Publié le 11 juillet 2018 par : M. Fabien Roussel, M. Chassaigne, M. Jumel, Mme Bello, M. Brotherson, M. Bruneel, Mme Buffet, M. Dharréville, M. Dufrègne, Mme Faucillon, Mme Kéclard-Mondésir, M. Lecoq, M. Nilor, M. Peu, M. Serville, M. Wulfranc.
Après l’article 47‑2 de la Constitution, il est inséré un article 47‑3 ainsi rédigé :
« Art. 47‑3. – La République garantit la justice fiscale. Elle lutte contre la fraude et l’évasion fiscales. »
La République est fragilisée par les pratiques d’évitement fiscal (fraude et évasion fiscales) et l’explosion des revenus d’une minorité (tant pour les contribuables que pour les opérateurs économiques) quand le grand nombre est constamment mis à contribution.
L’évitement fiscal est une plaie. Le Conseil constitutionnel reconnaît l’importance de l’enjeu, lui qui a érigé depuis 1999 la lutte contre la fraude fiscale en objectif à valeur constitutionnelle (Décision n °99‑424 DC du 29 décembre 1999. Loi de finances pour 2000, considérant n°52) en vertu de l’article XIII de la Déclaration des Droits de l’Homme et du Citoyen, qui dispose : « Pour l’entretien de la force publique, et pour les dépenses d’administration, une contribution commune est indispensable. Elle doit être également répartie entre tous les Citoyens, en raison de leurs facultés ».
Cependant, un objectif à valeur constitutionnelle n’occupe qu’une place relativement modeste dans la hiérarchie constitutionnelle. Il ne peut pas se heurter à des règles constitutionnelles directement énoncées et doit systématiquement être concilié avec d’autres normes.
C’est ce champ limité qui explique certaines censures, la dernière en date étant celle du caractère public de la déclaration pays par pays des entreprises, prévu à l’article 137 de la loi du 9 décembre 2016 « relative à la transparence, à la lutte contre la corruption et à la modernisation de la vie économique » mais qui a été jugé comme portant une « atteinte manifestement disproportionnée » à la liberté d’entreprendre au regard de l’objectif poursuivi.
Ce coup d’arrêt au « reporting public » a pu être analysé comme donnant un blanc-seing aux montages fiscaux considérés comme agressifs, considérés comme faisant partie intégrante de la stratégie industrielle et commerciale normale et légitime des multinationales. Si la liberté d’entreprendre est admise et permet aux opérateurs économiques d’agir, elle ne peut sanctuariser les comportements dommageables, sauf à risquer de méconnaître un autre principe constitutionnel, celui de l’égalité devant les charges publiques : comment accepter que les multinationales échappent à l’impôt alors que les TPE et les PME acquittent leur dû normalement ?
Il y a lieu d’agir et adapter notre norme fondamentale à l’enjeu ici soulevé. En toile de fond, la question posée est bien celle de la justice fiscale, qui doit être assurée pour garantir la cohésion économique et sociale de la République. Celle-ci est par ailleurs largement fragilisée par l’explosion des profits des entreprises multinationales, des dividendes distribués par les entreprises du CAC 40 et de la rémunération de leurs hauts dirigeants.
En conséquence, il est proposé de donner à la République l’objectif de garantir la justice fiscale en assurant l’égalité devant l’impôt. Il est également proposé d’inscrire dans la Constitution la lutte contre la fraude et l’évasion fiscales.
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