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L'enjeu est important. Après la promesse tenue, celle d'ouvrir l'assistance médicale à la procréation – AMP – aux couples de femmes et aux femmes seules, il convenait de leur permettre d'établir un lien de filiation dès la naissance de l'enfant. Ce dispositif devait garantir la protection de l'enfant mais aussi de chacune des mères, celle qui accouche et celle d'intention, en établissant un lien de filiation qui ne devait pas être fragilisé par la création d'un lien concurrent avec le donneur et qui devait être de même nature à l'égard des deux mères. C'est chose faite avec l'article 4, lequel repose sur tr...
…au point qu'il est possible de s'interroger sur sa conformité à l'article 45 de notre Constitution. Ensuite, malgré toutes les constructions théoriques que vous avez échafaudées pour faire évoluer le projet initial jusqu'au dispositif que vous nous proposez aujourd'hui, vous restez confrontés à un élément indépassable : le fait, intangible, que la filiation est établie à la suite de la rencontre – ou l'absence de rencontre – entre un homme et une femme qui, à un moment donné, ont donné la vie. C'est ce qui fonde les principes du droit de la filiation. Des aménagements sont évidemment possibles. Le droit a évolué au cours de l'histoire, prévoyant des exceptions. Le droit de la filiation en France n'est en effet pas celui instauré par Napoléon, comme...
Cette construction sociale théorique, qui repose sur la seule volonté des parents, constitue une brèche dans le droit de la filiation. Celui-ci sera nécessairement amené, demain, à évoluer pour prendre en considération diverses situations – y compris chez les couples hétérosexuels –, comme les familles multirecomposées, ou la volonté exprimée par trois personnes ou plus d'élever ensemble un enfant. En faisant primer cette volonté et le projet parental – ainsi que vous le dénommez –, vous faites s'effondrer tout l'édifice du dro...
L'article 4 est fondamental car il concerne le droit de la filiation. Or pour établir la filiation d'un enfant né par procréation médicalement assistée (PMA) au sein d'un couple de femmes, il était inutile de bousculer le droit en vigueur : les dispositions nécessaires existent et ont fait la preuve de leur clarté et de leur solidité. Les modifications que vous proposez ne sont donc guidées que par une obsession : effacer toute différence entre la femme qui accouc...
Nous saluons le rétablissement de l'article 4 dans la rédaction adoptée par l'Assemblée nationale en deuxième lecture. Nous l'avons souhaité et demandé en commission spéciale. En deuxième lecture, le Sénat a réaffirmé son souhait de faire de la procédure d'adoption le seul moyen, pour la mère d'intention d'un enfant né du recours à l'AMP par un couple de femmes, d'établir un lien de filiation. Il a refusé l'établissement rétroactif de ce lien grâce à une reconnaissance conjointe anticipée effectuée devant notaire. Il était important de rétablir cette nouvelle procédure d'établissement de la filiation ; c'est désormais chose faite. Cependant, nous regrettons qu'elle demeure distincte de celle proposée aux couples hétérosexuels. Nous défendrons donc des amendements visant à étendre aux...
La commission spéciale a rétabli la rédaction de l'article 4 adoptée par l'Assemblée en deuxième lecture, rejetant ainsi la proposition du Sénat à laquelle notre collègue Annie Genevard vient de faire référence. Cette dernière solution avait pourtant le mérite de la cohérence dans la mesure où elle ne touchait pas aux fondements du droit de la filiation. Elle permettait à la femme qui accouche naturellement d'être reconnue comme mère, en vertu du principe mater semper certa est. Le second membre du couple pouvait établir la filiation par voie d'adoption. Le nouveau système que vous créez suscite quant à lui des contradictions au sein du droit de la filiation au point de le remettre en cause. C'est le premier grief que nous formulons à l'...
...endement, qui n'avait fait l'objet d'aucune étude d'impact ni d'avis du Conseil d'État, a fait évoluer la rédaction du texte, sans parvenir à une formulation équilibrée. Notre collègue Gérard Leseul a affirmé que cette rédaction valait « pour l'instant » et qu'elle répondait au compromis du moment, sous-entendant qu'il faudra revenir, dans les mois ou années futurs, sur l'établissement du mode de filiation, alors que cette dernière est l'un des piliers de notre société. Sur le fond, je reprendrai les arguments de mes collègues Annie Genevard, Patrick Hetzel ou Pascal Brindeau : ce texte supprime la branche paternelle pour des enfants auxquels on interdit à tout jamais d'avoir un père. Cela crée une discrimination pour eux et cela envoie un signal à tous les hommes de la société : le rôle du père e...
...es. Ses dispositions – des arguties juridiques – reviennent en effet à nier l'altérité et la réalité biologique. Vous pouvez froncer les sourcils, madame la rapporteure de la commission spéciale, mais tels sont les faits. Que vous ne le compreniez pas, c'est une chose, mais tâchez au moins de l'entendre. Vous ne détenez pas la vérité et nos propos reflètent la réalité. Vous faussez totalement la filiation pour l'ensemble des familles ; vous ne faites pas qu'ajouter des droits, vous touchez toutes les familles de France. Monsieur le garde des sceaux, nous aimerions bien vous entendre sur ce sujet car tout le monde doit être éclairé de vos intentions.
J'ai déposé cet amendement de suppression de l'article pour deux raisons. J'ai évoqué la première à l'instant : une modification du droit de la filiation n'a pas à figurer dans un projet de loi relatif à la bioéthique ; il aurait fallu un autre véhicule législatif.
J'aimerais d'ailleurs connaître la position du Gouvernement sur ce point : pourquoi avoir intégré dans ce texte une réforme de la filiation ? Seconde raison : pourquoi la solution de l'adoption simple devrait-elle être rejetée au profit d'une reconnaissance de l'enfant par la mère sociale ? Elle n'offre pourtant pas moins de sécurité, pour le couple comme pour l'enfant. Est-il moins valorisant d'adopter que de reconnaître ? Si tel est le cas, il faut l'expliquer à celles et ceux qui cherchent à adopter un enfant, et qui suivent pour...
Madame Blin, ne vous offensez pas d'un mouvement de sourcils ! Il marque peut-être un désaccord, mais il montre surtout que je vous écoute. Vous risquez en tout cas de l'observer à nouveau au cours des prochaines heures. Se concentrer sur les mots et leur sens est peut-être plus important. Les amendements visent à revenir sur le rétablissement, opéré en commission, de la filiation pour les enfants issus de PMA réalisées par des couples hétérosexuels, homosexuels ou par une femme seule. Vous préférez la solution de l'adoption qu'a retenue le Sénat. Nous maintenons que la bonne solution est celle que le Gouvernement avait proposée – elle a connu quelques évolutions depuis mais n'a pas changé de nature –, celle du titre VII du livre Ier du code civil et de la filiation par en...
Vous le savez, la filiation par adoption signifie qu'une première filiation a été rompue, pour une raison ou pour une autre.
Une deuxième filiation s'établit alors pour l'enfant. Une rupture s'est produite au moins avec la mère qui a accouché, madame Genevard.
La filiation au sens du titre VII est fondée sur l'engendrement, qui est le fait générateur ayant fait venir au monde l'enfant.
...ogrès scientifiques permettent aujourd'hui d'engendrer autrement. L'AMP a d'abord bénéficié aux couples hétérosexuels et sera désormais ouverte aux couples homosexuels : elle permet de faire venir au monde des enfants d'une autre façon que sous la couette. Est-ce que cela rend leur naissance moins importante ? Est-ce que cela rend les parents moins responsables ? Pas du tout ! Ils méritent cette filiation, qui peut évidemment être établie, puisqu'il est évident que les parents qui se sont engagés dans une AMP sont la cause de la venue au monde de l'enfant. Quant à votre inquiétude au sujet de l'effacement du père, je vous l'ai dit en commission spéciale : faites attention ! En tenant ces propos, vous portez atteinte aux hommes engagés dans une AMP hétéroparentale. De même qu'il n'y a pas d'efface...
Un couple lesbien peut devenir parent grâce une AMP et obtenir une filiation : voilà le progrès que promeut la majorité et que défendent les groupes politiques qui voteront pour l'adoption de cet article. Nous tenons à cette avancée. Nous sommes en désaccord avec votre affirmation selon laquelle cette filiation reposerait sur une théorie sociale – nous avons entendu comme vous certains discours venant d'une autre partie de l'hémicycle. Cet argument ne tient pas car la pro...
...uons pas sur ce terrain-là, monsieur le garde des sceaux. Ne nous y emmenez pas, car ce n'est pas l'objet de l'article 4. La proposition que nous vous faisons concerne bien un enfant élevé par deux femmes, l'une qui a accouché, l'autre qui a adopté. Nous ne sommes pas là pour faire de la morale ni de la sociologie, nous sommes là pour faire du droit – en l'occurrence, pour réécrire le droit de la filiation. Je me souviens très bien de ce que disait Mme Belloubet en son temps : « On ne peut pas toucher à cela au risque de mettre hors d'elles les associations militantes ». On voit bien là que le Gouvernement est dans leur main, qu'elles ont tenu la plume.
...l'idée sous-jacente à votre position est qu'il ne faut faire aucune différence et surtout que l'enfant doit être celui de deux femmes. Or vous savez que cela n'est pas possible. J'ajoute – puisque l'on fait du droit, allons sur le terrain strictement juridique – qu'en introduisant dans le titre VII du livre Ier du code civil des dispositions utilisant le terme « reconnaissance » pour décrire une filiation invraisemblable – deux femmes ne pouvant, en effet, revendiquer de concert être les mères de l'enfant –, le projet de loi va immanquablement susciter du contentieux. Pourquoi ? Soit l'acte accompli par les femmes sera fragilisé par le recours au droit commun de la reconnaissance, soit les reconnaissances relevant du titre VII en général verront leur fondement de vraisemblance remplacé par un fond...
Ce n'est pas cela le problème ; ce n'est pas cela qui fait qu'une filiation doit être établie par reconnaissance ou par adoption. Le vrai sujet, que vous n'évoquez jamais, c'est que la reconnaissance est fondée, sinon sur la réalité, du moins sur la vraisemblance biologique.
C'est un fondement du droit de la filiation dans le code civil, et vous le savez au moins autant que nous. Pour satisfaire à des exigences militantes, car il s'agit de cela et de rien d'autre, vous sapez ce fondement du droit de la filiation. Dès lors, tout le château de cartes s'écroule.