Commission des affaires sociales

Réunion du mercredi 19 juin 2019 à 9h10

Résumé de la réunion

Les mots clés de cette réunion

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La réunion

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Mercredi 19 juin 2019

La séance est ouverte à neuf heures dix.

Présidence de Mme Brigitte Bourguignon, présidente

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Dans le cadre du printemps social de l'évaluation sur l'impact sur l'organisation des soins (évaluation des articles 17, 19 et 49 de la LFSS 2018, 56 et 62 de la LFSS 2019), audition de Mme Mathilde Lignot-Leloup, directrice de la Sécurité sociale (DSS), M. Martial Mettendorff, directeur général adjoint de Santé publique France, et M. Mili Spahic, directeur de cabinet, Mme Véronique Deffrasnes, cheffe de service, secrétaire générale de la direction générale de la Santé (DGS), Mme Magali Guegan, adjointe à la sous-direction Santé des populations et prévention des maladies chroniques.

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Mes chers collègues, nous allons commencer nos travaux. Nous poursuivons ce matin notre cycle d'auditions constituant le printemps social de l'évaluation, avec un premier thème relatif à la santé publique et à la prévention, sachant que nous aborderons un deuxième thème à partir de 11 heures.

Je souhaite la bienvenue à nos intervenants, Mme Mathilde Lignot-Leloup, directrice de la Sécurité sociale, M. Martial Mettendorff, directeur général adjoint de Santé publique France, Mme Véronique Deffrasnes, cheffe de service, secrétaire générale de la Direction générale de la Santé (DGS), Mme Magali Guegan, adjointe à la sous-direction Santé et population de la DGS.

Notre organisation sera la même qu'hier. Après les interventions du rapporteur général et des co-présidents de la Mission d'évaluation et de contrôle des lois de financement de la sécurité sociale (MECSS), les orateurs des groupes disposeront de deux minutes et les autres intervenants d'une minute. Je passe la parole au rapporteur général.

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Merci, Mme la Présidente. Bonjour à tous et merci aux personnalités d'avoir accepté notre invitation. Ce matin, nous allons parler de santé publique et de prévention. La prévention a été pendant très longtemps le parent pauvre de la santé en France. Nous avons un excellent système de soins, mais un système perfectible en matière de prévention. À titre d'exemple, sur le plan budgétaire, le budget de la santé est de 200 milliards d'euros par an dans notre pays. La prévention occupe 15 milliards d'euros. Au regard de ce constat, le président de la République s'était engagé pendant la campagne et la ministre de la Santé met en place, depuis qu'elle est nommée, une politique de prévention ambitieuse, notamment chez les plus jeunes. C'est un véritable enjeu de santé publique et de réduction des inégalités sociales. C'est aussi un enjeu de finances publiques. Nous savons qu'un euro investi dans la prévention, ce sont entre 5 et 20 euros économisés dans le curatif.

Dans les deux projets de loi de financement de la sécurité sociale (PLFSS) qui ont été adoptés sous cette législature, des mesures législatives ont été mises en oeuvre pour répondre à ces priorités et à la mission dédiée du projet de loi de finances (programme 204) : 9,1 milliards d'euros de dépenses dans le projet de loi de financement de la Sécurité sociale dans la catégorie « consommation des soins et des biens médicaux » pour la prévention primaire et secondaire ; 5,8 milliards d'euros de dépenses en prévention institutionnelle (programmes de prévention nationaux et locaux).

Depuis le début du mandat, nous avons voté entre autres les mesures pratiques suivantes : l'extension de la vaccination obligatoire ; la modulation de la taxe sur les boissons sucrées ; l'augmentation des prix du tabac ; le redéploiement des examens de santé obligatoires ; les forfaits de prise en charge précoces des enfants autistes.

Je ne serai pas plus long. Comme nous l'avons fait hier, Mme la Présidente, je vous proposerai volontiers de reprendre la parole en cours d'audition pour approfondir certaines questions ou demander des précisions sur des réponses données.

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Ce printemps de l'évaluation sociale est un temps fort pour la commission des Affaires sociales. Nos réformes sont emblématiques, elles doivent être bien comprises et bien expliquées. Elles doivent aussi être évaluées et ajustées en cas de besoin. Nos deux derniers PLFSS étaient en parfaite cohérence politique. Ils portaient tous les deux la volonté de libérer l'activité économique, de soutenir ceux qui travaillent et entreprennent, d'investir pour transformer notre système de santé et de protéger les plus vulnérables. Nous sommes à la MECSS très attachés à cette volonté d'apporter une contribution évaluative, dynamique et pertinente.

La prévention est un axe important porté par le gouvernement et par nombre de parlementaires. Ce sont 15 milliards d'euros de dépenses publiques. Si nous avons une médecine curative de qualité, force est de constater que la médecine préventive mérite d'être développée. C'est bien ce qui est porté, à la fois au niveau des deux premiers PLFSS et du plan Ma santé 2022.

L'article 62 de la LFSS pour 2019 relatif à la prise en charge de l'intervention précoce pour l'autisme et les troubles du neuro-développement en est une illustration. Aujourd'hui, 5 % des enfants naissent avec un ou plusieurs troubles du neuro-développement sévères. Les parcours de prise en charge sont peu structurés et le diagnostic est souvent trop tardif. Toutes les recommandations relèvent l'importance de la mise en oeuvre d'une intervention le plus précocement possible. Comme mes collègues, je le suppose, je suis très souvent sollicitée en circonscription par des parents qui sont confrontés à bon nombre de difficultés et notamment celle de faire face à des coûts de prise en charge qui sont parfois discriminants.

Cet article prévoit la création d'une prestation organisée par des structures médicosociales ou sanitaires et réalisée par des professionnels de ville. Il s'agit du forfait de bilan et d'intervention précoces. L'objectif de cette prestation est de fluidifier les parcours, d'améliorer la prise en charge précoce, de réduire les inégalités et de prévenir les risques de sur-handicap. C'est au total un coût de 105 millions d'euros à l'échéance de 2022, qui seront imputés sur l'ONDAM. Le décret est entré en vigueur le 1er janvier 2019. Aujourd'hui, pouvez-vous nous indiquer où en est la mise en oeuvre de ces forfaits ? Avez-vous déjà des retours sur les premiers enfants qui ont pu en bénéficier ?

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J'ai beaucoup de questions sur l'augmentation des prix du tabac, mais je laisserai mes collègues les poser. J'aurai une précision supplémentaire à demander sur ce sujet. Nous avons un peu de recul maintenant sur la mise en place du paquet neutre, puisqu'elle a été faite sous le précédent quinquennat. Je souhaiterais savoir si vous avez déjà des évaluations sur les effets, en termes de santé publique et de consommation, de la mise en place du paquet neutre.

Concernant la taxe soda, des questions similaires pourraient être posées. Nous voudrions vous interroger sur les effets de cette taxe sur la consommation des boissons sucrées adoptée par voie d'amendement par la commission des Affaires sociales et légèrement modifiée par le Sénat.

Disposez-vous à ce jour d'une évaluation précise de l'impact de ces nouvelles modalités de taxation à visée comportementale ? À la suite d'un amendement de mon collègue Thierry Benoît et du même amendement déposé par moi-même, nous avons obtenu en séance l'exclusion de la taxation sur les boissons sucrées pour les laits à base de soja proposés comme alternative nutritionnelle, notamment pour les enfants allergiques aux protéines d'origine animale. J'aurais souhaité savoir comment est appliquée cette disposition.

Sur la politique vaccinale, je pense que mes collègues auront aussi beaucoup de questions à ce sujet. La ministre a fait une présentation sur l'évolution de la couverture vaccinale. Ma seule question portera sur la mise en place de carnets de vaccination qui permettraient de mieux suivre cette couverture vaccinale. Puisque nous avons une mission sur le dossier médical partagé (DMP) au sein de la MECSS, je me demandais pourquoi la vaccination ne pourrait pas être comprise dans le dossier médical.

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Je crois que nous serons tous unanimes pour souligner et remercier la ministre Agnès Buzyn sur sa politique volontariste en termes de santé publique dans les précédentes lois de financement de la sécurité sociale (LFSS) avec différentes mesures : vaccination, taxe soda, prix du tabac, examens de santé obligatoires, prise en charge de l'autisme, etc..

Je voulais particulièrement insister et échanger sur les mesures contre les addictions au tabac ou autres. Lors de la dernière LFSS, il y a eu un très bel amendement voté à l'article 58, qui prévoyait la remise d'un rapport spécifique sur les dépenses en termes de prévention concernant l'alcoolisme notamment. Je voulais savoir où en était ce rapport. Est-il en cours de rédaction ? Avez-vous déjà quelques retours à nous faire à ce sujet ?

Je voulais également vous interroger sur l'article 57 de la dernière LFSS qui entraînait la transformation du fonds tabac en l'élargissant à un fonds addiction. Pouvez-vous nous donner une estimation du montant des crédits qui doivent alimenter ce fonds ?

Concernant ce fonds, pouvez-vous nous transmettre également le montant des dépenses affectées, notamment en termes de patchs nicotiniques ? Combien représentent-ils, en pourcentage sur ce fonds ? Ce fonds est-il essentiellement orienté vers les patchs ou d'autres mesures sont-elles envisagées ?

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L'article 17 de la LFSS pour 2018 prévoit plusieurs vagues d'augmentation de la fiscalité spécifique applicable aux produits du tabac, l'objectif étant de porter le prix du paquet de 20 cigarettes à 10 euros en 2020. Cette politique tarifaire accompagnée d'une politique d'accompagnement du fumeur en sevrage sera certainement très efficace. Elle a fait ses preuves dans d'autres pays. Avez-vous d'ores et déjà constaté des effets positifs de cette politique antitabac ?

Sur l'article 49 de la LFSS pour 2018 qui prévoit la vaccination obligatoire des enfants de moins de 24 mois, il existe encore des réticences fortes de la part d'un certain nombre de parents qu'il ne faut pas négliger. Avez-vous mis en place des supports de communication destinés à ce public ? Les médecins généralistes et les pédiatres ont-ils reçu une formation spécifique pour déconstruire les présupposés négatifs ? À combien estimez-vous encore le nombre d'enfants nés au 1er janvier 2018 qui échappent à ce dispositif ?

Enfin, sur l'article 62 de la LFSS pour 2019 qui prévoit une prise en charge du bilan de détection des enfants présentant un trouble de neuro-développement, c'est aux Agences régionales de santé (ARS) de mettre en place des parcours et de désigner des établissements pilotes pour réaliser le diagnostic. Cette prise en charge est très attendue par les familles, les associations et les travailleurs du secteur médicosocial. Tous les territoires sont-ils d'ores et déjà pourvus ?

Par ailleurs, le contrat conclu avec des établissements de santé prévoit notamment, pour chaque catégorie professionnelle, des engagements de bonnes pratiques professionnelles et des conditions de retour d'informations à la structure contractante et au médecin traitant. Existe-t-il un cahier des charges rédigé au niveau national par Santé publique France ou par un autre organisme de prévention pour uniformiser les suivis sur tout le territoire ?

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J'aurai deux questions. La première concerne le tabac. Nous savons que le coût social du tabac est de près de 120 milliards d'euros. Nous estimons que le tabagisme serait la cause de 73 000 morts par an en France, soit 200 par jour. Nous ne pouvons donc que soutenir les politiques publiques visant à améliorer la lutte contre l'addiction au tabac. Sur un plan directement comptable, avez-vous constaté une baisse des volumes de vente des cigarettes ? Y a-t-il un report significatif vers des achats en contrebande ou en approvisionnement dans les pays limitrophes ? Avez-vous un premier retour du remboursement des substituts nicotiniques ?

La deuxième question concerne la couverture vaccinale. Selon un article scientifique de février 2019 publié dans la revue Médecines et maladies infectieuses, l'extension de l'obligation vaccinale a permis une augmentation de la couverture vaccinale et nous ne pouvons que nous en féliciter. Cette étude pointe par ailleurs une augmentation de la confiance envers les vaccins, ce qui constitue une bonne nouvelle, alors que la France comptait en 2015 parmi les pays ayant le plus haut taux de défiance envers ceux-ci. La loi prévoit une première évaluation de l'efficacité de cette extension de l'obligation vaccinale à compter du dernier trimestre 2019. Les indicateurs dont vous disposez confirment-ils dès aujourd'hui cette amélioration de la couverture vaccinale ?

Enfin, je rejoindrai mon collègue sur le calendrier de vaccinations. Je crois que le DMP est un vrai bon outil pour y intégrer un jour ce calendrier. Ce serait sans doute une erreur de ne pas pouvoir l'utiliser.

Ce n'est pas tout à fait le sujet, mais puisque nous parlons de prévention, j'ai une question sur la vaccination antigrippale. La France est un très mauvais élève en termes de couverture de vaccination antigrippale. Avez-vous déjà fait une étude d'impact sur l'augmentation du volume de remboursement de cette vaccination ? Le fait d'augmenter le remboursement permettrait-il d'avoir une meilleure prévention ?

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Vaste question que celle de la prévention. Naturellement, sur ce sujet, nous serons sans doute d'accord pour estimer que notre système de santé n'est pas suffisamment tourné vers la prévention et qu'une politique de prévention publique s'éprouve sur la durée. Elle demande par conséquent des crédits d'État qui devraient être sanctuarisés, y compris peut-être au niveau des ARS. Je serais curieux de savoir comment ces crédits sont utilisés et se répartissent, au-delà du fait de savoir s'ils sont suffisants.

Je voudrais également vous interroger sur les outils dont nous disposons et sur la nécessité d'en développer. Je pense au registre des cancers. Sur mon territoire, la mise en place d'un registre a été annoncée. Elle était demandée depuis longtemps et la couverture du territoire en registres de cancers est sans doute l'un des défis auxquels nous devons répondre.

Notre collègue Michèle Peyron a rendu un rapport il y a quelques jours sur la protection maternelle et infantile (PMI) qui dresse un état des lieux assez sévère de la situation et fait sans doute des propositions. Je voudrais connaître votre sentiment à ce propos.

Les mesures de prévention qui ont été prises ont été beaucoup tournées vers les consommateurs et la question des prix. Y a-t-il suffisamment de moyens consacrés à l'éducation, d'une part ? D'autre part, quelle prévention en direction des producteurs tels que les industriels de l'agroalimentaire ?

Je voudrais également évoquer la santé au travail. En matière de prévention, il y a beaucoup à faire et je pense que nous avons pris du retard.

Enfin, deux sujets plus particuliers. Qu'en est-il de la prévention en matière de psychiatrie, dont un certain nombre de problématiques sont liées à l'environnement humain ? Où en sont nos réflexions sur le sujet ? Qu'en est-il de l'orthophonie préventive, dont j'ai été saisi et sur laquelle il y a très peu d'investissements ?

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Mathilde Lignot-Leloup, directrice de la sécurité sociale

Je répondrai d'abord à Mme Vidal concernant la mise en place du forfait de bilan et d'intervention précoces pour les maladies du neuro-développement des enfants. Comme vous l'avez rappelé, cette mesure monte en charge à partir de 2019. Elle se met donc en place dès cette année. Elle a la particularité d'être une prestation très novatrice pour l'assurance maladie, puisqu'il s'agit de coordonner plusieurs types d'interventions d'un point de vue sanitaire et médicosocial. La nouveauté est également que l'assurance maladie, via ces forfaits, prend en charge des prestations qu'elle n'intégrait pas jusqu'à maintenant, notamment concernant les psychologues ou d'ergothérapeutes, ce qui laissait un reste à charge pour les ménages. Il y a un double objectif. D'une part, les familles doivent avoir un diagnostic rapide. D'autre part, il doit y avoir une prise en charge en réduisant les risques financiers d'accès aux soins.

Ce forfait est mis en place par des structures qui ont été identifiées par les ARS. D'ores et déjà, une trentaine de structures vont pouvoir se mettre en place et accueillir des enfants dès cet été. Cela permettra la mise en place à la fois d'un bilan et d'un suivi pendant une année. Le bilan initial a été calibré avec un tarif de 140 euros, qui permet de couvrir des prestations d'ergothérapeutes et de psychomotriciens, de 120 euros pour des psychologues et de 300 euros pour un bilan neuropsychologique complet. S'ajoute à cela un forfait de prise en charge tarifé à 1 500 euros par an, en cas de suivi annuel. Ce dispositif vise à ce que les 5 % d'enfants que l'on estime être atteints de troubles du neuro-développement puissent avoir une détection précoce, puis une prise en charge pendant une année, pour traiter les problèmes de détection et de prise en charge pour les enfants de moins de 6 ans.

D'ores et déjà, en termes de communication, à la fois pour les professionnels de santé, les médecins et les parents, nous avons élaboré une brochure qui rappelle de façon très pédagogique les enjeux de détection et de prise en charge précoces. Cette brochure sera largement diffusée auprès de l'ensemble des médecins qui seront à l'origine de la prescription du forfait et auprès des familles, sur les sites internet de l'assurance maladie et des caisses d'allocations familiales. Il y a en effet un enjeu de communication et d'information sur la prise en charge de ces maladies et sur les nouvelles modalités mises en place. Nous avons prévu une montée en charge jusqu'à environ 105 millions d'euros en 2022 et, dès 2019, il est prévu 90 millions d'euros avec des dispositifs d'avance pour la mise en place de ce mécanisme.

M. Lurton, je vous réponds sur la taxe soda, c'est à dire la reconfiguration dans le dernier PLFSS de la taxe sur les boissons sucrées. L'évolution de cette taxe vise à avoir plus d'efficacité dans la politique de réduction de la consommation de sucres. Cette disposition est entrée en vigueur le 1er juillet 2018. Il est difficile de faire un bilan complet à date de la mise en oeuvre de cette mesure, puisque nous avons besoin d'un peu de recul pour voir la production d'effets de la taxe sur la mise à disposition et la consommation de produits trop sucrés. Nous pourrons certainement faire un bilan complet en 2020.

D'ores et déjà, nous pouvons noter certains premiers effets de la reconfiguration de ce barème. Je rappelle que l'objectif était d'avoir un barème à la fois plus progressif en fonction de la teneur en sucre et plus dissuasif sur les boissons très sucrées, et de supprimer le cumul entre les taxes sur les boissons sucrées et édulcorées. Nous avons prévu qu'il y ait un rendement de cette taxe et, a priori, nous sommes en phase avec les estimations qui s'élevaient à environ 85 millions d'euros en année pleine. Nous notons deux premiers effets intéressants du point de vue de la réaction des industriels à l'évolution de cette taxation. D'une part, un certain nombre de fabricants ont réduit la teneur en sucre de certaines boissons les plus sucrées. D'autre part, nous constatons chez certains industriels la réduction des contenants de boissons sucrées, ce qui répond aussi à l'objectif d'avoir une moindre consommation. Comme vous l'avez rappelé, un amendement demandait que les boissons à base de lait de soja pour les enfants soient exclues de cette taxe. À notre connaissance, ce dispositif existe depuis le 1er juillet 2018.

Le troisième élément sur lequel je reviendrai concerne les taxations sur les tabacs et l'évolution de la politique sur le tabac, qui faisaient l'objet de plusieurs questions. Comme vous l'avez rappelé, nous avons mis en place dans la LFSS une stratégie par laquelle la ministre a voulu à la fois augmenter la fiscalité pour pousser à une hausse du prix du tabac et mieux rembourser et accompagner les fumeurs qui veulent arrêter de fumer. En 2018, nous avons mis en place un remboursement des substituts nicotiniques directement par l'assurance maladie et non plus par une prise en charge forfaitaire a posteriori. Nous avons eu une progression importante du nombre de fumeurs qui ont bénéficié de traitements substitutifs nicotiniques. L'utilisation de ces traitements de substitution a pratiquement doublé : en 2018, un peu plus de 580 000 fumeurs ont bénéficié des traitements substitutifs nicotiniques par rapport à la situation de 2017. Cela permet d'accompagner la démarche d'arrêt du tabac, et nous avons observé des effets en termes de réduction du tabagisme.

Concernant l'effet de la fiscalité elle-même et de la taxation sur les produits du tabac, l'augmentation de la fiscalité visait à faire augmenter progressivement le prix du paquet de cigarettes jusqu'à 10 euros. En 2018, l'augmentation du prix du tabac avait permis d'avoir une progression du prix moyen mais qui restait un peu en deçà de l'objectif visé de 8,1 euros en 2018. Un industriel notamment avait plutôt choisi de ne pas augmenter son prix du tabac et de rogner sur ses marges. Ce prix du tabac a bien atteint la cible fixée avec la nouvelle augmentation qui est intervenue en mars 2019 : l'objectif de 8,1 euros est alors atteint, ce qui permet de tracer une trajectoire pour arriver au prix de 10 euros pour le paquet en 2020.

Concernant les effets, nous avons constaté une baisse du volume de consommation de cigarettes en 2018. La consommation a baissé de 11 % entre mars et décembre 2018. Sur les cinq premiers mois de l'année 2019, nous voyons une confirmation de cette tendance à la baisse du volume de cigarettes consommées (-7 %). Nous suivons attentivement un point : la baisse des volumes de tabac à rouler n'est pas aussi importante en 2018 que ce que nous visions. Sur les cinq premiers mois de 2019, l'évolution des volumes de tabacs à rouler est de + 6,5 %. C'est un point d'attention, car nous devons nous assurer qu'il y a bien une baisse du volume de tabac, qu'il s'agisse de cigarettes ou de tabac à rouler.

Un des enjeux de cette politique est d'éviter le développement de la contrebande ou du trafic de cigarettes. L'enjeu est qu'il y ait une baisse globale de la consommation de tabac. Cette politique s'accompagne, en plus de la hausse de la fiscalité et de l'accès plus facile aux traitements substitutifs nicotiniques, d'un renforcement des actions de lutte contre la contrebande. Une action est menée sous l'égide du ministre Gérald Darmanin par les douanes pour renforcer les actions de lutte contre les trafics. Nous pouvons notamment noter que, depuis le début de l'année 2019, les services des douanes ont procédé à un peu plus de 6 000 saisies et à la destruction de plus de 170 tonnes de tabac de contrebande. Voilà donc quelques premiers éléments de réponse.

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Martial Mettendorff, directeur général adjoint de Santé publique France

Je voudrais revenir sur la question de l'impact des politiques contre le tabagisme. Aujourd'hui, les résultats montrent 1,6 million de fumeurs en moins en deux ans. C'est le résultat issu des baromètres annuels de santé publique. C'est une baisse inédite de 12 % en deux ans, après plusieurs années de stabilité du tabagisme. Le nombre de fumeurs baisse descend d'un million entre 2016 et 2017 et poursuit sa baisse avec 600 000 fumeurs en moins entre 2017 et 2018. Nous avons une prévalence du tabagisme quotidien de 25,4 %, et qui a baissé de quatre points en deux ans.

Il faut comprendre que le chiffre de 1,6 million de fumeurs en moins traduit l'arrêt du tabac mais aussi la réduction du nombre de jeunes qui entrent dans le tabagisme. C'est l'impact d'une politique publique importante. C'est la mise en place du paquet neutre. C'est un meilleur remboursement des substituts nicotiniques. C'est aussi un soutien important en termes de temps de communication porté par Santé publique France et l'assurance maladie qui permet de maintenir un agenda médiatique par la lutte contre le tabac. Depuis 2016, Santé publique France et l'assurance maladie ont mis en place l'opération annuelle du « mois sans tabac ». C'est un succès et un élément important. Grâce à la mise en place du fonds tabac, avec des moyens supplémentaires, nous avons pu renforcer nos actions en 2018 et avoir un fil rouge tout au long de l'année pour notre activité de marketing social en matière de réduction du tabagisme. Je pourrai évoquer ces aspects si vous le souhaitez.

Sur la question de la vaccination, nous avons publié en avril 2019, à l'occasion de la semaine de la vaccination, un bulletin de santé publique qui fait état de certains points-clés auquel je vous renvoie. Il montre une augmentation du recours à la vaccination chez les nourrissons nés depuis le 1er janvier 2018. Nous avons 5,5 points supplémentaires pour l'utilisation du vaccin Xavalon avec un pourcentage d'utilisation en 2018 qui atteint 98,6 % contre 93,1 % en 2017. Nous avons également une augmentation de la couverture vaccinale de la première dose de vaccins contre le pneumocoque. Nous observons une augmentation de 36,4 points de la couverture vaccinale de la première dose de vaccins contre le méningocoque C : 75,7 % en 2018 contre 39,3 % en 2017. Nous avons également une augmentation des couvertures vaccinales chez les enfants avant l'entrée en application de la loi de 2,2 points pour la première dose de vaccin ROR chez les enfants ayant eu 12 mois en 2018. Nous constatons une augmentation de 3,21 points sur la première dose du vaccin HPV chez les jeunes filles de 15 ans nées en 2003. Nous observons donc une évolution positive de la couverture vaccinale.

Nous avons une majorité d'opinions positives des jeunes parents sur la vaccination et ses bénéfices. L'importance de la vaccination pour la santé des enfants est à 91 % et à 87 % pour la protection de la collectivité. Elle progresse dans l'opinion des parents, avec + 5 points par rapport à juin 2017. 86 % des gens adhèrent à l'idée que les obligations vaccinales permettront d'augmenter le nombre de personnes vaccinées en France et 77 % pensent qu'elles vont réduire les épidémies. Nous notons surtout une forte adhésion des professionnels de santé à la vaccination et aux vaccinations obligatoires. La proportion de médecins généralistes et de pédiatres favorables à la vaccination en général atteint 99 % dans nos enquêtes réalisées en février et mars 2019 auprès de 758 médecins généralistes et 615 pédiatres.

Le dispositif de marketing social sur la vaccination a également été très important. Après la démarche mise en place par le Pr Fischer d'association des citoyens à cette question, nous avons mis en place le site Vaccination Info Service qui permet au grand public d'avoir des réponses à leurs questions sur la vaccination. Au moment de la semaine de la vaccination, plus de six millions de visiteurs uniques étaient allés sur le site depuis son lancement en mars 2017. Nous avons ouvert un volet de Vaccination Info Service pour les professionnels de santé. Toujours au moment de la semaine de la vaccination en avril, nous comptions 180 000 visites de professionnels de santé sur le site.

Cela reste un enjeu à suivre. Nous devons continuer à mobiliser sur la question de la vaccination. En tout cas, nous sentons un renversement de tendance et un début d'engagement dans des taux de couverture importants. La rougeole reste un problème pour la France, sur lequel il faut continuer d'agir.

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J'aimerais revenir sur le calendrier de visites médicales. Nous disons que 20 visites médicales sont obligatoires, j'aimerais savoir pour qui. Les familles sont-elles obligées de les faire ? La puissance publique doit-elle les contrôler ? À partir du moment où c'est obligatoire, il serait intéressant que vous puissiez en rendre compte. À partir du moment où elles sont remboursées à 100 %, vous devez savoir exactement combien de visites médicales ont eu lieu. Une classe d'âge, c'est 800 000 enfants. Pour ces 20 visites médicales obligatoires, quel est le pourcentage de ces 800 000 enfants qui bénéficient de la prise en charge à 100 % ? Si c'est obligatoire, je pense que c'est possible pour la puissance publique de vérifier qu'elles soient faites. J'aimerais savoir ce qu'il en est. Nous savons très bien que certaines parties de ce dispositif médical sont faites par la médecine scolaire, mais seulement 40 % des enfants profitent de la médecine scolaire.

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Je vais évoquer la mise en place du parcours de bilan d'intervention précoce pour l'autisme et les troubles du neuro-développement prévue par l'article 62 du PLFSS. Cet article prévoit une prestation organisée par les structures médicosociales ou sanitaires et réalisée par les professionnels de ville (psychologues, psychomotriciens, ergothérapeutes) et définit les modalités de prise en charge par l'assurance maladie. Différentes modalités sont ou devraient être prévues : forfaits de bilan et intervention précoces versé aux structures, durée du parcours limitée à un an avec prolongation possible dans l'attente de la décision de prise en charge pérenne de la commission des droits et de l'autonomie des personnes handicapées. J'aimerais savoir quel bilan vous pouvez dresser de la mise en place de ce nouveau dispositif, des conditions de prise en charge pour les familles et des conditions de financement pour les intervenants (psychologues, psychomotriciens et ergothérapeutes).

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Ma question porte sur la prévention cardiovasculaire chez la femme. 400 morts par jour avec une majorité de femmes (52 %) contre 42 % chez l'homme. Nous n'avons pas connu d'améliorations ces dernières années concernant la mortalité cardiovasculaire chez la femme, selon la Cour des comptes. Il est vrai que les femmes jeunes fument. Nous avons des progrès liés à la politique volontariste de la ministre sur la prévention tabac. Les symptômes sont atypiques avec un retard de diagnostic, un retard de l'appel au SAMU (une heure de plus par rapport à l'homme) et une moindre vascularisation. Je souligne que la loi de février 2019 votée à l'unanimité pour lutter contre la mort subite est une très bonne chose. Il y a un paradoxe, parce que les femmes font des consultations médicales régulières. Où en est l'évaluation de nos politiques de prévention ?

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Ma première question portera sur la gouvernance de notre système de prévention et notamment sur la coordination locale. Comment pourrions-nous mieux faire en sorte que, par-delà les difficultés d'effectifs, les médecins de PMI du travail, les médecins scolaires et les médecins traitants se parlent, coordonnent leurs actions et mettent en cohérence leurs actions de prévention auprès de leurs patients ?

Ma deuxième question est plus pratique et ponctuelle. Face au déficit de praticiens sur les territoires en ophtalmologie, comment pouvons-nous prendre en charge efficacement la prévention et le dépistage des troubles visuels chez les enfants ? Un ophtalmologiste ne prend plus de nouveaux patients et donc pas de nouveaux enfants. Aujourd'hui, un certain nombre d'enfants sont en difficulté, y compris scolaires, pour des troubles visuels non détectés. Quelle réponse pouvez-vous nous apporter ?

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La bonne nouvelle de la prévention comme une priorité, tout le monde s'en réjouit. Ma question rejoint les préoccupations de M. Isaac-Sibille et de mon précédent collègue. Je voudrais demander une précision concernant la coordination et le pilotage. Nous savons que ces bilans de santé portent des enjeux majeurs. Nous parlons de la vaccination, du dépistage des troubles d'apprentissage, des troubles autistiques, de l'obésité, etc. L'expertise est très différente en fonction des professionnels qui sont pointés, la coordination reste assez floue. Dans la mise en oeuvre de ces nouveaux examens de santé, réfléchissez-vous à réviser le pilotage de la prévention, notamment à en assurer la coordination et in fine une meilleure prise en charge des jeunes ?

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Ma question concerne la vaccination obligatoire. Plus d'un an après l'extension de l'obligation vaccinale pour les enfants, nous pouvons reconnaître que cela porte ses fruits. Le nombre d'enfants vaccinés contre l'hépatite B a augmenté de 8 % et ceux protégés contre les méningocoques C de 31 %. Même si les professionnels de santé reconnaissent que la panique créée autour de la rougeole a certainement joué, plusieurs signes laissent penser que la confiance envers les vaccins se réinstalle doucement. Aussi, la semaine dernière, une adolescente est décédée à Nice des suites d'une méningite. Or, il existe un vaccin contre la méningite. Que pensez-vous de l'extension vaccinale ? Est-elle envisageable au vu des bons résultats de l'obligation vaccinale aujourd'hui ? Comment peut-on l'étendre ?

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Dans un récent rapport, l'Académie nationale de pharmacie s'est inquiétée de la faible couverture vaccinale chez les professionnels de santé, qui peut être responsable d'infections nosocomiales parfois graves, lorsqu'elles surviennent chez des sujets physiologiquement ou pathologiquement immunodéprimés ou atteints de certaines maladies chroniques. Elle recommande donc l'obligation vaccinale contre la rougeole pour tous les professionnels de santé en exercice ou en formation. En contact direct avec les patients, les professionnels de santé se doivent à mon avis de montrer l'exemple. Quelle serait la position du gouvernement ? Pourriez-vous intervenir pour rendre obligatoire cette vaccination envers les professionnels de santé ?

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Je voulais vous interroger sur la prévention de la perte d'autonomie des personnes âgées. Aujourd'hui, elle est essentiellement dans les mains des conseils départementaux par le biais de la conférence des financeurs. En France, nous vivons plus longtemps que dans les autres pays européens, mais nous vivons le plus longtemps en déficience de santé. Quel est l'état des lieux porté à votre connaissance sur la prévention de la perte d'autonomie des personnes âgées ?

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Je voudrais insister sur un point. Pour développer une action efficace en matière de prévention, il faut une bonne connaissance de l'état des choses. Santé publique France est chargée notamment de la surveillance de l'état de santé des populations. Dans le territoire du golfe de Fos où je vis, je crois qu'il y a des besoins extrêmement particuliers, comme dans un certain nombre de grands sites industriels de notre pays, sur lesquels je demande des enquêtes publiques et des dispositifs poussés sur le plan sanitaire et épidémiologique. Je crois que nous en avons véritablement besoin. Je voudrais savoir non seulement ce qui a été entrepris sur le sujet cette année, mais aussi ce qui doit pouvoir l'être dans les temps à venir. C'est une urgence.

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Je souhaite profiter de ce printemps de l'évaluation pour aborder la question du soutien à la parentalité. L'accompagnement à la parentalité est à la fois préventif et réparateur dans des périodes déterminantes de la vie des enfants qui en bénéficient avec leurs parents. Aujourd'hui, un million de personnes bénéficient de l'accompagnement à la parentalité. Pour autant, moins de 0,5 % du budget de la branche famille y est consacré. Ces dispositifs, qui sont finalement assez peu nombreux, souffrent d'un manque de connaissance et de coordination. À l'aube du PLFSS pour 2020, j'aimerais savoir comment vous pouvez améliorer l'efficacité de ces dispositifs, ce qui a été fait récemment au sein du gouvernement et quelles sont vos intentions pour la prochaine LFSS.

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Alors que la Sécurité sociale devait revenir à un équilibre financier cette année, les mesures sociales mises en place depuis décembre 2018 vont créer un déficit qui risque d'être compris entre 1,7 et 4,4 milliards d'euros selon la commission des comptes de la Sécurité sociale. Ces comptes reposaient sur un excédent de 108 millions d'euros après un déficit de 1,2 milliard d'euros en 2018. Ce nouveau déficit de 1,7 milliard d'euros résulterait d'une moindre progression de la masse salariale soumise à cotisation (plus 2,9 % contre 3,5 % attendus initialement) et risquerait d'être alourdi par la non-compensation des allègements et des exonérations prévues par la loi qui concernent les heures supplémentaires et les primes exceptionnelles, ainsi que l'annulation de la hausse de la contribution sociale généralisée pour 5 millions de retraités à hauteur de 2,7 milliards d'euros. Quelles pourraient être les propositions pour compenser le manque de recettes et permettre la non-détérioration des comptes de la Sécurité sociale ?

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La LFSS a prévu l'introduction d'un parcours de bilan et d'intervention précoces pour les jeunes enfants, mais la stratégie gouvernementale pour l'autisme ne s'appuie pas suffisamment sur la nécessité d'opérer ces dépistages précoces, alors qu'ils ont des vertus essentielles. Pour ce faire, nous manquons de médecins scolaires, capables d'effectuer ces dépistages. Sans moyens nouveaux, les bonnes intentions de la stratégie gouvernementale pour l'autisme resteront à notre avis des voeux pieux. Or, le manque de moyens s'observe à tous les niveaux, du dépistage à l'encadrement des patients. De nombreuses familles sont contraintes et nous interpellent sur leur obligation de partir en Belgique ou en Espagne, à tel point que la Belgique va installer des quotas de patients français. La seule possibilité pour ces patients est de retourner au domicile familial, avec tout ce que cela comporte de complications. J'aimerais savoir comment vous avez l'intention de répondre à ce déficit de moyens manifeste.

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Ma question sera très pragmatique. Au regard de l'augmentation du prix des cigarettes pour prévenir ou réduire le tabagisme et plus largement d'une politique publique antitabac avec le Mois sans tabac et le remboursement des substituts nicotiniques, j'aimerais connaître l'impact de ces mesures sur la consommation de cigarettes en France. Qu'en est-il parallèlement de la vente de tabac à rouler et des ventes illicites, achats transfrontaliers légaux et le duty free ?

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Vous avez évoqué la lutte contre le tabac. Un sujet d'importance concerne votre ministère et le ministère des Finances, notamment la Direction des Douanes, c'est la question de la traçabilité. Une bonne partie du trafic est le fait des cigarettiers eux-mêmes. Le protocole de l'Organisation mondiale de la Santé (OMS) prévoit en particulier que le système de traçabilité qui sera mis en oeuvre doit être totalement indépendant des fabricants de cigarettes. Or, certains s'émeuvent du fait que, dans la transcription au niveau européen et national, une part de la traçabilité puisse demeurer entre les mains des cigarettiers. J'aimerais avoir votre appréciation sur la situation et que vous nous fassiez un point d'étape sur la mise en oeuvre de cette traçabilité.

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Concernant la prévention et la santé publique à La Réunion, j'aimerais parler rapidement de deux points. Alors que la couverture maximale augmente sur les vaccinations obligatoires, Santé publique France a remarqué qu'elle était insuffisante pour les méningocoques, le vaccin rougeole-oreillons-rubéole ainsi que sur le papillomavirus. Allez-vous mettre en place une politique particulière pour pallier cette couverture insuffisante et anormalement basse par rapport à l'Hexagone ?

Deuxièmement, j'aimerais parler du financement de l'hôpital public à La Réunion. Nous bénéficions d'un coefficient multiplicateur qui reconnait que les soins à La Réunion coûtent plus cher que dans l'Hexagone. Cependant, contrairement à d'autres territoires, ce coefficient n'a pas été réévalué et nous enregistrons une perte de plus de 15 millions d'euros dans nos hôpitaux. Avez-vous un avis sur ce gel du coefficient géographique ?

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Dans le cadre de la stratégie pour l'autisme 2018-2022, la LFSS concrétise l'engagement d'intervenir précocement auprès des enfants afin de limiter le sur-handicap, avec un parcours des enfants de 0 à 6 ans financé par l'assurance maladie. Les moyens supplémentaires prévus à cet effet en 2019 sont de 20 millions d'euros pour le traitement des interventions et de 3 millions d'euros pour la mise en place des plateformes. Comment se mettent en oeuvre concrètement sur le terrain ces interventions au regard des grandes difficultés auxquelles est confrontée la pédopsychiatrie française, dues notamment à la crise professionnelle et à des structures régulièrement saturées ?

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Comment concilier l'urgence de mener des politiques publiques de prévention, notamment au regard du diabète et de l'obésité, avec deux obstacles ? Le premier obstacle est la permanence de publicités pour la « malbouffe » aux abords des établissements scolaires, notamment dans les Outre-mer. Le deuxième obstacle est l'existence de taux de sucre supérieurs dans les outre-mer malgré la loi nouvelle et l'arrêté du 9 mai 2016.

D'autre part, de nombreux travaux scientifiques démontrent clairement les effets de la pratique d'une activité physique et sportive sur la santé, en matière de prévention, notamment du vieillissement, mais aussi en matière de thérapie non médicamenteuse. Pour les cancers, les hypertendus, les personnes atteintes de maladies mentales, les diabétiques, etc., quelles sont les politiques et prises en charge, notamment par la Sécurité sociale, de ces pathologies ?

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Vous avez annoncé les résultats en matière de lutte contre le tabagisme, nous nous en félicitons. Est-il possible d'identifier les différents leviers que vous avez évoqués en matière de prévention sur cette question (paquet neutre, campagnes de communication, remboursement des substituts nicotiniques) ? Il serait intéressant, dans le cadre de l'annonce du Premier ministre dans son discours de politique générale sur la question de la lutte contre l'obésité, de mettre en place les outils de prévention les plus efficaces pour avoir des résultats aussi probants qu'en matière de lutte contre le tabagisme.

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J'ai souhaité attendre que les députés aient terminé pour éventuellement poser d'autres questions ou en compléter quelques-unes.

Concernant le tabac, vous présentez des chiffres excellents et vous êtes rassurants sur le fait que la réduction importante du nombre de fumeurs ne s'accompagne pas d'une explosion des saisies de contrebande. Il y a donc bien des personnes qui arrêtent de fumer dans ce pays. Nous avons parlé de l'augmentation du prix du tabac. Nous pourrions parler de l'impact du paquet neutre, du « Mois sans tabac », des substituts nicotiniques. Il y a la question de la cigarette électronique. Combien de Français sont-ils consommateurs de vapotage ? À quel moment la France considérera-t-elle que le vapotage est un outil de sevrage au tabac, à l'instar de ce qui se passe en Angleterre ? Quand on parle du nombre de personnes qui arrêtent de fumer, mais que l'on ne parle pas du nombre de personnes qui vapotent ou vont vapoter pour ce sevrage, cela me pose plutôt un problème, d'un point de vue méthodologique. Les nouvelles restent néanmoins excellentes, nous n'allons pas bouder notre plaisir.

Deuxièmement, un rapport sur la prévention des addictions est prévu par l'article 58 de la LFSS. Il devait être présenté au 1er juin et il n'a pas encore été remis au Parlement à ma connaissance. Pouvez-vous nous préciser quand ce rapport sera remis ?

Troisièmement, sur la taxe soda, nous restons un peu sur notre faim avec les éléments qui ont été donnés aujourd'hui. Vu qu'il y a une fiscalité inhérente au taux de sucre dans les boissons, cela veut dire que l'on se base sur l'évolution du taux de sucre pour déterminer la fiscalité. Sinon, nous n'empocherions pas l'argent de la part des industriels. Il y a forcément des chiffres. Ce qui m'interpelle, c'est que les seuls chiffres dont nous disposons depuis un an émanent de la presse, puisque BFM est allé dans les magasins et a vu qu'il y avait une réduction du taux de sucre dans les boissons sucrées de l'ordre de 30 à 75 % selon les boissons. J'aimerais bien que, du point de vue des autorités sanitaires, voire du côté de Bercy, nous ayons des éléments plus factuels, un an après la mise en place effective du dispositif. J'aimerais savoir aussi s'il faut revoir le dispositif législatif, élargir l'assiette ou faire évoluer le taux. Une taxe a été mise en place l'année dernière à l'initiative de ma collègue Dufeu Schubert sur les « prémix ». A-t-elle porté de bons résultats ? Certaines boissons y échappent-elles ? Faudrait-il revoir la fiscalité sur ces questions ?

Vous avez très bien et de façon très complète répondu sur la question de la vaccination. J'ai tous les éléments nécessaires et attendus.

Un dernier point général sur les politiques d'évaluation. De quoi s'inspire-t-on pour faire de la santé publique ? Les Anglo-saxons ont un bon dispositif appelé les « What Works ». Ils sont capables d'ériger à l'échelle nationale l'ensemble des expérimentations menées dans les territoires et de faire le point sur ce qui fonctionne ou non. Cela évite parfois de dire de grosses bêtises ou de prendre des positions sur de simples hypothèses. Il s'agit de s'appuyer davantage sur les faits. Vous semble-t-il que la France est entrée dans cette logique d'évaluation et d'expérimentation ou a-t-elle encore du retard ? Je pense que nous avons plutôt du retard. Par exemple, il y a aujourd'hui un grand appel à la légalisation du cannabis en France. Cet appel se fonde notamment sur l'impact éventuel sur la réduction de l'insécurité. Quand on regarde la situation de certains pays ou États qui ont légalisé le cannabis dans cette perspective, tels que le Colorado ou l'Uruguay, nous voyons que la légalisation ne s'est pas du tout accompagnée d'une baisse de l'insécurité, mais d'un report important vers d'autres types de trafics et d'une hausse conséquente du sentiment d'insécurité dans les populations concernées. Si nous avions cette logique du « What works » et d'évaluation, peut-être serions-nous plus efficaces. J'aimerais avoir votre opinion sur ce point.

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Magali Guegan, adjointe à la sous-direction Santé et population de la direction générale de la Santé

Si je reviens sur la politique de lutte contre les addictions, beaucoup a déjà été dit sur la lutte contre le tabac et ses résultats positifs. Cela s'inscrit dans une stratégie très globale qui est menée depuis le premier programme de lutte contre le tabagisme, et le relais a été pris par le nouveau plan national de lutte contre le tabac. Il y a le paquet neutre, la fiscalité et l'augmentation du prix qui s'est faite en parallèle d'une accessibilité aux traitements de substituts nicotiniques. C'est une garantie, puisque nous savons que l'effet prix en fiscalité comportementale fonctionne, mais il faut aussi aider les personnes dont on déclenche le réflexe de l'arrêt du tabac. La vente de traitements de substituts nicotiniques a beaucoup augmenté ces derniers temps, avec la levée du frein que représentait l'avance de frais sous l'ancien forfait, et la limite du plafond.

Le paquet neutre est l'un des éléments de la dévalorisation du tabac, pour rendre son image plus négative qu'elle ne l'était auparavant. Tout cela joue sur les environnements favorables à la santé et les démarches sont prolongées en ce moment. Je pense aux lieux de santé sans tabac qui s'engagent dans des démarches d'accompagnement, à la fois du personnel et des patients, mais aussi aux terrasses ou parcs sans tabac. Le défi porte aussi sur les générations futures, pour faire des générations sans tabac.

En termes de dépenses de prévention des addictions, la LFSS prévoyait effectivement un rapport au 1er juin. J'en suis désolée, nous ne le rendrons pas au 1er juin parce que nous sommes un peu en retard, mais nous avons surtout donné la priorité à la transformation du fonds tabac en fonds addiction. Il faudra tenir compte des nouvelles dépenses engagées cette année vers le fonds addiction. Nous voulions passer ces délais très serrés sur la transformation du fonds tabac en fonds addiction pour ensuite faire le rapport. Nous avons commencé à le faire.

Les chiffres de 2017 concernant la prévention des addictions sont de plusieurs ordres. Ce sont 411 millions d'euros pour les structures de prise en charge des addictions et en particulier les consultations anonymes et gratuites pour les jeunes consommateurs de 15 à 25 ans. Les actions de prévention des addictions via le fonds d'intervention régional sont de 18,4 millions d'euros. Le fonds tabac a dépensé 100 millions d'euros pour la lutte contre le tabac. Les traitements de substituts nicotiniques représentent 32 millions d'euros au sein de ce fonds en 2018. Il y a eu l'amplification du mois sans tabac qui a été une très belle réussite en 2018. Les dispositifs de proximité d'aide à l'arrêt du tabac sont portés par l'assurance maladie, qui est aussi un acteur incontournable de la lutte contre le tabac. Nous voyons que toutes les institutions ont un rôle à jouer dans les stratégies de prévention. Je pense aussi à une action importante grâce au fonds tabac, à savoir la mobilisation de la société civile. Cette lutte ne peut pas passer que par les institutions ; plus les acteurs de la société civile s'emparent de la lutte contre le tabac, plus nos politiques sont efficaces et plus nous parlons aux citoyens sur la lutte contre le tabac. Nous avons également des programmes tels que TABADO pour l'aide à l'arrêt des jeunes, notamment dans les établissements d'apprentissage et dans les lycées agricoles, à hauteur de 3,5 millions d'euros. Un gros appel à projets pluriannuel portera sur les programmes de recherche sur la lutte contre le tabac ; un projet traite d'ailleurs du vapotage. 14 millions d'euros étaient dédiés à cet appel à projets.

Une question porte sur la transformation du fonds tabac en fonds addiction, pour aussi traiter des poly-addictions. Il y a un enjeu très important à élargir le champ d'action et à essayer de décliner ce qui fonctionne contre le tabac pour d'autres addictions. Le comité d'orientation, élargi à la société civile et à toutes les institutions concernées par la prévention des addictions, s'est réuni. Sa doctrine est évidemment de poursuivre la dynamique lancée autour du programme national de lutte contre le tabac, mais aussi de mener des actions relatives à la prévention contre les risques de l'alcool et des autres substances actives, dont le cannabis.

Sur le sujet des multi-addictions, un partenariat est en train de se construire grâce au plan de priorité prévention entre les établissements scolaires (collèges, lycées) et les consultations de jeunes consommateurs. Une convention type est en cours de finalisation pour que des partenariats puissent s'établir localement et pour que la mise en relation avec une cellule de consultations de jeunes consommateurs entre dans la vie des établissements scolaires. Des actions pourraient être menées à l'école et les établissements scolaires qui repèrent des situations difficiles pourraient ainsi aider à l'orientation de leurs élèves.

Concernant le montant du fonds addiction et les dépenses, le fonds tabac représentait 100 millions d'euros l'année dernière et la ministre avait annoncé qu'il en irait de même cette année pour le fonds addiction.

La traçabilité est pilotée par le ministère des Comptes publics. En application de la directive, les textes d'application français ont évidemment respecté les critères de redéploiement par la Commission européenne sur le sujet. Tous les textes d'application ont été publiés le 20 mai dernier. Je ne connais pas exactement leur contenu, mais je vous renvoie aux derniers textes publiés qui ont confié la mission d'identifiants pour la traçabilité des produits à l'Imprimerie nationale. La mission traçabilité n'a pas été confiée à un opérateur privé.

Concernant la vaccination, les premiers résultats positifs existent. Nous avons de bons impacts sur la couverture vaccinale, mais aussi en termes d'adhésion, ce qui était un grand pari et un combat que nous devons continuer. L'adhésion est par essence assez fragile. Il suffit d'un événement pour qu'elle soit rompue. Évidemment, les actions continuent autour de la vaccination obligatoire. La ministre présentera en décembre 2019, comme elle s'y était engagée devant vous durant les débats, un bilan général qui comprendra les données à un an (toute l'année 2018) sur tous les volets. L'enjeu de l'adhésion est aussi celui de la transparence. Il y aura un bilan sur les couvertures vaccinales et l'adhésion, mais aussi sur la pharmacovigilance. Avant la suspension estivale, l'Agence nationale de sécurité du médicament et des produits de santé (ANSM) publiera un premier état de la pharmacovigilance 2012-2017 pour montrer la situation de départ, puis celle qui existe à fin 2018 après une année de réforme des obligations vaccinales. La confiance dans la vaccination et la pharmacovigilance est toujours là, mais nous devons mieux communiquer sur ce versant qui est un facteur d'incitation vaccinale.

Vous êtes plusieurs à nous avoir interrogés sur le carnet de vaccination électronique. Vous avez tout à fait raison sur le dossier médical partagé (DMP) : c'est un vrai enjeu de pouvoir enregistrer les données, car le carnet de santé qui recueille principalement les vaccinations des enfants se perd aussi. Un carnet de vaccinations électronique est en train d'être travaillé avec l'Agence des systèmes d'information partagés en santé (ASIP Santé) et devrait intégrer le DMP fin 2019 dans sa version « contenu », pour pouvoir remplir des vaccinations dans le DMP. À partir de 2020, nous travaillerons sur le système expert qui permettra d'organiser de vrais rappels et d'être proactifs à partir du DMP pour faire des notifications de rappels vaccinaux aux patients et aux professionnels. Le sujet du carnet de vaccination électronique est en cours.

Au-delà de la réforme des obligations vaccinales, vous avez évoqué la vaccination antigrippale. Nous avons là un très gros enjeu, car les Français n'y sont pas très enclins. Une des mesures de la LFSS de l'année dernière était la généralisation de la vaccination par les pharmaciens contre la grippe. Tous les textes ont été publiés à partir d'octobre. Cette année, tous les pharmaciens volontaires pourront vacciner les personnes qui font l'objet de recommandations de vaccination. Pour autant, nous avons vu cette année que les couvertures vaccinales n'ont pas suffisamment augmenté. Elles ne suffisent pas pour atteindre les taux recommandés par l'OMS. Plusieurs actions sont en cours ; nous espérons avoir de meilleures couvertures vaccinales pour cette campagne. L'assurance maladie est en train de travailler sur une nouvelle version de la campagne de communication des outils à diffuser. Nous avons aussi le sujet particulier de la femme enceinte qui ne se fait pas suffisamment vacciner contre la grippe, alors que c'est très important pour la protéger. Nous aurons des actions spécifiques, notamment en lien avec la PMI sur la vaccination antigrippale.

Concernant la vaccination HPV, nous lançons une expérimentation. La ministre a annoncé en avril dernier une expérimentation votée dans la LFSS de l'année dernière visant à améliorer la couverture vaccinale HPV chez les jeunes filles, sachant que la Haute autorité de santé doit toujours rendre son avis sur la vaccination HPV des garçons. Les textes d'application devraient être publiés d'ici un mois sur la vaccination HPV, notamment pour que la Guyane, qui a été retenue parmi les deux régions volontaires, puisse lancer son projet d'expérimentation à la rentrée scolaire. Il y a aussi un programme de projets de recherche sur l'acceptabilité de la vaccination HPV, pour essayer de voir comment identifier les leviers pour convaincre de l'intérêt de la vaccination HPV.

En termes d'évolution des obligations vaccinales, vous avez évoqué le méningocoque W, qui n'est pas obligatoire, et la vaccination obligatoire contre la rougeole pour les professionnels de santé. Nous avons ces deux questions en tête. Pour les obligations vaccinales pour les méningites, la Haute autorité de santé va refaire un travail. La vaccination sur le W n'a pas été rendue obligatoire parce que c'était un virus moins circulant et qu'il nécessitait beaucoup plus d'injections. Effectivement, des foyers se sont multipliés et cela nécessite de réinterroger la Haute autorité de santé qui est compétente pour se prononcer sur les extensions ou recommandations des obligations vaccinales. La Haute autorité de santé va y retravailler au début de l'année prochaine.

Concernant la vaccination des professionnels de santé, c'est un enjeu pour la grippe. Santé publique France lance une grande enquête en ce moment pour mesurer de nouveau la couverture vaccinale des professionnels de santé en établissements de santé et en établissement d'hébergement pour personnes âgées dépendantes (EHPAD) pour que nous ayons des données à jour et trouver les meilleures solutions pour la vaccination antigrippale. Sur l'obligation de la vaccination contre la rougeole, la Haute autorité de santé sera saisie dans les prochains jours sur la revue de la vaccination des professionnels de santé. Nous ne ciblons pas nécessairement l'obligation par rapport à la recommandation, mais la Haute autorité de santé doit pouvoir se prononcer sur l'actualisation de la vaccination des professionnels de santé et aussi de la petite enfance, puisqu'elle est concernée en matière de protection de la collectivité et des personnes plus fragiles.

Concernant les enfants, le redéploiement sur la période de 0 à 18 ans des examens qui couvraient avant la période de 0 à 6 ans a permis d'ancrer un meilleur suivi obligatoire des enfants tout au long de leur développement. L'obligation est à la fois à la charge de l'État et des parents : de l'État, dans la mise en place de ce redéploiement des examens de santé et dans la prise en charge à 100 % qui est assurée par l'assurance maladie sur ces vingt examens ; elle est aussi à la charge des parents puisque, selon la rédaction de la loi, les parents sont obligés d'emmener leurs enfants. Une question se pose sur le contrôle. L'idée n'est pas de sanctionner les parents s'ils n'emmènent pas l'enfant chez le médecin traitant. Néanmoins, toutes les obligations de protection de l'enfant participent de la responsabilité des parents en droit général. Il n'y a pas que la symbolique de l'obligation pour les parents. Les enfants vont chez le médecin, mais nous avons un sujet sur le suivi. Nous travaillons avec l'assurance maladie pour opérer un suivi très particulier et très fin de ces examens.

Évidemment, ces examens peuvent aussi être faits par la PMI et l'Éducation nationale puisque certains examens peuvent être réalisés à l'école. Le projet de loi pour une École de la confiance qui vient d'être adopté en commission mixte paritaire prévoit que la visite à trois ans sera réalisée de manière obligatoire à l'école. Cela fait le lien avec le déplacement et les annonces du Secrétaire d'État auprès de la ministre des Solidarités et de la Santé, M. Taquet, sur la PMI, qui est un outil formidable pour la protection des mères et des enfants et qu'il faut aider à avoir un impact territorial et à assurer une égalité qui n'existe plus sur le territoire. Pour cela, l'idée est que les agences régionales de santé puissent contractualiser. Il doit déjà y avoir une coordination par nos services pour articuler l'action des personnes qui travaillent avec elles sur les territoires. Si la PMI est de la compétence des départements, nous devons travailler avec eux pour que l'agence régionale de santé ait aussi un rôle à jouer en termes de soutien à la PMI et parvenir à créer cette logique de parcours où les médecins scolaires, de PMI et traitant de l'enfant pourront mieux communiquer. Le projet de loi pour une École de la confiance, le plan de priorité de prévention et le plan PMI ont tous pour but d'arriver à faire se parler les acteurs autour de l'enfant et pour son bénéfice.

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Martial Mettendorff, directeur général adjoint de Santé publique France

Je vais répondre aux questions de gouvernance et d'évaluation. Effectivement, avec la mise en place de Santé publique France, puisque l'agence a été créée en 2016, nous avons rapproché la connaissance de l'état de santé de la population des interventions de prévention ou des interventions de situations sanitaires exceptionnelles. Santé publique France joue un rôle dans la gouvernance de la prévention. Je voudrais illustrer mon propos par deux points.

Premièrement, il est nécessaire que nous ayons des données scientifiques pour pouvoir suivre l'état de santé de la population. Nous publions énormément de résultats d'enquêtes et d'études. Nous mettons depuis quelques mois à disposition des ARS sur le portail Géodes l'ensemble des données régionales dont Santé publique France dispose. Ce sont 40 thématiques, 400 indicateurs de santé qui permettent aux ARS de connaître l'état de santé de leur région et surtout de se comparer aux autres. La mise à disposition d'une connaissance est un élément important et structurant. Nous travaillons également sur la définition, au niveau des territoires infrarégionaux, d'indicateurs de santé, permettant de conduire et de coordonner des politiques publiques. C'est un élément clé pour nous.

Le deuxième élément clé est l'évaluation des actions. Nous sommes engagés dans la mise à disposition des partenaires qui interviennent sur le terrain des ARS d'un portail des actions probantes en matière de prévention. Il est très important que nous puissions avoir des actions éprouvées et efficaces. C'est un élément clé. Nous menons des évaluations. C'est un dispositif assez lourd qui nous prend beaucoup de temps. J'attire votre attention sur l'importance de cet élément, parce que nous avons par exemple évalué cinq actions sur les conduites addictives. Sur ces cinq actions de prévention, nous pouvons considérer que deux ont des impacts positifs et qu'elles fonctionnent. Deux sont avérées contreproductives, voire néfastes à certains égards. Pour la cinquième, nous n'avons pas été complètement capables de nous prononcer. Moins de la moitié des actions soumises à évaluation sont effectivement efficaces.

Malgré tout cela, je suis d'accord, nous ne sommes pas encore au niveau où nous devrions l'être pour ces actions. Nous aimerions pouvoir insister sur le retour sur investissement, secteur sur lequel l'agence n'a pas aujourd'hui suffisamment de compétences et n'a pas rassemblé. Au fond, investir dans la prévention, c'est améliorer l'état de santé de la population et, de fait, gagner sur la dépense de l'assurance maladie. Il faudrait que nous parvenions à prouver cela. S'agissant de l'hypertension artérielle, en termes de méthodes de santé publique, comment prioriser ? Santé publique France, ce sont certes 650 personnes et 170 millions d'euros de budget, mais il faut néanmoins choisir ses priorités sur la santé publique et la prévention. Nous choisissons principalement en fonction du poids des maladies via le World diseases. Tous les pays au plan international se concertent sur les méthodes pour faire cela. Nous sommes engagés dans un programme européen d'évaluation du World diseases. Les grands déterminants sont le tabac, l'alcool, la nutrition. Si nous agissons sur ces trois éléments, nous sommes en phase pour agir sur la prévention de l'hypertension.

Sur le vapotage, nous avons publié lors de la semaine de la vaccination une petite étude extraite du baromètre de santé publique 2017 sur l'usage de la cigarette électronique. Il ressort que 32,8 % des 18-75 ans déclarent avoir expérimenté la cigarette électronique. 3,8 % vapotent et 2,7 % vapotent quotidiennement. Paradoxalement, la prévalence est en baisse par rapport à 2014 où nous avions 5,9 % sur les 15-75 ans, en raison d'une baisse du vapotage occasionnel, alors que le vapotage quotidien est stable. Il faut comparer cela à la prévalence d'usage actuel de la cigarette électronique qui est estimé à 2 % et à l'usage quotidien à 1 % en Europe. L'Angleterre affichait une prévalence du vapotage d'environ 6 % parmi les adultes en 2018. Nous suivons ces chiffres ; ils sont un élément important dans la politique qui est conduite sur la réduction du tabagisme.

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Mathilde Lignot-Leloup, directrice de la sécurité sociale

Premièrement, je reviendrai brièvement sur la stratégie de lutte contre l'autisme qui fait l'objet d'un plan global qui a été lancé et qui s'accompagne, y compris dans les établissements scolaires, de formation des enseignants. Une formation des enseignants se met en place et se déploiera avec des enseignants « ressources », ce qui permet aussi de détecter de manière précoce les troubles des enfants et de les orienter ainsi vers la prise en charge soignante et médicosociale.

Le forfait de bilan et de détection précoces, du point de vue des familles, est pris en charge à 100 %. Il n'y a ni avance de frais ni paiement par les familles puisque nous finançons directement les structures par l'assurance-maladie qui permettront de faire le bilan et la prise en charge pendant au moins un an, voire plus, jusqu'au diagnostic pour la prise en charge de l'enfant dans des structures médicosociales, le cas échéant. Cette prise en charge permet de réduire voire de supprimer ce qui était auparavant un frein, puisque les soins de psychothérapie ou d'ergothérapie n'étaient pas pris en charge financièrement par l'assurance maladie. C'est donc une complète prise en charge pour les familles.

Du point de vue des professionnels de santé, le niveau du forfait a été fixé pour être suffisamment attractif et pour que suffisamment de professionnels de santé s'inscrivent dans cette démarche. Le forfait de bilan neurologique complet s'élève à 300 euros. Le forfait s'élève à 120 euros lorsque le bilan est réalisé par les psychologues et à 140 euros lorsqu'il conjugue l'intervention d'ergothérapeutes et de psychomotriciens. Ensuite, le forfait annuel s'élève à 1 500 euros.

Deuxièmement, concernant l'effort fait par la Sécurité sociale en termes d'accompagnement des parents, au travers du fonds national d'action sociale de la branche famille, nous avons un développement des actions au titre de la parentalité et de l'animation de la vie sociale qui s'élève à 100 millions d'euros. Ce financement progresse sur la période 2018-2022 et permet de développer les réseaux d'écoute, d'appui et d'accompagnement aux parents. Il permet aussi de développer les contrats locaux d'accompagnement de la vie scolaire ainsi que la médiation familiale. Les premières actions avaient été construites dans la convention d'objectif et de gestion précédente de la Caisse nationale d'allocations familiales. Au vu des bilans encourageants, elles sont renforcées avec une ligne de 100 millions d'euros.

Troisièmement, concernant les taxes sur les boissons sucrées alcoolisées, la taxe « premix » est relativement ancienne, puisqu'elle date de 1997. Elle n'a pas évolué de manière importante depuis. Elle frappe les boissons qui sont à la fois fortement alcoolisées et qui ont un taux minimal de sucre. Elle vise à lutter contre des produits qui conduisent à une consommation trop forte d'alcool chez les jeunes. De fait, cette taxe est dissuasive. Elle s'élève environ à 11 euros par litre et a permis de quasiment supprimer un certain nombre de ces produits.

En revanche, il y a un sujet de réflexion sur les paramètres de cette taxe qui sont un peu anciens, compte tenu de l'évolution du contexte et de la mise en place de nouveaux barèmes pour les taxes sur les boissons sucrées. La ministre de la Santé s'y était d'ailleurs engagée lors du dernier PLFSS. Ce sujet va être travaillé pour améliorer le dispositif.

Il convient également de mieux articuler cette taxe avec la nouvelle fiscalité sur les boissons sucrées. Certaines boissons ont un degré d'alcool moins élevé que celui prévu dans la taxe « premix », mais elles sont sucrées et ne relèvent pas de la taxe sur les boissons sucrées, parce que celle-ci ne concerne pas les alcools. Nous travaillons sur ce sujet pour proposer une évolution de ce barème. Il faudra se rappeler que les boissons « premix » ne sont pas seules un facteur d'alcoolisation ou de risque de consommation importante d'alcool chez les jeunes. Nous avons la nécessité de mener des actions sur l'ensemble des produits contenant de l'alcool et de veiller qu'il y ait une inflexion de la consommation chez les jeunes.

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Je n'ai pas entendu de réponse sur la prévention de la perte d'autonomie. Sans doute n'avez-vous pas grand-chose, mais j'aimerais vous l'entendre dire.

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Mathilde Lignot-Leloup, directrice de la sécurité sociale

Beaucoup d'actions sont menées en direction des personnes âgées, justement pour éviter la perte d'autonomie et reculer l'âge d'entrée en perte d'autonomie. Plusieurs actions sont menées à la fois par l'assurance-maladie et par les caisses de retraite en termes de bilan de santé. Nous développons fortement les bilans de santé pour les personnes seniors pour avoir une détection des risques. Nous avons également développé le programme PAERPA qui vise à accompagner les personnes en risque de perte d'autonomie et qui s'est déployé dans l'ensemble des régions. Nous en faisons actuellement un bilan et nous voyons qu'il produit des effets en termes de meilleure prise en charge des personnes âgées, notamment pour éviter des hospitalisations ou trop de consommation de médicaments qui peuvent générer des pertes d'autonomie.

Nous avons aussi, au travers de la prise en charge de certains dispositifs, des actions qui permettent de lutter contre des facteurs de perte d'autonomie. Je pense notamment à l'action que nous mettons en place sur la prise en charge à 100 % des aides auditives. Les personnes âgées ont un taux de recours aux aides auditives inférieur à ce qu'il devrait être, notamment pour des raisons de reste à charge et de coût financier. Lorsqu'une personne âgée souhaite s'équiper d'une aide auditive, c'est 850 euros de reste à charge par aide auditive. Cela peut expliquer que seul un tiers des personnes malentendantes soit équipé d'aides auditives. Dans le cadre de la prise en charge progressive à 100 % des aides auditives, nous visons que les personnes aient une réduction importante de ce reste à charge. Dès 2019, il y a une réduction de 200 euros. En 2021, les personnes pourront s'équiper d'aides auditives sans avoir aucun reste à charge. C'est aussi un élément de correction de ce risque de malentendance et par conséquent de prévention de perte d'autonomie.

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Martial Mettendorff, directeur général adjoint de Santé publique France

Santé publique France est engagée dans une étude participative avec les ARS. Nous sommes très attentifs à être impliqués sur le terrain, mais nous sommes dans un espace d'incertitudes scientifiques et d'incompréhension de la situation d'exposition de la population. Nous mettons en place des dispositifs d'étude qui permettent à la population de participer ou de comprendre ce que nous faisons. Nous avons mis en place un dispositif un peu original de participation de la population à la réalisation d'une enquête épidémiologique.

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Je souhaite remercier tous les intervenant, notamment d'avoir répondu de manière synthétique aux nombreuses questions posées.

La séance est levée à douze heures quarante-cinq.

Présences en réunion

Réunion du mercredi 19 juin 2019 à 9 heures

Présents. – M. Joël Aviragnet, Mme Delphine Bagarry, M. Belkhir Belhaddad, M. Julien Borowczyk, Mme Brigitte Bourguignon, Mme Marine Brenier, Mme Blandine Brocard, M. Sébastien Chenu, M. Gérard Cherpion, Mme Christine Cloarec, Mme Josiane Corneloup, M. Dominique Da Silva, M. Marc Delatte, M. Pierre Dharréville, M. Jean-Pierre Door, Mme Audrey Dufeu Schubert, Mme Nathalie Elimas, Mme Catherine Fabre, Mme Agnès Firmin Le Bodo, Mme Emmanuelle Fontaine-Domeizel, Mme Albane Gaillot, M. Jean-Carles Grelier, Mme Claire Guion-Firmin, Mme Monique Iborra, M. Cyrille Isaac-Sibille, Mme Caroline Janvier, Mme Fadila Khattabi, M. Mustapha Laabid, Mme Fiona Lazaar, Mme Geneviève Levy, Mme Monique Limon, M. Gilles Lurton, M. Sylvain Maillard, M. Thomas Mesnier, M. Jean-Philippe Nilor, M. Bernard Perrut, M. Laurent Pietraszewski, Mme Claire Pitollat, M. Adrien Quatennens, M. Alain Ramadier, M. Jean-Hugues Ratenon, Mme Stéphanie Rist, Mme Mireille Robert, Mme Marie Tamarelle-Verhaeghe, M. Jean-Louis Touraine, Mme Élisabeth Toutut-Picard, Mme Isabelle Valentin, M. Boris Vallaud, Mme Laurence Vanceunebrock-Mialon, Mme Michèle de Vaucouleurs, M. Olivier Véran, M. Francis Vercamer, Mme Annie Vidal, Mme Corinne Vignon, M. Stéphane Viry

Excusés. – Mme Ramlati Ali, Mme Ericka Bareigts, Mme Justine Benin, M. Guillaume Chiche, Mme Caroline Fiat, Mme Carole Grandjean, M. Brahim Hammouche, Mme Charlotte Lecocq, Mme Nadia Ramassamy, Mme Nicole Sanquer, M. Aurélien Taché, Mme Hélène Vainqueur-Christophe

Assistaient également à la réunion. – Mme Emmanuelle Anthoine, M. Thibault Bazin, Mme Gisèle Biémouret, Mme Anne Blanc, Mme Danielle Brulebois, Mme Annie Chapelier