La séance est ouverte à dix-sept heures.
Mes chers collègues, je vous propose de poursuivre nos auditions dans le cadre de la mission d'information sur l'incendie de Lubrizol à Rouen. La conférence des présidents nous a confié cette mission à la fois pour revenir sur l'évènement en tant que tel, s'intéresser à la gestion de cette crise, à la communication de crise, mais également pour faire un retour d'expérience et, à travers ces auditions, essayer d'en tirer les meilleures conclusions possibles pour faire des propositions d'amélioration si besoin.
Nous avons le plaisir d'accueillir cet après-midi Mme Véronique Delmas qui est la directrice générale de l'ATMO, accompagnée de Mme Catherine Tardif, qui est membre du conseil d'administration et qui représente France nature environnement (FNE) au sein même de ce conseil d'administration.
Madame la directrice, vous avez déclaré, je vous cite, qu'à certains moments vous pouvez décider de ne pas diffuser l'indice ATMO parce que la situation est trop incertaine. Pourriez-vous nous préciser ce que vous entendez par « situation incertaine » ? Aviez-vous eu des consignes particulières de non-diffusion de l'indice ce jeudi 26 septembre. C'est une question que se posent beaucoup d'entre nous et à travers nous aussi, j'imagine, beaucoup d'habitants.
Vous avez déclaré aussi que vous aviez eu l'impression que le choix de ne pas diffuser l'indice était tout à fait compréhensible. Qu'entendez-vous par là ? Sans doute y a-t-il des conditions particulières à ce genre d'évènement qui vous ont conduit ou ont conduit l'ATMO à ne pas diffuser cet indice.
Dans un communiqué du 27 septembre, il avait été indiqué que, pour évaluer l'impact de cet incendie sur la qualité de l'air, ATMO Normandie avait mis en place des mesures complémentaires dont les relevés ont été analysés a posteriori en laboratoire. La liste des mesures et leur résultat devaient être publiés... Qu'en est-il ? Quelle interprétation de la qualité de l'air les résultats publiés vous livrent-ils aujourd'hui ? En la matière, nous savons que le droit qui vous demande de mesurer quatre indices principaux. Ne pensez-vous pas, qu'à l'avenir, il faudrait faire évoluer et compléter ces indicateurs de qualité de l'air ? De quelle façon ? Quelles mesures pourrait-on prendre pour communiquer plus rapidement, précisément et de façon plus large le panel des polluants ? Au-delà même de la publication, ce qui vous souvent est demandé, c'est une interprétation la plus indépendante possible. Une chose est de publier les indicateurs – c'est ce qu'on vous demande de faire – en indiquant les seuils mais la question de l'interprétation me semble essentielle. Je sais que, malgré tout, vous faites un gros effort de pédagogie.
Le 9 octobre dernier, les premiers résultats d'analyse sur la détection de dioxines dans l'air – c'est une question importante – n'étaient pas rassurants, notamment concernant la commune de Préaux – cela a été indiqué à plusieurs reprises – où les taux étaient considérés comme quatre fois supérieurs. Continuez-vous à relever des taux de dioxines présentes dans l'air ? Si oui, quels sont les résultats et les enseignements que vous en tirez ? Sur le cas particulier de Préaux, avez-vous une explication ?
Le comité pour la transparence et le dialogue, installé dans notre département, auquel la plupart d'entre nous participent, a mis en place un suivi sanitaire des conséquences de l'incendie. Comment voyez-vous l'articulation entre les missions qui vous sont confiées et celles de l'agence régionale de santé (ARS) ? Allez-vous procéder également à des analyses complémentaires ? Allez-vous participer d'une façon ou d'une autre à ce suivi ?
Enfin, il y a des inquiétudes sur les missions qui sont confiées à un organisme tel que le vôtre sur un territoire qui est très concerné par la présence de sites Seveso et plus largement de sites industriels. Y a-t-il une spécificité accordée à vos missions du fait même d'être dans un département qui compte un nombre important de sites industriels ? Pour le dire autrement, faites-vous plus qu'ailleurs ? Quel est ce plus ? Qu'y a-t-il de particulier qui nous distingue d'autres régions qui ne connaissent pas autant de sites industriels ?
Le 26 septembre très tôt le matin, comme beaucoup d'habitants, j'imagine, mon premier réflexe, voyant que c'était un site industriel qui brûlait, a été de me connecter à ATMO Normandie. J'ai regardé la note globale qu'il y avait pour Rouen, c'était vert. J'ai ensuite creusé en essayant de me dire que, peut-être, cette note globale ne prenait pas suffisamment bien en considération la situation. J'ai creusé pour regarder le site le plus proche de Lubrizol, mis à jour heure par heure. Il indiquait que c'était vert. Il était entre 6 heures et 8 heures du matin. Vers 10 heures, vous avez arrêté de publier la note globale et vous avez indiqué a posteriori l'avoir arrêté non pas parce que les données étaient devenues mauvaises, mais parce qu'elles ne traduisaient pas la réalité de la situation. Cela pose le question de savoir, dans le cas de ce type d'incident, comment on peut vraiment analyser la situation, sachant que les polluants qu'il faut regarder ne sont pas forcément les quatre éléments polluants que vous observez régulièrement, à savoir les particules fines PM10, l'ozone, le dioxyde d'azote et le dioxyde de soufre . Jugez-vous votre indice pertinent dans le cadre de Lubrizol ? Faut-il mettre en place des mesures complémentaires ? J'aimerais déjà que vous puissiez faire le point sur toutes celles que vous avez réalisées à partir du 26 septembre qui ne sont pas réalisées en temps normal.
Pourriez-vous nous commenter les mesures spécifiques de long terme qu'il faudrait prendre et les modifications qu'il faudrait éventuellement apporter aux obligations des ATMO et notamment de ATMO Normandie, pour prendre en considération ce type de situation ?
J'aimerais enfin vous demander de commenter les expressions de certaines personnes lors de cette crise, notamment celle du PDG de Lubrizol Monde, qui avait indiqué que l'incendie n'était pas plus polluant qu'un feu de cheminée. Pourriez-vous nous donner votre sentiment par rapport à cette phrase ? J'ai entendu également qu'il n'était pas plus polluant que l'un de ces pics de pollution que l'on vit régulièrement sur l'agglomération rouennaise.
Pensez-vous que le spectre des polluants qui sont analysés de manière traditionnelle pour le suivi de la qualité de l'air soit suffisamment étendu pour répondre à une situation exceptionnelle telle que celle que nous avons connue lors de cet incendie ?
À quel moment la liste des produits qui ont brûlé vous a-t-elle été communiquée ? Au regard de cette liste, y aurait-il, selon vous, une surveillance spécifique à mettre en place et des polluants particuliers à rechercher, à court, moyen et long terme ?
Avez-vous besoin que l'on vous présente la structure, son organisation et ses missions, ou bien rentre-t-on tout de suite dans la réponse aux questions ?
Dans le cadre d'une mission d'information, je pense que cela peut être utile d'entendre une présentation des missions qui vous sont confiées. Je rappelle que nous sommes diffusés en direct. Cela peut être aussi une mission pédagogique que de dire ce que vous faites.
c'est une AASQA, c'est-à-dire une association agréée de surveillance de la qualité de l'air. Il y en a 19 dans la France entière. Elles sont réunies par l'association ATMO France. La loi, en particulier le Code de l'Environnement, l'a organisée de manière à ce qu'elle soit gérée par quatre collèges. Je fais partie du collège des services de l'État. Quand on se réunit, il y a des représentants de la préfecture, de l'ARS, de la direction régionale de l'environnement, de l'aménagement et du logement (DREAL). Le collège des collectivités territoriales rassemble métropoles, communes, établissements publics de coopération intercommunale (ECPI), celui organismes représente les émetteurs de pollution, ceux qui concourent à l'émission de substances polluantes. On y trouve des industriels, mais aussi les chambres de commerce et d'industrie (CCI) et la chambre de l'agriculture. Un quatrième collège, celui des associations de défense des consommateurs et de l'environnement accueille aussi des personnalités qualifiées, dont des médecins. En termes de participation à la décision, chacun des quatre collèges est à égalité, avec 25 % des voix.
Lorsque les AASQA ont été créées par le ministère de la transition de l'écologie, quatre missions leur ont été attribuées. La première de ces missions, c'est d'être des observatoires, de surveiller et de prévoir la qualité de l'air en faisant des mesures et des modélisations de la pollution de fond, dont on va reparler, par l'indice ATMO. Deuxième mission, informer et sensibiliser la population à la qualité de l'air. Troisième mission, accompagner les décideurs dans le champ du politique, leur proposer une évaluation de leurs actions, qu'elles soient réalisées ou en prévision. Dernière mission, participer à l'amélioration des connaissances, et donc amener des informations sur des projets d'échelle soit locale soit nationale. Les AASQA surveillent la pollution de fond, réglementée par des directives européennes qui désignent les polluants à surveiller au quotidien et le positionnement des capteurs. Pour mémoire, la pollution de fond a des sources chroniques comme le trafic, le chauffage, l'agriculture et l'industrie, hors accidents. La pollution de fond, vous le savez tous, est responsable de décès anticipés. Le calcul épidémiologique évalue à au moins 48 000 le nombre des décès anticipés par an en France. En octobre, la France a été condamnée par l'Europe pour des dépassements dans l'émission des NO2, le dioxyde d'azote dans certains endroits.
Dans le champ réglementaire, les AASQA n'interviennent pas s'il y a un accident. Il se trouve quand même que l'accident Lubrizol de 2013 a été analysé et que l'analyse a permis l'émission, un an plus tard, d'une instruction qui recommande de se mettre à l'écoute de ces risques et à la disposition de l'aide à la prise en charge. C'est ce qui a permis à ATMO Normandie, en se conformant à cette directive, d'être extrêmement réactif le 26 septembre.
Le budget de fonctionnement et d'investissement d'ATMO Normandie est de quatre millions et demi d'euros. Ce sont les trois premiers collèges qui le financent. Le quatrième collège n'est pas sollicité. Les industriels sont redevables auprès d'ATMO Normandie d'une partie de la taxe générale sur les activités polluantes (TGAP).
Effectivement, suite à l'évènement Lubrizol de 2013, l'instruction du 12 août 2014 nous a fait beaucoup travailler pour voir comment une association agréée de surveillance de la qualité de l'air pouvait contribuer à la gestion des situations accidentelles. ATMO Normandie – à l'époque, Air Normand – était l'une des trois AASQA expérimentatrices de cette instruction, avec ATMO Auvergne-Rhône-Alpes, à l'époque Rhône-Alpes et ATMO PACA . Nous avons remis à un groupe de travail national un rapport dans lequel il y a pas mal de préconisations . Je vous ai apporté un article de la revue Pollution atmosphérique qui les détaille toutes, à la fois au niveau local, mais aussi au niveau de l'organisation nationale.
Ce travail a été fait au niveau national. Il y a eu aussi un Le groupe de travail s'est beaucoup réuni avant et depuis la parution de cette instruction. ATMO Normandie s'est organisée pour répondre aux demandes de cette instruction et réagir en cas d'incident par l'apport d'éléments. C'était utile. Cela nous a permis de mieux connaître les acteurs, de nous intégrer parmi eux. Nous sommes allées au centre opérationnel départemental (COD) dès le premier matin. Nous connaissions l'endroit et les personnes qui étaient là. C'est très important. Je ne suis pas sûre que cela soit le cas partout en France. Nous nous étions formés et organisés en une cellule de crise interne, qui s'est mise à fonctionner dès le matin. C'est elle qui a pris la décision d'arrêter la diffusion de l'indice qui était à trois. Cet indice bon n'était pas compréhensible.
Nous avons mis en place une convention avec le service départemental d'incendie et de secours (SDIS) 76, dont on a parlé, pour la fourniture de canisters. Ce sont des bonbonnes d'air qui permettent d'avoir un échantillon. Cela nous avait manqué en 2013. Nous n'avions pas recueilli d'échantillon. Nous avions vu passer le nuage, nous l'avions senti. 400 appels nous le signalaient cela, mais nous n'avions pas prélevé d'échantillons. C'est une des choses que la convention a permise. Le SDIS est le mieux placé pour utiliser des canisters, dès le premier jour. Ils n'en avaient qu'un. Nous leur en avons fourni d'autres pour qu'ils puissent prélever plusieurs échantillons dès la première journée. À ma connaissance, il y a aujourd'hui, en France, trois conventions entre SDIS et AASQA. Je pense que c'est un point qui pourrait faire l'objet d'accélération.
aussi travaillé sur un programme d'équipement plus complet que tout cela. Il est encore en cours de financement. Nous espérons pouvoir le mettre en place assez rapidement. Il nous aidera en particulier pour l'exploitation des données, par un modèle de dispersion qui permet d'analyser la représentativité des échantillons .
Je vais revenir sur ce que nous avons fait en termes de mesure depuis le premier jour et après-incendie, puisque ce dispositif est, en majorité, toujours en place aujourd'hui. Vous qui habitez à Rouen le savez, il y a encore des problématiques d'odeurs et de signalements de symptôme de santé, qui sont encore très présents. Dès les premières heures, les SDIS ont mis en place ces fameuses bonbonnes appelées canisters dans lesquelles on peut faire des prélèvements d'air. Ce sont des prélèvements instantanés que l'on envoie à des laboratoires pour analyse. Nous avons mis en place des jauges. Ce sont des récipients qui permettent de recueillir la pluie. Nous en avons installé deux types : un pour les dioxines furanes et les PCB et un autre pour les métaux, puisque ce ne sont pas les mêmes préleveurs qu'il faut utiliser pour des questions de contamination éventuelle. Nous avons ajouté des tubes à diffusion ; qui permettent d'avoir des prélèvements sur une semaine. C'est toujours opérationnel autour du site. Nous avons aujourd'hui neuf sites de prélèvement à moins d'un kilomètre du site pour des mesures de benzène, de toluène, de xylène, de composés organiques volatils (COV) et d'H2S, qui sont les composites que l'on recherche. Nous avons utilisé des moyens mobiles dès le premier après-midi sur Mont-Saint-Aignan, sous le panache. Quand nous nous sommes aperçus que le panache s'était décalé, nous l'avons déplacé sur Bois-Guillaume un après-midi. À partir du lundi, nous l'avons mis sous les vents, à 600 mètres du site, sur un espace que Lubrizol et Normandie Logistique ont mis à notre disposition. Ce sont des choses qui sont encore opérationnelles aujourd'hui. Nous avons aussi l'aide d'autres AASQA pour renforcer un peu notre matériel.
La deuxième chose que nous avons faite, c'est une surveillance renforcée des odeurs. À ATMO Normandie, nous avons des nez qui sont formés à la reconnaissance des odeurs. Cela nous permet de qualifier les odeurs par grandes familles et par notes odorantes. Nous avons fait des tournées olfactives dès le vendredi, avec des gens qui ont été sur le terrain. Ce n'était pas forcément évident d'aller faire des prélèvements. Ils en ont fait par canisters et sacs Tedlar qui ont été envoyés dans des laboratoires. Dès le lundi, nous avons fait appel à une société spécialisée sur les odeurs pour venir nous renforcer. Le même jour, nous avons mis en place un système qui s'appelle ODO et fonctionne très bien. Il permet à chacun de signaler des odeurs sur smartphone ou à partir d'une connexion internet. Ce matin, nous avions 28 signalements émis par des habitants de Rouen. Ils nous ont signalé des odeurs et pour certains, les symptômes associés.
Nous avons mis en ligne ces systèmes de signalement et de traitement des signalements depuis le week-end dernier pour que leur résultat puisse être directement disponible pour les habitants de Rouen. Ce qui est intéressant à dire , c'est que depuis l'instruction du 12 août, nous avons aussi mis en place une fiche que l'on envoie vers la préfecture dès qu'il y a plus de cinq signalements sur un secteur. . Ce système fonctionne et continue de fonctionner depuis ce jour-là. En fonction du nombre de signalements, nous avons un suivi des odeurs et nous avons été amenés à signaler à Lubrizol des émergences très importantes d'odeurs certains jours.
Nous avons eu besoin de travailler avec des universités rouennaises pour analyser les données et comprendre le phénomène. Nous avons créé un petit groupe de travail pour exploiter des données qui sont assez nombreuses, pour lesquelles nous n'avons pas, pour la plupart, de seuil ni de référence bibliographique. C'est important que l'on puisse s'associer avec des personnes qui ont d'autres compétences que nous. La carte que je vous ai présentée est créée avec un universitaire rouennais. Elle permet de documenter la situation le jour même de l'incendie. Nous avons fait appel aux personnes qui nous suivent pour qu'elles apportent leurs photos, de façon à construire cette carte.
La dernière diapositive vise à montrer schématiquement où nous intervenons dans le suivi environnemental. Là où nous avons mis la petite loupe, c'est là où ATMO Normandie intervient, c'est-à-dire sur une partie du volet de mesure des gaz et des particules dans l'air et dans les pluies. Vous avez le détail des polluants que nous avons pu mesurer lors de la surveillance renforcée que nous avons mise en place. L'objectif, pour nous, est vraiment de documenter l'évènement et de fournir les informations à des experts qui vont pouvoir analyser l'impact en termes de santé, en termes d'environnement, avec l'ensemble des données qui sont produites par tous les acteurs. Nous sommes une partie du dispositif de surveillance, sur un volet qui est important, mais il y a beaucoup d'autres personnes qui sont intervenues, y compris sur ce volet-là. Pour les mesures d'amiante, il y a eu trois bureaux d'études et nous n'avons pas fait de mesure. Cela permet de voir où on se situe.
Par rapport à l'indice de qualité de l'air, c'est un indice que l'on prévoit la veille pour le lendemain, en fonction de la météo générale. Nous avions prévu un indice trois, de bonne qualité de l'air, le 26 septembre.On s'est bien planté, mais nous n'avions évidemment pas prévu l'incident. Un indice de qualité de l'air à trois alors que le préfet déclenche un plan particulier d'intervention (PPI), c'est une situation qui n'est pas représentative de la normale. Vous avez posé la question de savoir si on nous avait demandé de le faire. Dans l'instruction du 12 août 2014, il est explicitement prévu, dans un paragraphe spécifique,. que lesAASQA suspendent momentanément ou adaptent, pour la zone concernée, la diffusion des indices de qualité de l'air qui montreraient un bon niveau de qualité de l'air sur les polluants réglementés alors qu'un épisode de pollution atmosphérique est en cours, pour éviter toute confusion possible auprès du public. C'est exactement ce que nous avons appliqué. L'indice ATMO n'était pas représentatif de la situation. Il était incertain que le préfet puisse avoir la possibilité, en fonction de la tournure des évènements, d'intervenir et d'informer le public sur ce qui se passait. Je crois que l'indice ATMO à trois, un indice de qualité de l'air bon, ce n'était pas une information à conserver sur notre site internet et c'est d'ailleurs pour cela que nous l'avons supprimée dès que cela a été décidé par la cellule de crise. Il y a d'autres organismes privés qui donnent des informations sur la qualité de l'air et qui ont continué à indiquer qu'on pouvait aller courir. Il y a des sociétés privées qui font de l'information de façon un peu automatique. Certaines ont dû s'excuser d'avoir diffusé ce type d'information. C'est clair que ce n'était pas le moment d'aller courir sur les quais. Je pense que cette question de l'indice ATMO relevait du bon sens. L'instruction nous demandait de le faire. Sur ce point-là, c'est la cellule de crise interne à ATMO Normandie qui a pris la décision.
publiés, nNous publions les analyse et leurs résultats au fur et à mesure de l'exploitation des données. Comme vous l'avez compris, nous continuons à documenter l'environnement. Tous les jours, nous adaptons le dispositif. Aujourd'hui, nous faisons un gros travail sur la question des odeurs qui nous prend pas mal d'énergie puisque, vous l'avez vu, la situation n'est pas encore satisfaisante. Tout ce qu'on arrive à exploiter, on le met au fur et à mesure dans nos communiqués. Je suis d'accord avec vous, cela pourrait être plus rapide, mais aujourd'hui , nous en sommes là. Nous n'avons pas fini et continuons à envoyer des échantillons au laboratoire. Nous récupérons les résultats. Il est compliqué pour nous d'analyser un certain nombre de composés pour lesquels nous n'avons pas vraiment de référence. Cela prend du temps.
Par rapport à lL'indice de qualité de l'air va évoluer puisqu'il y a des particules PM2,5 très fines qui vont être intégrées dans son calcul à partir de février prochain. Cela va avoir un impact important sur l'indice de qualité d'air qui va être diffusé puisque c'est un polluant qui va sévériser l'indice. .
Vous avez posé la question de l'interprétation. Nous nous sommes associés avec des toxicologues et nous avançons sur cette question-là. Par rapport à la question de la dioxine à Préaux, nous avions fait une conférence de presse pour expliquer pourquoi il fallait prendre des précautions avant d'analyser les résultats. Pourquoi faut-il prendre des précautions ? Parce qu'il faut pouvoir se référer à des références. En l'occurrence, l'échantillon de Préaux était un échantillon de pluie et non pas d'air, donc il y a eu une interprétation qui a été faite après coup par un média normand qui a déclenché toute une réaction en chaîne de médias qui se sont déplacés sur Préaux. Nous n'avons pas fait de mesure de dioxines furanes dans l'air mais dans les pluies à Préaux. Nous en faisons très régulièrement autour des usines d'incinération, en particulier pour surveiller la contamination autour de l'usine. Nous avons une grande base de données des échantillons de deux mois parce que le problème est un problème d'imprégnation sur le long terme. Nous faisons des échantillons sur deux mois. Nous avons pris un échantillon sur un jour. Nous avions décidé de déroger à la règle de prélèvement pour avoir des résultats rapides. Nous ne pouvions pas attendre un mois et dire : « attendez, on attend un mois puis dans un mois, on fait les analyses et on vous donnera le résultat 15 jours après ». Il fallait accélérer le dispositif donc nous avons pris un échantillon sur un jour. Cet échantillon sur un jour, nous l'avons fait analyser au laboratoire de Rouen, qui a fermé depuis. Le résultat, nous l'avons présenté à titre indicatif, au regard des résultats d'échantillon sur deux mois. Quand on regardait ces deux chiffres, on pouvait voir que c'était dans une fourchette élevée, mais étant sur un pas de temps très différent, un jour sur deux mois, ce n'était pas directement comparable. C'était la seule chose que nous avions pour présenter des éléments de comparaison. On voyait que même en regardant un échantillon d'un jour par rapport à un échantillon sur deux mois, on se retrouvait dans une fourchette que nous avions déjà mesurée. C'est peut-être trop, c'est une autre question. Nous avons donc essayé de présenter cette information-là. Elle a été interprétée différemment. L'échantillon d'un jour de pluie est devenu un échantillon dans l'air quatre fois supérieur à la normale, alors qu'à ATMO Normandie – vous pourrez regarder la conférence de presse – nous n'avons jamais indiqué cela. Nous avions juste présenté un résultat avec une médiane. Un calcul a été fait. Il y a eu un emballement médiatique. Pour résumer, par rapport à cet échantillon de pluie, il n'y a pas énormément de dioxines furanes sur cet échantillon, par rapport au fait que nous n'avions pas vraiment de référence sur ce pas de temps. Il y a eu une surinterprétation. Pourquoi Préaux ? Parce que nous avions des mesures à Préaux. Au final, on ne se retrouvait pas très loin des limites de détection sur cet échantillon-là. Les phénomènes sont très compliqués à expliquer et les méthodes de mesure impliquent également une certaine compréhension. Ce n'est cela qui n'est pas forcément évident en termes de présentation des résultats et en termes de compréhension.
participer au comité de transparence et au suivi sanitaire ? Oui, je pense que ce serait une bonne idée, mais je n'ai pas encore compris comment cela s'organisera. Je pense qu(il serait aussi intéressant – je ne sais pas si c'est possible – que l'on puisse avoir une réflexion large, en groupe, sur la communication à froid, à chaud, pour que cela soit vraiment préparé. C'était une chose qui était déjà ressortie de l'épisode de Lubrizol de 2013. On peut dire que cela s'est reproduit de la même façon.
Spécificité par rapport àeLes missions des trois AASQA expérimentatrices ne présentent pas de spécificités. Elles étaient déjà concernées par les questions de l'industrie. Au niveau d'ATMA Normandie, nous avions intégré dans notre statut, à l'occasion de la fusion d'Air Normand et d'Air Com dans ATMO Normandie,une ligne qui dit que l'association aide les autorités dans le cadre des gestions de crise. Nous avons rajouté : « dans la limite de ses moyens ». Cela commence, mais en termes de moyens, il y a des choses à mettre en place.
Obligation de mesures supplémentaires par les ATMO. Il serait intéressant d'avoir des bases de référence qui permettent rapidement de dire : « c'est une situation normale ou anormale, habituelle ou inhabituelle » par rapport à un certain nombre de composés que nous n'avons pas forcément. Il serait aussi intéressant d'avoir des travaux préliminaires sur ce type de composés et une organisation des laboratoires qui peuvent les analyser. Si on prend l'exemple des mercaptans que l'on peut sentir en ce moment à Rouen, le laboratoire qui est le plus à même de mesurer cela, c'est l'école des Mines de Douai, avec qui nous travaillons en ce moment.
Est-ce plus polluant qu'un feu de cheminée ? J'ai vu que vous alliez auditer l'Institut national de l'environnement industriel et des risques (Ineris) demain. C'est plutôt eux qui vous diront quels types de polluants on va trouver. Ce sont des questions de quantité et d'exposition. Je préfère les laisser répondre.
Vous avez demandé quand la liste des produits nous avait été communiquée. Au niveau d'ATMO Normandie, nous n'avons pas la compétence pour savoir à partir d'une liste de produits qui ont brûlé ce que l'on va retrouver dans l'atmosphère. C'est vraiment le travail de l'INERIS. C'est à eux de savoir ce qu'il faut mesurer. Nous, nous allons faire des prélèvements pour tenter de mesurer cela. Nous allons faire ce que nous pouvons, mais j'estime que ce n'est pas notre métier. Nous avons fait ce que nous pouvions faire pour documenter l'évènement. Les canisters qui ont été prélevés par les pompiers ont été envoyés à l'INERIS dans l'après-midi. Ce sont eux qui ont analysé les polluants qu'ils pensaient pouvoir trouver dedans. C'est un point important : on ne peut pas tout analyser. Un canister fait un prélèvement, mais ne permet d'analyser que des COV. Tout ce qui est particulaire n'est pas mesurable dans ce type de prélèvement. Ce sont des choses qui sont complexes. Dans les canisters, ils ont pu mesurer ce qu'ils pensaient être intéressant à mesurer.
Vous avez rappelé que les textes vous demandent d'avoir des indicateurs des particules fines, d'ozone, de dioxyde d'azote et de soufre. D'où cela vient-il ? Pourquoi ces quatre indicateurs ? Est-ce , comme vous l'avez dit tout à l'heure en présentant aux activités, lié plutôt au trafic en général ou à des types d'activités industrielles, par exemple ? Si vous pouvez donner cet indice dit de qualité d'air ou de pollution, c'est bien parce que vous avez fait des relevés et qu'il y a des seuils. Si on le fait tous les jours régulièrement, c'est bien parce que cela vient de l'activité humaine, en quelque sorte.
Il y a un autre indice qui me semble essentiel, et le témoignage tout à l'heure de notre rapporteur me permet de souligner ce point, c'est une sorte d'indice de confiance. Pour que les habitants continuent à regarder votre site qui fait référence, il faut que vous apportiez la démonstration que vous mesurez les bonnes choses – cela renvoie à la première question – et que les chiffres que vous apportez, les données, sont solides et analysables. Cela me semble aussi important d'ajouter ce point-là.
M. le président aborde un point qui est essentiel. Vous observez quatre éléments qui permettent de calculer une qualité de l'air sauf qu'il peut arriver qu'il puisse y avoir un cinquième élément que vous n'observez pas et qui, à un moment donné, polluerait l'environnement sans que, finalement, personne ne soit au courant. Ce n'est pas forcément quelque chose que l'on avait à l'esprit.
L'instruction de 2014 dont vous parlez, par qui a-t-elle été proposée ? Par l'État ou par l'un des quatre collèges ?
Les canisters mesurent l'air ambiant. Est-ce qu'un canister a été utilisé pour aller chercher l'air du panache de fumée ? Les pompiers en ont au moins un dans le département de la Seine-Maritime, si je vous entends. Vous en avez quelques-uns supplémentaires. Comment sont-ils répartis ? J'imagine qu'il y a une nécessité de réactivité. Un gros incendie qui a duré plusieurs heures laissait du temps de latence pour récupérer les canisters et les emmener là où il faut. Mais si c'est un feu qui dure beaucoup moins longtemps, comment fait-on pour être sûr que les canisters sont à disponibilité ?
Êtes-vous sûres que dans les jauges que vous avez mises en place ont permis de capter la suie retombée avec la pluie ?
sur une journée. Vous avez fait une conférence de presse pour expliciter les données de cette journée. Comment les journalistes ont-ils eu accès à l'information ? Pour qu'ils aient défini que c'était dans l'air et que c'était quatre fois supérieur aux données, quelqu'un a leur donner l'information qui a créé cette psychose. J'aurais aimé savoir comment les choses se sont opérées pour qu'on en arrive à cette psychose et qu'après vous puissiez dire : « il ne s'est pas passé cela ». Nous sommes dans le cas d'une fake news et je pense que c'est important d'en retracer le déroulé complet.
Ce qui nous est beaucoup dit, et peut-être allez-vous pouvoir nous aider à répondre à cette question, c'est : « comment pouvez-vous nous dire que la qualité de l'air est bonne ou identique à ce qu'elle est habituellement quand on voit le panache de fumée, quand on sent les odeurs ? ». Les arguments sont parfois difficiles à trouver.
Par ailleurs, j'ai une petite inquiétude par rapport à ce que vous avez évoqué tout à l'heure, à savoir un nouveau polluant qui serait recherché d'ici le mois de février, et qui, en faisant une analyse plus fine, pourrait potentiellement dégrader l'indice habituel. D'ici à ce que les gens disent : « l'indice s'est dégradé, c'est à cause de… » en oubliant que l'on comprend un polluant supplémentaire, comment peut-on préparer la population à ce nouvel indice pour qu'il n'y ait pas de comparaison et de raccourci ?
Monsieur le président, vous avez parlé d'un indice de confiance, alors qu'on publie un indice ATMO. Il faut toujours expliquer à la population le plus possible qu'il manque des bases de raisonnement et probablement – ce qui est en projet à ATMO Normandie – expliquer qu'il y a besoin de faire des modélisations des polluants. Cela commence, mais pour ceux qui sont extrêmement curieux, on sait que, par exemple, on peut trouver une modélisation extrêmement spectaculaire du NO2, le dioxyde d'azote, qui montre qu'il suit le tracé de nos routes et de nos rues. Il faut communiquer là-dessus. Et puis il y a l'implication des citoyens. Il y a déjà eu en France certaines expérimentations d'un capteur citoyen et je pense que cela va venir prochainement chez nous. Vous avez tous entendu parler des microcapteurs, alors que, pour des raisons de métrologie, pour que l'on soit assuré de ce que l'on mesure, ATMO Normandie utilise des capteurs qui sont de gros outils lourds. Mais le microcapteur existe aussi. Il y a une expérience à Rennes, il y en a d'autres ailleurs, où un microcapteur accroché à un sac va donner des renseignements partiels, soit le NO2, soit les particules. Si on additionne tous ces renseignements, on arrive à avoir un suivi très imagé et très concret de la pollution. Si les citoyens s'emparent de cet outil-là en relation avec une structure solide comme une AASQA, ce sera extrêmement intéressant. Il faudra aussi leur donner la limite d'interprétation des relevés par microcapteurs. Je pense que dans l'application citoyenne, ce sera quelque chose de très important, pour peu que la communication soit bien faite.
Pour répondre à Mme Vidal sur ce que va devenir l'indice ATMO avec la PM2,5, il faudra qu'il y ait une grosse communication. C'est extrêmement important d'intégrer les PM2,5 dans cet indice, parce que sur le plan de la santé, c'est ce qui va avoir actuellement le plus d'impact. Ce sont les particules ultrafines qui pénètrent au plus loin de nos voies respiratoires et qui pénètrent même la circulation pour aller toucher tous les organes. C'est extrêmement important et je suis très satisfaite que cette mesure rentre maintenant dans l'indice ATMO. Comment cela sera-t-il exprimé ? Je ne sais pas encore.
L'indice ATMO est réglementaire. Le prévoir fait partie de nos obligations réglementaires. Les polluants qui sont pris en compte et les niveaux sont les mêmes, quelle que soit la ville. Ce qui est important, c'est que nous ne mesurons pas que les cinq polluants de l'indice ATMO. Nous avons beaucoup d'autres mesures, dont certaines sont en temps réel sur notre site internet. D'autres, qui nécessitent des analyses, sont intégrées sur notre site internet dans des rapports d'étude. Il y a beaucoup de données qui vont bien au-delà des cinq polluants de l'indice ATMO. On ne se contente pas du tout de faire ces mesures-là.
L'instruction du 12 août est une instruction ministérielle qui avait été signée par deux ministres à l'époque et qui ne s'applique pas qu'aux AASQA. Je ne vous ai parlé que de la partie qui nous intéresse directement, mais il y a des choses qui sont demandées aux industriels et aux services de l'État.
, pour équiper nos stations fixes de canisters ouvrables à distance. Nous les avons achetés et nous sommes en train de les déployer au Havre. A Rouen, ce projet-là n'a pas encore été discuté avec les industriels et la DREAL. En l'occurrence, nous nous sommes organisés pour en amener un certain nombre. Nous n'avons pas été en rupture de stock.
Est-ce que je suis sûre qu'il y a eu des suies dans les précipitations ? C'est une question intéressante. En fait, non, puisque les pluies ont été recueillies dans l'après-midi. Vous savez comme moi que les pluies noires sont arrivées plus tôt. Le temps d'aller chercher des jauges et de les installer sur le parcours du panache, je suis sûre que ce n'étaient pas les pluies dont les suies concentrées ont été prélevées par des systèmes de lingettes ou par toutes les analyses qui ont été faites sur le sol. C'est cela qu'il faut regarder. Nos mesures peuvent permettre d'apporter à un moment donné une information de modélisation , qui, à elle seule, ne peut absolument pas donner d'informations sur cette question-là. C'est pour cela que je ne m'étais pas forcément méfiée de leur surinterprétation. Ce qui est important, c'est de regarder toutes les données qui sont sorties. Nous en sommes une petite partie. Les pluies ont apporté des informations, mais pas sur la pluie de suies au coeur de l'incendie. C'était intéressant de regarder la suite.
J'avoue ne pas encore avoir tout à fait compris comment un média arrive, 13 jours après l'incendie, à un échantillon d'air prélevé le matin quatre fois supérieur à la normale. Je n'ai pas la réponse, je trouve cela un peu bizarre.
Comment peut-on dire que tout allait bien dans l'air en voyant le panache ? Nous n'avons pas dit cela. C'est justement pour cela que nous avons supprimé l'indice ATMO de notre site internet et ajouté des commentaires ; c'est ce qui était demandé. Lorsque nous avons republié l'indice ATMO, nous avons mis un commentaire pour expliquer que certes, l'indice ATMO était à trois ou quatre – cela dépend des jours – mais que l'on signalait qu'il y avait beaucoup d'odeurs et de symptômes de santé qui nous remontaient des habitants. Très clairement, la qualité de l'air était dégradée, nous l'avons écrit. Nous l'avons dit et redit.
Sur la base d'un malentendu qui a été explicité, mais qui risque de se retrouver dans d'autres circonstances, n'avons-nous pas à réinterroger cette directive de 2014 qui dit à une association agréée de contribuer, comme il lui est demandé explicitement, à la gestion de crise, à la gestion de l'urgence, selon ses moyens., quand vous dites que sur la couverture des moyens de prélèvement, par exemple, il y a encore des problématiques qui se posent et des bases de référence qui visiblement ne sont pas totalement consolidées ? Ne faut-il pas revisiter cette disposition de 2014 qui vous confère une responsabilité dans l'urgence alors que finalement vous travaillez à juste titre sur le « bruit de fond » et que les enjeux sont considérables et sue la communication vous échappe dans le moment de la gestion de crise ?
Madame la directrice, je suis impressionnée par vos connaissances et votre capacité à exprimer très simplement ce qui est pourtant très technique à bien des égards, ce que vous avez recueilli, suivi, mis en oeuvre, apporté au cours de ces évènements et par la suite. Excusez mon ignorance, mais je ne connaissais pas votre association. Cela existe-t-il uniquement en Normandie ? J'aurais tendance à penser que non. Vous devez vous retrouver dans d'autres régions de France. À ce moment-là, vous êtes-vous mise en relation avec ceux qui font le même travail dans ces autres régions et qui ont pu être confrontés, peut-être pas à des situations aussi graves que celles auxquelles vous êtes exposées aujourd'hui, mais qui en ont connu ? J'imagine que cette catastrophe permettra de nous faire grandir tous ensemble par l'expertise que vous apporterez. Dernier point, j'imagine que compte tenu de votre statut, les citoyens ont confiance en vous. D'ailleurs à d'autres reprises, vous avez fait part des contacts que vous aviez. Avez-vous le sentiment que la peur reste à un niveau très élevé ? Pensez-vous que la population commence à se sentir un peu moins isolée, totalement coupée, livrée à elles-mêmes ? Quelle est votre perception de la situation ?
Nous l'avons dit, les AASQA sont centrées sur la pollution chronique. C'est vraiment notre coeur de métier et de loin., L'indice ATMO représente la pollution chronique. C'est quelque chose qui est bien établi. En même temps, on voit bien que nous avons aussi un rôle important en termes d'information. On ne pourrait pas se dire « on ferme le site internet, on ne fait plus rien ». Nous, AASQA, qui sommes en lien avec des industries, nous sommes obligés de faire tout ce que nous pouvons pour contribuer à cela. Ce travail-là, il faut le continuer. Il y a très clairement des enjeux qui nous échappent. Nous avons besoin aussi d'être accompagnés là-dessus. Le travail de l'INERIS et le travail de l'agence nationale de sécurité sanitaire de l'alimentation, de l'environnement et du travail (ANSES) sont vraiment essentiels. Aujourd'hui, on avance comme ça, mais il y a sûrement un travail à faire là-dessus. Je pense que les AASQA qui sont les plus concernées travaillent le plus. Il y a une fédération qui s'appelle ATMO France, qui regroupe toutes les AASQA, dont ATMO Occitanie par exemple, ou ATMO Nouvelle-Aquitaine. Il y a des AASQA qui ont gardé des noms plus connus comme Airparif, qui est l'AASQA de l'Ile-de-France. La fédération a un rôle important pour organiser le retour d'expérience. On m'a déjà demandé de faire un retour sur Lubrizol à l'assemblée générale qui va avoir lieu en décembre, de dire comment nous avons vécu l'évènement et ce que nous pouvons apporter aux autres. Il y a eu aussi toute une solidarité des AASQA. Certaines nous ont proposé de l'aide. Cela va nous aider à avancer. L'instruction a été ciblée sur les épisodes odorants, pas sur les incendies alors que 63 % des accidents industriels qui sont des incendies Cela veut dire qu'il faut être en capacité de faire des prélèvements rapides ou en tout cas de fournir des éléments pour le faire, Il y a un gap entre le travail que l'on a fait dans le cadre d'instruction et les statistiques. Il faudrait que la partie incendie qui a manqué au cadre présent soit aussi considérée.
Une précision par rapport à ce que vous avez indiqué en répondant à la question des besoins d'équipement. Avez-vous les moyens des missions que vous voulez faire et bien faire ? Vous avez présenté tout à l'heure – et je vous en remercie – ATMO Normandie, ses collèges, mais aussi ses budgets. Quand vous présentez un plan d'équipement, dont on voit l'utilité avec l'épisode qu'on vient de vivre, êtes-vous suivis par ceux qui vous financent ?
Des collectivités nous proposent de participer au financement des budgets d'équipements que nous avons présentés en juin. Jusqu'à présent, les demandes de financement avaient été faites aux industriels. Là, le programme devient, de façon plus évidente, d'intérêt général. Aujourd'hui, nous avons adressé un courrier à toutes nos collectivités adhérentes, mais aussi aux CCI et aux chambres d'agriculture, pour qu'elles contribuent à ce programme.
Nous avions prévu d'avoir un logiciel dont l'objectif est de simuler l'incident et de voir où aller installer des jauges de prélèvement pour interpréter la représentativité des résultats. Cela nous servira. Dans notre projet, nous pensons installer à Gonfreville-l'Orcher ou au Havre un appareil qui serait tout le temps en chauffe et qui permettrait d'apporter directement des canisters et d'avoir une analyse ultra rapide. L'intérêt est qu'étant tout le temps en chauffe, on a un délai de résultat qui est bien réduit par rapport à ce que l'on a pu avoir aujourd'hui.
Dernier point dans notre projet, un véhicule serait équipé d'un petit laboratoire qui serait rapidement sur site. Nous avons dû aller chercher un équipement au Havre, un autre à Port-Jérôme, un à Caen, etc. Je n'ai pas trop décrit l'investissement des équipes qui ont vraiment été sur le terrain chercher tous les appareils, qui ont tout ramené dans la matinée et les ont installés, alors que c'était incertain et un peu compliqué. Oui, on pourrait faire mieux avec plus d'équipement, c'est clair.
J'entends à travers tout ce que vous nous expliquez une certaine zone d'incertitude sur la qualité de l'air les jours qui ont suivi l'incendie. Quelles seraient vos préconisations en termes de suivi pulmonaire ? Y a-t-il des choses à faire dans le suivi de la population ? Puisqu'on parle de l'air, je pense aux pathologies pulmonaires, quelles seraient vos préconisations dans ce domaine ?
Catherine Tardif étant pneumologue, elle pourra plus facilement répondre à la question.
Par rapport à la population, je pense que les Rouennais ont envie de ne plus sentir d'odeurs aujourd'hui, c'est sûr. Dès qu'on était dans le panache, on le sentait. Tant qu'il y a ce rappel-là, c'est compliqué de se sentir serein, pour certains d'entre eux, en tout cas. Je pense que tout le monde ne vit pas l'évènement de la même façon. Les odeurs, on sait que c'est quelque chose qui peut être très prégnant, qui peut donner des maux de tête, des nausées et des vomissements, quand c'est très fort. En termes de santé, c'est quelque chose d'important.
Juste un rappel, la population est un ensemble extrêmement hétérogène. Tout le monde n'a pas confiance en ce qu'ATMO Normandie publie, mais c'est toujours comme ça. Des gens ont confiance, d'autres critiquent ; il n'y a pas deux individus identiques. En ce qui concerne le retentissement sur la santé, il y a une première information, c'est que la France a un dispositif de santé extrêmement performant, avec un suivi épidémiologique extrêmement intéressant. Sur les phénomènes de santé aiguë et à moyen terme, puisqu'en ce moment, nous sommes dans la période à moyen terme, Santé publique France publie de façon hebdomadaire les recours à la médecine d'urgence. Cela se trouve extrêmement facilement sur le site de Santé publique France. Nous voyons exactement ce qui s'est passé grâce à ce recueil des passages aux urgences et des appels aux services de secours et à SOS Médecins, avec un codage de ce qu'ont été les symptômes, l'asthme, la toux, les décompensations respiratoires, les troubles digestifs. Grâce à ce suivi épidémiologique, on sait ce qui s'est passé dans les jours qui ont suivi le 26 septembre et ce qui se passe en ce moment.
Pour le futur, n'étant plus en activité, je n'ai pas forcément les informations, mais j'ai compris, en lisant les médias, qu'une surveillance épidémiologique allait se mettre en place. Je pense qu'il sera très difficile de trouver une population qui a été exposée aux fumées, aux toxiques et de chiffrer, individu par individu, le niveau d'exposition. Le niveau d'exposition, c'est le temps et l'intensité du polluant. Il va falloir aussi définir une population de référence qui n'aura pas été exposée. Il y aura sûrement un suivi à faire, avec des bilans à cinq ans, à dix ans, à quinze ans. Il pourrait être important de proposer aux gens dont on est sûr qu'ils ont été exposés une prospective, c'est-à-dire du dépistage précoce. Il y a des produits qui ont été relargués, qui sont cancérogènes. Peut-être qu'un dépistage précoce du cancer des voies respiratoires dans cette population-là serait utile. Je ne peux pas vous en dire plus.
Je vois qu'ATMO procède à des mesures du taux de particules dans l'air. Si le toit du lieu de stockage qui est fait en amiante avait été pulvérisé sous forme de particules fines, auriez-vous été à même de le mesurer, de caractériser la présence ou non de particules fines d'amiante ?
La problématique que nous avions le jour de l'incendie, c'est que les stations de mesure n'étaient pas directement dans le panache. C'est pour cela d'ailleurs que nous avons considéré que l'indice ATMO n'était pas représentatif, que nous ne pouvions pas le publier. Après, je pense que ce qui a été fait, ce sont des mesures par des laboratoires qui permettent de mesurer la concentration dans l'air. Nous ne faisons pas des mesures d'amiante de façon routinière puisque c'est en général dans les habitations que l'on va chercher l'amiante. Peut-être que c'est quelque chose à faire, mais ce ne sont pas des choses qui sont faites en routine dans l'air extérieur. En général, c'est plutôt en air intérieur que l'on va chercher cela.
Nous vous remercions de votre présence et de la qualité des réponses que vous nous avez apportées. Nous nous tenons à votre disposition et nous n'hésiterons pas si besoin en cours d'évolution de notre mission à revenir vers vous.
La séance est levée à dix-huit heures dix.
Membres présents ou excusés
Mission d'information sur l'incendie d'un site industriel à Rouen
Réunion du mercredi 6 novembre 2019 à 16 h 55
Présents. - M. Damien Adam, M. Christophe Bouillon, M. Jean Lassalle, Mme Natalia Pouzyreff, Mme Annie Vidal, M. Hubert Wulfranc
Excusé. - M. Xavier Batut