Commission d'enquête sur la situation, les missions et les moyens des forces de sécurité, qu'il s'agisse de la police nationale, de la gendarmerie ou de la police municipale

Réunion du jeudi 21 mars 2019 à 10h00

Résumé de la réunion

Les mots clés de cette réunion

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La réunion

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Présidence

La commission d'enquête sur la situation, les missions et les moyens des forces de sécurité, qu'il s'agisse de la police nationale, de la gendarmerie ou de la police municipale entend, sous forme d'audition commune : le Syndicat national des directeurs pénitentiaires (SND-CFDT) : Mme Aurélie Jammes et M. Jean-Michel Dejenne ; le Syndicat national pénitentiaire Force ouvrière direction : Mme Franca Annani, secrétaire nationale, et M. Sébastien Nicolas, secrétaire général

L'audition commence à dix heures vingt-cinq.

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Mesdames, messieurs, mes chers collègues, je voudrais d'abord dire qu'au vu des événements très graves qui se sont produits dans l'établissement de Condé-sur-Sarthe, nous nous associons à la douleur des personnels agressés et soutenons l'ensemble du personnel pénitentiaire qui, nous le savons, qui est très choqué. Nous nous réjouissons que le groupe Recherche, assistance, intervention, dissuasion (RAID) ait pu mettre fin à ces événements.

Conformément aux dispositions de l'article 6 de l'ordonnance du 17 novembre 1958, les personnes entendues déposent sous serment. Je vous demande donc de prêter le serment de dire la vérité, toute la vérité, rien que la vérité.

Les personnes auditionnées prêtent serment.

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Sébastien Nicolas, secrétaire général du Syndicat national pénitentiaire Force ouvrière direction

Le syndicat FO direction est le syndicat majoritaire des directeurs des services pénitentiaires. Nous assurons le pilotage et la direction des structures, mais nous travaillons également à l'administration centrale et en direction interrégionale, sur des missions de conception et de pilotage de l'administration.

Cette commission d'enquête intervient au lendemain des événements de Condé-sur-Sarthe, où deux de nos personnels ont été gravement attaqués, et je tiens à vous remercier pour les mots de soutien que vous venez de prononcer à leur égard et à celui de l'ensemble des personnels pénitentiaires. Évidemment, ces événements posent un certain nombre de questions en matière de pratiques professionnelles et de réglementation.

D'ores et déjà, des réflexions et des groupes de travail sont mis en place pour avancer sur ces questions et nous rencontrons le directeur de l'administration pénitentiaire prochainement pour lui faire part de nos propositions.

Je m'arrêterai là dans mon propos introductif. Je suis accompagné de Mme Franca Anani, qui dirige un établissement pénitentiaire.

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Jean-Michel Dejenne, représentant le Syndicat national des directeurs pénitentiaires (SNDP-CFDT)

Mme Aurélie Jammes, directrice du centre pénitentiaire de La Talaudière à Saint-Étienne, et moi-même, directeur adjoint du service pénitentiaire d'insertion et de probation (SPIP) des Alpes-Maritimes, nous représentons le Syndicat national des directeurs pénitentiaires affilié à la CFDT.

Cette organisation professionnelle, créée il y a neuf ans, est représentative chez les deux corps de directeurs pénitentiaires : les directeurs des services pénitentiaires et les directeurs de prison avec 46 % des voix, mais également chez les directeurs des SPIP, avec 35 % des voix. Nous comptons ainsi, dans nos rangs, les personnels de direction de l'ensemble des services de l'administration pénitentiaire.

La sécurité nécessite à la fois un certain nombre de moyens de sécurité dite passive – technologies et moyens matériels – et de sécurité dite active, c'est-à-dire la prise en charge globale des criminels et des délinquants qui nous sont confiés, en vue de prévenir la récidive. Cette contribution est la mission première de l'administration pénitentiaire. Elle est rappelée très clairement dans la loi de 2014, qui donne un objectif aux missions conjointes de garde et de réinsertion ; la prévention de la récidive est un élément clé et capital de la sécurité publique.

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Mesdames et messieurs, je tiens tout d'abord à m'associer aux propos du président concernant vos collègues de Condé-sur-Sarthe.

Notre commission d'enquête a pour vocation d'étudier la situation, les missions et les moyens des forces de sécurité. Bien que vous ne soyez ni la police nationale, ni la gendarmerie, ni la police municipale, le personnel pénitentiaire est un maillon complémentaire et essentiel de la sécurité en France.

Ma première question concerne les relations qui existent entre l'administration pénitentiaire et les forces de l'ordre – gendarmerie et police nationale –, notamment lors des missions telles que le transport des détenus.

Ma seconde question est relative à l'immobilier. Les grands objectifs ont été fixés par le projet de loi de programmation 2019-2022. Quelles sont, selon vous, les faiblesses de la loi et de la programmation budgétaire en la matière ?

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Sébastien Nicolas, secrétaire général du Syndicat national pénitentiaire Force ouvrière direction

Je préciserai, tout d'abord, qu'en termes d'effectifs – un peu plus de 40 000 personnels –, l'administration pénitentiaire est la troisième force de sécurité du pays.

S'agissant des relations que nous entretenons avec les forces de sécurité intérieure, elles sont globalement bonnes, malgré les crispations qui peuvent parfois exister dans l'exercice des missions d'extraction judiciaire. L'administration pénitentiaire a, depuis peu, repris à son compte ces missions, traditionnellement effectuées par la police et la gendarmerie. Cependant, les effectifs nécessaires ne lui ont pas été transférés en nombre suffisant. Nous disposons, pour les effectuer, 800 équivalents temps plein (ETP), alors que les forces de sécurité intérieure bénéficiaient de 2 500 ETP.

Il s'en est suivi que, très rapidement, les pôles de rattachement des extractions judiciaires (PREJ) ont enregistré une augmentation fulgurante des heures supplémentaires de leurs agents, bien au-delà du cadre prévu par le droit du travail. Certes, les heures supplémentaires sont rémunérées, mais, à un moment, la fatigue va grandissant et les agents sont touchés moralement. Ce n'est satisfaisant ni sur le plan humain, ni pour nos relations avec les forces de sécurité intérieure et les magistrats.

Les forces de sécurité intérieure continuent d'intervenir de manière subsidiaire pour relayer l'administration pénitentiaire, mais quand ni l'administration ni les FSI ne sont en capacité d'assurer les extractions, cela génère des tensions avec l'autorité judiciaire. Les choses se sont un peu améliorées mais les FSI sont toujours extrêmement sollicitées.

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Quelles solutions proposez-vous pour améliorer la situation ?

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Sébastien Nicolas, secrétaire général du Syndicat national pénitentiaire Force ouvrière direction

Il s'agit simplement d'une question d'effectifs.

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Sébastien Nicolas, secrétaire général du Syndicat national pénitentiaire Force ouvrière direction

Nous pouvons toujours réorganiser des services pour optimiser les effectifs, mais cela ne suffira pas. Nous n'avons pas de marge de manoeuvre suffisante, sans effectifs supplémentaires, pour effectuer ces missions.

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Sébastien Nicolas, secrétaire général du Syndicat national pénitentiaire Force ouvrière direction

Je n'ai pas de chiffre précis à vous donner.

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Aurélie Jammes, représentant le Syndicat national des directeurs pénitentiaires (SNDP CFDT)

La question des effectifs est majeure, mais il existe un autre moyen, pour les magistrats, d'entendre les détenus : la visioconférence. Il est en effet possible pour les magistrats de solliciter, non pas l'extraction d'une personne détenue pour une présentation physique, mais la présentation de cette personne, depuis l'établissement, via la visioconférence.

Ce dispositif existe depuis des années au sein des établissements pénitentiaires, mais il ne s'agissait pas du moyen de communication privilégié par les magistrats. Il le devient avec l'augmentation des impossibilités d'effectuer des extractions judiciaires par l'administration pénitentiaire. À la direction interrégionale des services pénitentiaires (DRSP) de Lyon, les visioconférences ont augmenté de 65 %. Cela reste un constat régional, mais il s'agit d'un moyen vers lequel il est possible de tendre, si les magistrats le souhaitent – sachant qu'il existe des situations ou des circonstances judiciaires qui exigent la présence physique du détenu.

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Savez-vous comment sont équipées les prisons françaises en visioconférence ?

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Aurélie Jammes, représentant le Syndicat national des directeurs pénitentiaires (SNDP CFDT)

Tous les établissements pénitentiaires de France sont équipés, a minima, d'une salle de visioconférence. Depuis quelques années, l'administration a la volonté de doubler ces salles dans certains établissements ; l'établissement dans lequel je travaille, qui compte 400 détenus, en possède deux.

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Hormis les extractions judiciaires obligatoires, à combien évaluez-vous le besoin en salles de visioconférence pour présenter tous les autres détenus ?

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Aurélie Jammes, représentant le Syndicat national des directeurs pénitentiaires (SNDP CFDT)

Je ne suis pas en mesure de répondre à votre question.

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Sébastien Nicolas, secrétaire général du Syndicat national pénitentiaire Force ouvrière direction

C'est d'autant plus difficile à évaluer que, s'agissant des extractions judiciaires obligatoires, si certaines le sont du fait des circonstances judiciaires, la volonté du magistrat est également à prendre en compte.

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Nous notons cependant qu'il s'agit d'un moyen économique – et écoresponsable ! Par ailleurs, avez-vous toujours un problème de recrutement ?

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Sébastien Nicolas, secrétaire général du Syndicat national pénitentiaire Force ouvrière direction

Oui, il s'agit même d'un problème majeur. Par exemple, entre 20 % et 30 % seulement des candidats inscrits se présentent aux épreuves concours de surveillants. Ce problème de recrutement touche, en fait, tous les corps de l'administration pénitentiaire, des surveillants jusqu'aux directeurs des services pénitentiaires, où le taux de présentation des candidats inscrits est de 30 % ; 36 % l'année dernière, un record ! Pour les autres concours – intendance de l'administration pénitentiaire (IRA), commissaires de police ou magistrature – le ratio varie entre 45 % et 60 %.

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Sébastien Nicolas, secrétaire général du Syndicat national pénitentiaire Force ouvrière direction

Il est difficile de répondre rapidement à cette question, car nous abordons-là des problématiques de fond. L'image des métiers pénitentiaires est mauvaise ; la majeure partie des candidats passe le concours par défaut, après des échecs aux concours de la police nationale et de la gendarmerie notamment. Cette image négative d'un métier où les personnels sont exposés à la violence est alimentée par les médias.

Le manque d'effectifs entraîne un cercle vicieux : moins il y a de personnel, plus les agents sont sollicités, plus le métier devient difficile et plus ils montrent dans leur entourage l'image d'un métier difficile et compliqué.

Pour sortir de cette spirale, nous pouvons présenter des éléments statutaires et indemnitaires intéressants, mais cela ne suffira pas. Les agents ont besoin d'une reconnaissance de la société qui fait défaut aujourd'hui. Ces agents sont souvent pris dans des injonctions sociales contradictoires qui impactent le cadre de travail ; je pense aux médias, quand ils font état des conditions de détention indignes, quand ils assurent que la prison fabrique de la violence, incite à la récidive, que des portables circulent dans les prisons. Tout ce discours donne aux personnels l'image d'une administration qui ne répond pas aux attentes sociales, d'un métier peut-être inutile, vers lequel les gens n'ont pas envie d'aller.

Il s'agit donc de tout un ensemble de facteurs qui s'accumulent et expliquent cette baisse de l'engouement pour les métiers pénitentiaires

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Aurélie Jammes, représentant le Syndicat national des directeurs pénitentiaires (SNDP CFDT)

Sachez que, dans certains territoires, un travail est mené avec l'éducation nationale pour développer les métiers de la sécurité – qui est validé par un diplôme, tel que le baccalauréat ou le brevet de technicien supérieur (BTS), etc. Ces nouvelles formations diplômantes peuvent être un levier de recrutement pour l'administration pénitentiaire.

Bien entendu, les premiers métiers auxquels les jeunes pensent sont ceux de pompier, gendarme ou policier, mais nous avons la possibilité d'intervenir dans le cadre de partenariats avec certains lycées et de leur faire ainsi découvrir l'univers carcéral.

Nous avons également des conventions avec des gendarmeries – il s'agit encore d'exemples locaux – qui peuvent faciliter l'intégration de gendarmes adjoints volontaires qui, par exemple, n'ont pas obtenu le concours de la gendarmerie mais veulent rester dans les métiers de la sécurité ; il s'agit de candidats très intéressants pour le métier de surveillant, notamment.

Toutes ces pistes méritent d'être développées.

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S'agissant des établissements pénitentiaires pour mineurs, leur nombre est-il suffisant ? Les mineurs ont-ils un comportement réellement différent des détenus adultes ?

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Franca Annani, secrétaire nationale du Syndicat national pénitentiaire Force ouvrière direction

La prise en charge des mineurs est très complexe.

Je n'ai personnellement jamais travaillé dans un établissement pour mineurs, dans lequel l'administration pénitentiaire intervient conjointement avec la protection judiciaire de la jeunesse (PJJ). L'établissement que je dirige actuellement comporte un quartier pour mineurs. En termes de violence potentielle et de violences caractérisées, c'est de même nature mais il faut savoir que ce quartier est le dernier lieu qui les neutralise, puisque, avant d'être mis en prison, car ces mineurs ont épuisé toutes les voies de placement et tous les recours.

Assez paradoxalement, la prison contient leur violence, mais cela ne suffit pas, il faut les réinsérer. Or le nombre de détenus dans les quartiers des mineurs au sein des établissements pénitentiaires étant moindre que celui de détenus majeurs, le quartier des mineurs doit intégrer le fonctionnement de droit commun de l'établissement. Par exemple, si des formations sont ouvertes aux adultes, il faut en proposer aux mineurs. De la même manière, quand un concert est organisé pour les mineurs, les autres détenus doivent pouvoir en profiter.

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Mesdames, messieurs, tout d'abord je vous confirme que vous êtes bien la troisième force de sécurité intérieure. Ensuite, j'ai pu constater après avoir visité trois prisons que la visioconférence est un outil tout à fait intéressant, qui fonctionne très bien.

Ma question concerne la présence des opérateurs privés dans le service public pénitentiaire, qui est de plus en plus importante. Bien que la France n'ait jamais accepté une privatisation totale, elle a admis, par exemple, la privatisation de l'activité de surveillance, jugée détachable des missions de souveraineté.

Que pensez-vous de cette privatisation qui va grandissant ? Pensez-vous qu'il faille continuer dans cette voie en confiant à la sécurité privée les transferts de prisonniers ou le maintien de l'ordre au sein des centres pénitentiaires ? Si vous y êtes opposés, pouvez-vous nous dire pourquoi ?

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Je m'associe totalement au propos de ma collègue pour vous dire que nous savons à quel point vous êtes une force importante pour la sécurité intérieure. Et pour avoir été avocat, le plus souvent du côté des parties civiles d'ailleurs, je sais à quel point votre rôle est important.

Je poserai deux questions. La première est relative à votre difficulté à recruter, notamment pour des raisons de motivation. Je suis élu d'un département, la Seine-et-Marne, où sont implantés un certain nombre d'établissements pénitentiaires, dont l'un a récemment fait l'objet d'une couverture médiatique, puisqu'un détenu s'en est évadé.

Lorsque nous discutons avec les personnels de la pénitentiaire, ils nous font souvent part du problème que leur crée le fait d'habiter dans les mêmes cités que les familles des détenus dont ils ont en charge la surveillance. Ne pensez-vous pas qu'une aide au logement, afin qu'ils puissent habiter loin des familles des détenus, pourrait être un début de réponse au problème du recrutement ?

Ma seconde question est plus technique. Le bureau central du renseignement pénitentiaire (BCRP) est le petit nouveau dans le monde du renseignement. Sa création a-t-elle modifié le mode de fonctionnement de vos établissements ? Vous apporte-t-il de l'information utile pour la gestion au quotidienne de vos établissements ? Enfin, que faudrait-il faire pour que ce BCRP soit le plus utile possible dans votre mission de service public ?

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Outre l'augmentation de la rémunération des surveillants, que préconisez-vous pour améliorer l'attractivité des métiers de la pénitentiaire ? Il me semble que le concours est national. Pensez-vous que des concours régionaux aideraient à recruter davantage ? Par ailleurs, la gestion et la répartition des ressources humaines doivent-elles être repensées, et de quelle manière ?

Enfin, concernant les détenus, pouvez-vous confirmer que certains d'entre eux devraient se trouver plutôt en hôpital psychiatrique qu'en maison d'arrêt ? Si oui, dans quelle proportion ?

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D'abord, par curiosité, je souhaiterais savoir si vous, les directeurs, avez organisé des grands débats, et si oui, comment cela s'est passé.

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Franca Annani, secrétaire nationale du Syndicat national pénitentiaire Force ouvrière direction

Merveilleusement bien.

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Les médias évoquent souvent le problème des visiteurs dans les maisons d'arrêt ; sont-ils un réel problème ?

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Je voudrais tout d'abord remercier les représentants des syndicats de direction d'être présents, aujourd'hui. Mesdames, messieurs, je partage votre analyse lorsque vous dites que les métiers pénitentiaires sont en difficulté. L'image que la population a de la prison n'est pas très positive. On ne parle de la prison que lorsqu'il y a un incident, une évasion, des trafics, des agressions, et personne ne parle de tout le travail qui y est effectué par les personnels, en termes de prévention, de santé et même au niveau du droit. Je ne m'étendrai pas sur ces sujets, mais il est vrai que la question que nous devons nous poser est relative au sens de la peine.

S'agissant du personnel pénitentiaire, le recrutement national est-il un recrutement opportun ? Je n'en suis plus convaincu. De nombreux jeunes de province ne passent pas ces concours car ils ne souhaitent pas être nommés dans un établissement de la région parisienne. J'avais proposé, dans un rapport, il y a maintenant quelques années – rapport qui, je dois bien l'avouer, n'avait pas été très suivi –, d'ouvrir des concours régionaux et un concours spécifique, national, pour la région parisienne. Prenons en effet l'exemple des pompiers : si nous recrutions, pour les brigades de Paris et de sa région, uniquement parmi les Parisiens, il n'y aurait pas de pompiers à Paris !

Les médias contribuent largement à donner une mauvaise image des établissements pénitentiaires. Avez-vous des propositions à nous présenter pour éviter cela ?

Concernant les visiteurs, avez-vous réfléchi à une façon de mieux les contrôler ?

Pensez-vous qu'il faille remettre en place les fouilles intégrales, notamment pour les détenus dangereux ? Je rappelle que, depuis 2009, la France suit la recommandation du Conseil de l'Europe concernant les fouilles.

Enfin, le renseignement pénitentiaire a-t-il pris son rythme de croisière ? Est-il efficace ou rencontre-t-il encore des difficultés, par manque de personnel, par exemple ? Vous apporte-t-il des informations concrètes sur les détenus les plus dangereux, notamment ceux qui projettent de commettre des faits graves au sein de la prison ou qui ont un lien avec la radicalisation en prison ?

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Ma question a déjà été posée : que conviendrait-il de faire pour traiter le problème de la porosité qui existe avec l'extérieur ?

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Sébastien Nicolas, secrétaire général du Syndicat national pénitentiaire Force ouvrière direction

S'agissant du recours aux opérateurs privés, nous n'y sommes pas favorables, notamment pour des missions de transfert de personnes détenues. Je ne m'étendrai pas sur le respect des missions régaliennes, ni sur le fait que la loi pénitentiaire prévoie qu'un certain nombre de missions ne peuvent être déléguées au secteur privé.

Nous y sommes aussi défavorables aussi pour des raisons plus pragmatiques. En effet, on constate déjà que les gendarmes ou les policiers qui prennent en charge un détenu dans le cadre d'une extraction judiciaire ou médicale ne le connaissent pas et peuvent lui appliquer un cadre plus coercitif que celui que nous lui appliquons dans l'établissement, ce qui a pour conséquence de faire monter des tensions entre l'équipe d'escorte et le détenu, et ne sera constructif ni pour elle, ni pour lui, ni pour le personnel pénitentiaire à qui celui-ci sera de nouveau confié. Nous pouvons donc légitimement nous demander ce qui se passerait si ces missions étaient confiées à des opérateurs privés.

Le syndicat Force ouvrière direction est favorable à la reprise de l'intégralité de ces missions par l'administration pénitentiaire – avec, bien entendu, les ETP nécessaires. Nous proposons de reprendre l'intégralité de la prise en charge d'une personne détenue dans le cadre des extractions judiciaires, des extractions médicales et des gardes statiques dans les hôpitaux des détenus. Non seulement, nous sommes en capacité de remplir ces missions, mais il s'agit d'une question de continuité dans la gestion d'une personne détenue.

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Sébastien Nicolas, secrétaire général du Syndicat national pénitentiaire Force ouvrière direction

Le chiffre estimé par le ministère de l'intérieur est de 2 500 ETP. Il englobe les gardes statiques et l'accompagnement des équipes d'escorte de la pénitentiaire dans le cas de prêts de main forte.

Je n'ai pas de chiffre arrêté à vous livrer, mais 3 000 ETP serait un bon chiffre – les 2 500 ETP prévus pour les extractions judiciaires étant compris dans ce chiffre.

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Vous nous avez dit disposer actuellement de 800 ETP.

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Sébastien Nicolas, secrétaire général du Syndicat national pénitentiaire Force ouvrière direction

Oui, il nous manque 1 700 ETP pour arriver à 2 500, auxquels il conviendrait d'en ajouter 500 supplémentaires.

S'agissant des personnels pénitentiaires qui habitent dans la même commune que les familles de détenus, tout dépend de l'endroit où l'on se trouve. En Bourgogne, par exemple, la problématique du logement n'est pas la même qu'en région parisienne mais il est vrai qu'il s'agit d'une question récurrente et d'une vraie difficulté pour le personnel, non seulement en termes d'image mais également de pressions qu'il est susceptible de subir. Je suis donc tout à fait d'accord avec vous : une aide au logement attribuée aux personnels pénitentiaires serait la bienvenue.

Le renseignement pénitentiaire a toujours existé dans notre administration ; simplement il se faisait « à la bonne franquette ». Aujourd'hui, le renseignement se professionnalise, s'imprègne des méthodes du renseignement territorial, de la direction générale de la sécurité intérieure (DGSI). Il en résulte que, depuis deux ans et demi, le renseignement pénitentiaire monte en puissance et va devenir un service à compétence nationale.

Cependant, des interrogations demeurent – que dénonce notre syndicat – dans ce processus d'autonomisation. Le renseignement pénitentiaire est constitué d'un bureau central du renseignement pénitentiaire (BCRP) à Paris, de cellules interrégionales du renseignement pénitentiaire (CIRP) et de délégués locaux du renseignement dans les établissements. Ce circuit sera plus ou moins indépendant de la hiérarchie pénitentiaire, avec une dichotomie entre le rattachement hiérarchique et le rattachement fonctionnel. Fonctionnellement, la CIRP est rattachée au directeur interrégional ; le délégué local à son chef d'établissement ; le BCRP au directeur de l'administration pénitentiaire. Mais hiérarchiquement, le délégué local est rattaché à la CIRP, qui est rattachée au BCRP.

Dès lors le problème est le suivant : l'information obtenue par un délégué local doit être remontée par la voie hiérarchique à la CIRP, qui elle-même la remonte au BCRP afin qu'elle soit traitée et analysée. Or, cette information peut appeler une réaction immédiate de l'administration pénitentiaire, et notamment du chef d'établissement.

Prenons un exemple : nous sommes informés qu'un détenu est en train de préparer une agression contre un personnel. Le chef d'établissement doit pouvoir être immédiatement saisi pour prendre des mesures préventives. Notre crainte, c'est que si l'on ajoute des maillons hiérarchiques dans le traitement de l'information, le chef d'établissement ne puisse pas réagir assez vite pour prendre les mesures adéquates.

Concernant l'attractivité des métiers pénitentiaires, la territorialité peut-elle être une solution ? Oui et non. Elle permettrait, en effet, dans un bassin d'emploi, de capter toutes les personnes en recherche d'emploi et de les fidéliser sur leur secteur géographique – et ainsi éviter la crainte de la mobilité. L'inconvénient, c'est que la territorialité peut amener la désertion de certains secteurs géographiques, notamment en région parisienne, et peut être source de difficultés pour des agents qui souhaitent, eux, s'inscrire dans une mobilité. En effet, cette solution va tarir, à un moment, les possibilités de mutation d'un agent en dehors de son secteur géographique ; elle peut ainsi générer une rupture d'égalité.

En revanche, toujours en termes d'attractivité, certaines expérimentations très intéressantes sont en cours au sein de l'administration pénitentiaire. Je pense notamment à une expérimentation de « surveillant référent » qui va se développer, après une note du directeur de l'administration pénitentiaire, sous l'appellation de « surveillant acteur ». Il s'agit, pour les agents, d'une nouvelle manière de travailler, plus dynamique et responsabilisante.

Par exemple : des agents sont responsabilisés dans la prise en charge, non plus d'un étage, mais d'un bâtiment. Ou encore : une équipe est en charge du parcours d'une personne détenue, qu'elle rencontre dans le cadre d'audience ; elle restitue ensuite une analyse sur le parcours de cette personne dans différentes instances, telles que la commission d'application des peines ou la commission pluridisciplinaire. Cette responsabilisation apporte une valorisation au métier pénitentiaire.

Enfin, vous avez raison, un grand nombre de détenus devraient être internés en hôpital psychiatrique. Le problème vient du manque de places dans les hôpitaux ou dans les unités spécialisées pour les accueillir. Par ailleurs, le désarroi du personnel des hôpitaux de proximité est profond quand il doit prendre en charge une personne détenue, car une personne détenue placée en hospitalisation d'office n'est sous la garde de personne : ni de la police, ni de la gendarmerie, ni de la pénitentiaire. Les seuls gardes sont les personnels médicaux et ils se sentent en danger.

Il n'est donc pas rare que les directeurs d'hôpitaux psychiatriques nous fassent comprendre qu'il leur est difficile de recevoir des personnes détenues – les syndicats hospitaliers se plaignant de la mise en danger des autres patients. Par ailleurs, cet internement n'est pas satisfaisant non plus pour la personne détenue, qui est placée en chambre d'isolement – sans télévision, sans le droit de fumer, sans recevoir de visites, etc. Il s'agit d'un contexte compliqué.

Le palliatif actuel ce sont les unités hospitalières spécialement aménagées (UHSA), qui ne sont pas en nombre suffisant et dont certaines manquent de réactivité dans leur politique d'accueil. En effet, les admissions dans les UHSA passent obligatoirement par le médecin responsable du site. Or les protocoles de soin et d'accueil manquent de réactivité pour prendre en charge les personnes en décompensation dans un établissement ou un hôpital psychiatrique de proximité.

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Quel est selon vous le pourcentage de personnes détenues qui devraient être placées non pas en prison mais en hôpital psychiatrique ?

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Franca Annani, secrétaire nationale du Syndicat national pénitentiaire Force ouvrière direction

Les dernières études épidémiologiques sur le sujet sont extrêmement anciennes. Elles indiquaient qu'environ 40 % des personnes placées en détention soit présentaient des troubles psychiatriques à leur entrée en prison, soit développaient dans ce cadre contraint des maladies liées à l'enfermement.

La maladie psychiatrique est une vraie question et pose un problème aux agents, qui nous rappellent fréquemment qu'ils ne sont pas des infirmiers ; ils sont complètement démunis pour la prise en charge de ces détenus. Alors oui, ces personnes sont neutralisées, mais nous avons beaucoup de difficulté à les gérer.

Par ailleurs, il n'y a qu'une unité hospitalière spécialement aménagée (UHSA) par direction interrégionale et elle ne compte que 60 lits. Les personnes placées en UHSA sont gérées en interne par du personnel médical et des agents de sécurité périmétrique pénitentiaire.

Une piste consisterait, plutôt que d'ouvrir des établissements pénitentiaires classiques, d'augmenter le parc d'UHSA – pour passer, par exemple, de 60 à 300 lits.

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Sébastien Nicolas, secrétaire général du Syndicat national pénitentiaire Force ouvrière direction

S'agissant des visiteurs, un dispositif réglementaire existe : il est tout à fait autorisé d'effectuer une palpation de sécurité sur un visiteur. Le problème est la pudeur de l'administration pénitentiaire à appliquer le règlement stricto sensu. Pour preuve, et cela vous fera sourire, la première fois que nous avons évoqué cette possibilité dans l'administration pénitentiaire, nous ne parlions pas de « palpation de sécurité », mais de « tapotements sommaires », afin de distinguer le contrôle que nous allions opérer sur le visiteur de celui que nous opérons sur une personne détenue. Ces termes démontrent toute la réticence de l'administration pénitentiaire à appliquer les méthodes de contrôle à des personnes en visite dans l'établissement.

Le manque d'impulsion de l'administration pour faire appliquer cette réglementation s'explique par la crainte des réactions face à une application trop poussée ; c'est un vrai problème.

Pour en revenir aux événements de Condé-sur-Sarthe, très concrètement, il n'y avait pas d'éléments justifiant cette palpation. Bien évidemment, nous devons en effet présenter des éléments objectifs pour effectuer une palpation, comme d'ailleurs pour fouiller intégralement une personne détenue.

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De nombreuses organisations s'intéressent aux conditions de détention, et il est vrai qu'il y a beaucoup de controverses sur cette question. Peut-être le rôle du Parlement serait-il de bien codifier la fouille. Je suis favorable, pour ma part, à des palpations de sécurité systématiques. En tout cas, bien codifier le protocole de fouille permettrait d'éviter les controverses.

La population pense que les visiteurs ne sont pas fouillés, ce qui, encore une fois, ne donne pas une bonne image des établissements pénitentiaires. La comparaison a même été faite avec l'entrée dans les stades : la fouille par palpation est systématique, personne ne s'y oppose, c'est naturel. Nous devrions donc recommander – et je l'ai déjà écrit dans ce fameux rapport – de mieux codifier les fouilles pratiquées sur les personnes en visite dans les établissements pénitentiaires car il y a eu trop de problèmes. Souvenez-vous des avocats, par exemple : à une époque, même le portique leur posait problème, alors qu'à l'aéroport tout le monde passe sous le portique et certaines personnes sont fouillées, de manière aléatoire, sans que personne s'y oppose.

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Qu'entendez-vous par « mieux codifier », monsieur Pueyo ? Vous pensez à l'administration, ou à la loi ?

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Il me semble que nous devrions nous renseigner pour savoir si, par la loi, nous ne pourrions pas aller plus loin. Cela permettrait d'asseoir les pratiques professionnelles afin qu'elles ne soient plus contestées comme elles peuvent l'être actuellement.

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Nos prédécesseurs ont légiféré sur cette question. Le problème, comme l'indiquait M. Nicolas, c'est que l'application des textes est, dans la pratique, adoucie avec le consentement de l'administration pénitentiaire.

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Oui, mais il s'agit d'un vrai sujet, car il dénature l'image de la prison. L'affaire de Condé-sur-Sarthe a dénaturé le travail de l'administration pénitentiaire, nous devons donc y réfléchir sérieusement. Le Gouvernement est en train d'y réfléchir et des dispositions seront prises. Peut-être conviendrait-il de légiférer.

J'avais proposé, pour éviter les difficultés, que dans chaque établissement pénitentiaire des agents aient la qualité d'officier de police judiciaire (OPJ), comme cela a été fait pour les douanes ; ainsi les douaniers peuvent pratiquer des fouilles plus poussées.

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L'obligation, pour un agent pénitentiaire, de déceler des indices pour justifier une fouille d'un visiteur est-elle prévue dans un texte spécifique ?

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Sébastien Nicolas, secrétaire général du Syndicat national pénitentiaire Force ouvrière direction

Il s'agit d'une note de l'administration pénitentiaire, reprise dans la circulaire relative à l'accès au droit de visite des personnes détenues.

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Aurélie Jammes, représentant le Syndicat national des directeurs pénitentiaires (SNDP CFDT)

Ce serait pour nous un changement de philosophie que d'imaginer que nous puissions contrôler des intervenants extérieurs ou les familles qui viennent au parloir. La difficulté est liée au fait que ce sont les mêmes agents qui fouillent les détenus, qui sont présents dans les parloirs et qui pourraient, potentiellement, fouiller les familles. Intellectuellement, et dans notre fonctionnement, ce serait un peu « schizophrène » pour ces agents.

La piste de réflexion doit plutôt être celle-ci : les équipes locales de sécurité pénitentiaire (ELSP), qui tendent à se constituer pour effectuer les extractions judiciaires et les missions de sécurité périmétriques, pourraient intégrer dans leurs missions celle du contrôle effectué sur les personnes en visite dans les établissements.

La question du statut d'OPJ doit être débattue, car un tel statut ne serait pas anodin pour un agent pénitentiaire : il serait en effet sous contrôle du procureur de la République.

La spécialisation des ELSP pourrait être une solution confortable pour les agents pénitentiaires. Ils pourraient, notamment au parloir, expliquer qu'ils sont autorisés à fouiller la population pénale, et que les familles sont, quant à elles, fouillées par d'autres agents qui n'ont pas de contact avec la population pénale, puisqu'ils sont dédiés à des missions extérieures.

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Jean-Michel Dejenne, représentant le Syndicat national des directeurs pénitentiaires (SNDP-CFDT)

Je souhaiterais revenir sur les propos de Mme la députée qui nous a rendu hommage en tant que troisième force de sécurité intérieure du pays. Je l'en remercie, mais cette expression, qui n'a pas d'existence légale ou réglementaire, nous fait sans doute du tort.

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Elle n'a, en fait, que repris la déclaration de votre collègue, M. Nicolas.

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Jean-Michel Dejenne, représentant le Syndicat national des directeurs pénitentiaires (SNDP-CFDT)

Nous sommes donc en désaccord avec nos collègues sur ce point. Car ce classement informel de prestige – les douanes pourraient d'ailleurs prétendre à cette troisième place – , donne l'impression aux personnes qui ont échoués aux concours de la gendarmerie et de la police avant de passer celui de l'administration pénitentiaire, qu'elles ne font partie que de la troisième force de sécurité – et qu'il s'agit donc bien d'un choix par défaut. Cette expression, souvent reprise depuis une dizaine d'années, n'est sans doute pas profitable à notre administration.

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C'est la raison pour laquelle, dans mon propos liminaire, j'ai différencié la gendarmerie, la police nationale et la police municipale des services pénitentiaires.

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Jean-Michel Dejenne, représentant le Syndicat national des directeurs pénitentiaires (SNDP-CFDT)

Nous sommes attachés, par principe, au concours national. Néanmoins, nous sommes face à de telles difficultés que nous pourrions effectivement assouplir cette approche et ouvrir des concours régionaux, proches des établissements pour éviter aux candidats de devoir déménager.

Votre question relative au logement des agents pénitentiaires amène à une question beaucoup plus large, et majeure, qui est celle du logement en France. Plus spécifiquement, nous sommes bien évidemment favorables à des aides, si elles ne consistent pas en la construction d'immeubles ou de cités réservés exclusivement aux personnels pénitentiaires. Les agents exercent un métier dans une administration qui est, par définition, cloîtrée, et la vie de caserne, en tout cas cette espèce d'endogamie, serait très néfaste pour eux ; les agents ont besoin d'avoir une vie sociale totalement dissociée de leur métier. C'est pourquoi nous sommes très critiques vis-à-vis des domaines pénitentiaires comme il en existe encore, et nous souhaitons leur disparition. Mais, bien évidemment, des formules de logement alternatives doivent être proposées.

Concernant toujours l'attractivité du métier, les cycles de travail devraient, selon nous, être revus. On note un certain conservatisme des syndicats de surveillants sur cette question. Or faire alterner des cycles de jour et des cycles de nuit, et éviter ainsi d'être sur un poste fixe, contribuerait, nous en sommes certains, à une vie au travail moins difficile.

Enfin, avoir plus d'effectifs permettrait de diminuer la peur que ressentent les agents. Certains viennent travailler chaque jour avec la peur au ventre, il faut le savoir. Affecter deux agents par coursive dans un certain nombre d'établissements, notamment dans les maisons d'arrêt où se trouvent des détenus condamnés aussi bien à quinze jours de détention qu'à trente ans, réduirait la sensation de peur. Tous les condamnés passent par la maison d'arrêt qui, de fait, compte une grande variété d'occupants, donc de comportements, de mentalités et de dangerosité. De fait, plus d'agents signifierait pour eux plus de sécurité.

Plus de personnels, ce serait également un regard croisé, un autocontrôle sur les pratiques professionnelles, qui les mettrait plus à l'abri des mises en cause formulées par les détenus.

Enfin, s'agissant de la délégation de missions à des opérateurs privés, ma réponse est la suivante : pourquoi ? Il s'agit d'un service public et d'une activité régalienne. Le privé a un autre objet, celui de faire du profit. Même si nous posons un cadre, il ne s'agit pas la même logique.

Le modèle qui a été trouvé jusqu'à maintenant, et qui a été malheureusement un peu dépassé avec les partenariats public-privé, celui de la gestion déléguée initiale, est un modèle à peu près satisfaisant. Mais nous ne serions pas opposés à une renationalisation, au retour dans le public de toutes ces fonctions, même si elles ne sont pas en lien direct avec la privation de liberté. Les missions d'extraction, pour lesquelles le personnel est en lien direct avec des personnes détenues, doivent rester l'affaire de fonctionnaires de l'État.

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Il est souvent dit que des téléphones portables entrent dans les prisons. Il existe des brouilleurs ; peut-être conviendrait-il de les généraliser ?

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Sébastien Nicolas, secrétaire général du Syndicat national pénitentiaire Force ouvrière direction

Les dispositifs de brouillage qui existent aujourd'hui sont très performants et permettent, dans un établissement, de définir un périmètre très précis de brouillage. Ces dispositifs coûtent cher, mais ils commencent à se développer et sont efficaces. La principale crainte est liée au principe même des brouilleurs : c'est qu'ils brouillent le proche environnement de l'établissement et les portables des personnels.

Les retours que nous avons des premiers établissements qui les ont mis en place sont très positifs.

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Dans combien d'établissements ont-ils été mis en place ?

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Sébastien Nicolas, secrétaire général du Syndicat national pénitentiaire Force ouvrière direction

Je ne sais pas exactement, mais, à Paris, la Santé en a installé. La difficulté, posée par les anciens dispositifs, était celle du paramétrage de la capacité de brouillage et des potentielles conséquences sur la santé des personnels. Or aujourd'hui, les nouveaux dispositifs sont très aboutis : un dispositif capte le signal, et aussitôt le dispositif de brouillage se met en route. C'est-à-dire que si aucun signal n'est détecté, il n'y a pas de brouillage, donc pas d'ondes activées. C'est un procédé qui mérite d'être généralisé dans les établissements, car il s'agit d'un véritable outil de lutte contre les portables en détention, qui génèrent trafics et autres dommages.

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Aurélie Jammes, représentant le Syndicat national des directeurs pénitentiaires (SNDP CFDT)

Je souhaite revenir, si vous me le permettez, sur les détenus à profil psychiatrique. Il a été indiqué par ma collègue que, selon une étude ancienne, 40 % de la population carcérale présentait des troubles psychiatriques. C'est un chiffre qu'il conviendrait d'actualiser et de relativiser, puisque la dépression, par exemple, est considérée comme un trouble psychiatrique, alors qu'elle n'est pas porteuse de dangerosité pénitentiaire.

Au-delà du trouble psychiatrique, de nombreux détenus ont des troubles de la personnalité, qui entraînent certains problèmes difficiles à gérer par nos personnels. Je veux parler d'actes de scarification, d'automutilation ou d'agression des personnels, et d'une réelle intolérance à la frustration. Ces détenus ne souffrent pas pour autant de troubles psychiatriques et ne sont pas suivis par un psychiatre. Mais ils sont, pour nous, créateurs de difficultés et d'insécurité.

Les UHSA sont complètes et les listes sont longues. Il existe également les soins psychiatriques à la demande du représentant de l'État, les hospitalisations d'office pour lesquelles le médecin décide d'hospitaliser en urgence une personne détenue dans l'hôpital psychiatrique de proximité, sous couvert d'un arrêté préfectoral. Enfin, il existe également des services médicaux psychologiques régionaux dans certains établissements, mais qui sont eux aussi saturés et pour lesquels les listes d'attente sont très longues.

Si les victimes demandent une réponse pénale – c'est-à-dire une privation de liberté –, certains délinquants ou criminels relèvent du secteur psychiatrique ; mais cette réponse n'est pas toujours satisfaisante pour la victime.

L'audition se termine à onze heures quarante-cinq.

Membres présents ou excusés

Réunion du jeudi 21 mars 2019 à 11 heures

Présents. - Mme Aude Bono-Vandorme, M. Jean-Claude Bouchet, M. Jean-Pierre Cubertafon, M. Rémi Delatte, Mme Sandrine Josso, M. Denis Masséglia, M. Christophe Naegelen, M. Joaquim Pueyo, M. Jean-Louis Thiériot, Mme Nicole Trisse

Excusés. - M. Xavier Batut, Mme Brigitte Kuster