La réunion

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La réunion est ouverte à 17 heures

Présidence de Mme Marie-Pierre Rixain, présidente.

La délégation aux droits des femmes et à l'égalité des chances entre les hommes et les femmes auditionne M. Olivier Véran, ministre des Solidarités et de la santé, dans le cadre de la mission d'information sur la santé des femmes (Mmes Karine Lebon et Marie-Pierre Rixain, rapporteures).

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Monsieur le ministre des Solidarités et de la santé, nous vous remercions d'avoir bien voulu participer aux travaux que nous menons en cette fin de législature afin d'évaluer l'application des recommandations adoptées durant quatre ans par notre Délégation en matière de santé des femmes.

Nul besoin de rappeler le contexte sanitaire : je salue votre engagement constant et sans faille pour les droits des femmes, en particulier leurs droits sexuels et reproductifs, même et surtout en période de pandémie.

Les problématiques liées à la santé des femmes ont occupé une place importante dans nos travaux. Je résumerai les principales recommandations et avancées adoptées par le Parlement.

Demain, l'Assemblée nationale est appelée à voter, une dernière fois, la proposition de loi de notre collègue Albane Gaillot visant à renforcer le droit à l'avortement, reprenant les recommandations formulées au nom de notre Délégation par nos collègues Marie-Noëlle Battistel et Cécile Muschotti. Je salue leur travail exhaustif et précis, qui fera date. Outre l'issue de cette proposition de loi, que vous soutenez publiquement depuis l'adoption du rapport de nos collègues, le législateur a adopté deux mesures importantes pour améliorer l'effectivité du droit à l'avortement, partout sur le territoire national : la généralisation à toutes les femmes du tiers payant pour un acte d'interruption volontaire de grossesse (IVG) et l'expérimentation de l'ouverture aux sages-femmes de la pratique de l'IVG chirurgical.

De plus, lors du premier confinement, vous avez permis l'allongement du délai de recours à l'IVG médicamenteuse en ville en le portant de cinq à sept semaines de grossesse et facilité le recours à la téléconsultation. Ces mesures seront-elles pérennisées ?

Notre Délégation a adopté le rapport d'information de nos collègues Laëtitia Romeiro Dias et Bénédicte Taurine sur les menstruations. Il a donné lieu à une proposition de loi – que nous avons déposée – sur ses recommandations phares.

Il convient d'insister sur la nécessité de mieux lutter contre les chocs toxiques en préconisant plus de transparence et de contrôle quant à la composition des protections intimes. Quelles ont été les avancées en la matière ? Afin de lutter contre la précarité menstruelle, notre Délégation a proposé de multiplier les mises à disposition gratuites de protections hygiéniques pour les publics les plus précaires et les jeunes. Confirmez-vous la pérennisation et l'élargissement de ces dispositions ?

Autre actualité législative récente, cette fois à propos de l'endométriose, première cause d'infertilité en France qui touche plus d'une femme sur dix. Le Gouvernement s'est mobilisé dès 2019 et le Président de la République a annoncé une stratégie nationale de lutte sur laquelle vous pourrez revenir.

De même, pourriez-vous revenir sur les moyens déployés par le Gouvernement pour faciliter l'accès des femmes… et des hommes – j'y insiste – à la contraception : je pense à la gratuité pour les femmes de moins de 26 ans, votée par le Parlement, à la consultation longue de santé sexuelle ou aux dispensations d'ordonnance permises pendant le confinement.

Autre point qui m'est particulièrement cher : le congé maternité. Dois-je rappeler la réforme que nous avons soutenue, qui a permis aux travailleuses indépendantes et aux agricultrices de bénéficier d'un véritable congé de maternité dont la durée a été alignée sur celle des salariées, et dont nous ne pouvons que nous féliciter ?

Je profite de cette audition pour appeler votre attention sur quelques aspects problématiques qui m'ont été signalés dans le prolongement du rapport que j'avais remis à Agnès Buzyn.

Tout d'abord, le report systématique du délai de paiement des cotisations sociales des travailleuses indépendantes est-il effectif ? En Essonne, ce n'est pas le cas… Qu'en est-il sur le plan national ?

Ensuite, où en est l'expérimentation visant à autoriser une reprise progressive et plafonnée de l'activité des travailleuses indépendantes, sujet encore plus important depuis la fin du régime social des indépendants (RSI) ? Je rappelle qu'il s'agit d'expérimenter la possibilité, pour les travailleuses indépendantes qui le souhaitent, de reprendre progressivement leur activité professionnelle à l'issue d'une période d'interruption totale d'activité de deux semaines avant l'accouchement et six semaines après. Cette reprise se fait sur une période de huit semaines supplémentaires pendant laquelle la femme peut reprendre une activité à temps partiel, à hauteur de 20 %. Il semblerait que cela ne soit pas encore totalement possible pour toutes ces femmes.

Enfin, dans le cadre de la dernière loi de financement de la sécurité sociale (LFSS), nous avons permis aux travailleuses indépendantes n'ayant pas suffisamment cotisé de faire valoir leurs droits liés à la maternité au titre d'un salariat précédent, ce que refusent encore à de nombreuses femmes des caisses d'assurance maladie (CPAM) locales. De plus, si nous avons autorisé une rétroactivité jusqu'en 2019, quelques travailleuses indépendantes dont les dossiers remontent à 2018 sont exclues de la loi. Peut-être pourrons-nous régulariser leurs dossiers ?

Je sais combien vous êtes mobilisé, aux côtés d'Élisabeth Moreno, ministre déléguée chargée de l'égalité entre les femmes et les hommes, sur la question des enseignements relatifs à la vie affective et sexuelle. Avez-vous eu des échanges avec le ministre de l'éducation nationale à ce sujet ?

Enfin, le rapport Femmes et ruralités de nos collègues sénateurs, dont la délégation aux droits des femmes a auditionné les auteurs, dresse un constat triste et alarmant. Quelles actions sont-elles menées pour garantir à toutes les femmes, quel que soit leur âge, un accès à des soins de qualité ? Dans un contexte de vieillissement de la population et de désertification médicale, comment permettre l'accès des femmes les moins mobiles, notamment en milieu rural, aux soins et à la prévention ? Je pense notamment à l'engagement « maternité » voté par le législateur.

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Monsieur le ministre, quel regard portez-vous sur la préconisation formulée par nos rapporteures, Mmes Marie-Noëlle Battistel et Cécile Muschotti, visant à une meilleure prise en compte des coûts spécifiques des actes d'IVG dans les outre-mer ?

S'agissant du rapport sur les menstruations, comment mieux sensibiliser les professionnels de santé à l'endométriose ? Nos collègues ont relevé de nombreux témoignages selon lesquels, faute d'une formation satisfaisante, des professionnels assimilaient ces douleurs à des problèmes psychologiques – refus de devenir une femme, etc. –, ce qui aggrave encore les souffrances des femmes concernées.

L'actualité donne un triste écho aux travaux sur la séniorité des femmes réalisés en 2019 par Mmes Marie-Noëlle Battistel et Sophie Panonacle, qui préconisaient de revoir le modèle des EHPAD en promouvant la logique de la bientraitance pour garantir de meilleures conditions de vie aux résidents, en « favorisant une alimentation saine et gourmande » et en développant les activités physiques. Dans ces établissements, mais aussi dans nombre d'établissements de santé, la situation est souvent catastrophique pour les personnes âgées, très majoritairement des femmes. Ces personnes sont trop souvent condamnées à souffrir, voire à mourir en silence. Quelles mesures ont été prises au cours de cette législature pour améliorer la situation des résidents en EHPAD et des personnes âgées hospitalisées ? Quels dispositifs d'alerte, de signalement et de contrôle sont mis à disposition de ces personnes et de leurs proches ?

Par ailleurs, la crise sanitaire a renforcé les situations de huis clos, ce qui a aggravé les problèmes de maltraitance ou de négligence là où ils existaient déjà. Les mesures de restriction des visites ont laissé des dizaines, voire des centaines de milliers de personnes âgées livrées à elles-mêmes. Ne faudrait-il pas instaurer un droit absolu de visite aux membres des familles des personnes âgées dépendantes pour les visiteurs qui fournissent la preuve d'un schéma vaccinal complet ou d'un test négatif et qui, nonobstant, se voient refuser la visite à leurs proches ? Compte tenu des possibilités de vaccination ou de test offertes, il est possible d'imaginer que des consignes claires et certaines modalités de visites peuvent réduire les risques de contamination et éviter ainsi à ces personnes de dépérir dans la solitude. De telles garanties peuvent-elles être apportées aux familles de résidents en EHPAD ou aux personnes âgées hospitalisées ? Le Gouvernement peut-il transmettre des consignes très claires ? C'est la première condition pour permettre aux personnes âgées dépendantes – très majoritairement des femmes, donc – de finir leur vie dans la dignité.

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Olivier Véran, ministre des solidarités et de la santé

Je vous remercie de votre invitation. Le moment est en effet venu de faire le bilan de chantiers structurants en matière de santé et d'accès aux prestations sociales pour les femmes.

Depuis presque deux ans que je suis ministre, la crise sanitaire m'a considérablement mobilisé mais, malgré la tempête et la lutte de chaque instant contre l'épidémie, j'ai toujours tenu à défendre des convictions fortes et à me préoccuper des questions fondamentales, dont la santé des femmes. Nous avons fait avancer des causes, nous avons renforcé des droits et nous en avons consacré de nouveaux.

Parler de la santé des femmes, cela suppose de regarder en face des réalités difficiles et de lever certains tabous. Il y a quelques années, un ministre de la santé parlant de précarité menstruelle aurait suscité de la perplexité, voire de la gêne. Je le fais aujourd'hui devant des associations qui permettent aux femmes en situation de vulnérabilité d'accéder à des protections hygiéniques.

Il y a peu, ce sujet était donc encore tabou, comme si parler d'un phénomène biologique concernant un être sur deux sur la planète supposait toujours une fausse gêne ou une vraie pudibonderie ! Dans les publicités pour les protections hygiéniques, le liquide qui coule est bleu et les jeunes filles qui ont leurs premières règles dans un établissement scolaire sont l'objet de railleries de la part des garçons… Mais quel exemple montrent les adultes ? Ce tabou est imposé par la société et il ne tient qu'à nous de le faire tomber. Ce sujet n'est ni technique ni sémantique : c'est une question d'égalité entre les femmes et les hommes, grande cause du quinquennat.

La précarité menstruelle touche 1,7 million de femmes et concerne principalement trois publics. Le tabou est le même, les risques sont identiques mais les problématiques diffèrent.

Pour les adolescentes et les jeunes femmes – collégiennes, lycéennes ou étudiantes –, la clé est l'éducation à la sexualité. Je salue la remarquable prise en charge individuelle assurée par les infirmiers et la formation des personnels de l'éducation nationale. Je crois profondément à « l'intelligence du local ». Les universités, les centres régionaux des œuvres universitaires et scolaires (CROUS) et les collectivités ont trouvé d'excellentes solutions mais il faut aller plus loin en ouvrant davantage l'école et en revenant au principe : « une tête bien pleine dans un corps bien fait ». Les enfants doivent apprendre à lire, écrire et compter, or, nombre d'entre eux souffrent de plus en plus d'addiction aux écrans, de conflits sociaux – de plus en plus précocement – et de difficultés éducationnelles. Si l'on considérait la famille comme l'alpha et l'oméga de l'éducation des enfants, on ne déploierait pas des trésors d'ingéniosité pour encourager les collectivités à offrir des petits déjeuners gratuits à l'école. S'il est parfois difficile de faire comprendre qu'un enfant qui a le ventre vide ne peut pas apprendre correctement, il l'est encore plus d'aller sur d'autres terrains avec certaines familles. Il faut donc ouvrir l'école. L'intervention d'une association ou du Planning familial dans un établissement scolaire relève du seul chef d'établissement, de sorte que des inégalités peuvent se créer entre les territoires.

S'agissant des femmes incarcérées, nous avons des échanges réguliers avec le Garde des Sceaux et l'administration pénitentiaire s'est saisie de cette question.

Enfin, pour les femmes en situation de grande précarité, j'ai demandé à l'administration de travailler à un plan d'action afin de fournir des protections périodiques à celles qui sont accueillies dans les établissements spécialisés et par les services sociaux. Des avancées ont été réalisées et la précarité menstruelle a reculé sans avoir toutefois été éradiquée. Le travail n'est donc pas terminé.

J'en viens à l'endométriose. À l'école, une jeune femme ou une jeune fille qui a des douleurs pendant ses règles va à l'infirmerie et rate des cours. Pendant sept ans, en moyenne, elle s'entendra dire que c'est normal et que les règles peuvent être douloureuses. Or, si la présence de douleurs n'est pas toujours un signe d'endométriose, celle-ci peut provoquer des douleurs suraiguës dont il faut tenir compte afin d'inscrire les jeunes femmes et les jeunes filles dans des parcours diagnostiques parfois complexes, ce qui nécessite que les médecins eux‑mêmes connaissent bien les symptômes de cette maladie.

Lors de mes études de médecine, pas si lointaines, l'endométriose n'avait pas la place qu'elle aurait dû avoir alors que 10 % des femmes sont concernées. Il faut donc former les médecins, informer la population et développer les parcours diagnostiques – il est en particulier très difficile, dans la ruralité, de bénéficier de soins spécifiques. Même si nous ne savons pas comment guérir cette maladie, il est possible de soulager les patientes. Un traitement chirurgical est d'ailleurs envisageable lorsque des brides péritonéales se développent et que l'endométriose envahit d'autres organes. Première cause d'infertilité, elle est souvent diagnostiquée à l'occasion des bilans d'infertilité.

Il convient également de repenser la place de cette pathologie dans la société et sa prise en charge par la sécurité sociale : doit-elle être considérée comme une affection de longue durée – ALD 30 – c'est-à-dire comme une maladie chronique à vie, toute personne qui en est atteinte étant prise en charge à 100 %, ou comme une ALD 31 justifiant un traitement prolongé ? Les appréciations diffèrent entre experts et associations. Nous débattrons de ces questions, le Parlement ayant voté à l'unanimité une proposition de résolution en ce sens. J'ai quant à moi émis quelques réserves car, s'il faut offrir la protection la plus adaptée aux femmes, il ne serait pas de bonne politique de mettre du jour au lendemain 10 % d'entre elles en longue maladie. Le Président de la République s'est saisi de cette question à bras-le-corps. Il est intervenu le 11 janvier à ce propos et il m'a confié le pilotage d'un comité interministériel. Les travaux commenceront le 14 février à la suite de la remise du rapport de l'eurodéputée Chrysoula Zacharopoulou, qui a réalisé un excellent travail.

Par ailleurs, publiée le 1er décembre dernier, la feuille de route 2021-2024 de la stratégie nationale de santé sexuelle prévoit des actions concrètes pour renforcer la promotion, l'information, l'éducation à la santé sexuelle, telles que le lancement de la semaine de la santé sexuelle en 2022, la conception et la diffusion d'outils de promotion de la santé sexuelle accessibles aux publics en situation de handicap et le renforcement des connaissances en santé sexuelle des jeunes dans le cadre du service national universel. Elle réaffirme la nécessité d'une offre en santé sexuelle lisible, accessible, à proximité des lieux de vie et comporte une action consacrée au renforcement de l'accès à l'IVG tant nous devons conforter l'exercice effectif de ce droit partout sur le territoire. Il est également prévu d'inscrire l'IVG comme action prioritaire du développement professionnel continu (DPC) pour la période 2023-2025. Nous intégrerons une offre de dépistage gratuit des infections sexuellement transmissibles (IST) dans le forfait IVG ; nous actualiserons et renforcerons également le site ivg.gouv.fr et son référencement pour améliorer la visibilité de l'offre.

Les premières mesures concrètes ont été adoptées dans le cadre de la loi de financement de la sécurité sociale pour 2022, notamment, l'extension de la consultation longue santé sexuelle à tous les jeunes jusqu'à 25 ans afin que celle-ci cesse d'être considérée comme la seule affaire des femmes, et l'accès gratuit à la contraception pour les femmes jusqu'à 25 ans révolus, depuis le 1er janvier dernier. Pour les hommes – cela se sait peu – l'achat de préservatifs est remboursé et pris en charge à 100 % sur prescription : la contraception masculine est en effet reconnue au titre des dispositifs de contraception efficaces et remboursables car les femmes peuvent également acheter des préservatifs masculins. La contraception masculine doit néanmoins se développer, même si cela ne relève pas de la compétence du ministre. Les laboratoires doivent investir plus massivement, ce qui suppose une demande accrue et, donc, une évolution de la société.

J'ai toujours défendu le renforcement de l'accès à l'IVG partout sur le territoire. Pendant la crise sanitaire, j'ai demandé en urgence l'allongement de cinq à sept semaines de l'avortement médicamenteux et la possibilité de le faire par télémédecine. Je me suis mis en effet à la place d'une jeune fille mineure, âgée de 16 à 17 ans qui, en plein confinement, n'avait pas envie de dire à ses parents qu'elle avait besoin de se rendre au Planning familial. Nous l'avons fait par arrêté, dans le cadre de l'urgence sanitaire, faute de quoi cela nous aurait peut‑être valu des années de débat au Parlement – nous avons d'ailleurs prolongé ce dispositif à votre demande et je m'étais engagé à faire entrer ces mesures dérogatoires dans le droit commun. Le décret d'application, en cours d'examen par le Conseil d'État, sera publié dans les prochaines semaines. Cette mesure sera pérennisée.

Par ailleurs, les IVG instrumentales en centre de santé peuvent désormais être appliquées, le décret qui en précise les conditions ayant été publié en avril dernier.

Le décret et l'arrêté d'application relatifs à l'expérimentation de la réalisation d'IVG instrumentales par les sages-femmes en établissement de santé ont été publiés le 31 décembre 2021. Je n'ignore pas que la proposition de loi visant à renforcer le droit à l'avortement en prévoit la généralisation mais, comme un bon « tiens vaut mieux que deux tu l'auras », j'ai préféré que les textes ouvrant la voie à l'expérimentation soient publiés tant on ignore de quoi l'avenir sera fait… Une cinquantaine d'équipes sera sélectionnée et les premiers projets commenceront à la mi-2022. C'est une étape importante pour jeter les bases d'une pratique qui, sans nul doute, facilitera l'organisation des équipes hospitalières pour répondre aux demandes d'IVG et donnera aux femmes un nouvel interlocuteur dans leurs parcours.

Depuis la LFSS pour 2021, le tiers payant intégral est dorénavant prévu pour toutes les femmes s'agissant des dépenses prises en charge par l'assurance maladie obligatoire, c'est-à-dire 100 % des frais liés à l'IVG. À ce tiers payant s'ajoute la garantie du respect du secret pour la prise en charge de ces frais pour toutes les femmes.

Une politique efficace de prévention primaire et de dépistage reste plus que jamais essentielle pour lutter contre la survenue des cancers. Il est primordial d'informer les femmes des facteurs de risque et de protection. Ces dernières années, les campagnes de prévention des cancers du sein et du col de l'utérus ont été intensifiées à travers des actions de communication de l'institut national du cancer (INCa). La vaccination est un moyen sinon d'éradiquer le cancer du col de l'utérus, du moins, de le faire quasiment disparaître. Elle est possible mais peu effective, tant pour les jeunes femmes que pour les jeunes hommes qui, quant à eux, peuvent développer des cancers de la marge anale ou de la sphère oro-pharyngée. La question de la vaccination obligatoire contre le HPV – human papilloma virus – se posera. Le vaccin est une chance et il est intolérable que sept-cents jeunes femmes décèdent du cancer du col de l'utérus chaque année alors qu'il est évitable ou que l'on considère qu'il est difficile de vacciner des jeunes filles contre une maladie sexuellement transmissible. Certains pays comme le Mexique et le Costa Rica, me semble-t-il, ont rendu cette vaccination obligatoire mais c'est assez peu le cas en Europe. J'ajoute que nous constatons une augmentation des cancers du poumon et du larynx chez les femmes parce qu'elles fument davantage.

Il est essentiel de développer la participation des femmes aux programmes de dépistage des cancers du sein et du col de l'utérus. Plusieurs actions de communication ont été menées depuis 2017 pour les soutenir et leur apporter toutes les informations nécessaires à la compréhension des enjeux, notamment à travers des campagnes de publicité de proximité ou lors des mois de sensibilisation et de mobilisation, ainsi qu'à travers la diffusion régulière de communiqués et de dossiers de presse. Nous avons tous porté le petit sigle contre le cancer du sein.

Depuis 2021, l'institut national du cancer a mis en ligne la rubrique leseclairages.e-cancers.fr, afin de lutter contre les fausses informations et de donner au grand public une information scientifiquement robuste, notamment sur la vaccination contre le HPV et le dépistage du cancer du sein.

Plusieurs actions ont été menées pour améliorer la qualité des programmes de dépistage. S'agissant du cancer du sein, l'amélioration constante de la qualité des installations a conduit à ne plus autoriser, depuis 2019, les mammographes analogiques et à expérimenter la dématérialisation des mammographies afin de faciliter la seconde lecture des clichés. S'agissant du cancer du col de l'utérus, plusieurs actions ont permis depuis 2018 d'améliorer la qualité du programme, dont la mise en place du test HPV pour les femmes entre 30 et 65 ans. Un référentiel sur l'auto-prélèvement vaginal est en cours d'élaboration.

Je souhaite également évoquer la santé des femmes dans la période périnatale, moment de bouleversements personnels. La grossesse est en effet une période délicate. Dès 2019, nous avons généralisé l'entretien prénatal précoce pour répondre à l'enjeu de la bientraitance obstétricale. Dans la grande majorité des cas, au-delà des situations extrêmes et condamnables, se posait un problème de communication et de dialogue faute d'un temps sanctuarisé. L'enquête nationale périnatale de 2016 ayant révélé une sous-utilisation de l'entretien, celui-ci est désormais obligatoire depuis le 1er mai 2020.

La parentalité se prépare. C'est une période charnière pour se construire et assurer le développement harmonieux de l'enfant. Adrien Taquet, secrétaire d'État chargé de l'enfance et des familles, s'est engagé à travers le plan « 1 000 premiers jours de l'enfant ». De nombreuses mesures ont déjà été prises, dont l'entretien postnatal, disposition que vous avez votée et qui sera effective à partir du mois de juillet. Il aura lieu entre quatre et huit semaines après la naissance pour faire le point, vérifier que tout se passe bien, dépister et détecter les symptômes de la dépression post-partum, laquelle touche 10 % à 20 % des femmes et est sous‑diagnostiquée alors que nous pouvons prévenir ou accompagner les femmes en intervenant suffisamment tôt.

Je citerai aussi le développement des visites à domicile après l'accouchement, en lien avec les centres de protection maternelle et infantile, notamment dans les situations de vulnérabilité. Afin d'accompagner au plus près les femmes, de la grossesse au post-partum, l'expérimentation d'un référent parcours périnatalité pour dix-huit mois a été engagée dans quatre territoires.

Concernant l'accès au congé de maternité pour les travailleuses indépendantes, la LFSS pour 2019 a favorisé, sur la base de vos propositions, une grande avancée sociale. En tant que rapporteur, je vous avais soutenus. Comme les salariées, elles bénéficient désormais de 112 jours d'indemnisation, conformément à l'engagement présidentiel. En outre, vous avez adopté dans la LFSS pour 2022 le principe du maintien des droits des travailleuses indépendantes anciennement salariées, lequel a fait rapidement l'objet d'un décret. Nous allons nous assurer que cette disposition soit opérationnelle partout, même s'il existe toujours des « bugs » ou des retards à l'allumage.

L'amélioration de la qualité de vie dans les EHPAD est essentielle.

Je l'ai moi-même vécu professionnellement : quand, la nuit, on est deux, un auxiliaire de soins et un aide-soignant, pour cent personnes âgées, dont une bonne cinquantaine très dépendante et une bonne trentaine souffrant de troubles psychogériatriques, il est très difficile de répondre à toutes les demandes en temps et en heure. C'est une question éminemment complexe. Plutôt que d'opposer modèle privé et public – j'ai travaillé dans le secteur public où nous étions aussi deux la nuit –, mieux vaudrait envisager la construction d'EHPAD à taille plus humaine.

Tout d'abord, il importe de prioriser le domicile : les Français veulent vivre chez eux le plus longtemps possible. Ensuite, quand la dépendance est trop forte, quand l'autonomie disparaît, quand, malgré les congés, la famille ne peut plus assurer le quotidien et qu'une admission en EHPAD est nécessaire, il faut envisager un autre modèle. Des moyens supplémentaires ont été déployés : nous avons recruté 40 000 personnes dans l'urgence, pendant la crise, 10 000 personnes l'ont été de façon structurelle et nous en cherchons 10 000 supplémentaires. Les budgets et la feuille de route, qu'il convient maintenant de décliner, me semblent à la hauteur.

En ce qui concerne le droit de visite, des directives ont été adressées depuis plusieurs mois. Comme dans l'éducation nationale, c'est en l'occurrence le directeur qui peut adapter le protocole en fonction de son établissement. D'un point de vue légal, sauf situations extrêmes, rien ne peut empêcher les visites. J'ajoute que l'isolement peut parfois s'expliquer par la situation géographique.

Dans le cadre du Ségur de la santé, nous avons consacré 700 millions à l'équipement numérique des EHPAD pour 700 000 résidents, soit 1 000 euros par résident. Le petit papi ou la petite mamie en perte d'autonomie dispose d'un écran et d'une télécommande à plusieurs touches, l'une pour appeler son fils ou sa fille en visioconférence, une autre pour allumer la télévision et une autre pour appeler à l'aide. Tout cela est financé et en cours de déploiement partout afin d'améliorer le confort de personnes qui en ont bien besoin.

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Nous mesurons concrètement la force de votre engagement pour les droits des femmes et nous vous en remercions.

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La santé mentale des femmes est moins bonne que celle des hommes et le Covid n'a pas amélioré la situation. Les troubles du comportement alimentaire touchent 1,5 % des femmes contre 0,5 % des hommes, et une femme a deux fois plus de risques qu'un homme de vivre un épisode dépressif. Le sujet, complexe et tabou, appelle des réponses interministérielles, notamment pour réduire les facteurs de risque aggravant comme les violences faites aux femmes, la pression sociétale sur le corps des femmes, la charge mentale ou les inégalités sociales. Après les assises de la santé mentale, comment votre ministère s'est-il saisi de cette question ?

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Je vous félicite de votre engagement pour permettre à un maximum de jeunes femmes d'accéder à des produits de protection gratuitement. À l'occasion de la visite, en octobre, de Mme Moreno et de M. Taquet sur des campus universitaires de ma circonscription, nombre d'étudiantes ont exprimé leur satisfaction de disposer de distributeurs.

Toutefois, les situations, en la matière, diffèrent. Ne pourrait-on envisager un déploiement national homogène – collège, lycée, enseignement supérieur – et créer un baromètre permettant de s'assurer de son effectivité ?

J'ai été alerté sur la qualité des produits diffusés alors que nous en fabriquons de très bonne qualité et bio. Ce n'est pas parce que ces produits sont mis à disposition et pris en charge par la collectivité qu'ils doivent être de moindre qualité.

Enfin, des députés ont fait état dans leurs rapports de la qualité plutôt médiocre des sanitaires, où les jeunes filles n'osent plus se rendre.

Je suis d'accord avec vous sur la nécessité d'une plus grande ouverture de l'école. Comment pourrait-on également l'ouvrir en matière de prévention et de santé mentale, en particulier pour les jeunes filles ? Si les assises de la santé mentale ont fixé de bonnes orientations, elles n'ont pas évoqué la différence de vécu psychique et psychologique entre les hommes et les femmes.

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Mme la présidente a évoqué le rapport alarmant du Sénat sur la situation des femmes dans les territoires ruraux. Le dernier numéro de l'émission Cash Investigation a rappelé le refus, par le lobby des médecins, de l'obligation d'installation pourtant de nature à rééquilibrer l'offre de soins sur les territoires et à lutter contre les déserts médicaux, à l'image du dispositif instauré avec succès au Canada. L'obligation d'installation est d'ailleurs l'une des préconisations faites par les sénateurs devant notre Délégation.

Que pensez-vous des centres de santé fonctionnant grâce à des médecins salariés et facilitant l'accès aux soins des femmes et des autres habitants de la ruralité, comme c'est notamment le cas dans ma circonscription ariégeoise, à Lavelanet ? En zone rurale, l'incitation à l'installation est un échec car elle entraîne une surenchère des demandes et une compétition entre territoires. Lors de sa visite, samedi, M. Castex a annoncé la fin du numerus clausus mais l'obligation d'installation ne s'imposera-t-elle pas ?

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Environ 3,3 millions de Français sont concernés par l'infertilité, sujet que j'ai eu l'occasion d'aborder avec des femmes de ma circonscription de Pau. Ne faut-il pas améliorer la prévention dès le collège, le lycée et l'université alors qu'une femme sur quatre est touchée à 30 ans, une sur trois à 35 ans et une sur deux à 40 ans ? Nous avons identifié trois causes principales : médicale, sociétale et environnementale. Ne faudrait‑il pas créer une structure afin de coordonner, piloter et impulser des actions de prévention et de prise en charge des personnes infertiles à l'échelon individuel ou collectif ?

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Une politique d' « aller vers » est-elle menée en direction des femmes en situation de précarité afin de faciliter leur accès aux soins ? En effet, la mortalité liée aux maladies cardiovasculaires est trois fois supérieure chez les ouvrières par rapport aux cadres et 6 % à 7 % des ouvrières n'ont aucun mode de contraception contre 1,6 % des femmes cadres. C'est un fait que l'accès aux soins et à la santé varie selon les classes sociales.

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Je rappelle qu'en moyenne, les femmes vivent plus longtemps que les hommes mais en moins bonne santé.

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Dans notre rapport sur l'accès à l'IVG, nous avons pointé du doigt la question de la sensibilisation aux problèmes liés à la sexualité et à l'égalité entre les filles et les garçons au sein des établissements scolaires. Si les textes imposent un certain nombre de séances par année, dans les faits, elles sont très peu organisées. À mon sens, elles doivent d'ailleurs l'être par des professionnels extérieurs au monde de l'éducation nationale. On pourrait très justement nous répondre que c'est aux parlementaires de contrôler la bonne application de la loi or, comme vous le savez, nous avons trop peu de temps et de moyens pour ce faire.

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Nous auditionnerons demain la neurobiologiste Catherine Vidal à propos des neurosciences, qui remettent parfois en question l'égalité entre les femmes et les hommes en justifiant des inégalités économiques ou d'accès à certains postes en raison des compétences supposément spécifiques du cerveau féminin. Nous sommes vigilants sur ce point et je souhaitais vous en alerter.

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Olivier Véran, ministre

Cela revient en effet à tenter de « scientiser » soixante ans de débats en prenant la question de travers. Je me suis passionné pour le « care » dans le champ sanitaire. Pour réaliser à Sciences Po un mémoire sur le sujet, j'avais travaillé sur deux ouvrages, l'un de Joan Tronto et l'autre de Carol Gilligan, auteur qui a fait partie de la première génération des gender studies américaines. J'ai beaucoup aimé le livre de Joan Pronto, qui rétablit toute la valeur du « care » et l'inscrit dans certains courants de pensée.

Selon certain postulat, les femmes seraient dotées d'une morale particulière qui les rendrait plus aptes à s'occuper des vieillards, des bébés et des malades. Quand elles ont revendiqué le légitime droit d'accès à la sphère professionnelle, les « insiders » ont dit aux femmes qu'elles devaient faire ce qu'elles savaient faire le mieux, c'est-à-dire s'occuper des vieillards, des enfants et des malades, en ajoutant : on vous permet déjà d'exercer des métiers féminisés, mais on ne va tout de même pas vous donner le même salaire ! Grâce au Ségur de la santé, 1,5 million de personnes, dont 85 % de femmes, a bénéficié des 10 milliards consacrés à la hausse de salaires. Nous avons ainsi rattrapé un écart salarial qui n'était justifié que par des théories infondées datant de cinquante ans et ce fut la plus forte réduction d'écart de salaires entre hommes et femmes dans l'histoire de notre pays. Rien, dans les circuits neuronaux, ne peut justifier une discrimination fondée sur une différence entre les hommes et les femmes.

Concernant la santé mentale des femmes, j'ai évoqué le cas spécifique du post‑partum. Vous l'avez dit, la charge mentale peut aussi être vécue différemment. Je n'ai pas parlé de la question des violences faites aux femmes alors que nous avons beaucoup travaillé pour organiser les centres de prise en charge et d'accueil et que nous avons déployé d'importants moyens budgétaires. J'avais reçu Élisabeth Moreno dès après sa nomination et elle m'avait fait part de la nécessité d'accélérer leur déploiement : nous avons multiplié les budgets, me semble‑t-il, par cinq. Une vingtaine de ces maisons est en cours de réalisation, ce qui permettra également d'accompagner ces femmes sur un plan psychologique.

Les troubles du comportement alimentaire sont en effet plus fréquents chez les jeunes femmes que chez les jeunes hommes. Ils sont parfois plus insidieux et prennent des formes différentes. J'ajoute qu'un autre trouble comportemental est de plus en plus fréquent chez les jeunes adolescentes : la scarification. Cette tendance à se faire du mal et à se blesser, comme pour « graver » une image de soi différente, inquiète beaucoup les pédopsychiatres. Nous renforçons donc la filière pédopsychiatrique, les « chèques psy » permettant de lever les obstacles financiers pour consulter un psychologue. Nous renforçons les centres médico‑psychologiques (CMP) infanto-juvéniles ; nous menons des campagnes de prévention et de promotion de la santé. Les jeunes utilisent beaucoup le numéro national de prévention du suicide puisque plusieurs dizaines de milliers d'appels ont lieu, certains étant suivis de déplacements qui ont sans doute permis d'éviter nombre de passages à l'acte.

Faut-il traiter spécifiquement la santé mentale chez les femmes ? Les réseaux ont plutôt tendance à se structurer en fonction des pathologies et des troubles psychiques, les troubles du comportement alimentaire, par exemple, concernant aussi les hommes : l'anorexie est souvent présentée comme une maladie féminine, or, 5 % à 10 % des hommes en souffrent. L'approche de l'anorexie est donc la même pour un garçon ou une fille. Lors des assises de la santé mentale, les experts n'ont pas souhaité de différenciation.

La distribution des protections menstruelles fait l'objet d'initiatives locales ; nous lui consacrons chaque année 5 millions alors que nous sommes partis de rien. En 2020-2021, nous avons expérimenté une mise à disposition gratuite dans soixante-quatre collèges et lycées de l'académie de Lille afin de promouvoir la santé des élèves et de lutter contre les disparités économiques ainsi que les stéréotypes ; 6 000 protections périodiques ont été distribuées, 30 % des établissements expérimentateurs ont fait appel à des personnels formés en éducation de la sexualité, 63 % aux référents « égalité filles-garçons », 54 % à un partenaire extérieur comme le Planning familial, 77 % des établissements ont proposé un projet éducatif sur la puberté, la vie affective et sexuelle, l'égalité entre les filles et les garçons. En 2021, nous avons souhaité étendre cette expérimentation aux Alpes-Maritimes, à la Seine-Saint-Denis, aux Ardennes, aux Landes et à La Réunion. Je n'ai aucun doute quant à sa généralisation.

Je ne ferai pas d'annonce ici mais, dans les prochaines semaines, vous aurez satisfaction à propos de la qualité des protections menstruelles.

Je ne rouvrirai pas le débat sur la liberté d'installation des médecins. Une obligation d'installation est possible lorsque le nombre de médecins est pléthorique ; en période de pénurie, celle-ci serait aggravée. Si trois ou quatre médecins s'installent dans un désert médical, les autres zones en difficulté, fussent-elles un peu moindres, en pâtiront. Si vous dites que plus aucun médecin ne pourra s'installer à Tarbes pendant cinq ans parce que la démographie médicale de ce territoire se situe un peu au-dessus de la moyenne, la population protestera, considérant qu'elle manque déjà de médecins traitants. Empêcher des médecins de s'installer à un endroit ne les contraindrait pas à s'installer où on le souhaiterait et risquerait de creuser les inégalités territoriales. De plus, le vieillissement de la population des médecins entraîne des évolutions rapides : une zone considérée comme surdotée peut rapidement devenir un désert médical. À Calvi, le nombre de médecins est ainsi passé de onze à quatre en dix mois !

Il n'en reste pas moins qu'il faut favoriser l'accès à la santé en milieu rural pour tous. C'est pourquoi nous déployons télémédecine, assistants médicaux et communautés professionnelles territoriales de santé. Je me bats d'ailleurs contre les corporatismes et pour que soient reconnues à des soignants non médicaux des compétences pleinement acquises par l'expérience : infirmières à pratique avancée, développement des compétences des auxiliaires de puériculture, infirmières de bloc opératoire – IBODE –, qui passent au niveau master. Dans tous ces métiers féminisés, non par nature mais par culture, il importe de valoriser les compétences et de reconnaître les qualifications par l'apprentissage afin de leur donner une nouvelle impulsion.

S'agissant de l'infertilité, le rapport qui me sera remis ce vendredi par Samir Hamamah et Salomé Berlioux – dont je connais déjà les « bonne feuilles » ! – montre que le rythme des naissances est inférieur à celui qui est nécessaire pour assurer le renouvellement de population. Beaucoup avanceront des raisons fiscales mais je n'en suis pas convaincu. Les aides, le quotient ou les allocations, sont indispensables pour ne pas freiner financièrement le projet parental de quiconque mais je ne crois pas que la modulation de quelques pourcents de l'un ou l'autre indicateurs soit motivante. La crise du covid a entraîné une baisse de la natalité – laquelle avait commencé avant –, ce qui incite à considérer la question de l'immigration sous un angle différent de celui dans lequel on voudrait nous enfermer. Nous aborderons également la question de l'infertilité à partir des facteurs de risques, ceux qui sont connus et ceux qui sont suspectés mais non démontrés, ainsi que les parcours de prise en charge.

Après deux ans, je regrette que le volet de la santé environnementale n'ait pas été suffisamment considéré car j'y crois beaucoup. La sortie de la crise du covid peut être l'occasion d'aller plus loin.

Nous avons beaucoup évolué sur la question de la conservation de gamètes grâce à la loi de bioéthique, dont j'aurais pu parler.

Enfin, dans le cadre du Ségur de la santé, des crédits ont été déployés pour les femmes dont la situation sanitaire est la plus précaire. Des équipes mobiles ont été organisées, notamment en Île-de-France. J'ai financé les premiers lits « halte soins de suite » destinés exclusivement aux femmes dont la situation sociale, après leur accouchement, est particulièrement précaire. J'ai été bouleversé par la vie de ces femmes, qui donnent envie de se battre pour changer l'humanité, des femmes qui ont traversé des continents, des mers et des océans, qui ont été violées, qui ont subi de nombreuses violences et qui veulent élever leur enfant. Sans doute faut-il faire beaucoup mieux mais je compte sur vous, dont je connais les engagements.

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Nous n'avons pas parlé de ce sujet important qu'est la PMA…

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Olivier Véran, ministre des solidarités et de la santé

Nous avions anticipé 3 000 demandes de PMA en un semestre et nous en sommes à 7 000 ! La loi était donc très attendue, ce qui répond aussi à vos questions sur la natalité. Nous avons reconnu des modèles familiaux qui, jusqu'ici, ne l'étaient pas. J'ai rencontré un couple de femmes qui m'a dit : « Nous sommes arrivées dans un hôpital où on nous parlait français, contrairement à la Belgique, côté flamand, où nous étions allées. Nous sommes allées dans une pharmacie française, avec une ordonnance française, et nous n'avons pas honte. On a l'impression d'être des citoyennes à part entière ».

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Si ce sont les femmes qui portent les enfants, le congé paternité est aussi un immense progrès en matière d'égalité entre les femmes et les hommes !

Je vous remercie.

La réunion s'achève à 18 h 05

Membres présents ou excusés

Présents. - M. Erwan Balanant, Mme Fiona Lazaar, M. Gaël Le Bohec, Mme Karine Lebon, Mme Cécile Muschotti, Mme Josy Poueyto, Mme Marie-Pierre Rixain, Mme Laëtitia Romeiro Dias, Mme Isabelle Santiago, Mme Bénédicte Taurine, Mme Laurence Trastour‑Isnart

Excusés. - M. Guillaume Gouffier-Cha, Mme Nicole Le Peih, Mme Isabelle Rauch

Assistait également à la réunion. - Mme Cécile Delpirou