Publié le 3 mai 2021 par : M. Morel-À-L'Huissier.
Supprimer cet article.
L’article 29 du projet de loi prévoit que les transactions et les actes qui constatent l’accord suite à une médiation, à une conciliation ou à une procédure participative lorsqu‘ils sont consignés par avocat puissent être revêtus de la formule exécutoire par le greffe de la juridiction compétente.
Les dispositions qui permettent de conférer en cette espèce la force exécutoire revêtent un risque sérieux d’inconstitutionnalité. Le Conseil constitutionnel ne permet en effet aux personnes privées d’émettre un titre exécutoire qu’à la seule condition qu’elles soient chargées de l’exécution d’une mission de service public. C’est une jurisprudence constante.
Outre cet empêchement majeur, cette disposition est de nature à contrevenir gravement aux principes mêmes qui régissent l’attribution de la force exécutoire aux actes des notaires, officiers publics.
L’attribution de la force exécutoire aux actes notariés n’a rien d’un simple « hasard de l’histoire », ni d’une injustice faite aux autres professionnels du droit et qu’il conviendrait aujourd’hui de réparer en étendant le domaine de cette prérogative. Elle est, au contraire, un effet parfaitement fondé et légitime de la qualité d’officier public du notaire, un corollaire des obligations qui lui incombent à ce titre et l’objet d’une mission qui lui est confiée par l’État.
A la différence de l’avocat, l’officier public est privé de sa liberté d’installation, puisqu’il doit être nommé par le Garde des Sceaux ; il est tenu d’instrumenter les actes dont il est requis et ne peut dès lors pas choisir ses clients ; il est soumis à un tarif ; il doit conserver l’original des actes qu’il dresse pendant 75 ans avant de les verser aux archives, etc…
Il est chargé, non de défendre les intérêts de ses clients, mais de faire appliquer la loi. Le contrôle de légalité est inhérent au ministère qui lui échoit. Il doit veiller non seulement à conférer aux parties un droit efficace, mais il doit de surcroît veiller à ce que cela ne se fasse pas au mépris des règles de droit ou des droits des tiers. Toutes choses qui montrent l’existence d’un véritable service public qui lui est délégué.
Ajoutons encore que la délivrance d’un titre exécutoire n’a bien entendu rien d’anodin, puisqu’elle ouvre la voie à l’exercice direct de mesures de contrainte. C’est pourquoi cette mission ne peut être réservée qu’à un délégataire de la puissance de l’Etat que ne peut être l’avocat, outre ses qualités.
Cet argumentaire avait été largement développé par Mme BELLOUBET, alors Garde des Sceaux lors des débats parlementaires sur le projet de loi de programmation 2018-2022 et de réforme pour la justice.
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