Publié le 9 juin 2018 par : Mme Bareigts, M. Aviragnet, Mme Battistel, Mme Biémouret, M. Bouillon, M. Jean-Louis Bricout, M. Carvounas, M. Alain David, Mme Laurence Dumont, M. Faure, M. Garot, M. David Habib, M. Hutin, M. Juanico, Mme Karamanli, M. Jérôme Lambert, M. Le Foll, M. Letchimy, Mme Manin, Mme Pau-Langevin, Mme Pires Beaune, M. Potier, M. Pueyo, M. Pupponi, Mme Rabault, M. Saulignac, Mme Untermaier, Mme Vainqueur-Christophe, M. Vallaud, Mme Victory.
I. – Supprimer l'alinéa 10.
II. – En conséquence, après l'alinéa 23, insérer l'alinéa suivant :
« 15° Le cas échéant, le titulaire lui-même. »
Lorsque le coût de la formation est supérieur au montant dont dispose l'individu sur son CPF, le texte prévoit plusieurs canaux d'abondements complémentaires. Parmi eux, le texte prévoit que le titulaire puisse lui-même financer sa formation. Vu les montants prévus pour le Compte personnel de Formation, il est désormais clair que sans abondements, des formations qualifiantes ou de réorientation professionnelle à la hauteur de leurs moyens deviendront hors de portée.
Il est à craindre que le financement des formations professionnelles, qui bénéficient aux titulaires eux-mêmes mais également à l'entreprise dans laquelle il exerce et à l'économie française toute entière dans nos efforts pour parvenir à une société de la connaissance, ne soit progressivement opéré par les seuls titulaires. Il n'est d'ailleurs pas anodin que le titulaire soit la première personne mentionnée lorsqu'il s'agit d'abondement complémentaire : l'employeur nous paraîtrait bien plus indiqué, tout comme l'opérateur de compétences ou l'État ou Pôle emploi notamment pour des demandeurs d'emploi.
Bénédicte Zimmermann, Directrice d'études à l'EHESS et directrice du Centre Georg Simmel – Recherches franco-allemandes en sciences sociales, résume ainsi dans Le Monde du 5 juin 2018 : “Si la liberté de choisir ne peut se concevoir indépendamment de la responsabilité qu'elle engendre envers soi-même et autrui, se pose la question cruciale des moyens accessibles à tout un chacun afin d'exercer cette responsabilité. Au-delà de la liberté de choisir, c'est en effet la capacité effective d'agir qui est en jeu, sans laquelle la liberté n'est qu'un artifice. Le projet de loi apporte à cette question trois types de réponses : le libre usage du compte par son titulaire, le développement du conseil en évolution professionnel (CEP) et la possibilité d'abonder la dotation de base. Ce dernier point mérite une attention particulière. Car si la définition des conditions d'abondement est renvoyée à des décrets et accords ultérieurs, l'article 1er énumère toutefois quatorze sources possibles, parmi lesquelles figure en première position le titulaire du compte. L'introduction de la liberté de choisir est donc aussi celle de la liberté de financer. Cette référence à la contribution financière des individus passe presque inaperçue. Pourtant, elle modifie en profondeur la matrice de financement de la formation continue. Le titulaire devient un acteur à part entière du système de co-investissement appelé à financer tout le pan de la formation continue qui ne relève pas de l'obligation de l'employeur ou de Pôle emploi. Afin de ne pas faire de la loi de 2018 une occasion manquée pour garantir l'accès de tous à des formations porteuses de sens et de développement professionnel, l'ouverture d'un débat sans tabous sur le co-investissement est indispensable et urgent. En effet, sans garde-fous appropriés, le risque est grand de renforcer les inégalités plutôt que de les réduire.”
Nous partageons pleinement ces inquiétudes face à un changement de fond dont il faut mesurer pleinement les conséquences. Il n'est donc pas souhaitable que la loi inscrive le titulaire en premier contributeur complémentaire : cela ne saurait être un point d'horizon pour le législateur.
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