COMMISSION D'ENQUÊTE relative à la mainmise sur la ressource en eau par les intÉRÊts privés et ses conséquences
Lundi 7 juin 2021
La séance est ouverte à dix-huit heures dix.
(Présidence de Mme Mathilde Panot, présidente de la commission)
La commission d'enquête relative à la mainmise sur la ressource en eau par les intérêts privés et ses conséquences, procède à l'audition de MM. Alain Beullier et Christophe Aubert, membres du conseil d'administration d'Engie.
Mes chers collègues, nous poursuivons les auditions de notre commission.
Nous allons à présent auditionner M. Alain Beullier et M. Christophe Aubert, membres du conseil d'administration d'Engie représentant l'un les salariés, l'autre les salariés actionnaires, et tous les deux membres de la Confédération française démocratique du travail (CFDT).
Je vais vous donner la parole pour une intervention liminaire, qui précèdera notre échange sous forme de questions et réponses. Je vous remercie de nous déclarer tout autre intérêt public ou privé de nature à influencer vos déclarations.
L'article 6 de l'ordonnance du 17 novembre 1958 impose aux personnes auditionnées par une commission d'enquête de prêter le serment de dire la vérité, toute la vérité, rien que la vérité. Je vous invite donc à lever la main droite et à dire : « Je le jure ».
MM. Alain Beullier et Christophe Aubert prêtent serment.
Je précise que j'ai effectué un mandat d'administrateur représentant les salariés actionnaires de 2017 à 2020. J'ai été élu par résolution à l'assemblée générale de tous les actionnaires d'Engie, après désignation.
Mon mandat d'administrateur a pour objectif premier de défendre l'objet social d'Engie. Je ne fais pas partie des administrateurs indépendants au sens du code de gouvernement d'entreprise des sociétés cotées, connu comme code Afep-Medef (Association française des entreprises privées et Mouvement des entreprises de France, car je suis par ailleurs salarié du groupe Engie.
Je suis administrateur salarié du groupe Engie, parrainé par la CFDT. Mon mandat prend en fin en mai 2022.
Chacun d'entre vous peut-il revenir en détail sur le déroulement du conseil d'administration du 5 octobre 2020 – les personnes qui y siégeait et l'heure à laquelle il a eu lieu – la presse ayant affirmé que sa tenue avait été reportée ?
Je ne connais pas précisément le détail de l'heure. Je pense que le conseil avait effectivement été retardé. Il devait se tenir vers 18 heures.
Ce conseil s'est déroulé normalement. Je pense que l'ensemble des participants étaient présents.
Nous avons bien tenu un conseil d'administration le 5 octobre. Celui-ci a eu lieu en soirée, et a été décalé en raison d'un retard du membre représentant l'Agence des participations de l'État (APE).
Tous les administrateurs y étaient présents, soit 13 personnes au quorum, car Isabelle Kocher ne faisait plus partie du conseil à cette date.
Ce conseil extraordinaire avait pour objet d'entériner la cession de notre participation financière dans Suez. Il faisait suite à deux autres conseils extraordinaires organisés le 13 septembre et le 2 octobre.
Le 17 septembre, les administrateurs avaient reçu une présentation de l'offre détaillée de Veolia : le projet industriel, le prix d'achat souhaité et les conditions sociales en résultant.
Suite à cela, un débat a eu lieu au conseil d'administration. Nous avons demandé à notre président de se rapprocher de Veolia afin d'améliorer l'offre financière et les engagements sociaux, car nous considérions que les engagements en matière sociale étaient insuffisants.
Un autre conseil d'administration a eu lieu le 30 septembre. Notre président nous a présenté des éléments supplémentaires. Le prix a été modifié à la hausse. Les engagements sociaux ont été revus par Veolia et Meridiam.
Veolia étant assujetti à une loi antitrust, il nous avait été proposé que Meridiam fasse l'acquisition de l'activité eau France. Nous avions demandé que les conditions d'acquisition du périmètre Eau France soient améliorées.
Les engagements ont été améliorés sur trois aspects :
– l'engagement de Meridiam de conserver cet actionnaire pendant des années ;
– des investissements importants dans la durée garantissant un développement de l'activité eau en France ;
– des garanties sociales liées au maintien de la participation et à l'engagement d'embaucher 1 000 apprentis sur deux ans.
Tout cela nous a paru très cohérent
Le 30 septembre, un délai supplémentaire a été demandé notamment par l'APE. Elle ne souhaitait pas une offre publique d'achat (OPA) hostile, même si celle-ci n'était pas présentée comme telle. Le conseil a autorisé notre président à accorder ce délai à Veolia jusqu'au 5 octobre.
A cette date, sur la base de la participation financière, des investissements et des engagements sociaux qui avaient été pris par Veolia et Meridiam, un vote du conseil d'administration sur la cession de cette participation a eu lieu.
Vous affirmez que l'OPA n'était pas nécessairement présentée comme hostile. Portant, M. Philippe Varin et M. Bertrand Camus s'y sont fortement opposés. Quels sont les éléments qui vous font affirmer cela ?
Le dossier comportait un vrai projet industriel. Dans le cadre d'une OPA considérée comme hostile, on n'établit pas un projet industriel et on ne s'engage pas sur des garanties sociales.
La presse relate que vous avez discuté avec M. Jean-Pierre Clamadieu durant l'heure précédant le conseil d'administration. Le confirmez-vous ou l'infirmez-vous ? Le cas échéant, quelle était la teneur de vos échanges ?
Nous nous trouvions tous dans le couloir, à l'étage du conseil d'administration. Il nous a fallu attendre que la personne représentant l'APE arrive. Nous avons donc nécessairement tous discuté dans les couloirs, dans le cadre d'échanges liés au conseil d'administration.
Je confirme ces propos. Christophe Aubert et moi-même avons échangé sur la position de la CFDT, qui n'avait visiblement pas été bien comprise.
Nous avons lu la presse, et nous n'en avons pas retiré que des éléments agréables. Nous avons assumé notre position ensemble. Nous l'avons d'ailleurs exprimée lors des délibérations du conseil.
Ne souhaitant pas prendre part au vote, nous sommes sortis de la salle.
Nous ne souhaitions pas prendre part au vote, pour les raisons portées par la CFDT.
Pourquoi n'avez-vous pas suivi les consignes de la CFDT au niveau national ? Son secrétaire général M. Laurent Berger avait donné consigne de voter contre ou de s'abstenir lors du vote d'Engie.
Il avait peut-être indiqué qu'il ne fallait pas voter pour.
Tout le monde confond le fait de s'abstenir et le fait de ne pas prendre part au vote.
Une abstention est comprise comme un vote contre. Or la CFDT représentée par M. Aubert et moi-même ne souhaitait pas exprimer contre le projet. Nous ne pouvions donc pas voter contre ou nous abstenir.
L'abstention est comptabilisée comme un vote contre – c'est la position qu'a adoptée un représentant de l'État. Le fait de ne pas prendre part au vote ne correspond ni à un vote pour, ni à un vote contre, mais à une position neutre. Tel a été notre choix.
Nous représentons les salariés et nous sommes nous-mêmes salariés. Deux choix s'offraient à nous : soit voter contre la vente de la participation, et donc contre les salariés d'Engie, car contraire au plan stratégique d'Engie ; soit voter pour la vente de la participation, ce qui impliquait d'accepter la seule offre qui avait été faite, et qui tombait malheureusement sous le coup d'une loi antitrust.
La seule offre que nous pouvions accepter en vendant notre participation financière était une offre qui démembrait l'activité eau France du reste de Suez.
Notre position, qui consistait à ne pas prendre part au vote, revenait à nous positionner ni contre les salariés d'Engie, ni contre les salariés de Suez. Cette position a malheureusement été mal interprétée.
Pourtant, je répète qu'il semble assez inhabituel que vous n'ayez pas suivi la consigne donnée par la Confédération.
La presse a notamment fait écho du fait que vous aviez voté contre la rémunération de M. Gérard Mestrallet, pour suivre les consignes de la CFDT, en précisant que vous auriez peut-être voté pour en d'autres circonstances.
Pourquoi n'avez-vous pas suivi la position de votre confédération cette fois-ci ?
Les propos que vous avez entendus de la part de Laurent Berger consistent à ne pas se prononcer contre, ou à s'abstenir au sens de rester neutre. Tout le monde confond l'abstention et le fait de ne pas prendre part au vote.
Pour respecter la consigne de voter contre ou de rester neutre, il faut voter contre ou ne pas prendre part au vote.
S'il s'agit de se prononcer contre, il faut soit s'abstenir soit voter contre. En revanche, si la consigne demande de ne pas se prononcer, dans un conseil d'administration, il ne faut voter contre ou ne pas prendre part au vote.
Je m'interroge sur le fond de votre question. Cet épisode concerne la CFDT en interne. Une seule décision ne peut pas expliquer tous les problèmes que nous avons identifiés dans ce dossier.
Nous sommes favorables à l'emploi chez Engie et chez Suez. Lorsque nous avons constaté l'évolution en cours chez Suez, nous avons pris en compte ce paramètre.
Nous étions plus ou moins informés depuis le mois d'août. Le dossier s'est bien construit. Une proposition a été réalisée. La stratégie proposée a obtenu l'unanimité au mois de juillet. Nous étions donc bien d'accord.
Par la suite, divers éléments variables sont intervenus, notamment les pressions des syndicats. Il n'en demeure pas moins que nous avons toujours conservé la même position.
Au mois de juillet, l'État avait validé la stratégie, qui comprenait des cessions et des rotations d'actifs. Toutefois, il ne nous a pas complètement suivis lors du dernier conseil d'administration. Nous avons alors été amenés à douter.
Nous, petits administrateurs salariés, ne sommes pas informés des confidences entre les grands patrons.
Étant donné que nous nous trouvions dans une position complexe, nous avons choisi de reste le plus neutre possible, et donc de sortir de la salle.
Dans la presse, nous avons presque été affublés du qualificatif de déserteurs, alors que je peux vous assurer que nous sommes bel et bien présents.
Je vous invite à regarder les communications syndicales internes à Veolia. Leurs tracts internes, qui soutenaient la proposition de Veolia, montrent bien qu'en fonction des endroits où l'on se trouve, les intérêts divergent grandement. Vous comprendrez ainsi pourquoi notre position est complexe.
Non, elle ne fait pas basculer le vote, étant donné les forces en présence et le nombre d'administrateurs indépendants.
Je ne comprends pas que cette information ait été reprise telle quelle dans la presse, car ce n'est pas possible techniquement.
Dans vos chiffres, les abstentions sont comptabilisées comme des votes contre. Nos deux voix ne font donc pas basculer le vote.
Vous affirmez que si vous ne vous étiez pas abstenus, le vote n'aurait pas été différent ?
Non, le vote n'aurait pas été différent. Le quorum correspond à des votes pour et des votes contre. Êtes-vous bien d'accord avec moi ?
Votre éventuelle abstention devait donc être comptabilisée comme un vote contre ; nous sommes d'accord.
Que nous ayons tous les deux voté contre, ou que nous nous soyons abstenus – ce qui revient également à un vote contre –, l'issue du vote n'en aurait pas été changée.
Étant donné que nous ne souhaitions pas prendre part au vote, nous avons dû sortir pendant cinq minutes au moment du décompte final. Nous avons toutefois participé à l'ensemble des débats, et nous avons tenté de convaincre les administrateurs du bien fondé de notre position. Nous avons joué notre rôle jusqu'au bout.
Nous sommes sortis de la salle en sachant pertinemment que même si nous avions voté contre, l'issue du vote n'en aurait pas été changée.
M. Beullier, vous avez affirmé que vous aviez été informé dès le 30 août, et donc que vous aviez eu le temps de recevoir les informations. Pourtant, M. Berger a justifié votre position de sortie de la salle par le fait que les administrateurs ne disposaient pas d'éléments suffisants pour voter.
Entre les conseils, nous discutons entre administrateurs pour nous forger une opinion. Jusqu'à la séance du 5 octobre, au cours de laquelle le vote a eu lieu, nous disposions d'éléments suffisants pour nous positionner.
La légère marque d'agacement que j'ai exprimée était liée au fait que l'État, actionnaire principal, ne souhaitait pas aller jusqu'au bout. Étant donné qu'il ne nous a pas exposé ses raisons, nous en avons conclu qu'il nous manquait des informations.
Nous avons donc exprimé un doute, craignant que l'État ne nous ait pas totalement informés.
La presse se fait l'écho d'un appel que vous avez reçu de la part de M. Alexis Kohler concernant le conseil d'administration du 5 octobre. Confirmez-vous ou infirmez-vous cette information ?
Avant ces débats, je ne connaissais même pas ce nom. Je peux vous affirmer que je n'ai reçu aucun appel de personne.
J'ai repris le document que vous nous avez envoyé sur le décompte des votes : sept voix pour, quatre voix contre et deux abstentions. J'imagine que les deux abstentions correspondent à nous, qui n'avons pas pris part au vote. Le résultat se serait donc établit à sept votes pour et six votes contre.
Je vais vous demander de répondre tour à tour par oui ou par non à un certain nombre de questions.
Monsieur Aubert, avez-vous reçu un appel d'un représentant de l'exécutif au niveau national ?
Il s'agissait d'une position complexe, qui a en partie semé le doute, et notamment d'une position de soutien de la stratégie du groupe. L'État, tout comme les autres parties prenantes du conseil d'administration, a soutenu la stratégie du groupe durant le conseil de fin juillet.
Le portefeuille de cessions et de rotations d'actifs envisagé incluait Suez. A ce moment-là, 100 % des membres du conseil étaient donc en accord avec ce projet.
C'est par la suite que l'État a légèrement modifié sa position, sans que je puisse l'expliquer.
Je continue d'avoir un doute. C'est la raison pour laquelle je n'ai pas pris part au vote, alors que j'étais favorable à cette vente de participation financière.
Nous, administrateurs, devions choisir une offre intégrant des dispositions antitrust et séparant les activités ou une offre conservant l'intégralité de cette opération.
L'APE aurait pu proposer de se porter acquéreur des 29 % et chercher par la suite un repreneur n'ayant pas de difficultés avec la loi antitrust, ce qui aurait permis de conserver l'intégralité de Suez.
Or l'APE ne s'est pas exprimée sur le sujet. Elle était d'accord sur les questions de prix. De plus, nous nous accordions tous sur le projet industriel, qui intégrait des dispositions antitrust qui nécessitait la séparation des activités.
Il s'y est ajoutée la question de l'OPA hostile. Celle-ci était-elle la raison du vote contre ? Je l'ignore.
L'ensemble des organisations syndicales et le conseil d'administration ont demandé le maintien de l'intégrité de Suez. Or pour qu'une entreprise reste intègre dans son périmètre, il faut que le repreneur ne soit pas soumis à des dispositions antitrust qui l'empêche de le faire dans son intégralité.
Nous ne pouvons pas apporter la réponse à votre question sur la position de l'État, car nous ne la connaissons pas. Nous continuons à nous poser de nombreuses questions.
Monsieur Aubert, vous avez indiqué que M. Alexis Kohler ne vous avait pas appelé. Pourquoi n'avez-vous pas porté plainte à la suite de la mention par la presse de cet appel, alors que cela a dû avoir des répercussions sur votre engagement syndical et sur vos vies personnelles ?
De la même façon, nous n'avons pas porté plainte suite aux accusations selon lesquelles nous nous serions rendus à la piscine ce jour-là, ainsi qu'à d'autres encore.
Ces ragots dans la presse m'ont coûté ma place d'administrateur. Au moment de ma réélection, les salariés de Suez qui disposaient de voix pour designer des administrateurs d'Engie représentant les salariés actionnaires ont reçu des consignes de vote différentes.
C'est peut-être une leçon à tirer. Je n'ai pas l'habitude de me laisser faire, mais je ne suis pas rompu non plus aux échanges de ce niveau.
Il me semble que j'ai beaucoup appris. Si cela devait se reproduire, je pense que je me défendrais de manière plus active.
Lorsque vous observez la manière dont l'opération se dessine jusqu'à ce jour, avez-vous l'impression d'avoir pris la bonne option en quittant la salle de vote, d'avoir défendu l'intérêt général d'Engie, qui sera désormais séparé en deux, et notamment après coup, alors que la CFDT de Suez a déposé une plainte au parquet national financier ?
Nous ne sommes que de modestes administrateurs d'Engie. Nous assumons la lourde tâche de défendre l'ensemble des salariés et l'entreprise.
Nous agissons selon trois dimensions. Il faut que nous créions de la valeur pour l'actionnaire, que nous défendions les salariés et que nous nous assurions de la pérennité de l'entreprise.
Chacun tente d'agir au mieux. J'ai écouté les auditions de syndicalistes de Suez. Ils ont bien défendu leur groupe et leurs salariés. Ils reconnaissent que les syndicalistes de Veolia sont intervenus en soutien de l'opération.
Chez Engie, j'estime que j'ai bien défendu les salariés. J'ai défendu la stratégie d'un groupe qui en a besoin, en toute loyauté, et au mieux pour les salariés d'Engie.
Je réaffirme que notre décision de vote a été la plus loyale envers l'ensemble des salariés, et qu'elle n'a pas fait basculer le vote. Si ce n'était pas le cas, j'aurais dû voter pour.
Pour ma part, si c'était à refaire, j'agirais exactement de la même manière, pour les raisons que nous avons évoquées.
Tout d'abord, alors que notre vote n'était pas pris en considération dans le premier tour de table qui a été effectué au conseil, nous avons bien constaté que le fait que nous votions pour, contre ou que nous nous abstenions ne changeait rien.
De plus, nous avons adopté une position neutre afin de ne pas nous opposer aux salariés d'Engie et de Suez. Cette position a malheureusement été mal interprétée.
Enfin, nous avons joué notre rôle, puisque l'offre initiale de Veolia et de Meridiam ne comportait quasiment aucune garantie sociale. Nous avons œuvré dans les débats du conseil pour obtenir des garanties sociales plutôt qu'un prix.
Si l'offre de Veolia et de Meridiam contient toutes ces garanties sociales aujourd'hui, c'est aussi parce que les administrateurs représentant les salariés ont œuvré à cet effet. Évidemment, la presse ne l'a pas rapporté et n'en avait pas connaissance.
Si nous avions constaté, au premier tour de table, qu'un vote contre de notre part pouvait influer sur le sujet, je ne peux affirmer si j'aurais voté contre ou non. En effet, le fait de voter contre cette participation financière revenait à voter contre une stratégie de développement d'Engie.
Ce n'était pas notre rôle d'administrateurs défendant l'objet social d'Engie de voter contre une stratégie qui avait été approuvée à l'unanimité de l'ensemble des organisations syndicales.
L'audition s'achève à dix-huit heures cinquante-trois.