqu'une bouteille est négociée 1 € chez Carrefour et 1,10 € chez vous, quand Carrefour négocie pour - 3 % en déflation, il calcule - 3 % sur 1 € et - 3 % sur 1,10 €. Or vous venez de me dire que grâce à la centrale d'achat, vous êtes passés de 1,10 à 1 €.

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Ludovic Châtelais, directeur général de Cora

Nous ne sommes pas en mesure de vous dire qu'il y a un alignement des prix. Nous avons bénéficié d'un apport de compétitivité grâce à l'adhésion à Interdis. Nous n'avons pas de vision claire sur le prix négocié.

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Lionel Barbaras, directeur général exécutif de la société Provera

C'est la base de l'accord.

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Ludovic Châtelais, directeur général de Cora

Lionel pourra davantage évoquer la partie qui porte sur la base de l'accord.

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Je ne comprends pas très bien. Cora adhère à Interdis et de ce fait confie à Carrefour la gestion, la négociation d'achat à 179 entreprises alimentaires et 30 non alimentaires. Provera est une centrale d'achat qui n'intervient pas dans les négociations d'Interdis. Vous ne parlez pas de vos plans d'affaires à Interdis lorsque Cora négocie avec les marques. Vous nous avez expliqué que Provera est le négociateur, la centrale qui négocie avec les petites et moyennes entreprises (PME) et les entreprises de taille intermédiaire (ETI).

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Lionel Barbaras, directeur général exécutif de la société Provera

Nous allons vous réexpliquer notre mode de fonctionnement. Nos enseignes Cora et Supermarchés Match ont mandaté Provera en septembre 2002 pour négocier leurs achats de marques de distributeur (MDD) nationales premier prix. Au fil de l'eau, la compétitivité a manqué crucialement, notamment avec la guerre des prix de 2014, et nous avons été contraints à cette période de trouver des solutions de partenariat à l'achat. Dans ce cadre, nous avons fait adhérer Provera à Interdis et en tant que Provera, je collecte auprès de Cora et de Supermarchés Match mes mandants, la partie des plans d'affaires que j'apporte à Interdis et que je développe auprès d'Interdis. Est-ce plus clair ?

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Oui, cela se précise, même si ce montage reste compliqué.

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Pour rester sur l'exemple de la bouteille d'eau, vous dites confier vos achats à Carrefour, lequel vous ramène un prix plus compétitif. Ne vous posez-vous pas la question de savoir si Carrefour a acheté moins cher ? Disposez-vous du prix de Carrefour ? Vous avez une confiance aveugle en Carrefour sur le fait qu'ils vont mieux négocier que vous. Pour moi qui étais auparavant dans les affaires, confier mes achats sans avoir de comparaison, sans connaître le prix négocié me paraît improbable. À un certain moment, Provera doit avoir conscience du prix Carrefour et du prix appliqué à Cora. Vous ne pouvez pas me dire que vous ne connaissez pas les prix Carrefour, cela me paraît ubuesque.

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Lionel Barbaras, directeur général exécutif de la société Provera

Vous avez raison, cela peut paraître ubuesque. Il n'en demeure pas moins que je ne connais pas le prix d'achat réel de Carrefour. Je ne connaîtrai jamais le prix négocié entre l'industriel et Carrefour ; cela a toujours fait partie du « deal » lorsque nous avons discuté de cet apport de compétitivité ensemble. Néanmoins, contractuellement, on nous garantit d'avoir le bon prix d'achat et nous disposons d'un auditeur tiers indépendant chargé d'un audit annuel, qui vérifie et nous assure la vraie compétitivité prix de notre accord commercial.

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Lionel Barbaras, directeur général exécutif de la société Provera

La garantie du bon prix d'achat, c'est celui de Carrefour.

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Ce qui veut dire que la garantie du bon prix d'achat, c'est que c'est le même prix que Carrefour ?

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Lionel Barbaras, directeur général exécutif de la société Provera

Oui. Concernant la partie commerciale, la garantie du bon prix d'achat, c'est celle de pouvoir être positionné correctement sur le marché, ce qui n'était pas tout à fait le cas auparavant.

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Je ne dis pas le contraire et je respecte tout le travail que vous faites et la difficulté dans laquelle vous vous trouvez peut-être avec les hypermarchés. Le but de cette Commission d'enquête est de comprendre les relations commerciales. Vous me dites qu'il ne s'agit pas d'un alignement des prix, puis que dans votre contrat, vous avez une garantie du bon prix d'achat, qui consiste à avoir le prix Carrefour. À moins que je ne comprenne pas, j'appelle cela un alignement des prix.

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Ludovic Châtelais, directeur général de Cora

Je ne peux pas vous répondre en ce sens, je ne partage pas le terme « alignement des prix ».

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Un même produit qui est au même prix, car cela vous a été garanti, avec un tiers qui vient contrôler, cela s'appelle un alignement des prix. Aujourd'hui deux enseignes compétitrices font des alignements de prix.

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Lionel Barbaras, directeur général exécutif de la société Provera

Serait-il possible de passer à huis clos pour quelques minutes pour vous expliquer la réalité de cette situation ?

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C'est compliqué pour des raisons techniques. Nous allons organiser le huis clos en fin de séance, après avoir abordé toutes les questions d'ordre moins stratégique ou confidentiel. Monsieur le rapporteur souhaitait savoir si Cora négocie les mêmes prix négociés ou suit une tendance : si la tendance est à la hausse, le chef de file est Cora et vos prix ont une tendance à la hausse, si la tendance est à la stabilité, vos prix ont une tendance à la stabilité… Est-ce tendanciel ou s'agit-il d'un alignement sur les mêmes prix ?

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Lionel Barbaras, directeur général exécutif de la société Provera

Je préfère que nous y revenions en huis clos.

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Étant donné que vous êtes un grand distributeur avec des magasins de proximité et une centrale d'achat, il est compliqué de comprendre et d'accepter le principe que votre centrale se tourne vers une autre centrale pour avoir un meilleur prix. En définitive, dans la négociation, vous ne parlez pas des produits ; on vous amène des produits et des prix.

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Ludovic Châtelais, directeur général de Cora

Pas tout à fait.

Je voudrais juste revenir sur la partie concernant l'alignement des prix et surtout les parts de marché. Vous avez utilisé le terme « ubuesque » par rapport à la situation. Ce qui n'est pas ubuesque, c'est la situation concrète de cette entreprise : 2,6 % de part de marché. Quand on parle de part de marché, un rapport de force s'établit. La situation n'est pas plus compliquée que cela. Nous pourrons dans la partie à huis clos donner quelques éléments concrets vous permettant de comprendre pour lever le doute et enlever le terme d'alignement dans cette discussion.

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Pour parler uniquement du prix, nous avons compris que la tonalité du prix est donnée par Carrefour, qui aura négocié avec les enseignes multinationales internationales. Carrefour donne la tendance sur le prix, l'alignement, la coordination et vous avez a priori un prix adapté. Ce qui peut apparaître compliqué est la notion de service et de plan d'affaires. Quel est le plan d'affaires en question en l'absence de stratégie sur le prix ? Quelle est votre stratégie ? Quel est le plan d'affaires de Provera pour les enseignes Cora et Match ? Nous avons compris que les négociations à ce niveau étaient très compliquées, mais si vous n'êtes pas dans la discussion, comment s'articulent votre plan d'affaires et votre volonté stratégique ?

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Lionel Barbaras, directeur général exécutif de la société Provera

Le plan d'affaires des enseignes de Provera comporte deux grands volets.

Les industriels s'intéressent généralement à deux aspects :

– l'assortiment

– et tout ce qui concerne les promotions

Pour des raisons évidentes d'entente possible en aval, tout ce qui ressort de la discussion promotionnelle se fait directement chez nous. Je rencontre l'ensemble des industriels gérés par Interdis pour négocier la mise en oeuvre de la partie opérationnelle des opérations promotionnelles pour éviter toute collusion entre les deux groupes.

Pour toute la gestion de ces assortiments et donc des stratégies d'enseigne, je récupère auprès de mes mandants leur stratégie d'enseigne sur les mois de septembre et octobre voire début novembre en fonction de certaines catégories de produits et je les remets à celui que j'ai mandaté pour négocier, soit Interdis. Je l'informe donc que Cora souhaite tant de références chez tel fournisseur, qui seront détenues dans telle strate d'assortiment et qui seront présentes dans l'ensemble des magasins, etc., et ce pour chacun des fournisseurs.

Pour vous donner un ordre de détail de ce plan d'affaires, il est descendu à l'European Article Numbering (EAN) : je remets à Interdis un fichier contenant près de 15 000 EAN divers et variés reclassés sur l'ensemble des catégories qu'il gère pour moi, par industriel. De ce fait, chaque négociateur Interdis sait exactement, pour Cora ou Supermarchés Match, quelles références sont souhaitées au sein de l'entreprise.

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Êtes-vous affiliés à une centrale d'achat européenne ?

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Ludovic Châtelais, directeur général de Cora

Non.

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Je vous propose de passer à huis clos de façon à ce que vous puissiez vous exprimer sur cette situation qui semble compliquée.

L'audition se poursuit à huis clos à partir de dix-neuf heures vingt-cinq et prend fin à vingt heures trente.

Membres présents ou excusés

Réunion du mercredi 10 juillet 2019 à 19 heures

Présents. – M. Thierry Benoit, M. Grégory Besson-Moreau, Mme Barbara Bessot Ballot, Mme Michèle Crouzet, M. Yves Daniel, M. Jean-Baptiste Moreau, M. Hervé Pellois