Accords entre l'union européenne et le canada — Texte n° 2124

Amendement N° 60 (Rejeté)

(30 amendements identiques : 1 2 3 4 5 6 7 10 11 14 16 18 19 21 22 23 25 26 27 29 30 31 32 47 49 50 52 55 56 58 )

Publié le 16 juillet 2019 par : M. Dupont-Aignan.

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Exposé sommaire :

Cet amendement a pour objet de rejeter la ratification de l’accord économique et commercial global entre l’Union Européenne et le Canada (AECG ou CETA) signé à Bruxelles le 30 octobre 2016 et entré en vigueur provisoirement le 21 septembre 2017, sans débat démocratique préalable.

A ce titre, l’hypocrisie du Gouvernement et d’Emmanuel Macron n’a aucune limite, lui qui déclarait le 11 juin 2019 devant la conférence annuelle de l’Organisation internationale du travail : « je ne veux plus d’accords commerciaux internationaux qui alimentent le dumping social et environnemental ».

En effet, ce traité de libre-échange aura un impact significatif sur le quotidien des Français et l’avenir de notre planète : il constitue une véritable menace démocratique, écologique, sanitaire et socio-économique.

1 / Une menace démocratique car depuis de nombreuses années la Commission de Bruxelles négocie, sous l’influence des lobbies et dans le dos des États, des traités de libre-échange qui engagent de force les 28 États-membres de l’Union européenne.

L’accord instaure par ailleurs le mécanisme de tribunal d’arbitrage entre investisseurs et États (ICS), censé palier les défauts des ISDS (Investor-State Dispute Settlement) et qui, malgré l’introduction de plusieurs garde-fous, constituera un véritable mode de règlement extra-judicaire des conflits : plutôt que se soumettre à la sentence d’un juge, les multinationales pourront recourir à des « tribunaux privés » afin d’attaquer des États qui oseraient défendre leurs intérêts en ne respectant pas le dogme libéral. Fin 2017, le CIRDI révélait que dans 61 % des cas, les groupes privés gagnent au détriment des pouvoirs publics, de l’intérêt général, de la souveraineté nationale.

La démocratie ne devrait-elle pas primer sur les intérêts économiques et financiers des multinationales ? Ne devrait-on pas lutter contre le recul progressif de notre démocratie au profit de l’argent roi ?

2/ Une menace écologique ensuite, face à l’accroissement massif des échanges commerciaux avec l’Europe : ils intensifieront les flux transatlantiques de marchandises avec le Canada situé à plus de 6000 km de l’Europe, au mépris de lourdes conséquences comme la pollution de l’air et de la mer, la disparition de la biodiversité dans les fonds marins.

Alors que le récent rapport du Haut Conseil pour le Climat confirme que les émissions nettes importées représentent 60 % de nos émissions nationales de gaz à effet de serre (en 2015), il conviendrait de privilégier la production nationale et locale pour réduire drastiquement l’impact de l’activité humaine sur le réchauffement climatique. Pourtant, le traité de libre-échange avec le Canada s’oppose directement au développement des circuits courts : d’une part car il privilégie des circuits très longs, d’autre part car ces derniers représentent une concurrence déloyale par rapport aux circuits courts en matière quantitative et qualitative (normes environnementales, sanitaires, sociales, etc.).

Le rapport de la commission Schubert remis au Premier Ministre le 8 septembre 2017 et chargé d’évaluer l’impact de cet accord de libre-échange sur l’environnement, le climat et la santé, regrette par ailleurs que ce traité ne fasse nullement mention de l’Accord de Paris, ni de l’urgence climatique.

Plus généralement, le traité soumis au vote de cette assemblée ne dote pas ses chapitres sur le développement durables d’une force exécutoire contraignante(1) et fait passer les impératifs environnementaux derrière les principes généraux d’ouverture des marchés !

Le Canada ne se félicite-t-il d’ailleurs pas d’avoir accru ses exportations de combustibles fossiles vers l’Union Européenne de 63 % lors des 12 premiers mois de la mise en application provisoire de l’AECG ?

3/ Une menace sanitaire et un mépris de la dignité animale également : un an après l’entrée en vigueur du CETA imposée par l’Union européenne, un article de RTL écrit par Virginie Garin révélait que la France laissait encore entrer depuis le Canada du colza OGM sans indication sur l’étiquette malgré l’obligation en Europe, du saumon transgénique malgré son interdiction en Europe, ou encore 42 pesticides toxiques interdits dans notre pays mais autorisés au Canada.

De même, comment tolérer de pactiser avec le pire de l’agrobusiness mondial en Amérique du Nord qui ne voit l’animal que comme une machine à faire du profit dans des fermes usines de 30.000 animaux, alors même que la taille moyenne d’un troupeau français est de 60 vaches ?(2)

La Commission d’experts indépendants mise en place par Emmanuel Macron déclarait d’ailleurs que le CETA est « muet sur les questions de bien-être animal, de l’alimentation animale (farines animales ou non ?), et de l’administration d’antibiotiques comme activateurs de croissance ». Le rapport déplorait également l’absence de nombreux contrôles des importations pour éviter que des viandes vendues en Europe n’aient été élevées avec des hormones de croissance ou ne soient contaminées. Plus généralement, l’Interbev (Interprofession Bétail et Viande) regrette l’absence d’obligation de traçabilité des viandes bovines canadiennes depuis leur naissance, alors même qu’elle l’est pour chaque animal identifié de l’UE.

Rappelons que l’Union Européenne peine déjà à assurer la sécurité sanitaire et la traçabilité de la viande de certains pays européens (scandales de la viande de cheval roumaine ou du bœuf avarié polonais). Comment croire une seconde, dans ces conditions, que l’UE soit capable de contrôler la production au Canada ?

En acceptant l’application du CETA, la France va nécessairement importer des produits qui ne pourraient pas être légalement produits ni consommés sur son sol à cause de leur dangerosité. Nous assistons une fois de plus au recul de la dignité animale, de la sécurité sanitaire et de la protection de l’Homme, au profit d’une société de consommation déshumanisée et profondément anarchique.

4/ Une menace économique et sociale enfin car le CETA lève près de 98 % des droits de douane entre l’UE et le Canada et, bien que les échanges soient facilités dans la quasi-totalité des secteurs de biens et de services, ce sont essentiellement nos éleveurs et agriculteurs qui se retrouvent pénalisés par l’accord.

En effet, ils se retrouvent en concurrence avec les filières notamment laitière, bovine (augmentation des contingents canadiens de 4 161 à 45 840 tonnes/an) et porcine (augmentation des contingents canadiens de 5 549 à 75 000 tonnes/an) qui s’insèrent progressivement dans le marché européen et le satureront à terme ; de plus, seules 12 % des 1 349 indications géographiques européennes sont reconnues et donc protégées par l’accord. Quant à l’accès aux marchés publics canadiens, il passera de 10 à 30 % pour les entreprises européennes alors que 90 % des marchés publics européens sont déjà ouverts aux entreprises canadiennes : il s’agit d’un déséquilibre inadmissible.

Nos exploitations familiales et à taille humaine seront confrontées à une véritable concurrence déloyale qui signera leur arrêt de mort !

En effet, la consommation de viande en Europe n’augmente plus et la production est suffisante. Ainsi, toute importation supplémentaire au rabais créera une surproduction qui fera encore baisser des prix qui ne permettent déjà pas à nos paysans de vivre décemment de leur travail !

Ce traité avec le Canada permettra ainsi l’importation massive de biens dont les normes de production sont en totale contradiction avec les efforts imposés aux producteurs français en termes d’exigences sociales, sanitaires et environnementales !

(1) : Page 33 du rapport fait au nom de la commission des Affaires étrangères SUR LE PROJET DE LOI autorisant la ratification de l’accord économique et commercial global entre l’Union européenne et ses États membres, d’une part, et le Canada, d’autre part, et de l’accord de partenariat stratégique entre l’Union européenne et ses États membres, d’une part, et le Canada, d’autre part : « 1. Des dispositions générales peu contraignantes. » (2) : Interbev : lettre d’information aux parlementaires – juin 2019

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