Commission des affaires européennes

Réunion du jeudi 9 décembre 2021 à 9h05

Résumé de la réunion

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La réunion

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COMMISSION DES AFFAIRES EUROPÉENNES

Jeudi 9 décembre 2021

Présidence de Mme Sabine Thillaye, Présidente de la Commission

La séance est ouverte à 9 heures 05.

I. Échange avec M. Olivér Várhelyi, commissaire européen au voisinage et à l'élargissement, en présence de jeunes originaires des pays des Balkans et du Mouvement européen français et de députés de la commission des affaires européennes du Conseil national autrichien (Nationalrat)

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. Je suis très heureuse de vous accueillir à distance pour un échange dans un format original. Nous accueillons en effet le commissaire européen en charge du voisinage et de l'élargissement, Olivér Várhelyi, des députés de l'Assemblée nationale française et du Conseil national autrichien et des jeunes des pays des Balkans, d'Autriche et du Mouvement européen français pour un dialogue qui s'annonce aussi riche que passionnant. Le commissaire européen devra partir avant la fin de la réunion mais il sera remplacé par M. Thomas Halgeiter, chef d'unité à la direction générale Élargissement que je salue.

Cet échange s'inscrit dans le cadre de la conférence sur l'avenir de l'Europe et fera l'objet d'un compte rendu publié sur la plate-forme de la Conférence.

Nous nous sommes en effet retrouvés une première fois à l'invitation de Reinhold Lopatka, président de la sous-commission des affaires européennes du Conseil national autrichien, à Vienne les 28 et 29 octobre pour un premier échange avec un groupe de jeunes des pays des Balkans. Nous étions alors convenus d'organiser une seconde session par visioconférence depuis Paris.

De nos premiers débats sont en effet ressortis un certain nombre de constats que je voudrais partager avec vous pour lancer la discussion.

Les six pays des Balkans se retrouvent dans une situation difficile sur le plan économique. Représentant 18 millions d'habitants, soit 3,5 % de la population de l'Union, ils souffrent d'un retard de développement accru par un défaut de diversification de leurs économies trop dépendantes du tourisme. Les taux de chômage sont élevés à cause des systèmes d'éducation défaillants. Les personnes hautement qualifiées ont tendance à quitter leurs pays d'origine. Environ 20 % des jeunes auraient ainsi émigré ces dernières années, principalement vers l'Europe occidentale. Selon un sondage réalisé par le bureau de coopération régionale sur la jeunesse (RYCO), 55 % des jeunes souhaitent quitter la région ! Seuls 20 % des jeunes se considèrent comme impliqués dans leur société : plus de 55 % sont désireux de s'impliquer mais se découragent en raison du manque d'opportunité.

Les jeunes des Balkans nous ont dit qu'il fallait réorganiser les systèmes d'enseignement pour leur permettre d'étudier et de travailler en même temps. La corruption et le non-respect des règles de l'état de droit ont été soulignés à plusieurs reprises. Pour avoir des emplois, certains jeunes disent qu'ils doivent être affiliés au parti au pouvoir. Ils revendiquent l'égalité des chances. Les conditions d'octroi des visas ont été jugées trop strictes. Il convient toutefois de rappeler que les ressortissants des Balkans bénéficient d'une exemption de visas pour les courts séjours de moins de 90 jours et que certains États membres, comme les Pays-Bas, souhaiteraient remettre en cause cette exemption. Certains jeunes ont exprimé également le souhait de pouvoir avoir accès aux marchés du travail des États membres et à bénéficier d'une possibilité d'emploi en lien avec une autorisation de séjour. Une revendication récurrente est celle d'un élargissement des possibilités de reconnaissance des diplômes.

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Reinhold Lopatka, Président

Je me retrouve à Skopje car j'ai participé à un projet TAIEX, soutenu par la Commission européenne. Je me suis entretenu également avec le ministre des affaires étrangères de la Macédoine du Nord qui a souligné l'importance du déclenchement immédiat des processus de négociations entre son pays et l'Union européenne.

La possibilité de mener ce dialogue avec les pays des Balkans occidentaux est très important pour nous car nous sommes à la croisée des chemins. Il s'agit d'un moment décisif pour donner à ces pays une perspective européenne crédible. Nous sommes conscients que l'adhésion des pays des Balkans occidentaux à l'Union européenne ne se fera pas à court terme mais il faut néanmoins leur offrir une perspective crédible. Ceci permettra de motiver les jeunes de ces pays à rester dans leurs pays d'origine et à contribuer à leur développement.

Selon les sondages réalisés par le groupe de réflexion sur les Balkans occidentaux, les jeunes de 19 à 26 ans de ces pays sont plus critiques que d'autres tranches d'âge, ce qui me fait penser qu'ils ont perdu l'espoir en une adhésion de leur pays à l'Union européenne. Dans le cadre de la Conférence pour l'avenir de l'Europe, nous avons l'obligation de dialoguer avec les jeunes des pays de Balkans.

En conclusion, je veux souligner l'importance d'établir des étapes concrètes dans ces processus d'adhésion. Le ministre des affaires étrangères de Macédoine du Nord a affirmé que son pays a attendu quinze ans pour résoudre le différend avec la Grèce. Il ne souhaite pas attendre encore quinze ans pour résoudre l'autre différend avec la Bulgarie.

Les questions de l'état de droit et de la lutte contre la corruption sont fondamentales pour les pays des Balkans occidentaux mais aussi pour les Etats membres de l'Union européenne. À mon avis, il n'existe pas d'autre alternative que la coopération au sein de l'Union européenne.

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Olivér Varhély, commissaire européen à la politique de voisinage et à l'élargissement

L'un des grands objectifs de la politique européenne de voisinage et élargissement est d'aider la jeunesse. Nous avons le devoir de mettre en place des politiques publiques innovantes et de forger un avenir avec les pays des Balkans occidentaux.

La Commission européenne a proposé que l'année prochaine soit l'année de la jeunesse. Il s'agit de toute la jeunesse du continent européen et non seulement de la jeunesse de l'Union européenne. La Conférence sur l'avenir de l'Europe doit être accessible également aux jeunes des Balkans occidentaux.

Lors du sommet de Brdo, nous avons mis en place une stratégie avec les Balkans occidentaux, « l'Agenda sur la recherche, l'innovation, l'éducation, la culture, la jeunesse et les sports pour les Balkans occidentaux ». L'objectif étant de créer des nouvelles opportunités pour la jeunesse et d'éviter la fuite des cerveaux. Les jeunes représentent 21 % de la population des Balkans occidentaux, d'où la nécessite pour leurs gouvernements de créer des emplois et de la croissance économique. En ce sens, offrir des opportunités pour les jeunes est une des priorités de l'Union européenne, qui travaille à créer un environnement permettant aux jeunes des Balkans occidentaux d'envisager leur avenir dans la région.

Ainsi, l'an dernier, a été créé le réseau des jeunes ambassadeurs dans les Balkans occidentaux. Venant de tous les horizons, il s'agit de puiser dans les talents et le potentiel de jeunes issus des Balkans occidentaux. Sélectionnés chaque année par voie de concours, leur rôle est de faire connaître les valeurs européennes à leurs concitoyens.

Il s'agit également de se concentrer sur la reprise économique à long terme à la suite de la pandémie de Covid-19, grâce à la convergence économique avec l'Union. L'an dernier, a été publié le plan économique et d'investissements pour les Balkans occidentaux, qui vise à mobiliser 30 milliards d'euros de financements aussi bien d'institutions publiques que du secteur privé. Ce plan a été conçu avec les partenaires des Balkans occidentaux, en vue de créer un véritable intérêt pour leurs citoyens.

Comprenant dix grandes initiatives, ce plan offre une garantie « jeunes », c'est-à-dire une politique ambitieuse censée veiller à ce que tous les jeunes bénéficient d'un bon enseignement supérieur et aient de bonnes opportunités d'emplois. Puisque l'économie des Balkans occidentaux à besoin de talents, il sera désormais possible grâce à cette initiative d'obtenir des emplois de qualité et bien rémunérés. Des possibilités d'apprentissages et de stages sont aussi prévues, afin de mobiliser les jeunes inactifs des Balkans occidentaux. Ces nouveaux emplois et investissements dans la région ont toujours comme objectif d'augmenter les opportunités pour les jeunes des Balkans occidentaux.

Ainsi, dans les six mois à venir, les autorités nationales des Balkans occidentaux vont préparer des plans de mise en œuvre et les jeunes sont invités à y participer activement. Il s'agit désormais d'entendre la voix et les idées des jeunes pour rendre l'Union européenne plus inclusive.

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Kostian Jano (

Albanie) . En Albanie, il y a une expression importante : l'Europe est là, nous sommes l'Europe. Toutefois, si le rêve de l'intégration européenne est bien là, les préoccupations quant à l'avenir de l'Albanie demeurent. En effet, le processus d'adhésion à l'Union est lent, d'où la question de savoir comment maintenir vivant ce rêve d'intégration européenne. Si l'Union européenne est avec l'Albanie, sur le plan économique mais aussi sur le plan politique, il s'agirait alors tout simplement d'ouvrir les négociations avec l'Albanie et la Macédoine du Nord.

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Adrijana Nikitović (

Serbie) . Une des difficultés principales auxquelles sont confrontées les jeunes, en Serbie notamment, est un taux de chômage extrêmement important. C'est une des raisons pour lesquelles les jeunes quittent la Serbie, entraînant une véritable « fuite des cerveaux ». Malgré les diplômes universitaires, il est difficile de trouver un emploi car le système universitaire ne prépare pas au marché du travail. Or, peu de jeunes connaissent les opportunités offertes par l'Union européenne, d'où la nécessité de communiquer davantage sur ce sujet.

De plus, l'Union européenne doit poursuivre ses investissements dans le programme Erasmus, qui soutient la mobilité et renforce la coopération régionale. Les jeunes des Balkans occidentaux partagent beaucoup de choses et sont prêts à travailler ensemble pour devenir des États membres de l'Union. Néanmoins, ils ont l'impression que le processus d'adhésion est éloigné d'eux, en ce qu'il se déroulerait uniquement dans les cercles politiques.

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Srgjan Vidoeski (

Macédoine du Nord) . Les opportunités académiques font défaut. Même si les pays des Balkans occidentaux ne font pas partie de l'Union européenne, les jeunes peuvent partir étudier dans les États membres de l'Union, ce qui renforce cette « fuite des cerveaux ».

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Egzona Bokshi (

Kosovo) . L'une des questions que je souhaite vous poser concerne les visas nécessaires aux habitants du Kosovo pour voyager dans l'Union européenne et la position de la Commission européenne à ce sujet.

La situation actuelle n'est pas juste car le Kosovo remplit les critères déterminés par l'Union européenne et pourtant la libéralisation des visas n'a toujours pas été mise en œuvre. Or près de 75% de la population du Kosovo sont des jeunes de moins de 30 ans et cette situation entraîne une perte d'espoir vis-à-vis des promesses de l'Union européenne à l'égard des jeunes des Balkans occidentaux. Où en est le processus de libéralisation des visas et pourriez-vous indiquer quand les jeunes du Kosovo pourront enfin voyager sans visa dans l'espace Schengen ?

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Edon Govori (

Kosovo) . Le Kosovo est le seul pays du Sud-Est de l'Europe qui ne bénéficie pas de la libéralisation des visas. Les citoyens du Kosovo ne jouissent donc pas des mêmes droits. Même si le Kosovo a rempli tous les critères établis par l'Union européenne, les citoyens du Kosovo doivent toujours fournir de nombreux documents pour obtenir un visa.

Ainsi, quand sera mise en œuvre la libéralisation des visas ? Existe-t-il un plan pour convaincre les pays qui sont réticents à cette libéralisation ? En effet, la Commission européenne a déjà recommandé la libéralisation des visas et le Parlement européen a adopté plusieurs résolutions en ce sens.

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Endrit Sadriu (

Kosovo) . La seule alternative pour le Kosovo est l'Union européenne. Cependant, nous constatons que la libéralisation des visas pose non pas des problèmes techniques mais des problèmes politiques. Il devient compliqué d'imaginer un avenir européen pour nous dans ces conditions. Malgré tous les efforts du Kosovo pour mettre en œuvre les valeurs de l'Union européenne, la plupart des citoyens du Kosovo ne savent pas à quoi ressemble l'Union européenne. Les citoyens du Kosovo ont le sentiment de ne pas être traités justement par l'Union européenne. Pouvons-nous continuer à considérer l'Union européenne comme un partenaire fiable du Kosovo ? La politique d'élargissement de l'Union européenne à l'égard des Balkans occidentaux est-elle durable ?

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. Je souhaitais revenir sur la question de la migration de la jeunesse des Balkans occidentaux vers les pays de l'Union européenne. Selon un rapport publié par l'ONU en 2021, 52 % des jeunes des Balkans occidentaux ont déclaré qu'ils envisageaient de vivre hors des Balkans dans la prochaine décennie. Cette migration de la jeunesse est motivée par l'attractivité des salaires mais également par des déficits dans les domaines de la santé, de l'éducation, de l'absence de méritocratie et la persistance de la corruption.

Il est donc indispensable que les Etats des Balkans occidentaux progressent concernant les réformes de l'administration publique et dans la lutte contre la corruption. Il est également important de développer la coopération entre les Etats de Balkans occidentaux eux-mêmes pour offrir à cette jeunesse des opportunités d'emplois dans la région.

Au-delà de la coopération économique avec l'Union européenne, il est essentiel de rapprocher la jeunesse des Balkans occidentaux de la jeunesse de l'Union européenne afin de leur permettre d'imaginer un avenir européen commun. Ce rapprochement pourrait se faire par le biais du service civique européen, qui est actuellement expérimenté dans plusieurs pays de l'Union européenne. Ce programme pourrait être étendu aux jeunes des Balkans occidentaux via l'instrument du Corps européen de solidarité.

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Stefan Schennach, député de la sous-commission des Affaires européennes du Conseil national autrichien

. Dans ma vie politique, je me suis toujours engagé pour l'intégration des Balkans occidentaux et pour la libéralisation des visas. Il est absurde que les jeunes des Balkans ne puissent pas voyager en Europe alors même que leurs grands-parents le pouvaient. Nous devons donc revenir à cette libéralisation des visas et je pense que cette étape est extrêmement importante pour ces pays.

La perspective d'adhésion est centrale et elle est particulièrement importante pour la jeunesse. La Macédoine du Nord doit également avoir une perspective d'adhésion à l'Union européenne et nous devons ouvrir officiellement les négociations avec le pays. Concernant la Bosnie-Herzégovine, les accords de Dayton ne suffisent pas. Une Constitution solide et démocratique est nécessaire.

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Helmut Brandstätter, député de la sous-commission des Affaires européennes du Conseil national autrichien

. J'aimerais m'adresser aux jeunes des Balkans. Vous avez dit que vous vous sentiez proche de l'Europe, mais que vous n'y étiez pas vraiment. Lorsque j'étais jeune et que l'Autriche ne faisait pas encore partie de l'Union européenne, j'ai effectué un stage à Bruxelles. Lors de ce stage, j'ai ressenti pour la première fois le sentiment d'appartenance à l'Europe. Nous voulions construire ensemble l'avenir de notre continent. Je comprends alors à quel point il nous est important de vous aider à construire votre avenir.

Il faut envoyer une délégation européenne dans les Balkans pour travailler sur une sorte de plan en plusieurs points. L'Europe doit jouer un rôle plus important à l'international. La Chine et la Russie communiquent de manière importante sur leur récit national tandis que nous ne communiquons pas assez sur le nôtre. Il faut que les pays des Balkans occidentaux soient à la pointe sur la formation professionnelle et l'éducation. Les jeunes doivent pouvoir être en mesure de répondre aux attentes du marché du travail. Ils doivent également s'investir dans leur propre pays, participer à sa construction économique, notamment grâce aux start‑up.

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Meri Disoski, députée de la sous-commission des Affaires européennes du Conseil national autrichien

. Étant moi-même originaire de Macédoine du Nord, je connais bien les enjeux liés à cette région. De nombreuses réformes structurelles sont nécessaires dans les domaines de l'État de droit, la corruption, l'égalité salariale entre autres.

J'aimerais aborder également le sujet des droits des femmes et des minorités car l'Union européenne peut aider l'ensemble de la région des Balkans et les accompagner dans leur processus d'adhésion.

Nous devons également traiter les questions de contentieux entre certains Etats comme la Bulgarie et la Macédoine du Nord. Cependant, nous ne pouvons pas attendre de régler tous ces problèmes avant d'entamer des pourparlers.

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Olivér Varhelyi, commissaire européen

Sur l'entretien de l'espoir d'une éventuelle adhésion, nous devons envisager l'intégration des pays des Balkans occidentaux dans certaines prises de décision. Ce n'est pas seulement dans l'intérêt des jeunes des Balkans, mais c'est un intérêt partagé au sein de l'Union européenne. Mon travail porte en ce moment sur cela, même si je rencontre de nombreux obstacles. L'année dernière, je pensais avoir trouvé une solution mais le processus est actuellement à l'arrêt. Nous devons avancer rapidement car le temps presse.

Concernant l'implication des Balkans occidentaux dans l'agenda de l'Union européenne, je considère qu'il s'agit d'une des priorités de notre réflexion. Durant la crise sanitaire, nous avons très rapidement pu apporter un soutien aux Etats de la région. Nous avons mobilisé 3,3 milliards d'euros et apporté une aide micro-financière aux petites entreprises et macro-financière aux budgets des États en difficulté.

L'Union européenne travaille sérieusement sur la question de l'adhésion des pays des Balkans occidentaux. L'Union européenne s'efforce d'apporter son soutien sur les questions prioritaires : la crise sanitaire, l'emploi et la formation, la transition écologique et numérique favoriser la production d'emploi à l'échelle locale à travers une culture des PME ainsi que favoriser l'innovation et attirer les meilleurs talents.

Les Etats des Balkans ont besoin de plus de croissance et d'inclusivité dans leurs sociétés. Plus de 4 millions de personnes ont quitté les Balkans sur une population de 18 millions. Si cela continue, les économies de ces pays présenteront des carences importantes. Sans une économie efficace, des pratiques saines en matière d'État de droit, de justice, de liberté des médias, le processus d'adhésion n'aboutira pas. La région des Balkans doit devenir attractive aux yeux des investisseurs étrangers pour favoriser la création d'emplois.

Concernant l'engagement de la diaspora, je considère qu'elle peut faire un travail de communication parce que la culture, l'histoire ainsi que les mœurs de ces pays sont souvent méconnues dans l'Union européenne. connaître ces pays, c'est reconnaître la nécessité qu'ils adhèrent à l'Union européenne. Cela permettra de comprendre les liens forts qui nous unissent ainsi que l'interdépendance existante. La fuite des cerveaux est une preuve de la contribution importante apportée par les jeunes des Balkans occidentaux aux sociétés et aux économies d'Europe occidentale. La diaspora peut nous aider à expliquer pourquoi l'intégration des Balkans occidentaux est absolument indispensable pour l'Europe.

Même si la Commission pense que le Kosovo a rempli tous les critères pour la mise en place de l'exemption des visas à l'entrée de l'Union européenne, la décision revient aux États membres, qui n'en sont pas encore tous convaincus.

Pour répondre à Endrit Sadriu, l'Europe reste à mon sens un partenaire commercial fiable pour le Kosovo. Elle est le plus grand investisseur et le bailleur de fond principal du pays. De plus, nous appuyons le processus de réforme afin de lutter contre la corruption, contre la criminalité organisée et le terrorisme, ainsi que pour réformer le système judiciaire. La politique d'élargissement ne sera crédible et durable qu'à partir du moment où nous prendrons en Europe toutes les mesures qui permettront l'adhésion des Balkans Occidentaux ainsi qu'une véritable intégration sur le terrain.

L'emploi est une priorité du plan d'investissement européen dans la région car il s'agit d'un enjeu important pour les jeunes des Balkans. Notre objectif est d'inverser le problème de la fuite des cerveaux dans les Balkans. Si nous arrivons à augmenter les salaires dans la région à hauteur de 60 à 65 % des salaires européens, les jeunes d'origine des Balkans pourraient envisager de retourner dans leurs pays. Pour y parvenir, il nous faut donc une véritable coopération avec nos partenaires à un horizon de dix ans. L'extension du corps de solidarité aux pays des Balkans occidentaux est souhaitable afin de permettre une meilleure connexion de la région avec l'Union européenne. La mise en place d'une approche régionale dans les Balkans occidentaux, où les quatre libertés fondamentales sont appliquées, leur permettrait de récolter les bénéfices de l'application des règles de l'Union européenne avant leur adhésion stimulant ainsi la croissance de leur PIB d'au moins un tiers.

Pour répondre à M. Schennach, renégocier les accords de Dayton ne me semble pas être une bonne solution, bien qu'il faille aider la Bosnie Herzégovine à rénover ses institutions. Nous travaillons en revanche sur un paquet de solutions que nous présenterons d'ici la fin de l'année.

Comme l'a affirmé M. Brandstätter, la région a besoin d'un tissu de PME plus concurrentiel, axé sur la recherche et l'innovation. Il faut développer le système d'éducation afin d'avoir une main-d'œuvre qualifiée. Nous avons des programmes de financement novateurs afin de mettre en place plus de start-ups.

La Commission européenne a donné la priorité aux actions concrètes et ensuite à la communication. Pour cette raison, nous nous sommes concentrés sur les blocages et les goulets d'étranglement : infrastructures de transports, internet, et énergies renouvelables. L'intégration régionale et européenne dépend de la connexion des capitales entre elles par le rail et les autoroutes. Nous devons également développer des connexions internet haut débit entre les capitales, et enfin les aider à sortir du charbon, le plus vite possible, et à investir dans les énergies renouvelables. Il faut donc se penser sur les questions tangibles qui changent le quotidien des gens.

Nous obtiendrons des résultats au cours des cinq prochaines années. Mais c'est seulement par la voix des jeunes que nous pourrons savoir si ces investissements sont effectifs et apportent des résultats.

Pour conclure, nous ne devons pas attendre que le conflit entre la Bulgarie et la Macédoine du nord se règle de lui-même, avant de faire des efforts pour la jeunesse. Nous n'avons pas de temps à perdre, car ces débats ne bénéficient pas à l'Europe, ni aux Balkans occidentaux.

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Benjamin Sbille (

Collectif Service Civique européen). Je suis le fondateur du collectif pour le service civique européen dont l'objectif est de donner l'opportunité à tous les jeunes européens de réaliser un service civique comme il existe actuellement dans certains États membres (France, Italie, Allemagne, Luxembourg et Autriche). Nous avons présenté ce projet et nous avons réussi à avoir cent bénévoles dans ce programme. Ils font fonctionner ensemble les services civiques nationaux ayant lieu dans les pays mentionnés et le corps européen de solidarité pour permettre à de nombreux jeunes européens d'effectuer une mobilité dans d'autres pays. Cela permet à des jeunes de faire un service civique des douze mois dans deux pays différents.

Le renforcement du corps européen de solidarité est une mesure nécessaire. Ce projet dans les Balkans occidentaux permettrait de découvrir l'Europe et de construire la solidarité entre les peuples européens à travers la jeunesse.

Malheureusement, ce corps européen de solidarité n'a pas été renforcé comme le fut Erasmus et nous souhaiterions qu'il soit multiplié par deux. Une collaboration entre les services civiques nationaux permettrait de renforcer ce projet. Cela peut être réalisé facilement car ce sont des outils qui sont financés à l'échelle nationale. À cet égard, nous nous félicitons de la signature du traité entre la France et l'Italie qui permettra des échanges de bénévoles entre les deux pays dans le cadre de services civiques en commun. Cela existe déjà dans le cadre de l'OFAJ entre la France et l'Allemagne.

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Boris Jaros (

Collectif Service Civique européen). En Estonie, nous coopérons avec le ministère de l'éducation pour mettre en œuvre nos projets. Nous sommes également en discussion avec les associations en Grèce pour faire aboutir le projet en 2022. L'Autriche est un pays tout à fait décisif qui possède déjà un système de service civique national fonctionnel et nous aimerions une coopération entre la France et l'Autriche, basée sur le modèle de l'accord entre la France et l'Italie.

Sur les Balkans, nous pensons qu'il y a une opportunité pour renforcer la coopération, pour l'étendre, avec les différents projets déjà mis en œuvre. En Autriche, nous voyons une opportunité d'avoir davantage de mobilité européenne avec les grands pays qui ont également des services civiques. Dans les Balkans occidentaux, nous avons l'occasion d'intégrer davantage de jeunes pour effectuer des services civiques.

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Dusan Banovic

(Serbie). La jeunesse attend beaucoup de l'Europe et de Bruxelles. Il existe de nombreuses organisations en Serbie qui sont engagées auprès de la jeunesse. Malheureusement, nous n'avons pas de réseau de jeunes à l'échelle nationale. L'énergie des jeunes est présente, il est donc fondamental de soutenir le collectif pour le service civique européen et de créer des projets qui permettront de faire émerger de tels services civiques dans les pays des Balkans occidentaux.

Des pays comme la France, l'Allemagne et l'Italie ont connu les bénéfices d'un système de service civique. Un même système profiterait aux jeunes dans les Balkans occidentaux. Cela nous permettrait d'unir la jeunesse de cette région, de rencontrer les jeunes des autres pays de l'Union Européenne. Seriez-vous prêts à soutenir ce projet comme Mme Tanguy l'a proposé ?

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Larissa Lojic (

Autriche). Je fais partie du Conseil National des Jeunes en Autriche. Certains participants ont mentionné la diaspora des jeunes des Balkans occidentaux, j'en fais partie, je viens de Bosnie mais j'ai grandi en Autriche. Je suis très critique à l'égard de mon pays natal. Nous avons des problèmes dans des nombreux domaines dont le fonctionnement démocratique et le bon fonctionnement des institutions. À cause de ces problèmes, mes parents ont quitté la Bosnie pour s'installer en Autriche.

La mise en place d'un service civique européen et d'un corps européen de solidarité pour les jeunes des Balkans occidentaux est pertinente car il s'agirait de faire un pas en direction des Balkans occidentaux mais ce n'est pas suffisant. Nous ne pouvons pas avoir de start-up dans nos pays si la démocratie est dysfonctionnelle.

Je voulais également mentionner qu'en tant qu'Union, nous devons considérer les citoyens des Balkans comme des partenaires, les accueillir dans nos pays afin qu'ils puissent y étudier. Nous ne voulons pas qu'ils viennent en Europe occidentale seulement pour étudier, nous voulons aussi qu'ils y restent. Pour se faire, il faut qu'ils aient des opportunités d'emplois et qu'ils puissent apporter des compétences à la région. De nombreux jeunes sont intéressés et compétents mais n'ont pas l'opportunité de quitter leurs pays car ils veulent aussi y rester.

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Marie Leveugle (

Office franco-allemande de la Jeunesse). J'ai eu la chance grâce à l'OFAJ de faire une formation à la médiation interculturelle entre la France, l'Allemagne et la Serbie. Je trouve que c'est un très bon moyen de découvrir une autre culture, de s'ouvrir à autre chose.

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Je me réjouis de l'idée d'un service civique européen étendu à la jeunesse des Balkans occidentaux qui semble être une bonne idée et un bon vecteur pour rapprocher la jeunesse de l'Europe occidentale de celle des Balkans occidentaux. Il est important que nos jeunes se rencontrent et apprennent les uns des autres, apprennent à connaître la culture des pays voisins. Je pense que c'est de cette manière-là que des liens se créeront et des initiatives communes pour créer des start-up dans les secteurs d'avenir à savoir dans le numérique, l'environnement… De cette manière-là, nous arriverons peut-être à créer une dynamique positive pour l'emploi. C'est ce que les jeunes recherchent, autant ceux des pays des Balkans occidentaux que ceux de l'Union européenne.

Je pense que le service civique européen est un bon instrument et j'espère que le Commissaire sera attentif à favoriser cet instrument du corps européen de solidarité et à en augmenter la capacité pour être mis en œuvre dans les pays des Balkans occidentaux. La coopération entre la France et l'Autriche pourrait se poursuivre dans ce domaine-là.

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Kostian Jano

Je souhaiterais souligner deux aspects. S'agissant du chômage, un des grands problèmes dans les pays des Balkans occidentaux est l'accès à l'université, l'absence de travaux scientifiques ainsi que les contenus pédagogiques de l'université. Il faudrait établir davantage de partenariats entre les universités des Balkans occidentaux. Les étudiants de ces pays bénéficieraient énormément de la mobilité académique régionale. Il faut rendre plus accessibles également les programmes Erasmus.

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Egzona Bokshi

J'ai constaté que les jeunes de l'Union européenne sont assez sceptiques concernant l'élargissement de l'Union européenne vers les Balkans occidentaux. Nous devons travailler sur cet aspect également. D'autre part, la mobilité régionale est assez difficile ce qui affecte négativement la coopération entre les pays des Balkans occidentaux.

En ce qui concerne la fuite des cerveaux, il faut réfléchir à comment rendre les pays des Balkans occidentaux attractifs pour inciter les jeunes à y retourner.

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Srgjan Vidoeski

Les jeunes de l'Union européenne devraient mieux connaître les pays des Balkans occidentaux car ils ont tendance à nous percevoir comme étant moins européens mais cela pourrait changer grâce à une connaissance plus approfondie.

En tant que ressortissant de la Macédoine du Nord, je considère que l'Union européenne devrait être plus crédible par rapport à notre perspective européenne. Depuis longtemps nous rencontrons des nombreux obstacles ce qui renforce l'euroscepticisme. Il s'agit d'une responsabilité partagée, nous devons faire plus pour remplir les critères d'adhésion mais vous devez faire plus également pour nous offrir une perspective crédible.

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Reinhold Lopatka, Président

La population autrichienne est assez sceptique quant à l'élargissement de l'Union européenne. Nous, en tant que responsables politiques, devons communiquer et informer mieux nos citoyens. Nous devons expliquer quel serait le coût pour l'Union européenne de la non-adhésion des pays des Balkans occidentaux en termes de sécurité. Ce n'est pas une tâche facile mais nous devons faire plus d'efforts car nous avons une population importante provenant des pays des Balkans occidentaux, nous avons également des nombreux parlementaires avec des origines des Balkans occidentaux.

Historiquement et géographiquement, nous sommes plus proches de cette région que d'autres Etats membres. Nous devons agir concrètement comme Mme Tanguy et moi-même le faisons en Macédoine du Nord en coopérant étroitement avec les parlementaires. Il est vrai que les relations de l'Autriche avec ces pays sont différentes de celles que la France peut entretenir avec ceux-ci mais nous devons faire plus pour rendre le processus plus dynamique.

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Thomas Hagleitner, chef unité de la direction générale de l'élargissement

L'élargissement de l'Union européenne n'est pas seulement une politique menée par la Commission. En effet, l'Union européenne bénéficie, en tant que telle, de l'enthousiasme montré lors de telles réunions, en particulier constaté chez les jeunes des Balkans occidentaux. De nombreuses interventions ont porté sur ce que la jeunesse pouvait faire en faveur du processus d'adhésion des Balkans occidentaux à l'Union. Or, si la population des Balkans occidentaux est largement pro-européenne, et tout particulièrement les jeunes, l'absence d'élites politiques est un problème. Élément clé de l'élargissement, il faut des dirigeants sur le terrain pour mettre en place et faire avancer les réformes nécessaires aux Balkans occidentaux pour intégrer l'Union européenne.

Sur la « fuite des cerveaux », au sein même des Balkans occidentaux, il y a une forte demande de la part des étudiants et des jeunes actifs de circuler sans frontière. L'Union encourage les Balkans occidentaux à mettre en œuvre un marché commun régional, qui implique cette liberté de circulation des personnes.

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Les propos sur le rôle de la diaspora sont d'une grande importance. En effet, nous ne nous connaissons déjà pas suffisamment entre États membres de l'Union européenne. Ainsi, rien ne remplace les échanges directs, qu'il faut multiplier aussi bien au sein de la société civile qu'entre parlementaires et gouvernements nationaux. Ces échanges doivent permettre de créer une meilleure compréhension.

Par ailleurs, il s'agit d'encourager la coopération entre les Balkans occidentaux. Le sujet de la libre circulation joue un rôle important, en ce qu'elle permet aux jeunes de se rencontrer plus facilement. Je vous remercie.

La séance est levée à 11 heures 05.

Membres présents ou excusés

Présents. - M. Jean-Pierre Pont, M. Didier Quentin, Mme Liliana Tanguy, Mme Sabine Thillaye

Excusés. - Mme Frédérique Dumas, M. Thierry Michels