Publié le 14 janvier 2019 par : M. Peu, M. Jumel, Mme Faucillon, Mme Bello, M. Brotherson, M. Bruneel, Mme Buffet, M. Chassaigne, M. Dharréville, M. Dufrègne, Mme Kéclard-Mondésir, M. Lecoq, M. Nilor, M. Fabien Roussel, M. Serville, M. Wulfranc.
Supprimer cet article.
L'article 34 du projet de loi tend à généraliser la possibilité de poursuivre certaines opérations postérieurement à l'ouverture d'une information judiciaire, d'une part, et à encadrer les plaintes avec constitution de partie civile, d'autre part.
Les alinéas 1 à 4 prévoient de permettre au parquet de conduire des actes complémentaires pendant une durée de 48 heures (une semaine dans le projet de loi initial), à compter du réquisitoire introductif d'information, afin d'assurer une meilleure transition entre les enquêtes placées sous l'autorité du parquet et les informations judiciaires conduites par les magistrats instructeurs.Cette procédure pourra s'appliquer aux crimes et aux délits punis d'une peine supérieure ou égale à trois ans d'emprisonnement (seules les infractions relevant de la délinquance et de la criminalité organisée étaient visées par le dispositif adopté au Sénat).
Or, comme le souligne le Défenseur des droits, dans son avis n°18‑22, il ne ressort pas de l'examen de la loi organique qu'il soit envisagé que l'extension des pouvoirs coercitifs du parquet soit accompagnée par une évolution du statut de ce dernier en matière d'impartialité et d'indépendance. Ce transfert progressif de compétences en matière d'enquête du juge d'instruction vers le procureur s'inscrit dans un mouvement de fond qui s'illustre notamment par des évolutions législatives du droit de la procédure pénale comme celle opérée par la loi du n° 2004- 204 du 9 mars 2004. Le projet de loi ne soumet pas de façon pleine et entière l'enquête au contrôle effectif d'un juge au sens de la Convention européenne des droits de l'homme. Cette absence de contrôle effectif de l'enquête par un juge indépendant n'est pas sans poser des difficultés au regard du droit européen. Le juge des libertés et de la détention ne dispose pas des moyens concrets et pratiques pour réaliser sa mission. Son intervention est le plus souvent limitée compte tenu de sa charge de travail et des délais qui lui sont imposés.
Les alinéas 5 à 10 durcissent considérablement les conditions d'exercice de la plainte avec constitution de partie civile dans les dossiers correctionnels en posant de nouveaux obstacles à la plainte avec constitution de partie civile et à l'ouverture d'une information judiciaire.
D'une part, un délai de 6 mois (3 mois actuellement)est imposé au procureur pour répondre à une plainte simple avant que la victime ne puisse saisir le juge.
D'autre part, la possibilité est offerte au juge d'instruction de refuser l'ouverture d'une information lorsque celle-ci est inutile et qu'une citation directe de la victime est possible.
Comme le souligne le Barreau de Paris, les conditions supplémentaires imposées par l'article 34 à la victime et l'introduction d'une appréciation d'opportunité sur l'ouverture d'une information judiciaire alors même que l'enquête préliminaire aurait établi des charges suffisantes remettent en cause la garantie ouverte à celle-ci d'un accès au juge pénal.
Par ailleurs, et même dans l'hypothèse où le plaignant surmonterait les obstacles procéduraux, le juge d'instruction garderait la possibilité, sur réquisition du parquet, de refuser d'instruire au motif que les faits auraient pu faire – selon son appréciation et hors tout critère défini par la loi - l'objet d'une citation directe devant la juridiction de jugement. La plainte avec constitution de partie civile est pourtant le seul moyen de surmonter l'inertie du parquet dans des dossiers sensibles. De nombreux exemples existent de dossiers qui auraient pu être non traités ou moins bien jugés sous le regard d'un parquet non indépendant soumis au lien hiérarchique avec l'exécutif. Sans la pugnacité des parties civiles et l'indépendance des juges d'instruction, le fonctionnement de notre justice aurait été défaillant. De plus, la pratique démontre régulièrement que le parquet est amené à classer sans suites des plaintes ou dénonciations en application du principe de l'opportunité des poursuites pour finir par requérir des condamnations en audience après que la procédure ait été réenclenchée après le dépôt d'une plainte avec constitution de partie civile.
C'est la raison pour laquelle cet amendement vise à supprimer ces dispositions.
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