Publié le 23 juillet 2018 par : M. Peu, Mme Faucillon, M. Bruneel, Mme Buffet, M. Chassaigne, M. Dharréville, M. Dufrègne, M. Jumel, M. Lecoq, M. Fabien Roussel, M. Wulfranc.
Rédiger ainsi l'alinéa 6 :
« Art. L. 741‑2‑1. –Lors de l'enregistrement de sa demande d'asile, l'étranger est informé, dans une langue qu'il comprend ou dont il est raisonnable de supposer qu'il la comprenne, des langues dans lesquelles il peut être entendu lors de l'entretien personnel mené par l'office prévu à l'article L. 723‑6. Il indique celle dans laquelle il préfère être entendu. Tout au long de la procédure, il peut être entendu dans une langue qu'il comprend ou dont il est raisonnable de supposer qu'il la comprenne. »
Cet amendement de repli reprenant une proposition de l'association d'avocats du droit d'asile « ELENA », vise à assurer aux demandeurs d'asile les garanties procédurales prévues par la directive « procédures » 2013/32/UE :
Les bases juridiques européennes applicables au droit d'asile prévoient un droit à l'information du demandeur d'asile « dans une langue qu'il comprend ou dont il est raisonnable de supposer qu'il la comprenne » (Article 12 a) de la directive « procédures ».
Or, la nouvelle formulation retenue par le projet de loi à savoir « dans une langue dont il a une connaissance suffisante » laisse supposer que l'on pourrait se contenter d'une simple connaissance d'une langue sans s'assurer que le demandeur d'asile comprenne réellement cette langue.
Cette formulation est moins protectrice que la législation européenne en la matière et que le juge de l'asile sera obligé de l'écarter en raison du principe de l'effet direct de la directive européenne.
Par ailleurs, cette nouvelle formulation proposée par le projet de loi à savoir « dans une langue dont il a une connaissance suffisante » pose une difficulté relative à la question de savoir qui aura la compétence pour apprécier la connaissance suffisante de cette langue.
En effet, les agents des préfectures qui sont les premiers représentants de l'État à recevoir les demandeurs d'asile en France ne sont pas compétents pour se prononcer sur les compétences linguistiques des demandeurs d'asile dans les langues parlées dans leurs pays d'origine.
En outre, en souhaitant fixer le choix de la langue utilisée par le demandeur d'asile dès l'enregistrement de sa demande en préfecture tout en ne prévoyant qu'une seule possibilité de changement de langue dont les conditions seront en pratique irréalisables, le projet de loi constitue une atteinte au droit d'être entendu puisqu'il risque de créer de nouveaux cas de demandeurs d'asile qui seront entendus dans une langue qu'ils ne comprennent pas et qui s'exprimeront dans une langue dans laquelle ils ne pourront pas être compris.
Rappelons que le droit d'être entendu est rappelé par l'article 41 de la Charte des droits fondamentaux de l'Union Européenne. La Cour de Justice de l'Union Européenne a reconnu dans de nombreuses décisions ce droit comme un principe fondamental de l'Union Européenne puis comme un principe général du droit de l'union des droits de la défense.
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