COMMISSION D'ENQUÊTE relative à la mainmise sur la ressource en eau par les intÉRÊts privés et ses conséquences
Mercredi 9 juin 2021
La séance est ouverte à vingt heures.
(Présidence de Mme Mathilde Panot, présidente de la commission)
La commission d'enquête relative à la mainmise sur la ressource en eau par les intérêts privés et ses conséquences, procède à l'audition des régies municipales en charge de l'eau et de l'assainissement en Guadeloupe : M. Jean-Louis Francisque, maire de Trois-Rivières et président de la régie municipale des eaux ; M. Alain Grunewald-Krembel, directeur général des services de Sainte-Rose ; M. Rosan Capalita, chef des services responsable de la régie des eaux de Sainte-Rose ; M. Patrick Bambou, directeur du service des eaux et de l'assainissement de Trois-Rivières.
Nous poursuivons les auditions de cette commission d'enquête consacrée à la situation et à la gestion de l'eau en Guadeloupe. Pour terminer notre tour d'horizon des autorités organisatrices de l'eau et de l'assainissement, nous recevons donc des représentants des régies municipales des eaux :
– M. Jean-Louis Francisque, maire de Trois-Rivières et président de la régie municipale des eaux ;
– M. Alain Grunewald-Krembel, directeur général des services de Sainte-Rose ;
– M. Rosan Capalita, chef des services responsable de la régie des eaux de Sainte-Rose.
Avant toute déclaration, l'article 6 de l'ordonnance du 17 novembre 1958 relative au fonctionnement des assemblées parlementaires impose aux personnes auditionnées par une commission d'enquête de prêter le serment de dire la vérité, toute la vérité, rien que la vérité. Je vous invite donc à lever la main droite et à dire : « Je le jure ».
MM. Jean-Louis Francisque, Alain Grunewald-Krembel et Rosan Capalita prêtent serment.
La régie est composée d'une quinzaine de techniciens affectée à l'eau et de trois autres techniciens en charge de l'assainissement.
Nous œuvrons sur le territoire avec un réservoir principal constitué par celui de l'Hermitage. Il permet de satisfaire à lui seul près de la moitié des besoins en eau.
Or, depuis quelques jours, la forte sécheresse que nous connaissons actuellement a fortement perturbé la distribution de l'eau au sein des foyers. Ainsi, pendant plus d'une semaine, des zones ont été pénalisées faute d'une ressource suffisante pour alimenter l'ensemble de la population.
Nous avons certes pu augmenter le nombre de citernes d'eau non potable afin de fournir à une partie de la population une première solution.
En complément, des bouteilles d'eau potable ont été distribuées, mais pas en quantité suffisante.
Concernant l'assainissement, nous avons un programme ambitieux en cours de réalisation. Il nous permettra de raccorder un certain nombre de foyers dans le cadre de notre politique d'amélioration de l'assainissement.
La régie des eaux fonctionne sous ce statut depuis 1986. Elle regroupe la régie des eaux et de l'assainissement et nous avons choisi un mode d'exploitation direct. Nous recourons ainsi à notre propre personnel, à nos propres moyens techniques et à nos propres moyens de facturation.
Cette régie gère 9 000 abonnés et environ 20 000 habitants et les distribue de manière relativement régulière et homogène. Il y a certes des pannes, mais nous réussissons à gérer les situations et généralement, personne ne manque d'eau. Nous pouvons parfois regretter des perturbations liées aux précipitations ou des bouchages de captage par exemple, mais globalement, la population est alimentée et nous recourrons peu à des moyens extérieurs.
Le volet assainissement est quant à lui plus délicat puisque l'ensemble de nos équipements est obsolète et ne fonctionne pas comme il devrait. Cela constitue une préoccupation pour nous. Aussi, nous travaillons avec la communauté d'agglomération Nord Basse-Terre pour traiter ce sujet puisque nous ne sommes que gestionnaires du réseau.
Le service mobilise 34 agents inégalement répartis entre l'eau et l'assainissement.
Les principales difficultés rencontrées concernent essentiellement le comptage des consommations individuelles, la facturation, à laquelle nous travaillons pour résoudre le problème, et le recouvrement.
En ce qui concerne les moyens techniques, nous disposons de quatre usines de production d'eau potable pour une production journalière que 11 000 mètres cubes d'eau. En complément, nous avons aussi quatre unités de distribution d'eau potable (UDI) et sept stations d'épuration. Il est vrai que ces dernières sont assez vétustes et ne répondent pas à la réglementation, notamment en matière de rejets. Cela suscite parfois des rapports.
En collaboration avec la communauté d'agglomération, un certain nombre d'améliorations et de programmes d'investissement ont été identifiés, notamment dans le cadre du plan de relance régional.
Il me semble important de distinguer le réseau d'assainissement collectif du non collectif. Il me semble que 40 % des abonnés sont raccordés au collectif.
Sur 9 000 abonnés, 1 700 sont assujettis à la redevance modernisation des réseaux de collecte. Il est vrai que le réseau n'est pas aussi développé que dans le cadre d'une agglomération ou d'une ville et c'est ce qui génère ce ratio.
Nous disposons aussi d'un service public d'assainissement non collectif (SPANC) depuis 2010. Il fonctionne réellement depuis 2017 et permet désormais de délivrer les attestations pour les ventes ou les contrôles dans le cadre de permis de construire.
Sur les sept stations d'épuration de votre territoire, combien sont considérées aux normes ?
De manière très honnête, je ne peux que vous répondre aucune puisque les rejets ne respectent pas la réglementation.
Les stations sont vétustes et les mini-stations, pour la plupart construites dans des lotissements communaux, n'ont pas été entretenues et ont mal vieilli. Ainsi, aujourd'hui, elles ne traitent pas correctement la pollution.
Les stations majeures fonctionnent certes en ce qui concerne l'aération, mais la clarification n'est pas optimale.
Concernant la station d'épuration des eaux usées (STEP) de Nolivier, la collectivité a eu des difficultés à maintenir en état les outils de traitement. Aussi, aujourd'hui, elle dysfonctionne.
En matière d'effectifs, seuls trois agents sont affectés à l'assainissement collectif, les autres étant positionnés sur le réseau d'eau potable.
Vous avez mentionné un programme d'investissement visant les trois grosses stations d'épuration. Quel sera son montant ?
Les travaux permettant de réhabiliter la majeure partie du réseau d'assainissement de Sainte-Rose sont chiffrés à 5 millions d'euros. Cela inclut par exemple la création de postes de refoulement, la réhabilitation de stations d'épuration ainsi que la construction d'une nouvelle.
Nous produisons annuellement 4 millions de mètres cubes. En revanche, la vente aux abonnés ne représente qu'un million. Nous attribuons donc l'écart à des fuites ou à des volumes non comptés. Cet écart est conséquent et la perte d'eau sur le réseau est importante.
Monsieur Jean-Louis Francisque, vous avez signalé un projet important d'assainissement était en cours. Pouvez-vous nous en dire davantage ?
Notre station principale est aux normes. En complément, nous disposons d'une mini-station, celle des Acacias, qui a fait l'objet d'une mise en demeure. Nous avons donc été contraints d'engager d'importants travaux afin de raccorder les abonnés des Acacias sur la zone de la station principale.
Ces travaux sont en cours.
M. Patrick Bambou, directeur du service des eaux et de l'assainissement de Trois-Rivières, se joint à l'audition et prête serment.
Cette opération consiste en une extension du réseau d'assainissement collectif du secteur de Grande-Anse à Trois-Rivières. Elle prévoit la suppression de la mini-station des Acacias qui est problématique.
Dans un premier temps, nous souhaitions la réhabiliter, mais la police de l'eau nous a conseillé de supprimer cette mini-station plutôt que de la réhabiliter.
À ce jour, l'opération est presque terminée et l'achèvement des travaux est annoncé pour fin juin ou début juillet 2021.
Le problème de la mini-station des Acacias sera ainsi résolu, de même que l'extension du réseau.
Une autre STEP pose également problème, bien qu'elle ne nous concerne pas puisqu'elle est celles des logements sociaux de la Société immobilière de Guadeloupe (SIG) et l'extension permettra par la même occasion de résoudre celui-ci.
La STEP principale a une capacité de 2 500 équivalents habitants. Elle est aux normes et fonctionne correctement. En général, nous ne rencontrons pas de difficultés sur l'assainissement.
Monsieur Jean-Louis Francisque, combien disposez-vous d'agents travaillant à l'assainissement ?
Ils sont trois.
Sur le dernier rapport, notre rendement atteignait 54 %.
Vous avez signalé que la sécheresse avait mis en difficulté les habitants et que des bouteilles d'eau avaient été distribuées. Aussi, comment la solidarité entre les différentes autorités organisatrices est-elle organisée ? Quelles sont les relations entre les établissements publics de coopération intercommunale (EPCI) et les régies ?
Nous sommes absolument seuls à gérer les difficultés sur Trois-Rivières. Aucun élu ou toute autre autorité ne nous vient en aide.
La régie opérant une gestion directe sur le terrain, bien que l'EPCI soit responsable de la régie, lorsqu'une difficulté se présente, c'est la régie qui intervient en fonction de ses moyens.
Monsieur Alain Grunewald-Krembel souhaite-t-il apporter des compléments quant à ce système de solidarité pour la régie de Sainte-Rose ?
Je vais simplement abonder dans le sens des propos de Monsieur Jean-Louis Francisque.
Notre régie aussi a dû se débrouiller par elle-même.
Bien sûr, nous avons reçu le soutien des partenaires financiers habituels – office de l'eau, conseil régional, conseil départemental – mais nous devons surtout faire face seuls aux difficultés.
Nous essayons d'améliorer le partenariat avec la communauté d'agglomération du Nord Basse-Terre (CANBT), afin que la problématique du transfert et de la préparation de l'arrivée d'une autre structure éventuelle soit résolue. Nous sommes donc dans une dynamique de transformation de la régie en une autre structure et en parallèle, nous n'avons pu compter que sur nous-mêmes.
Quel est votre regard sur le futur syndicat mixte ouvert (SMO) et vos craintes éventuelles ?
Nous nous préparons à une évolution de la structure régie municipale depuis 2015, date à laquelle la compétence a été transférée à la CANBT.
Nous avons conservé un principe de continuité afin de pallier le risque de rupture du service vis-à-vis des abonnés. Nous avons donc réfléchi à l'évolution de la structure juridique elle-même, mais cela a été contrarié par le projet de structure unique.
À terme, il me semble être source de justice pour l'ensemble des Guadeloupéens, mais à plus court terme, cela me semble soulever différents problèmes, tant administratifs, que techniques ou financiers. À mon sens, la principale question est de savoir ce qu'il adviendra du déficit, puisque la nouvelle structure ne reprendra pas les pertes existantes. Cela n'est pas sans poser de réels problèmes aux structures actuelles pour se rééquilibrer.
Cette situation génère donc une incertitude relative puisque la loi n° 2021-513 du 29 avril 2021 rénovant la gouvernance des services publics d'eau potable et d'assainissement en Guadeloupe prévoit que le transfert sera réalisé sans compensation financière pour les collectivités et que les déficits resteront dans les structures qui les ont créés. Cela semble juste, mais constitue aussi une vraie difficulté de gestion pour les communes.
Si la question nous avait été posée personnellement, en tant que maire de Trois-Rivières, j'aurais exprimé mon désaccord pour une gestion à travers une structure unique.
Je pense en effet que les gestions en régie sont plus pertinentes pour notre territoire. Elles permettent aux structures de faire preuve de réactivité vis-à-vis des abonnés et au personnel d'avoir une connaissance réelle du réseau.
Il est vrai que le SMO traduit une position adoptée par les élus et présidents responsables et relayée par l'ensemble des parlementaires.
Nous nous inscrivons dans cette organisation faute de pouvoir procéder différemment.
Personnellement, si la possibilité m'en avait été laissée, j'aurais milité pour la préservation de la régie des Trois-Rivières, car depuis sa création, elle a tenu le cap.
Aujourd'hui, nos collaborateurs ignorent ce qu'il adviendra d'eux et cela génère une souffrance qu'il nous revient de gérer en tant qu'unique interlocuteur de ces agents.
À ce jour, nous ignorons quelle sera la répartition sur le territoire et si elle sera équitable. En outre, quel sera le prix de l'eau pour les abonnés de Trois-Rivières ?
En effet, aujourd'hui, ce prix de 2,09 euros reste raisonnable et acceptable dans la mesure où la commune était tant une zone de production que de distribution. Or, dans le cadre du SMO et de la politique de prix unique, il sera nécessaire d'expliquer à notre population ces changements.
Hier, lors de nos auditions, plusieurs collectifs ont dénoncé la recrudescence de la présence d'acteurs privés, notamment de Suez et de ses filiales, dans la gestion de l'eau en Guadeloupe. Comment réagissez-vous à ces affirmations ?
Il est vrai que certaines informations circulent, amis pour l'instant, nous n'avons pas observé de réaction particulière.
Je souhaiterais répondre à votre question précédente. Il est évident qu'il s'agit d'un choix d'ordre politique auquel je suis totalement étranger, mais ma position est identique à celle de M. Jean-Louis Francisque, même si les conditions d'exploitation directe sont difficiles.
Nous sommes amenés à suivre un mouvement qui n'est pas naturellement le nôtre. Aussi, nous aurions préféré conserver cette compétence.
Concernant la présence grandissante des acteurs privés, le sujet de la mainmise du secteur privé sur l'eau n'est pas une question pertinente sur Sainte-Rose. En effet, nous recourrons éventuellement à ces sociétés comme prestataires lors de travaux, comme des constructions d'usine. Il s'agit donc de marchés publics attribués tout à fait clairement.
Monsieur Jean-Louis Francisque, vous venez d'affirmer que la création d'une SMO ne constitue pas une solution que vous auriez choisie. Sommes-nous d'accord que le SMO fixera la gouvernance et qu'ensuite, les différents territoires choisiront le mode d'exploitation ? Ainsi, régies et délégations de service public (DSP) pourront perdurer.
Ainsi, si la gouvernance sera unique, sur les différents territoires, une phase de transition sera instaurée afin d'observer et de s'orienter ensuite vers des évolutions d'exploitation.
Est-ce aussi votre interprétation ?
S'agissant du SMO, mon impression, et qui est partagée par d'autres élus, est que nous avançons en chambre fermée. Ainsi, les informations existent peut-être, mais elles ne nous parviennent pas.
Alors qu'avec nos régies nous sommes directement concernés et que nous avons tout à perdre, nous constatons que les informations relatives aux organisations de territoire par exemple ne nous sont pas communiquées.
Il est communément admis que vos régies fonctionnent comparativement mieux que celles du reste de la Guadeloupe. Le confirmez-vous ?
Je confirme que la régie de Trois-Rivières a effectivement fait ses preuves. Elle aurait certes pu être mieux accompagnée financièrement, mais en dépit de cela, une partie du réseau a pu être déjà renouvelée et des opérations sont en cours.
Ces jours-ci, selon les zones, les coupures peuvent être fréquentes, car la sécheresse a généré une diminution importante des réserves.
Actuellement, il avoisine les 54 %.
Il est donc plus élevé que la moyenne de la Guadeloupe qui s'établit plutôt aux alentours de 44 %.
Certes, mais nous le considérons encore trop important. Si nous parvenions à les réduire encore, nous pourrions davantage répondre aux besoins des abonnés.
Sachez que nous avons aussi fait l'acquisition de matériel pour la recherche de fuites. Deux agents ont donc été formés et nous menons une campagne de recherche de fuites, notamment sur certaines zones. Nous espérons ainsi retrouver les fuites invisibles sur des zones ciblées. Cela devrait permettre d'améliorer la situation.
Sur notre réseau, nous décelons régulièrement des fuites. De plus, une partie de notre réseau n'a pas pu être renouvelée.
Ainsi, à certains endroits, nous disposons toujours d'un réseau en amiante-ciment qui en fait un réseau vétuste qui nécessite un renouvellement.
Aussi, lorsque des casses surviennent, leur réparation nécessite davantage de temps et d'énergie.
La réparation des fuites relève-t-elle d'un sujet de moyens financiers ou de détection de leur localisation ?
Une partie de notre réseau est encore en amiante-ciment.
Or, les compétences eau et assainissement dépendent de la communauté d'agglomération. Nous avons donc une convention de gestion et nous avons transmis certains dossiers afin de renouveler ces portions en amiante-ciment. Toutefois, ces opérations n'ont pas été retenues.
Aussi, ns procédons à de la réparation de casses tracées régulièrement et nous souhaiterions remplacer ces portions de réseau qui génèrent de nombreux problèmes.
Vous affirmez donc que la réparation des fuites et des tuyauteries relève de la compétence de la communauté d'agglomération qui n'a pas retenu les travaux proposés. En outre, de notoriété publique, elle ne dispose pas des moyens financiers pour les assumer.
Dans la mesure où nous fonctionnons en régie, nous sommes financièrement autonomes. Cependant, sur de lourdes opérations, la communauté d'agglomération pourrait nous accompagner financièrement.
Il y a un an et demi ou deux ans, le plan d'urgence a été mis en place. Il est destiné à résoudre un certain nombre de problèmes.
Nous avons présenté les travaux et chiffré leurs coûts, mais ces opérations n'ont pas été retenues dans le cadre de ce plan, alors qu'elles auraient pu être financées.
Compte tenu de la jeunesse de ce plan, j'imagine que les diminutions de rendement sur votre réseau lui sont antérieures.
Comment expliquez-vous cette diminution ? Avez-vous eu des difficultés à réaliser les travaux ?
Le problème est toujours financier.
Sur Trois-Rivières, près de 60 % des canalisations étaient en amiante-ciment. Nous en avons tout de même déjà remplacé une bonne partie ; des travaux ont été réalisés en régie, comme sur la zone de l'Hermitage où nous avons remplacé près de deux kilomètres de réseau en amiante-ciment.
Néanmoins, une partie non négligeable reste encore à réaliser. C'est sur cette partie que nous rencontrons le plus de problèmes, car la situation s'est dégradée sur les deux ou trois dernières années.
Quatre ou cinq ans plus tôt, le taux de recouvrement atteignait pratiquement 95 %, mais depuis deux ou trois ans, à la suite des nouvelles lois nous interdisant de procéder à des coupures, il est plutôt entre 86 et 88 %. Notre taux d'impayé est donc passé de 5 à 12 ou 14 %.
Il est de 41,2 %. Il est vrai qu'il est très bas et il est dû aux fuites sur le réseau. Or, chaque année, elles augmentent, non pas faute de réparations, mais parce que le réseau est particulièrement vieux.
En ce qui nous concerne, nous n'avons plus de réseau en amiante-ciment, mais certaines portions sont dans la boue, elles ont plus de 50 ans alors que nous savons pertinemment qu'au-delà de 40 ans, compte tenu de nos sols argileux, les canalisations s'abîment. Nous observons donc des fuites tant sur les canalisations que sur les branchements.
Nous constatons aussi des fuites chez l'habitant, car lorsque le compteur est défectueux, toutes les fuites ne sont pas identifiées par nos services.
Cela explique notre rendement plus faible que la moyenne.
Lorsque vous procédez au remplacement des canalisations, utilisez-vous du polyéthylène haute densité (PEHD) ou du polyéhtylène Excel Plus ?
Nous avons toujours utilisé du PEHD et lorsque nous renouvelons un branchement, nous employons toujours du PEHD.
Les casses que nous observons sur les branchements ne sont pas forcément au niveau de la canalisation. Il peut par exemple s'agir du collier. Les casses sont parfois liées à des pressions importantes lorsque les jonctions ont été réalisées en polychlorure de vinyle (PVC).
Il est vrai que la technologie Excel Plus résiste bien à l'action du chlore, mais nous ne constatons pas de casse montrant une faiblesse du matériau.
Sur Sainte-Rose, la difficulté réside principalement dans l'identification des fuites sur branchement. Si la fuite est visible, nous pouvons intervenir, mais si elle intervient sur un sol perméable, sa détection est plus délicate.
Le directeur de la Régie eau nord Caraïbes (RENOC) affirmait qu'en fonction de la température de l'eau, de sa pression et du taux de chlore, il avait été observé que le PEHD vieillissait déjà au bout de cinq ans, contrairement à l'Excel Plus.
Avez-vous fait les mêmes observations ?
Nous n'avons jamais utilisé l'Excel Plus, à l'exception d'une prestation de la Générale des Eaux sur quelques branchements.
À ce jour, je n'ai pas constaté que nos branchements subissaient des casses prématurées.
Sur les branchements, nous utilisons les deux. Toutefois, concernant le PEHD, nous n'utilisons plus le polyéthylène (PE) 16 bars, mais uniquement du PE 20 bars.
Nous avions effectivement constaté quelques difficultés avec le PE 16 bars, mais l'emploi du PE 20 bars a permis de les résoudre.
Notre taux de recouvrement est très bas, il s'établit à 65 %. Il pénalise d'ailleurs énormément le service de la régie des eaux.
Nous sommes confrontés à une population qui peine parfois à payer leurs factures. La loi n° 2013-312 du 15 avril 2013 visant à préparer la transition vers un système énergétique sobre et portant diverses dispositions sur la tarification de l'eau et sur les éoliennes, dite loi Brottes, nous interdisant de procéder à des coupures a installé une protection au bénéfice de l'abonné, mais en parallèle, nous avons perdu une marge de manœuvre pour la gestion de l'eau et des recouvrements.
Ce taux de rendement doit aussi être confronté à notre politique de recouvrement mise en place. En effet, sur Sainte-Rose, le recouvrement n'est pas assuré par la régie. Lorsqu'une facturation est émise, elle est transmise à un prestataire chargé du recouvrement des factures.
Je souhaite préciser qu'en manière d'eau, la problématique de sécheresse constatée à Trois-Rivières est identique à celle de Sainte-Rose.
C'est vrai qu'en 2020, la sécheresse était terrible, et la gestion de la crise sanitaire, qui nécessitait énormément d'eau, n'a rien arrangé.
Cette année, un déficit hydrique est constaté, notamment sur un captage où la baisse du niveau de l'eau était évidente. Il impacte parfois la distribution en impactant le remplissage du bassin d'eau brute.
Néanmoins, en dépit de cette diminution de la pluviométrie, nous parvenons à distribuer de l'eau à tous les abonnés.
En matière d'assainissement, j'avais avancé le chiffre de 5 millions d'euros concernant le plan de relance de la CANBT pour la réhabilitation des stations d'épuration, la mise en place de postes de refoulement. En fait, c'est 6,5 millions d'euros, car j'ai omis de prendre en compte l'augmentation de la capacité générée par la future station.
Concernant le recouvrement, je souhaite signaler que nous avons fait énormément de progrès en la matière puisque, si le taux évoqué est encore bas, il affiche néanmoins une tendance à remonter.
Ainsi, nous avons déjà atteint 70 %, parfois même 80 %. J'admets que c'est encore notoirement insuffisant par rapport à la gestion d'un service. Toutefois, nous y travaillons. Ainsi, nous avons diversifié les moyens de paiements, et ainsi, permis, en étroite collaboration avec le payeur de réduire la problématique des impayés.
Nous espérons que nos propos contribueront à la réflexion nationale. Nous avons en effet témoigné d'une expérience de terrain, au plus près des populations.
Nous ne reviendrons pas sur le choix fait dans l'intérêt de la Guadeloupe, mais il est important de garder un œil sur ce qui était fait et faire en sorte que les organisations qui découleront de cette nouvelle structure puissent permettre que les communes disposant déjà d'une régie, d'un personnel compétent et de la connaissance de son réseau soient entendues.
S'agissant du prix, je sais que le raisonnement est fait dans le cadre d'un prix unique. Toutefois, laissez la porte ouverte pour que nos deux régies, qui sont des zones de production, puissent garder la possibilité de jouir d'une modulation par rapport au caractère général qui sera retenu.
Je vous remercie pour le temps que vous nous avez accordé. Je vous invite à nous adresser tout document écrit susceptible de compléter vos déclarations.
La réunion se termine à vingt heures cinquante-cinq.