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Je voudrais tout d'abord saluer la volonté du Gouvernement de lutter contre les délinquances sexuelles et sexistes. Les chiffres, connus, sont accablants. Selon le Haut Conseil à l'égalité entre les femmes et les hommes, des dizaines de milliers de femmes sont victimes de viol, mais seule une sur dix porte plainte. Seule une plainte sur dix, environ, arrive devant les tribunaux et débouche sur une condamnation. Le durcissement des peines et des procédures préconisé par le projet de loi se justifie donc non par un souci de répression, mais par le caractère sacré du droit de la personne au respect. Les conséquences d'un viol peuvent être dramatiques, nous n'avons cessé ...
Mes chers collègues, ce projet de loi renforçant la lutte contre les violences sexuelles et sexistes comporte des mesures très attendues, concernant notamment la prescription des crimes sexuels puisque, lorsque cette loi sera promulguée, l'âge maximal d'engagement de l'action publique sera de quarante-huit ans révolus au lieu de trente-huit ans aujourd'hui. Ce sujet a déjà été longuement évoqué dans cet hémicycle sous les précédentes législatures, et j'ai une pensée p...
...ongement s'inscrit dans la continuité des recommandations de la mission de consensus présidée par Mme Flavie Flament et M. Jacques Calmettes, qui insistent sur le nécessité d'allonger le délai de prescription pour mieux tenir compte des nombreux cas d'amnésie traumatique qui empêchent durablement les victimes de porter plainte. En raison de leur âge et de liens souvent familiaux avec l'auteur des violences, les victimes mineures peuvent se retrouver dans l'incapacité de révéler les violences et de dénoncer leurs auteurs. Cette disposition permettra également d'augmenter les poursuites judiciaires des cas de viols en série. Aussi l'allongement du délai de prescription des crimes sexuels sur mineur est-il une évolution juste et indispensable pour les victimes.
Cet article 1er porte à trente ans, au lieu de vingt, la durée de prescription à compter de la majorité de la victime des crimes de nature sexuelle ou de certaines violences commis sur des mineurs. De fait, le plaignant pourra porter plainte jusqu'à ses quarante-huit ans révolus. Je suis bien entendu favorable à cet article qui tend à allonger le délai de prescription. L'avancée est réelle, mais je regrette la position défendue par Mme la secrétaire d'État chargée de l'égalité entre les femmes et les hommes pour refuser la proposition que nous avions formulée a...
...endre pleine conscience des agressions dont elle a été victime, qui doit disposer du temps nécessaire pour comprendre, absorber et dépasser le phénomène de l'amnésie traumatique et la réalité de l'effacement des preuves et de la mémoire ou encore la fragilisation des témoignages. Il est préférable que l'imprescriptibilité ne soit pas retenue, malgré l'inextricable situation subie par les mineurs violentés, non parce qu'il faut accorder à l'auteur le droit à l'oubli, mais parce qu'il faut accepter qu'avec le temps, les probabilités de non-lieu et d'acquittement augmentent, donnant à la victime le sentiment de ne pas avoir été entendue ou crue – notre collègue Laurence Vichnievsky l'a rappelé. Accorder ce délai dérogatoire de trente ans pour les crimes sexuels sur mineur de quinze ans, c'est e...
...nde que nous portions depuis de nombreuses décennies. Il était temps d'allonger le délai. Ces dix ans supplémentaires nous paraissent corrects en ce qu'ils permettent de tenir compte des phénomènes d'amnésie, du contexte familial qui peut empêcher le mineur de prendre conscience de la gravité des faits et le retenir de porter plainte. Il était nécessaire de prendre en compte la spécificité de ces violences. Nous approuvons par conséquent cette proposition. Cependant, nous demeurons opposés à l'imprescriptibilité de ces crimes, en raison des limites que pose notre droit français pour tenir compte, justement, d'autres spécificités. Il ne faut pas aller jusque-là. Nous défendrons en revanche, tout à l'heure, un amendement pour étendre cet allongement à des personnes violées alors qu'elles étaie...
Nous devons ici, au-delà de l'émotion et de l'indignation face aux violences sexuelles et sexistes, avant tout légiférer, apporter une réponse raisonnée et graduée à des faits qui restent odieux. Si nous rendons imprescriptibles certains actes, nous les plaçons au niveau des crimes contre l'humanité commis, souvent, par des gouvernements ou des groupes contre d'autres groupes humains, par une mise en place concertée, organisée, de meurtres ou d'exactions à grande éc...
Chère collègue, vous souhaitez supprimer l'article 1er du projet de loi, ce que nous pouvons comprendre du fait que vous vous exprimez également comme ancienne magistrate. Vous anticipez ainsi les difficultés que les magistrats pourront rencontrer lorsqu'ils auront, devant la volonté farouche des victimes de voir condamner leur violeur, la lourde tâche de devoir établir la vérité alors que de nombreuses preuves auront disparu. Nous ne nions pas ces difficultés. Toutefois, vous savez comme nous que les preuves peuvent malheureusement disparaître quelques jours, voire quelques heures seulement après la commission d'un viol. Cet élément ne doit donc pas nous arrêter, et c'est ailleurs qu'il nous faut chercher les moyens d'aide...
Cet amendement vise à allonger le délai de prescription de vingt à trente ans également pour les victimes majeures d'agression sexuelle et de viol. La violence, cela a été souligné, ainsi que les traumatismes subis par les victimes, peuvent entraîner une amnésie plus ou moins temporaire : or ce phénomène est lié non pas à l'âge de la victime, mais au choc qu'elle a subi. Ces séquelles peuvent se traduire de différentes manières : Muriel Salmona a démontré, dans de nombreux travaux, que les conséquences sur l'intégrité physique, psychique et...
...nésie traumatique n'a pas d'âge : un majeur comme un mineur peut y être soumis. Cette raison serait donc suffisante pour prévoir, dans le cas des victimes majeures, le même délai de prescription que pour les mineurs. Mme Autain a évoqué un autre point, très important : la nécessité d'aller porter plainte. Comme je l'ai dit lors de la discussion générale, le dépôt de plainte constitue une seconde violence pour la personne violée, car il s'agit de raconter, de revivre devant un tiers le traumatisme qu'elle a vécu. Or le fait qu'une personne ayant subi les mêmes agissements de la part d'un même auteur ait le courage de porter plainte, de revivre cette violence, ce traumatisme, peut avoir un effet d'entraînement. Il me semble alors important de permettre aux autres victimes de suivre le mouvement...
...is ce débat reviendra. Permettez-moi d'insister sur un point, madame la garde des sceaux. Vous avez affirmé que la situation était différente selon que les victimes sont mineures ou majeures ; or cette différence est déjà intégrée dans le droit actuel, puisque le délai de prescription d'un crime commis sur un mineur est de vingt ans à compter de l'âge de dix-huit ans. Si vous avez été victime de violences sexuelles à six, sept ou dix ans, le délai de prescription – vingt ans aujourd'hui, trente ans demain – ne court pas à partir de la date de l'infraction, mais à partir de l'âge de dix-huit ans. Ainsi, notre droit intègre déjà un délai spécifique pour les mineurs. Dès lors que vous allongez de dix ans le délai de prescription des violences commises sur des mineurs, vous auriez pu pousser un ...
Mes chers collègues, nous reprenons l'examen des articles du projet de loi renforçant la lutte contre les violences sexuelles et sexistes.
...cle 222–22–1 du code pénal qui dispose que la contrainte morale peut résulter de la différence d'âge entre une victime mineure et l'auteur des faits et de l'autorité de droit ou de fait que celui-ci exerce sur cette victime. Cette précision de la notion de contrainte s'applique en effet non seulement à l'article 222–22, relatif à l'agression sexuelle, mais également à l'article 222–23, relatif au viol.
Il est logique que seul l'article 222-22 du code pénal soit visé, dans la mesure où cet article figure dans les dispositions communes à l'ensemble des agressions sexuelles, qu'il s'agisse de viols ou d'agressions sexuelles autres que le viol, à la différence des articles 222-23 et suivants, qui sont propres à chacune de ces deux catégories d'infractions. En conséquence, il ne fait pas de doute que la définition de la notion de contrainte s'applique à l'ensemble de ces infractions. Il n'y a pas lieu d'ajouter la précision que vous appelez de vos voeux. Je vous invite à retirer votre amen...
Cette question a été posée lors des auditions préparatoires : faut-il préciser la notion de contrainte ? À trop vouloir préciser les notions, on risque d'enfermer le juge dans des définitions trop strictes, qui empêchent parfois de cerner certaines situations. Le choix a été fait de ne pas définir les notions de violence, contrainte, menace ou surprise dans le code pénal. L'état de vulnérabilité de la victime est de longue date pris en compte par les juridictions au titre de la contrainte morale, comme dans le cas d'une femme vulnérable face à son médecin, par un arrêt de la chambre criminelle de la Cour de cassation du 25 octobre 1994, d'une jeune fille timide face à un supérieur hiérarchique au caractère t...
Cet amendement rédige l'alinéa 2 de la façon suivante : « Lorsque les faits sont commis sur un mineur de moins de 13 ans par une personne majeure d'au moins cinq ans son aînée, cette dernière doit apporter la preuve du consentement du mineur. » Le dispositif prévu par le projet de loi ne suffit pas à protéger de façon convenable les mineurs victimes de viol, puisqu'il se borne à reprendre la jurisprudence. Il nous semble qu'en ce qui concerne de très jeunes mineurs, il faut a minima que la charge de la preuve soit inversée car, dans ce cas, la présomption de non-consentement est indispensable. En l'état actuel du droit, il existe une forme de présomption de consentement : les corps des femmes et des jeunes filles sont présumés disponibles jusqu'à c...
Cet amendement vise à prendre en compte plus spécifiquement les violences sexistes et sexuelles à l'encontre des personnes handicapées. Dans le texte actuel, il n'est aucunement indiqué que le manque de « discernement » ou de « maturité » puisse résulter directement de la situation de handicap, ce qui ne facilite pas la preuve de la vulnérabilité. Il apparaît ainsi essentiel que les filles et femmes handicapées victimes de violences sexistes et sexuelles soient d...
L'amendement CL46, issu de la recommandation n° 6 de la Délégation aux droits des femmes, vise à simplifier et à clarifier le fait que la contrainte ou la surprise, élément constitutif du viol ou de l'agression sexuelle, peuvent résulter d'un abus de l'ignorance de la victime âgée de moins de 15 ans qui, du fait de son âge, n'est pas en mesure de consentir à des actes sexuels. Nous soutenons pleinement l'idée de faire figurer dans le code pénal que l'écart d'âge entre un mineur de 15 ans et un majeur peut être un élément constitutif de la contrainte ou de la surprise. Toutefois, de n...
...s situations que vous évoquez. C'est pourquoi je vous suggère de le retirer, faute de quoi j'émettrai un avis défavorable. Mon avis sera par ailleurs défavorable à tous les autres amendements. La rédaction que je propose répond à un besoin de clarté et permet de mieux protéger les mineurs et de mieux définir les notions de contrainte et de surprise pour qualifier les agressions sexuelles et les viols commis sur mineur.
Nous arrivons au coeur de ce qui nous préoccupe : garantir une protection accrue aux mineurs victimes de viols et éviter des décisions de justice ne permettant pas de retenir la qualification de viol parce qu'il est difficile de qualifier et de caractériser le défaut de consentement. Les notions d'abus d'ignorance et de maturité qui figurent dans le texte ne sont probablement pas suffisamment fiables juridiquement et pas assez habituellement utilisées par les magistrats, ce qui risque à nouveau de laiss...