Commission des affaires économiques

Réunion du mardi 2 février 2021 à 17h30

Résumé de la réunion

Les mots clés de cette réunion

  • brexit
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  • royaume-uni

La réunion

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La commission des affaires économiques a auditionné, conjointement avec la commission des affaires européennes et la commission des finances, de l'économie générale et du contrôle budgétaire, M. Michel Barnier, conseiller spécial de la Présidente de la Commission européenne.

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Nous auditionnons aujourd'hui M. Michel Barnier, qui a été le chef de la task force chargée de la finalisation des négociations liées à la sortie du Royaume-Uni de l'Union européenne (UE), et aux relations futures entre les deux parties. Cette audition est conduite conjointement avec la commission des finances et la commission des affaires européennes.

Nous avions déjà eu le plaisir d'accueillir M. Barnier, avec la commission des affaires étrangères, en 2017, peu après le lancement des négociations formelles concernant le retrait britannique.

Monsieur Barnier, au nom de tous les parlementaires présents, je tenais à vous remercier pour vos efforts sans relâche durant cette longue négociation. Ils ont abouti à la mise en place d'un accord au 1er janvier. L'unité européenne aura été exemplaire jusqu'au bout de cette période, notamment grâce à vous, malgré des sujets particulièrement compliqués, comme ceux de la frontière irlandaise ou de la pêche.

L'audition de ce jour satisfait à la volonté de la Conférence des présidents du mardi 12 janvier dernier, qui a décidé « l'organisation par les commissions, dans les prochaines semaines, et dans leurs domaines de compétences respectives, d'auditions sur le Brexit, afin que des comptes rendus de ces auditions puissent donner lieu à une publication commune, qui sera mise en ligne sur le site de l'Assemblée nationale. De plus, lors de la séance des questions au Gouvernement du mardi 16 février 2021, les neuf premières questions seront consacrées à l'Europe. Et un débat consacré à l'Europe aura lieu lors de la semaine de contrôle, début mars » .

Cette audition répond aussi à notre souhait, plus ancien encore, de faire un point sur le Brexit, les négociations achevées et restant à conduire, ainsi que les relations futures. Nous entendrons demain Mme Annick Girardin, ministre de la mer, sur ses conséquences pour le secteur de la pêche.

Enfin, cette réunion fait exception à notre règle de visioconférence intégrale. Nous profitons de la présence de M. Barnier à Paris pour le recevoir. Je veillerai néanmoins à la stricte application des précautions sanitaires. Les groupes ont été prévenus de ces contraintes. Leurs orateurs se verront, si nécessaire, donner la priorité en termes de présence physique.

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La négociation du Brexit, conduite par M. Barnier, s'est heureusement conclue juste avant Noël par un accord. Je salue votre ténacité extraordinaire. L'équation était complexe. Il convenait de respecter le vote des Britanniques, tout en transformant cette triste nouvelle pour l'Europe en une occasion de rebondir pour ses autres membres. Cette fin de négociation prépare une relation stable entre le Royaume-Uni, la France, l'Union européenne et ses autres États membres. Tout se joue maintenant. L'Union européenne se trouve à la « croisée des chemins ».

Dans l'immédiat, le Brexit suscite des frictions aux frontières. Il complique les transports et rallonge les délais d'acheminement. Nous espérons que les formalités douanières s'optimiseront, et qu'elles ne seront pas trop coûteuses pour nos entreprises importatrices ou exportatrices avec le Royaume-Uni.

L'enjeu aujourd'hui consiste à établir une coopération durable entre l'Europe et la Grande-Bretagne. Elles se séparent, mais restent liées. Nos longues années de vie commune ne s'effacent pas si facilement. Les conditions de la concurrence et la réciprocité devront toutefois être au centre de notre nouvelle relation. En effet, les risques de dumping social ou environnemental sont majeurs. La composition de l'organe arbitral, qui trancherait sur l'éventuel rétablissement de quotas ou de droits de douane en cas de non-respect des standards sociaux ou environnementaux européens, devra être clarifiée. L'histoire révélera si cet accord fera germer à long terme une relation solide ou une rivalité.

Au plan du marché financier, plusieurs questions se posent. L'Union européenne a accordé des équivalences pour certaines opérations, par exemple en ce qui concerne les chambres de compensation. Tel n'est cependant pas le cas concernant le marché des échanges de dérivés. M. Barnier nous dira si la négociation d'un cadre de coopération réglementaire relatif aux services financiers est prévue, et quel scénario l'Union privilégie.

Si peu d'équivalences sont accordées aux Britanniques, pensez-vous que les activités de services financiers aujourd'hui situées au Royaume-Uni se reporteraient vers l'Union européenne ? À l'inverse, quelles seraient les conséquences si l'ensemble des équivalences était accordé ?

Existe-t-il un risque que le Royaume-Uni adopte une réglementation prudentielle moins exigeante que les directives européennes ? Quelles seraient les conséquences d'une telle décision sur le secteur financier français ?

Nous nous demandons également qui paiera quoi. Quelle sera la contribution britannique à l'Europe pour les prochaines années ? Parallèlement aux négociations du Brexit, d'autres concernent le budget, et plus particulièrement les ressources propres. Nous nous interrogeons ainsi sur la persistance des rabais.

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M. Barnier, je joins mes félicitations à celles de mes collègues présidents. Vous en recevez de manière unanime, de tous les parlements nationaux de l'Union.

Nombre d'interrogations demeurent, en dépit des informations communiquées. Des inquiétudes persistent, concernant les risques de dumping social, économique ou environnemental qu'une Grande-Bretagne aux portes de l'Europe pourrait susciter. L'accord prévoit des garde-fous si les divergences deviennent excessives, mais nous nous demandons quand et comment celles-ci seront évaluées en pratique.

Il existe également un problème de calendrier de ratification par le Parlement européen. Les États membres suggèrent d'étendre la période de mise en œuvre provisoire de l'accord au-delà du 28 février. La Commission européenne doit toutefois porter cette requête devant le Conseil de partenariat Union européenne Grande-Bretagne. Pensez-vous que celui-ci donnera son accord ?

Enfin, nous devons créer une nouvelle relation de confiance avec le Royaume-Uni. Je m'interroge dans ce contexte sur son refus d'accorder à l'ambassadeur de l'Union européenne à Londres le même statut que celui des diplomates nationaux, une décision qualifiée de geste inamical par le Haut représentant, M. Josep Borrell.

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Michel Barnier, conseiller spécial de la Présidente de la Commission européenne

Je suis toujours heureux de revenir à l'Assemblée. Pour y avoir siégé par le passé, je sais l'importance et la qualité des travaux de ses commissions.

Je vous remercie de l'appréciation que vous me témoignez. Ces négociations étaient néanmoins le fruit d'un travail collectif. J'ai dirigé durant quatre ans et demi une équipe exceptionnelle de soixante-dix personnes de dix-huit nationalités différentes, représentant les expertises de toutes les directions générales. En novembre et décembre 2020, les négociations étaient continues, incluant les six week-ends, avec des débriefings nocturnes regroupant la task force, les experts, et les membres du Conseil.

L'unité que vous saluiez plus tôt est née de la prise de conscience suscitée par le vote du Brexit, en juin 2016. Désigné comme négociateur en octobre, j'ai durant trois mois rencontré chaque chef d'État ou de gouvernement, visitant 27 capitales. Le Brexit, suivi de l'élection de M. Trump, dans un contexte de menaces géopolitiques et terroristes accrues, ainsi que de changement climatique, a généré un sentiment de gravité, et par conséquent de responsabilité concernant le destin du projet européen. Aussi, les deux institutions ont nommé un seul négociateur, avec la confiance du Parlement européen.

J'ai cultivé cette unité vitale, en adoptant une transparence totale, inhabituelle dans le cadre de négociations. Le conseil des 27 Brexit delegates des États membres s'est réuni une ou deux fois par semaine durant quatre ans et demi, permettant d'informer systématiquement chacun de manière équitable.

De plus, j'ai visité trois à quatre fois chaque capitale. J'ai écouté les partenaires sociaux, les parlements, les gouvernements, afin de prendre en compte leurs préoccupations spécifiques, dont les 26 autres membres se sont systématiquement montrés solidaires. Chypre s'inquiétait de ses deux bases militaires britanniques, et l'Espagne de Gibraltar. La Finlande s'interrogeait sur le transport aérien. Les huit pays côtiers se préoccupaient de la pêche dans les eaux territoriales britanniques. Quant à l'Irlande, j'y reviendrai ensuite.

Cette négociation aura été un long parcours, comprenant diverses étapes. Deux traités ont été négociés. Le premier concernait le divorce, dont je ne me félicite pas. Il sécurise les droits – sociaux et de résidence – des 4,5 millions de citoyens affectés, pour eux-mêmes et leur famille, pour la durée de leur vie. Il a été ratifié en novembre 2019, au terme de trois ans de travail. Il garantit en outre le financement par les Britanniques, malgré cette séparation, de toutes les décisions antérieures prises à 28. Aussi, ce qui reste à financer le sera.

Durant toute cette négociation, j'ai porté trois exigences : la paix en Irlande, la protection du marché intérieur, et la possibilité de quelques opérations avec la Grande-Bretagne pour l'avenir.

La paix en Irlande n'est pas un sujet technique ou financier, mais humain. Elle est très fragile. Nous sommes parvenus avec le Gouvernement de M. Boris Johnson à un compromis résolvant la quadrature du cercle. L'absence de frontière sur l'île est essentielle à la paix. Le contrôle de tout produit y entrant – dont les marchandises arrivant de Grande-Bretagne via l'Irlande du Nord – pour s'assurer du respect du code douanier européen garantira la sécurité du marché unique. Enfin, la coopération économique entre le nord et le sud sera assurée. Une vache transportée d'Angleterre à Belfast doit y être contrôlée, car elle y franchit la frontière extérieure du marché unique. Il s'agit de protéger les consommateurs, les budgets et les entreprises contre la contrefaçon.

La première négociation a servi de fondation. Les Britanniques ont toutefois suscité des craintes l'an dernier, lorsqu'ils ont tenté de remettre en cause ce traité sur la question irlandaise, une provocation délibérée qui risquait de susciter une rupture de confiance. Ils sont finalement revenus à la raison, retirant leurs menaces.

Les solutions trouvées sont complexes, mais la situation de l'Irlande l'est également. Deux pays occupent une même île. L'un d'eux ayant quitté l'union douanière, nous avons été contraints d'imaginer des solutions originales, mais compliquées.

La seconde négociation a été engagée pour la durée de la transition, avec une date d'échéance au 31 décembre 2020. Nous aurions pu la prolonger, mais les Britanniques ne souhaitaient pas reporter davantage leur sortie du marché unique et de l'union douanière. L'alternative à un accord général incluant un accord de commerce était donc le no deal, qui n'aurait pas été sans conséquence.

Nous avons proposé aux Britanniques différents modèles de coopération. Le plus intégré correspond aux exemples norvégiens ou islandais : la Norvège ne souhaitait pas intégrer l'Union, mais elle appartient au marché unique. Nous disposions d'autres solutions avec des options de moins en moins intégrées. Il nous fallait aussi tenir compte des lignes rouges britanniques : absence de Cour de Justice, absence de contribution au budget européen, absence de lien avec la politique commerciale commune. Ils ont, par ces exigences, fermé la porte aux différents modèles intégrés que nous proposions, ne laissant qu'une possibilité : celle d'un accord de libre-échange.

La nature de ce type d'accord dépend néanmoins des pays qu'ils concernent, et plus particulièrement de leur proximité géographique et des volumes échangés. L'Union européenne a négocié une soixantaine d'accords de libre-échange dans son histoire. La Grande-Bretagne se trouve cependant dans une situation unique. Elle a une frontière terrestre, en Irlande, avec le marché unique, tandis qu'elle est le partenaire possédant le plus fort volume d'échanges avec l'Union. Une coopération inédite devait donc être définie. Établir des règles équitables était fondamental.

De plus, nous avons négocié pour la première fois un accord de libre-échange dans un contexte de divergence réglementaire, le Royaume-Uni entendant recouvrer son autonomie dans ce domaine. Tous les autres accords s'inscrivaient au contraire dans un contexte de convergence des standards et des normes, afin de faciliter les échanges. Il convenait donc de s'assurer que la souveraineté réglementaire britannique ne transformait pas l'accord conclu en outil de dumping social, environnemental, fiscal ou économique.

Nous sommes parvenus à un accord plus ambitieux que les accords de libre-échange classiques, au terme de neuf mois seulement de négociation, une durée particulièrement courte, quatre à cinq ans étant généralement nécessaires avec d'autres pays.

Nous n'avions toutefois que peu de temps. Nous avons donc proposé dès le départ au Royaume-Uni un accord commercial éliminant tous les tarifs douaniers et tous les quotas. En contrepartie, l'Union européenne et ses membres ont naturellement exigé des règles équilibrées, évitant autant que possible tout dumping.

Le premier chapitre de cet accord concerne le commerce des biens et d'une partie des services. Il ne fixe aucun tarif douanier aux échanges entre l'Union européenne et la Grande‑Bretagne, alors que l'Union représente 46 % des exportations de cette dernière, le flux inverse ne s'élevant qu'à 8 % des exportations européennes. Un cadre inédit de level playing field, de règles du jeu, a en contrepartie été fixé, afin qu'aucune des deux parties ne soit tentée de créer des distorsions de concurrence susceptibles de détruire des emplois chez son partenaire.

Ces distorsions peuvent provenir d'aides d'État. Or, le Royaume-Uni est sorti du système de contrôle correspondant de l'Union, sans pour l'instant préciser comment il s'organisera en interne dans ce domaine. Les divergences réglementaires peuvent également être à l'origine de distorsions. Nous sommes convenus de rester au moins au niveau atteint fin 2020 concernant les standards et les normes environnementaux et sociaux. Nous vérifierons l'absence de régression dans le temps, par le biais de dispositions nouvelles. Leur usage et leur efficacité devront être évalués sans trop attendre. Ces dispositions permettent à l'une des parties de prendre des mesures compensatoires – dont le rétablissement de tarifs douaniers – si l'autre crée des distorsions de concurrence, par des aides d'État massives ou des divergences réglementaires.

La vigilance sera indispensable, les autorités britanniques ayant annoncé depuis trois semaines leur intention d'adopter des règles différentes concernant les pesticides, la durée hebdomadaire du travail, ou encore les services financiers. Si des divergences suscitent des difficultés, la Commission devra en être informée, par le secteur concerné, les parlements nationaux, ou encore le Parlement européen.

Le deuxième chapitre de l'accord porte sur la coopération économique et sociale, en matière de connectivité des transports routiers et aériens, ou encore d'énergie – interconnectivité électrique, énergie renouvelable… Il ouvre également un certain nombre de programmes européens à la Grande-Bretagne, en tant que pays tiers, dans de nouvelles conditions financières et juridiques, concernant la recherche universitaire ou encore certains programmes satellitaires. Les Britanniques ont en revanche refusé de se maintenir dans Erasmus, car ils entendent mettre en place un programme concurrent.

Ce deuxième chapitre traite enfin de la pêche, qui a reçu une attention conséquente jusqu'à la dernière minute. Le Royaume-Uni a – sans succès – cherché à faire de ce sujet, le seul où nous étions demandeurs, un levier de négociation. En effet, les pêcheries européennes réalisent 650 millions d'euros par an de chiffre d'affaires dans les eaux britanniques, contre 850 millions d'euros de chiffre d'affaires généré par les pêcheurs britanniques dans leurs eaux territoriales. La pêche dans les eaux européennes ne représente en revanche pour ces derniers que 150 millions d'euros.

Les positions de départ étaient les suivantes : les Britanniques souhaitaient exploiter seuls leurs eaux territoriales ; nous réclamions le maintien du statu quo. Un compromis a donc été recherché.

J'ai tenu compte des seuils d'acceptabilité des huit principaux États européens côtiers concernés, qui les avaient signifiés à la Commission. Je rappelle que tout accord nécessitait l'unanimité des 27 États membres. Leur solidarité a toutefois représenté un atout.

Nous sommes parvenus à la disposition suivante : l'Europe rendra 25 % de ses capacités de pêche dans les eaux britanniques, sur une répartition des stocks comprenant cent espèces de poissons, dont certaines présentent davantage de valeur que d'autres. Au terme de cinq ans et demi, le Royaume-Uni retrouvera cependant sa souveraineté complète, et une capacité de discussion annuelle quant à l'accès à ses eaux territoriales.

La Grande-Bretagne pourra alors nous fermer tout ou partie de cet accès. Une telle configuration devra donc être préparée. L'accord prévoit des mesures de dissuasion, comme le rétablissement de tarifs douaniers non négligeables sur les importations de différents poissons, dont le maquereau, voire la mise en œuvre de mesures « miroirs » – cinq ans et demi de transition puis une discussion annuelle – dans d'autres secteurs, en particulier l'énergie. Or, l'interconnectivité au marché électrique européen est essentielle pour le Royaume-Uni.

Le troisième chapitre porte sur la sécurité intérieure des citoyens. Les Britanniques s'engagent à respecter dans la durée les principes de la Convention européenne des droits de l'homme et la protection des données personnelles échangées. Une coopération opérationnelle sera construite concernant Europol, Eurojust, l'extradition, la lutte contre le blanchiment, l'échange de données ADN et le contrôle des passagers aériens.

Dans sa déclaration politique d'octobre 2019, M. Boris Johnson avait évoqué la politique étrangère, la défense, la sécurité extérieure et la coopération. Les Britanniques ont néanmoins refusé toute discussion sur ces sujets. Ce chapitre important n'a donc pas été négocié. Il reste ouvert pour l'avenir, si nos partenaires le souhaitent. Nous leur avons signifié encore récemment notre disponibilité, mais sans fébrilité.

Le dernier chapitre de l'accord détaille le système de gouvernance visant à résoudre les éventuels conflits. Les Britanniques ont fini par accepter un cadre global, au moins sur les questions économiques, l'Union européenne ayant refusé le système « suisse », qui divise cette question entre de multiples accords à l'autonomie propre. Le compromis inclut un système de règlement des conflits ainsi qu'une possible suspension croisée de différents aspects du partenariat en cas de non-respect des engagements de l'accord.

L'accord ne définit pas la coopération sur les services financiers, excepté en matière réglementaire. Sur ce sujet, une discussion est en cours, comme nous en conduisons avec le Japon ou les États-Unis. Elle ne concerne toutefois pas les équivalences. Nous n'anticiperons pas la décision unilatérale que la Commission et l'Union peuvent prendre concernant l'attribution de ces équivalences. Nous conservons cette capacité, afin d'en faire éventuellement usage au mieux de nos intérêts.

Nous n'oublions pas la récente crise financière de 2008, dont nous subissons toujours les conséquences, que la covid a d'ailleurs aggravées. Préserver la stabilité de l'euro et de l'Union européenne est primordial. Nous avons donc des exigences certaines en matière de supervision et de régulation. Des chambres de compensation, qui n'existent pas encore côté continental, ont obtenu une équivalence. Quelques autres équivalences pourront être accordées, mais au service de nos intérêts et de la préservation de la stabilité financière de la zone euro.

L'accord a été conclu le 24 décembre à 18 heures. Son processus d'approbation par le Parlement européen est en cours. Dans l'attente, les États membres ont approuvé son application provisoire à compter du 1er janvier 2021. Le Parlement ne statuera probablement pas d'ici fin février. En effet, les 27 États exigent de disposer d'une traduction authentifiée du texte dans les 24 langues officielles de l'Union. Ces traductions ne sauraient être produites avant le 28 février. Aussi, le dispositif d'application provisoire devra être prolongé de quelques semaines, le temps que l'authentification des 24 traductions de 1 400 pages soit achevée.

Je resterai à la disposition de la Commission, bien que ma mission soit terminée, pour accompagner ce processus jusqu'à son terme.

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Cet exposé très complet a répondu à une partie de mes questions.

Pourriez-vous détailler l'ensemble des flux budgétaires actuels et à venir, ainsi que les modalités selon lesquelles le Royaume-Uni continuera de financer certaines politiques ?

Pourriez-vous préciser le principe de non-régression du niveau de protection de l'environnement et des engagements climatiques, et ses mécanismes de protection ?

Comment le conseil de partenariat résoudra-t-il les litiges ?

S'agissant des services financiers, parviendrons-nous à protéger nos intérêts au regard de la problématique des chambres de compensation, alors que le protocole d'accord devra être signé d'ici fin mars 2021 ?

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Je tenais d'abord à féliciter M. Barnier et ses équipes. Vous avez cultivé l'unité des 27 au cours de ce marathon, qui était complexe à la fois politiquement et techniquement. Les 300 000 citoyens français vivant au Royaume-Uni vous remercient d'avoir sécurisé leurs droits dans le cadre de l'accord de retrait.

Je m'interroge sur le calendrier relatif à la protection des données privées. Jusqu'au 1er juillet 2021, le régime européen s'appliquera. Ensuite, un accord sera nécessaire pour encadrer ces échanges d'informations, indispensables à nos relations économiques.

Par ailleurs, l'accord prévoit différents mécanismes de gouvernance. Vendredi dernier, la Commission a fait usage de l'article 16, qui restreint les exportations de l'Irlande du Sud vers l'Irlande du Nord, avant de reculer. Que s'est-il produit pour que l'accord soit ainsi remis en cause, quatre semaines seulement après sa conclusion ?

Quelle est la procédure pour prendre ces décisions délicates ? Le Premier ministre irlandais n'y aurait pas été associé, alors qu'il est le premier concerné.

Tirerons-nous de cet épisode des leçons quant à l'usage de ces clauses par la Commission à l'avenir ?

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Monsieur Barnier, le groupe LR salue le succès de votre équipe, votre engagement européen de longue date et votre art remarquable de la négociation dans ce contexte difficile. Nous nous réjouissons des avancées destinées à prévenir le dumping social et fiscal. Il conviendra toutefois de rester vigilant. La Présidente de la Commission européenne vous a d'ailleurs nommé récemment conseiller spécial pour négocier les accords post-Brexit.

Quelles sont à terme les clauses de revoyure, notamment sur la question des quotas, des antériorités de droits de pêche, ou encore concernant les tensions commerciales liées au vaccin AstraZeneca ? Elles pourraient poser de grandes difficultés.

Par ailleurs, les tensions montent entre Édimbourg et Londres. La Première ministre écossaise réclame l'organisation d'un nouveau référendum sur l'indépendance de l'Écosse, dont les pêcheurs auraient déjà perdu 30 à 40 % de chiffre d'affaires en raison des contrôles douaniers.

Vous l'évoquiez, Londres a refusé d'inclure dans cet accord les questions de sécurité et de défense. Pourriez-vous nous éclairer davantage sur ce point ?

La Grande-Bretagne était membre jusqu'à présent de la coopération structurée permanente. Quelles seraient les éventuelles conséquences de son retrait sur le fonds européen de défense, qui vise à conforter l'autonomie stratégique de l'Union européenne ?

Enfin, le général de Gaulle avait systématiquement rejeté la candidature britannique à la Communauté économique européenne, que Georges Pompidou avait finalement acceptée. Quelle est votre analyse de ces 50 années d'appartenance du Royaume-Uni à notre union ?

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Je vous félicite à mon tour d'avoir, au terme de quatre ans et demi d'efforts, paré au spectre du no deal. Ce divorce s'annonce cependant riche en rebondissements. Déjà, une guerre des vaccins se dessine, fort mal à propos. La Commission, dans un nécessaire esprit d'apaisement, a renoncé à inclure l'Irlande du Nord dans le mécanisme de contrôle d'exportation des vaccins, mais leur production, et par extension le domaine sanitaire, semblent devenir un moyen de pression géopolitique. Lors de son audition, l'ambassadeur britannique, M. Edward Llewellyn, avait pourtant témoigné de la bonne volonté de l'outre-Manche. Sur ce dossier, et de manière plus générale, maintiendrons-nous une relation harmonieuse avec notre voisin, ou devons-nous rester sceptiques ? Vous avez en partie répondu, en appelant plus tôt à la vigilance.

Par ailleurs, le populaire programme Erasmus contribue à faire aimer l'Europe. Le groupe MoDem-Démocrates apparentés y est particulièrement attaché. M. Johnson, après avoir assuré que ce programme ne serait pas affecté par le Brexit, a malheureusement fait volte-face, créant un programme Alan Turing concurrent. Quel sera l'avenir d'Erasmus sans le Royaume‑Uni et les 17 000 étudiants britanniques qui s'y inscrivaient auparavant ? Continueront-ils d'étudier en Europe ? Erasmus fera-t-il les frais du Brexit, ou en profiterons‑nous au contraire pour mieux faire découvrir la diversité de nos langues ?

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Le groupe Agir ensemble, comme tous ceux qui aiment l'Europe, vous remercie, Monsieur Barnier.

Dans le domaine de l'agriculture, qu'advient-il des accords passés, et notamment des concessions tarifaires ou des quotas d'importation à droits nuls, qui avaient été concédés à des pays tiers ? Par exemple, la Grande-Bretagne représente 300 000 tonnes de l'ensemble des concessions passées sur la volaille. Les emporte-t-elle ? Ce volume représente un tiers de la production nationale. Il est donc susceptible de déstabiliser le marché européen.

Concernant l'énergie, l'accord prévoit des renégociations à compter de 2026. Le Brexit impactera-t-il alors l'équilibre d'EDF, opérateur électrique majeur, qui possède actuellement un accord pour construire une centrale nucléaire à Hinkley Point ?

Enfin, les frontières terrestres de la Grande-Bretagne avec l'Europe (Gibraltar, bases militaires de Chypre) présentent des enjeux migratoires, mais aussi géopolitiques. Des tensions ont récemment émergé entre la Turquie et la Grèce concernant des champs gaziers au large de Chypre. Comment appréhendez-vous ces deux problématiques ?

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Le groupe Socialistes et apparentés salue l'endurance, la maîtrise et la volonté nécessaires à la conclusion de cette négociation complexe.

Tout ce qui a été décidé à 28 sera, selon votre propos liminaire, payé à 28. Je m'interroge donc sur les flux financiers à venir. Un tableau synthétique serait apprécié.

N'ayant pas lu les 1 400 pages du traité, j'aurais souhaité savoir qui a gagné ou perdu sur les différents sujets. Tel n'est généralement pas l'esprit d'un traité, mais il s'agit ici d'un divorce. Vous avez obtenu des compromis très satisfaisants, notamment l'absence de taxe lors de transferts de pièces pour assemblage. Pour autant, un tableau synthétique des enjeux serait très instructif.

Par ailleurs, les services financiers n'ont pas encore été négociés. Ce prochain enjeu sera-t-il selon vous l'occasion d'enfin fonder une Europe dans ce domaine ? Compenser l'euro à Londres est un paradoxe que plusieurs d'entre nous regrettent. L'Europe décidera-t-elle que 20 ans après sa mise en circulation, il serait temps que l'euro joue un vrai rôle sur la scène mondiale ?

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Le groupe UDI et Indépendants partage l'idéal européen, et vous félicite de sa défense dans le cadre de cet accord. L'accord évite les droits de douane et les quotas. Néanmoins, sa configuration imposera des délais, ainsi que de nouvelles règles à respecter pour les entreprises exportatrices. L'Union européenne prévoit-elle de les accompagner ? Si les négociations se poursuivent, le système pourrait encore être amélioré.

Évidemment, nous nous réjouissons de l'accord sur l'Irlande. Il s'avère toutefois complexe. La Grande-Bretagne pourrait en outre s'en servir de cheval de Troie. Comment l'Union peut-elle prévenir ces dérives ? Enfin, quel est l'état des ajustements qui restent en suspens, pour que l'accord conclu prenne toute sa réalité ?

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Dans le cadre de l'Union européenne, nous avons pendant des années travaillé à nous rapprocher les uns des autres. Avec le Brexit, il nous a fallu au contraire dénouer nos innombrables liens avec le Royaume-Uni, une tâche difficile et complexe que M. Barnier a su mener.

La filière aéronautique, notamment Airbus, est intégrée des deux côtés de la Manche. Comment garantir que les sous-traitants britanniques ne se tourneront pas vers Boeing ? Qu'en sera-t-il des certifications et normes de production ?

Les formalités douanières permettant l'entrée de produits agricoles au Royaume-Uni et dans l'Union européenne généreront une hausse de 5 % des prix. Quelles seront les filières les plus impactées par les replis des importations ?

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En tant qu'ancien maire de Dieppe et député d'une circonscription maritime, je suis très attaché au lien transmanche. Le Brexit constitue une véritable fracture, dont personne ne sortira gagnant. Cependant, lorsque l'Europe libérale se construit sans les peuples, ils l'abandonnent.

Ma grand-mère aurait qualifié l'accord conclu de « moins pire que si c'était mieux ». Le compromis sur la pêche, que nous devons à votre opiniâtreté, évite le no deal. Il offre aux ports inquiets une respiration. La baisse immédiate de 25 % des droits de pêche ne sera toutefois pas anodine. Elle pourrait provoquer des reports d'efforts de pêche susceptibles de pénaliser la pêcherie française. Un plan d'accompagnement a été annoncé au niveau national, mais qu'en sera-t-il à l'échelle européenne ?

Enfin, la clause de revoyure – à l'horizon 2026 – porte exclusivement sur la pêche. Les contreparties qui ont pesé sur la négociation de l'accord disparaîtront à ce moment-là. Quels sont les leviers assurant l'application de l'accord dès à présent ? De quels leviers l'Europe disposera-t-elle en 2026 pour préserver durablement les intérêts de la pêche ?

Empêcher les bateaux-usines, notamment néerlandais, de piller nos mers est une impérieuse nécessité. L'Europe et le Fonds européen pour les affaires maritimes et la pêche (FEAMP) doivent se concentrer sur la préservation de la pêche artisanale.

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Michel Barnier, conseiller spécial de la Présidente de la Commission européenne

Je transmettrai vos appréciations à mes équipes de négociation. Mmes Sabine Weyand et Stéphanie Riso durant la première phase, puis Clara Martinez et Paulina Dejmek, ont notamment fourni un travail exceptionnel. Avec leur assistance, j'ai en bon savoyard « taché moyen de faire pour le mieux ».

Les Britanniques paieront tout ce à quoi ils se sont engagés lorsqu'ils étaient membres de l'Union, y compris au titre des programmes mis en œuvre au cours de la programmation 2014-2020 et les restes à payer ou à liquider sur les fonds structurels. Les Britanniques demeurent aussi responsables dans le cadre de certaines garanties d'emprunts souscrits à 28, concernant des programmes en Ukraine ou en Turquie notamment. L'accord sur ce point est impeccable. Je n'ai aucun doute que le Royaume-Uni honorera sa signature.

Les autres échanges financiers dépendront de la participation britannique à des programmes européens en tant que pays tiers.

Leurs laboratoires et universités étaient très dynamiques au sein des programmes de recherches européens, mais ils en tiraient un avantage supérieur au coût de leur participation. Désormais, leurs bénéfices et le coût de leur participation seront strictement équilibrés, mais leur implication se poursuivra, au même titre que celle de la Norvège ou de la Suisse

La période de sept ans des prochains programmes s'ouvre en 2021. Le Royaume-Uni doit encore définir de quelle manière il souhaite y participer, mais nous pourrons en rendre compte à l'Assemblée nationale.

S'agissant de la non-régression des standards et normes découlant du droit de l'Union, en particulier en matière environnementale, elle concerne Natura 2000, mais aussi les normes sur le bruit ou encore la pollution de l'air. De même en termes de transparence fiscale ou de droits sociaux, ces principes sont détaillés dans l'accord. Une évaluation est prévue tous les quatre ans, car des divergences pourront apparaître au fil du temps. Des aides d'État massives peuvent impacter rapidement la concurrence dans les secteurs qui en sont la cible. La politique européenne de concurrence nous en prémunit aujourd'hui. À l'avenir, les parlements et gouvernements nationaux devront se montrer vigilants, et demander des explications s'ils détectent de telles distorsions.

Quant au protocole sur la réglementation financière, il n'anticipera pas l'attribution des équivalences. Celle relative aux chambres de compensation a été accordée l'année dernière, faute de posséder une telle chambre de compensation sur le continent.

Comme Mme Rabault le soulignait, avec ou sans Brexit, je pense que l'Europe doit prendre ses responsabilités, comme elle l'a fait avec le programme d'emprunts mutualisés de 750 milliards d'euros pour faire face à la covid.

Une volonté économique et politique est cependant indispensable, pour que les banques européennes créent les infrastructures financières qui nous manquent aujourd'hui. Il conviendrait notamment que la zone euro se dote de dispositifs de compensation.

Les Britanniques ont perdu mécaniquement le passeport financier attaché au marché unique. Des équivalences leur seront accordées, en nombre mesuré, pour garantir nos intérêts et la stabilité financière de l'Union. Ce processus autonome ne sera ainsi pas négociable.

Concernant la protection des données, évoquée par M. Holroyd, elle fait l'objet d'un second processus autonome. À partir de juillet, nous vérifierons le respect des droits fondamentaux des citoyens avant d'attribuer un certain nombre d'équivalences, d' adequacy decisions, en matière de données. Leur préparation est en cours.

Quant aux événements de vendredi dernier, j'indiquerai sobrement que nous avons pris beaucoup de décisions dans l'urgence et face à la gravité de la situation. Des erreurs peuvent avoir été commises. Celle de vendredi a été corrigée le soir même, sans autre conséquence que politique. Nous répétons aux Irlandais que nous nous attacherons à préserver l'absence de frontière, indispensable à la fragile paix de l'île.

Je n'aurai en revanche aucun commentaire concernant l'Écosse. Je peux discourir passionnément de la France ou de l'Europe. J'ai été un élu du peuple toute ma carrière, plutôt qu'un technocrate. Néanmoins, ces dernières années, je me suis soigneusement gardé de faire preuve de passion dans cette négociation. Je préfère éviter de donner prise aux tabloïds ou aux polémiques. Je ne me mêle pas des débats internes au Royaume-Uni, même si je les suis attentivement. Il appartiendra à son peuple de trancher la question de l'Écosse.

En tant qu'ancien ministre des affaires étrangères, je ne comprends pas pourquoi la Grande-Bretagne refuse de négocier sur le chapitre des relations extérieures. Elle a sans doute des raisons idéologiques. L'Europe est selon elle une zone de libre-échange, alors que nous pensons qu'elle doit revêtir une dimension politique, qui se traduit par des efforts dans les domaines de la défense ou de la sécurité extérieure.

Une coopération dans ce domaine sera dans notre intérêt commun. Le Royaume-Uni reste un grand État, membre du Conseil de sécurité de l'ONU. Il participait activement aux politiques européennes de sanction. Nous aurons peut-être même intérêt à ce que la Grande‑Bretagne prenne part à certaines opérations extérieures de l'Union. De plus, certains pays tiers contribuent, sous certaines conditions, au fonds européen de défense. Un cadre sera alors nécessaire. Pour la première fois en 2021, le budget européen financera des efforts de recherche en matière stratégique et de défense. Nous aurons également besoin d'échanger en matière de renseignement. Nous laissons ainsi la porte ouverte, sans fébrilité, à une négociation avec le Royaume-Uni en matière de sécurité extérieure.

J'ai pris des notes tout au long de cette négociation. Je les publierai au printemps prochain, si les détails vous intéressent. Le Brexit est un accord perdant-perdant, un affaiblissement, un divorce. L'Europe est amputée d'un membre puissant et actif, qui se retrouvera seul dans la compétition mondiale, où il aura moins de poids face à la Chine ou aux États-Unis. Les Britanniques ne partageaient cependant pas mon analyse.

Sur la question des vaccins, je recommande que nous préservions un esprit de coopération. Au-delà du Brexit, d'autres défis graves nous menacent : pandémies, terrorisme, changement climatique. Nous avons donc des raisons de collaborer, même sans appartenir à l'Union. De même pour Erasmus, notre porte restera ouverte. Il serait logique de faire participer un pays tiers comme le Royaume-Uni à ce programme, qui constitue l'une des plus belles réussites de l'Union européenne. Je souhaite toutefois bonne chance au programme concurrent que souhaite créer le Royaume-Uni, comme il en a absolument le droit.

S'agissant des accords commerciaux, notamment concernant les productions agricoles, décider comment retrancher la part des Britanniques a fait l'objet de longues réflexions. Nous sommes parvenus – je crois – à des solutions équilibrées. Une note écrite vous détaillera ce sujet pour chaque accord. Le Royaume-Uni quitte, en abandonnant l'Union, 600 accords internationaux, qu'il devra renégocier de son côté avec tous ces partenaires.

Sur l'énergie, une clause miroir existe. Si elle joue correctement son rôle de dissuasion, l'interconnexion électrique devrait demeurer. À l'échéance d'un délai expirant dans cinq ans et demi, nous rediscuterons tous les ans de ce sujet, qui est essentiel pour la Grande-Bretagne, parce qu'il lui permet d'accéder aux échanges sur un marché de 450 millions de consommateurs. J'ai proposé cette clause miroir, car le gain des Britanniques sur le marché électrique est équivalent à celui des pêcheries européennes dans les eaux territoriales britanniques. L'accès au marché électrique et aux eaux doit être réciproque, dans le cadre d'un accord équilibré.

Concernant Chypre, nous devons organiser la protection du marché intérieur, alors que deux zones relevant de la souveraineté britannique se trouvent sur l'île. L'organisation de ces contrôles n'a cependant aucun lien avec la Turquie. Quant à Gibraltar, elle fait l'objet d'une négociation parallèle, à la demande des Espagnols comme des Britanniques. Elle pourrait, dans ce cadre, être intégrée à Schengen.

Peu de flux financiers seront encadrés par l'accord, excepté la participation britannique à certains programmes. La perte du passeport financier est une conséquence mécanique du Brexit, tout comme l'absence de reconnaissance mutuelle des qualifications professionnelles, ou des certifications de production. Notre position n'est pas punitive. Simplement, quitter le marché commun, son écosystème de normes et de droits, de supervision et de juridiction, a des conséquences. La Grande-Bretagne ne saurait conserver tous les avantages en s'affranchissant de toutes les contraintes. À l'heure actuelle, les entreprises britanniques découvrent l'existence de nombreuses barrières non tarifaires, qui freineront leurs échanges, en conséquence de leur départ du marché unique.

Le fonds d'ajustement européen s'élève à 5 milliards d'euros : il est destiné à accompagner les secteurs ou les régions affectés par les conséquences du Brexit pour les prochaines années. 4 milliards sont déjà partagés entre les États les plus impactés. L'accord limite les conséquences, mais il ne les élimine pas complètement, notamment pour la pêche. Plusieurs centaines de millions d'euros seront ainsi mobilisables pour accompagner les parties affectées en France, sous la responsabilité des autorités nationales.

S'agissant des ajustements que M. Michel Zumkeller évoquait, les négociations sont terminées, après quatre longues années et demie de discussions : l'accord n'est pas une base de travail pour poursuivre. La Grande-Bretagne éprouve des difficultés qu'elle n'avait pas anticipées. Cependant, nous appliquerons l'accord. Il sera évalué. Nous envisagerons d'éventuels changements, mais ils devront être réciproques. Seul le chapitre de la défense et des relations extérieures reste encore ouvert à la négociation, ainsi que certains points d'application de l'accord, par exemple le cadre de coopération réglementaire en matière de services financiers.

L'accord crée un conseil de partenariat, où siégeront trois personnalités publiques indépendantes, que nous choisirons ensemble. Comme pour l'accord de retrait, elles régleront les éventuels conflits entre les parties. L'accord lui-même ne sera néanmoins pas ajusté.

Par ailleurs, la question des règles d'origine est fondamentale. Lorsque nous exportons une voiture européenne, en Corée par exemple, une certaine proportion de pièces doit provenir du marché intérieur, ce qui pourra poser problème du fait de la sortie des fabricants britanniques, qui se verront imposer cette barrière non tarifaire. Toutefois, cette règle est impérative et fondamentale pour protéger nos emplois. La Grande-Bretagne ne saurait devenir un hub d'assemblage, et exporter en Europe sans tarif ni quota des produits assemblés à partir de pièces qui y seraient normalement soumises.

Enfin, la clause de revoyure, dans cinq ans et demi, devra être préparée. L'accord sur la pêche est raisonnable, mais il était difficile, tant nos positions initiales étaient opposées. Ce compromis nous conduit à rendre 25 % de ce que nous pêchons aujourd'hui. Dans cinq ans et demi, la Grande-Bretagne risque de vouloir fermer telle ou telle zone aux pêcheries européennes. Il conviendra d'évaluer et de discuter chaque année. Si la raison ne prévaut pas, nous activerons nos outils de réciprocité.

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Quelles seront les conséquences du Brexit sur le tourisme ? Les Britanniques sont de fidèles visiteurs de la France. La Savoie en reçoit 500 000 chaque année. Le Brexit compliquera-t-il la circulation des touristes britanniques, à l'heure où nous avons cruellement besoin de relancer notre économie ? De plus, quelle sera la place du tourisme dans l'accord conclu ? Les formalités nécessaires pour accéder à l'Union européenne ne détourneront-elles pas les Britanniques vers d'autres destinations, comme les États-Unis, pour les sports d'hiver notamment ?

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La commission des affaires culturelles et de l'éducation, dont je suis membre, se préoccupe de la mobilité étudiante et des échanges universitaires. Vous avez déjà abordé Erasmus sur ce point.

Nous nous inquiétons également de la culture, qui implique la libre circulation des idées, des personnes et des œuvres. Nous craignons ainsi un appauvrissement des échanges culturels, de part et d'autre de la Manche. Le Royaume-Uni maintiendra-t-il sa participation au programme Europe créative, en tant que pays tiers ? Qu'en est-il par ailleurs de la propriété intellectuelle et des droits voisins ? La non-application des directives sur les droits d'auteur ou sur les services de médias audiovisuels (SMA) par la Grande-Bretagne présentera un véritable danger.

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Je salue le travail de M. Barnier et toutes ses équipes durant quatre ans et demi. Je co-préside le groupe d'étude secteur aéronautique et spatial de l'Assemblée nationale. Dans ces deux domaines, les coopérations entre la France, le Royaume‑Uni et l'Union européenne sont nombreuses. Nos chaînes de production sont très intégrées des deux côtés de la Manche. Airbus, en particulier, emploie 14 000 personnes sur 25 sites britanniques. La Grande-Bretagne devrait rester membre de l'Agence spatiale européenne. Néanmoins, elle a décidé de ne pas prendre part à la prochaine période de programmation financière et n'a pas encore confirmé sa participation au projet Galileo. J'aurais donc souhaité vous entendre concernant l'impact du Brexit sur la souveraineté et l'autonomie stratégique européenne dans les domaines aéronautique et spatial.

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Les sujets économiques, de libre-échange de biens et de services, ont été assez largement évoqués. Comme ma collègue, je m'interroge sur la culture. Les artistes en tournées européennes ou mondiales devront réaliser des demandes de visa supplémentaires, avec des complaisances plus ou moins importantes selon les pays européens. Ces contraintes administratives pourraient-elles être assouplies au bénéfice des échanges culturels ?

Par ailleurs, en matière de transport maritime, beaucoup empruntent des chemins détournés. Quels seront les impacts du Brexit, en termes d'activité, dans les ports français, à la hausse ou à la baisse ?

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Hélène Laporte (membre du Parlement européen)

Le Brexit était une expérience. J'espère que nous ne la renouvellerons pas. Cependant, toute relation contractuelle doit prévoir les modalités selon lesquelles il y est mis un terme. Sur ce point, les traités européens se sont avérés pour le moins insuffisants. En tant que négociateur, ne recommanderiez-vous pas de réécrire a minima l'article 50 ?

Concernant la concurrence fiscale, le Royaume-Uni jouit d'un réseau de dépendances qui lui sont liées juridiquement, comme Jersey, l'île de Man ou encore des ports francs. L'accord prévoit une clause de bonne gouvernance fiscale et un principe de non-régression par rapport aux règles sur la base d'imposition et le transfert de bénéfices (BEPS) de l'OCDE. Dans ce domaine, quelles contraintes pèseront sur la Grande-Bretagne, une fois la période de transition terminée ?

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Quelles leçons devrions-nous, selon vous, tirer de la colère exprimée au Royaume-Uni envers l'Union européenne, pour éviter que ce scénario se répète dans d'autres États membres ?

Quelles sont vos ambitions pour l'Union européenne ?

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Le Brexit impactera l'agriculture, l'agroalimentaire, la pêche et la forêt. Le Royaume-Uni est le principal partenaire de l'Union européenne et le premier importateur net de produits agricoles et alimentaires. Alors qu'un accord de commerce et de coopération a été conclu le 24 décembre, il est vital que les conditions nécessaires à une concurrence loyale soient pleinement effectives dans l'agroalimentaire.

Cet accord a rassuré. Toutefois, le Brexit rallongera l'acheminement des marchandises, en raison des modalités douanières. Les entreprises devront s'enregistrer pour pouvoir réaliser des échanges commerciaux. De plus, des contrôles sanitaires et phytosanitaires s'exerceront.

Ces nouvelles formalités seront à peine perceptibles dans les prix à la consommation. Néanmoins, pouvez-vous nous assurer que ces coûts supplémentaires seront contenus ? Ne risquent-ils pas de fragiliser davantage une situation déjà compliquée ?

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Nos pêcheurs ont été très soulagés de la conclusion de l'accord. Ils espèrent que votre clause miroir jouera son rôle correctement.

Par ailleurs, vous nous avez montré un graphique en escalier descendant, illustrant les niveaux d'intégration qui étaient envisageables à l'ouverture des négociations. Avec l'accord conclu, où se situent les Britanniques dans cette représentation ?

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L'Europe et les États-Unis n'ont pas accompagné leurs laboratoires de la même manière dans le risque industriel associé au développement des vaccins. Nous avons malheureusement perdu la course, et ce dès le départ de cette aventure scientifique et technologique, lors du versement des crédits. Aujourd'hui, les Britanniques, qui avaient signé leur commande trois mois avant nous, vaccinent à très grande échelle. Un pays seul n'est-il donc pas plus agile parfois, sur ces questions logistiques, sans l'Union européenne, dont nous connaissons les hésitations et les lourdeurs ? La résurgence de la souveraineté dans le débat national soulève cette question, non pas de la France contre l'Europe mais avant l'Europe.

Par ailleurs, comment l'Union européenne aidera-t-elle ses exportateurs à maintenir leur position au Royaume-Uni, alors que les coûts augmenteront avec les contrôles et les formalités ? Il s'agit d'un enjeu important pour l'emploi et l'activité, la Grande-Bretagne représentant 10 milliards d'euros d'excédent dans notre solde commercial.

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Je m'interroge pour ma part concernant la sécurité alimentaire. La qualité de l'alimentation de notre pays est une question sensible. Qu'en est-il de la convergence des normes sanitaires et phytosanitaires dans ce domaine ? Des mesures de redéfinition des critères pour l'importation seront-elles prises, s'agissant des pesticides, des OGM ou des néonicotinoïdes ?

Nous avons dû construire à nos frontières de nouvelles infrastructures, notamment pour la sécurité alimentaire. Sommes-nous prêts ?

Les douanes britanniques et européennes coopèrent-elles correctement ?

Enfin, des villes portuaires s'inquiètent d'un dumping, résultant de nouvelles liaisons vers d'autres ports. Quelles sont les mesures préventives dans ce domaine ?

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De nombreux Anglais installés en France, parfois depuis plusieurs décennies, ont vécu le Brexit comme un séisme. Leur accès à leur résidence secondaire sur le continent sera entravé par les formalités frontalières. Ceux qui souhaitaient s'y installer la retraite venue devront solliciter un visa de longue durée. En effet, le séjour exempt de visa est, depuis le 1er janvier, limité à 90 jours sur une période de six mois. Des évolutions de ces contraintes seront-elles possibles à l'avenir ?

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Les touristes britanniques étant très nombreux, la Savoie a développé une offre avec de la main-d'œuvre britannique pour accueillir ces clients. Sous quel régime ces travailleurs seront-ils employés demain ? Relèveront-ils des législations française ou britannique ? Les charges n'y sont pas les mêmes.

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Je ne cherche pas à attiser la polémique. Cependant, je connais bien la problématique écossaise. N'avez-vous pas le sentiment que l'accord ratifié pourrait à terme fragiliser les relations entre l'Angleterre d'une part, et l'Écosse et l'Irlande d'autre part ?

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Michel Barnier, conseiller spécial de la Présidente de la Commission européenne

Évidemment, le Brexit aura des conséquences au Royaume-Uni. Il bouscule des traditions et des habitudes, en particulier en Écosse, où la population avait exprimé son attachement au marché unique et à l'Union européenne. Je ne saurais néanmoins, en tant que négociateur européen, partager mon opinion sur ces débats internes à la Grande-Bretagne, que je respecte, excepté pour préciser que les Britanniques doivent assumer toutes les conséquences – humaines, sociales, juridiques, techniques, financières et économiques – du Brexit. Malheureusement, elles ont souvent été, dans tous les domaines, mal expliquées et sous‑estimées. Nous en avons toutefois traité une grande partie dans les accords.

Rien n'interdit pour autant, comme le suggérait M. Corceiro, de tirer des leçons de cet épisode. J'ai eu pour rôle de réduire les conséquences négatives du Brexit. Je recommande, cependant, en tant qu'homme politique, de s'interroger sur les raisons pour lesquelles 52 % des Britanniques ont voté contre l'Union.

Beaucoup des régions qui ont voté majoritairement en faveur du Brexit étaient animées d'une colère sociale que nous retrouvons dans d'autres régions européennes, notamment en France. L'Europe, trop ouverte, ne protégerait pas assez, entraînant une désindustrialisation. Elle affecterait le service public. Ces sentiments populaires – à distinguer du populisme – devront être écoutés et compris. Je recommande d'y répondre.

Nous avons commencé cet effort. La politique industrielle était quelques années auparavant un tabou. Elle est aujourd'hui évoquée ouvertement. Quand le Président de la République se propose de contrôler qui achète quoi chez nous, il s'agit d'une approche nouvelle. Nous investirons ensemble 750 milliards d'euros, en mutualisant pour la première fois des emprunts. Nous tirons ainsi des leçons, pour mettre en exergue la valeur ajoutée de l'Union européenne.

Beaucoup d'erreurs ont néanmoins été commises, en particulier l'excès de dérégulation qui, dans un grand vent libéral, a abouti à la crise financière. J'ai essayé, lorsque j'étais commissaire européen, de reconstruire une régulation financière. 41 lois ont été votées en ce sens durant mes cinq années de mandat, afin de remettre de l'éthique là où elle avait disparu, mais ce travail n'est pas terminé.

S'agissant du tourisme, je connais bien les conséquences du Brexit, au-delà de la pandémie actuelle. Les courts séjours de moins de trois mois ne subiront aucune conséquence du Brexit. Au-delà de trois mois, il appartient à chaque État d'attribuer ses visas.

Quant à la réglementation applicable en matière de droit du travail et de salaire aux sociétés britanniques de prestations de services – dont nous connaissons les conditions de travail –, elle sera celle du pays d'accueil. L'État concerné pourrait toutefois décider de conserver le système actuel et de leur attribuer les mêmes avantages que précédemment.

En matière culturelle, les échanges ne pourront pas se dérouler comme auparavant. Les Britanniques se sont montrés très peu volontaristes en matière de mobilité. Je le regrette. Nous leur avions proposé au départ d'être ambitieux, mais ils préfèrent appliquer leurs nouvelles règles d'immigration, très différentes de celles de la libre circulation. Les musiciens qui partent plusieurs semaines en tournée déplorent ces difficultés. Les Britanniques n'ont cependant pas souhaité conserver cette vision très large de l'Europe en matière de mobilité.

Par ailleurs, je vérifierai la situation du programme Europe créative. Tous les programmes ouverts à des pays tiers seront accessibles aux Britanniques, dans des conditions juridiques et financières, qui ne seront pas celles offertes aux membres de l'Union.

Enfin, je vous transmettrai une note relative aux droits d'auteur et à la propriété intellectuelle. L'accord de négociation se veut facilitateur dans ce domaine.

S'agissant de la coopération aéronautique, les règles d'origine s'appliquent, mais aucune barrière tarifaire ne concerne les échanges de pièces ; l'accord est équilibré et préserve globalement la situation actuelle.

Quant au transport maritime, il est un peu tôt pour mesurer les effets du Brexit. Des changements de liaison pourraient intervenir. Il conviendra d'observer la création de nouvelles lignes, notamment de fret, entre le continent et la République d'Irlande, qui souhaite être moins dépendante du Royaume-Uni en la matière.

Concernant l'article 50 du traité de Lisbonne, il était issu du traité instituant une Constitution pour l'Europe. Soutenu par M. Giscard d'Estaing, il visait à démontrer que l'Europe n'est pas une prison. Néanmoins, sortir du marché commun implique des conséquences, qui ne sauraient se reporter sur les autres membres. J'ai eu l'honneur de le mettre en œuvre le premier. Le processus a été long. Peut-être des ajustements seraient-ils souhaitables, mais ce dispositif me semble avoir fonctionné correctement dans le cas du Royaume-Uni.

En matière de concurrence, l'accord prévoit des dispositions dissuasives ou de compensation, pour en assurer la loyauté. Leur usage et leur efficience devront être examinés. Des outils et des échéances sont prévus pour en évaluer l'application. Le Brexit s'accompagne cependant d'innombrables conséquences inévitables, que l'accord limite simplement.

S'agissant de son niveau d'intégration avec l'Union européenne, la Grande-Bretagne se trouve tout en bas de l'escalier. Un accord de libre-échange sur mesure a été négocié, dans un contexte unique de divergence réglementaire, alors que ce pays frontalier de l'Union affiche avec elle des volumes d'échanges particulièrement importants. Néanmoins, un escalier peut être monté ou descendu. Notre porte demeure ouverte.

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J'ai le sentiment que vous ne négocierez pas cette remontée.

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Michel Barnier, conseiller spécial de la Présidente de la Commission européenne

Je pourrai un jour révéler mon opinion personnelle concernant les événements actuels, mais personne n'est indispensable.

Quant aux vaccins, une réponse commune a été impulsée par la Présidente Ursula von der Leyen. Des laboratoires ont été soutenus par les États-Unis, la Grande-Bretagne ou l'Europe, sans certitudes de délais ni même de résultat.

Décider à 27 pour la première fois était peut-être plus difficile que seul. Pour autant, je crois qu'il était positif d'avancer ensemble, pour que chaque membre soit traité équitablement.

Le temps en sera juge, mais je vous appelle à ne pas polémiquer avec le Royaume-Uni sur cette question. En tant qu'hommes et femmes politiques responsables, nous aurons déjà suffisamment de défis à relever dans le sillage de cette pandémie, que nul n'avait imaginée. J'espère que nous saurons préserver l'esprit de coopération européenne, en y incluant les Britanniques, même s'ils n'appartiennent plus à l'Union. La sécurité classique, sanitaire ou écologique, en sortira renforcée.

Le fonds d'ajustement permettra de compenser les effets négatifs du Brexit que chaque gouvernement évaluera pour ses différents secteurs.

Les risques de dumping devront être régulièrement évalués.

Concernant la sécurité alimentaire, tous les produits entrant sur le marché commun, qu'ils proviennent de Grande-Bretagne ou d'ailleurs, respectent les réglementations européennes, y compris sanitaires. Des contrôles sont réalisés, pour protéger les consommateurs européens, les budgets nationaux comme de l'Union, et détecter les contrefaçons.

Par ailleurs, les résidents britanniques – que nous sommes heureux d'accueillir – avaient acquis des droits jusqu'au 31 décembre 2020. Ceux-ci sont garantis par le premier accord ratifié en novembre 2019, pour eux-mêmes et leur famille, pour la durée de leur vie. Évidemment, la situation des Britanniques qui arriveront aujourd'hui, ou à l'inverse, de Français qui choisiraient de vivre au Royaume-Uni, ne sera pas la même.

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Je vous remercie encore pour vos efforts durant ces quatre dernières années et demie, ainsi que pour le temps plus bref que vous nous avez accordé aujourd'hui. Vous avez apporté des réponses précises à des questions complexes.

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Michel Barnier, conseiller spécial de la Présidente de la Commission européenne

Je vérifierai le point relatif au programme culturel, et j'apporterai – notamment à M. Herth – des compléments écrits dans les prochains jours. Je vous remercie de votre accueil.

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La situation n'est pas idéale, mais l'accord que vous avez conclu défend nos intérêts fondamentaux. Il fixe un cadre de coopération avec le Royaume-Uni, tout en préservant l'unité européenne.

Des leçons devront cependant être tirées de ce qui s'est produit. Il est nécessaire de répondre à la colère sociale. La conférence sur l'avenir de l'Europe – dont le lancement a été confirmé par les trois institutions européennes – sera l'occasion de se poser les bonnes questions : Que souhaitons-nous, voire que devons-nous accomplir ensemble, et comment ?

Les résultats de ces réflexions seront présentés au premier semestre 2022, durant la présidence française du Conseil.

Celle-ci aura trois maîtres mots : relance, puissance et appartenance.