Mission d'information sur l'émergence et l'évolution des différentes formes de racisme et les réponses à y apporter

Réunion du mercredi 14 octobre 2020 à 12h00

Résumé de la réunion

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  • discrimination
  • diversité
  • musée

La réunion

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La mission d'information procède à l'audition de Mme Agnès Saal, haute fonctionnaire à l'égalité, la diversité et la prévention des discriminations au ministère de la culture et de Mme Sophie Lecointe, cheffe du service de la coordination des politiques culturelles et de l'innovation.

La séance est ouverte à 12 heures 09.

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Voilà quinze jours, nous avons reçu le ministre de l'éducation nationale et, ce matin, nous avons reçu des représentants de la politique du logement. Nous recevons à présent Mme Agnès Saal, haute fonctionnaire à l'égalité, la diversité et la prévention des discriminations au ministère de la culture et Mme Sophie Lecointe, cheffe du service de la coordination des politiques culturelles et de l'innovation.

Notre mission d'information a été créée en décembre 2019. Notre objectif est de présenter un rapport dressant un état des lieux des différentes formes de racisme, en espérant proposer des pistes de réflexion pour rendre la lutte contre le racisme plus effective.

La culture est au cœur des débats historiques qui se posent au cours de nos travaux, nous l'avons constaté dernièrement avec les épisodes des statues déboulonnées ou la restitution des œuvres d'art. Certains événements historiques, tels que la guerre d'Algérie, laissent des traces relativement profondes et peuvent nourrir le racisme. Mais certaines expériences culturelles à destination des jeunes peuvent être la voie d'une meilleure appropriation de notre histoire.

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Avec l'aide de chercheurs et d'universitaires, nous avons posé le constat que la culture, la mémoire, l'histoire étaient autant de vecteurs pour combattre les préjugés et, par ricochet, les phénomènes de racisme.

Nous avons récemment reçu Pascal Blanchard dont j'ai visionné les documentaires récemment diffusés, qui sont très instructifs. Nous avons également l'intention d'explorer les éléments culturels, mémoriels, historiques d'outre-mer. Il serait intéressant que vous nous parliez de la culture, des cultures, de l'histoire de France, ou peut-être de ses histoires.

Voilà quelques années, le ministère de la culture a diffusé des publications sur l'apprentissage des langues : s'agit-il d'un levier pour permettre aux jeunes de s'approprier différentes cultures ?

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Agnès Saal, haute fonctionnaire à l'égalité, la diversité et la prévention des discriminations au ministère de la culture

Le sujet est d'une ampleur redoutable. Je me positionne du point de vue de la prévention des discriminations et de la promotion de la diversité et de l'égalité entre les femmes et les hommes.

La prévention des discriminations est une urgence absolue. Nous ne sommes jamais suffisamment armés.

Les champs sur lesquels j'interviens sont volontairement très larges. Dans la démarche de candidature du ministère de la culture aux deux labels de l'AFNOR, « diversité » et « égalité », nous avons réfléchi à tout ce qui pouvait prévenir les discriminations dans la sphère interne, au sein du ministère lui-même, dans ses services centraux et déconcentrés et dans les établissements publics qui en relèvent. Le but est d'agir à toutes les étapes des parcours professionnels, dans le recrutement, la promotion, la formation, l'égalité salariale, la communication, etc.

Nous avons totalement revu nos procédures de recrutement. Nous avons passé un marché avec la société Mozaïk RH pour diversifier les viviers. Grâce aux études de l'équipe du professeur Yannick L'Horty sur les testings dans la fonction publique, nous étions persuadés que les discriminations demeuraient. Celles du fait de l'origine y étaient malheureusement prégnantes.

Il m'a semblé que cette action serait insuffisante si elle ne couvrait pas également le champ des politiques culturelles. Le ministère de la culture est une puissance évidente en termes de construction d'un imaginaire. Un spectacle vivant, une exposition dans un musée, un documentaire, une série télévisée, un jeu vidéo sont autant de manifestations d'une force créatrice qui reflète ou non la réalité de notre société. Ces productions jouent un rôle essentiel en termes de stéréotypes implantés ou déconstruits, dans la manière dont l'Autre est perçu.

Nous avons ainsi fait en sorte que toute la sphère culturelle s'engage dans la démarche, en posant de fortes exigences de représentation de la diversité, y compris avec l'audiovisuel public.

Nous travaillons également avec d'autres partenaires très engagés sur ces sujets tels que le Défenseur des droits, la délégation Interministérielle à la lutte contre le racisme, l'antisémitisme et la haine anti-LGBT (DILCRAH), le Conseil supérieur de l'audiovisuel (CSA). Le but est de poser un diagnostic lucide sur la réalité : la diversité sur nos écrans, les scènes de musique, de danse et de théâtre n'est pas aussi présente qu'elle devrait l'être pour refléter la diversité française. Une fois cette prise de conscience effectuée, il nous faut agir efficacement sur les contenus culturels.

Vous avez raison d'évoquer le travail de mémoire et de réflexion sur un passé qui peut être douloureux. La création artistique contribue à cette reconstitution d'une histoire commune et d'un imaginaire collectif qui permet de se projeter dans l'avenir d'une manière plus sereine, plus apaisée et mieux partagée. Par exemple, nos artistes d'outre-mer n'ont pas encore la visibilité en métropole que leur talent appelle.

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Sophie Lecointe, cheffe du service de la coordination des politiques culturelles et de l'innovation

Nous sommes investis dans la dimension éducative et préventive des problématiques liées au racisme et à l'antisémitisme, dans une approche de démocratisation culturelle et d'accès à la culture.

Cette prise de conscience se matérialise par un choix politique de réorganisation du ministère. À compter de janvier 2021, une direction d'administration centrale sera chargée d'incarner les politiques à destination des habitants et des territoires. L'approche n'est pas la même que celle des « directions métiers » qui s'adressent à des professions : aux artistes, aux créateurs, aux acteurs du patrimoine ou aux médias.

Cette direction aura aussi la mission de veiller à la cohérence de nos politiques à destination des écoles d'architecture et des écoles de la création, notamment sur la diversité des étudiants, qui seront les artistes et les professionnels de la culture de demain. S'occuper du problème dès la scolarité permet à ces élèves de réaliser leur potentiel et d'influer par la suite sur les stéréotypes ou le manque de diversité de notre société.

Je pense que nous avons également un rôle à jouer, en complément de l'éducation nationale, sur les politiques destinées à la jeunesse. Nous travaillons pour déconstruire les stéréotypes, éveiller l'esprit critique des jeunes, notamment dans l'éducation aux médias et à l'information, y compris pour ce qui est de l'usage des réseaux sociaux et d'internet. Les professionnels de la culture peuvent diffuser leurs connaissances et leurs savoir-faire. Des journalistes et des scientifiques peuvent aider à déconstruire les fausses informations et aider à comprendre comment se propagent les rumeurs.

Nous intervenons aussi aux côtés de l'Agence nationale de la cohésion des territoires sur des politiques interministérielles à destination des territoires prioritaires. Nous concevons notre action dans une démarche d'égalité, de tolérance et d'ouverture. Tous les habitants doivent accéder à la vie culturelle. Notre objectif est de fonder un projet culturel qui porte des valeurs d'humanisme et qui respecte les spécificités culturelles, quelle que soit l'origine sociale ou géographique.

Nos directions régionales des affaires culturelles (DRAC) sont donc fortement investies dans les territoires, en lien avec les collectivités. Les moyens du ministère sont déconcentrés pour être au plus près des acteurs de terrains.

Les acteurs culturels sont aussi fortement mobilisés sur la question de la mémoire.

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Les discriminations dans l'audiovisuel sont flagrantes. Les réalités sont-elles différentes selon les endroits ? Des critères particuliers sont-ils ajoutés lorsque vous soutenez des programmes afin de promouvoir davantage de diversité ?

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Agnès Saal, haute fonctionnaire à l'égalité, la diversité et la prévention des discriminations au ministère de la culture

La frilosité sur cet aspect reste forte. La présence des femmes s'est accrue dans les modalités d'accès aux moyens de création et de production, même si nous ne sommes pas encore parvenus à une égalité. Nous avons quantifié des objectifs extrêmement précis dans la feuille de route pluriannuelle « égalité » dont le ministère s'est doté depuis 2018. Le but est une progression significative des femmes à la tête des institutions culturelles et de leurs programmations, sur les plateaux de télévision et de cinéma.

En revanche, sur les autres critères de discrimination que sont le handicap, le lieu de résidence, l'orientation sexuelle, l'appartenance syndicale, l'état de santé, la vulnérabilité économique, l'origine et les vingt-cinq critères interdits au code pénal, nous n'avons pas encore posé d'exigences, par exemple dans la nomination de personnes issues de la diversité à la tête des institutions culturelles ou dans la programmation. La diversité d'origine n'est pas encore réellement représentée, malgré quelques exceptions.

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Les parcours d'excellence des grandes écoles sont ouverts sur concours. Nous ne pouvons donc pas nier l'objectivité sur laquelle ils se basent pour opérer une sélection. L'épreuve de culture générale amène toutefois des candidats potentiels à se fixer une limite – de même que d'autres épreuves qui pourraient la remplacer (droit, philosophie, capacités rédactionnelles). Elle ne se prépare pas dans une salle de classe, mais dans des lectures, des lieux de culture. Une approche globale pourrait-elle être envisagée, sur un public cible, pour amener une tranche d'âge à décloisonner ses apprentissages, à s'enrichir seule, hors des lieux conventionnels ?

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Sophie Lecointe, cheffe du service de la coordination des politiques culturelles et de l'innovation

La culture générale et la manière dont on appréhende les connaissances culturelles partagées par tous tout au long de son parcours de vie est aussi un socle qui fait société. Il ne faudrait pas qu'il y ait une appréhension particulière à avoir une pratique artistique au quotidien. Cette culture ne devrait pas être réservée à quelques élèves, dans le contexte plus favorisé d'un établissement de centre-ville.

Notre ambition est que 100 % des enfants bénéficient de l'éducation artistique et culturelle. Au-delà du cadrage juridique existant, les enseignants, les éducateurs et tous les adultes qui accompagnent les jeunes doivent mener un travail protéiforme. Nous œuvrons en partenariat avec l'éducation nationale, mais aussi avec les acteurs culturels qui vont au-devant de la jeunesse dans les établissements scolaires. Nous cherchons à leur fournir des conditions de réalisation les plus favorables, à sensibiliser les chefs d'établissement, le monde enseignant, les partenaires éducatifs que sont les centres de loisirs.

Les familles ont aussi un rôle à jouer dans la manière de s'approprier la démarche dès la petite enfance. Nous avons un enjeu avec les tout-petits, qui sont encore dans un lien fort avec les parents et qui se distend quelque peu avec l'école. Nous pouvons ainsi toucher de jeunes adultes, qui ne sont pas forcément sensibilisés, et faire entrer les livres, la musique, les partenariats artistiques, la danse ou l'expression corporelle. Les enfants ont alors le sentiment que tout le monde a droit à la culture.

Le Pass Culture vise à aider les jeunes de plus de 18 ans à ne pas avoir d'obstacle financier à pratiquer une activité culturelle ou artistique, à accéder à une offre culturelle en autonomie. Il est cependant préférable d'avoir été suffisamment accompagné dans l'enfance pour franchir la porte d'un opéra, d'un théâtre ou d'un musée.

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Agnès Saal, haute fonctionnaire à l'égalité, la diversité et la prévention des discriminations au ministère de la culture

La discrimination peut être volontaire et inconsciente et se situe à l'entrée même des établissements culturels, indépendamment même du contenu de la programmation.

Des établissements comme le Centre Pompidou, le musée d'Orsay, Universcience ont pensé qu'une solution pouvait être de sortir des murs pour aller à la rencontre de populations qui ne franchiront jamais naturellement le seuil de leur établissement, quelles que soient la richesse, la qualité et l'accessibilité des propositions culturelles et artistiques. Cette proximité peut remédier en partie à ce qui n'a pas eu lieu au moment des parcours d'éducation et dans le cercle familial.

Dans le cinéma et l'audiovisuel, il existe une question de stéréotype des personnages représentés. Heureusement, nous progressons, comme en fait état le dernier observatoire de la diversité du CSA, mais il n'est pas normal que les personnages non blancs soient toujours dans des rôles négatifs ( dealers, etc.).

De même, un travail doit être mené dans la diversité même des viviers de talents. Des associations comme Mille Visages œuvrent dans ce domaine. Avec le Collectif 50/50, nous avons créé un recueil professionnel des talents issus de la diversité. La présidente de France Télévisions s'est engagée à faire appel aux personnes qui y sont inscrites dans les programmes produits ou coproduits par ses chaînes.

L'Opéra de Paris vient également de confier une mission à l'universitaire Pap Ndiaye et à la secrétaire générale du Défenseur des droits, Constance Rivière, pour réfléchir à la question de la diversité à l'Opéra de Paris. Alexander Neef, nouveau responsable de l'Opéra, considère nécessaire d'interroger les pratiques au sein même de ses équipes techniques, artistiques ou administratives. La mission doit également réfléchir au répertoire lyrique et chorégraphique. Vous évoquiez les statues déboulonnées, mais il y a peut-être des manières plus constructives de revoir le répertoire.

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Le vivier dont vous parliez existe et tente de s'exprimer, encore faut-il lui offrir la possibilité d'accéder à la haute fonction publique, au Centre Pompidou. Je suis un ancien élu de la ville de Metz et accueillir le Centre Pompidou à Metz a été une réelle satisfaction. Cette idée était extraordinaire, car elle a permis de développer des parcours d'artistes, en amenant la culture dans tous les foyers messins, en complément des projets comme Démos, l'un des plus magnifiques qu'il m'ait été donné de voir.

Notre administration centrale a aussi un devoir d'exemplarité. Sur le champ culturel, la diversité est-elle représentée ? Le Centre Pompidou Metz a été une opportunité de développer la culture sur le territoire, mais la diversité n'est pas présente dans les expositions. Le récit historique de 1917 n'a par exemple pas montré la place des populations issues des immigrations récentes. De même, ces dernières ne connaissent pas suffisamment la guerre de 1870, alors qu'elles sont françaises.

Par ailleurs, de nombreux acteurs de la guerre d'Algérie sont toujours présents à des postes à responsabilités et ferment la porte à quelqu'un d'origine algérienne ou ayant la double nationalité.

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Agnès Saal, haute fonctionnaire à l'égalité, la diversité et la prévention des discriminations au ministère de la culture

Vous avez raison : l'État devrait être exemplaire. Je ne pense pas que le ministère de la culture soit plus défaillant que d'autres administrations, mais je crains qu'il ne soit pas meilleur. En l'état actuel de la composition des postes d'encadrement, les plus visibles, je dois admettre que nous ne sommes pas représentatifs de la diversité de la société française.

Nous avons donc jugé indispensable de nous rapprocher d'une population qui a toutes les compétences requises pour rejoindre ces métiers, mais qui n'y vient pas parce qu'elle pense ne pas y avoir accès, grâce à notre partenariat avec Mozaïk RH. Nous avons transmis une liste de postes à pourvoir, de catégorie A, de manière à ce que le cabinet recherche les profils les plus adéquats et nous les présentent. Le processus de recrutement est ensuite classique et tient compte des compétences, de l'adéquation par rapport au besoin sans rien céder sur l'excellence, la qualité et l'exigence. Il serait méprisant d'agir autrement.

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Sophie Lecointe, cheffe du service de la coordination des politiques culturelles et de l'innovation

Nous avons recensé les lieux qui possèdent des collections sur la thématique de la mémoire, y compris des lieux religieux identifiés comme patrimoine du XXè siècle. Pour répondre au rapport de la Commission nationale consultative des droits de l'Homme, nous avions comptabilisé 475 structures patrimoniales investies dans ce travail de mémoire. Nous aimerions les associer à l'offre accessible par le Pass Culture, en créant des passerelles.

Le Musée national de l'histoire de l'immigration, au palais de la Porte Dorée, est également porteur de cette démarche de mémoire et d'ouverture. Depuis deux ans, il organise un festival autour de la lutte contre le racisme et l'antisémitisme, qui a trouvé sa place dans l'actualité culturelle.

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Estimez-vous que les budgets pouvant rendre la culture accessible à tous sont suffisants ? Une grande partie de ces actions ne sont-elles pas financées par les crédits de la politique de la ville ?

En outre, le chef-d'œuvre Les Misérables, de Ladj Ly, a rencontré de fortes difficultés à trouver des financements, notamment auprès du Centre national du cinéma et de l'image animée (CNC). N'est-il pas plus complexe pour des artistes issus des quartiers populaires d'accéder à ces budgets dont ils ont terriblement besoin ?

Je souhaite cependant souligner les actions positives qui se déroulent dans ma circonscription. À Argenteuil, nous bénéficions d'un partenariat avec le musée du quai Branly. J'ai également le souvenir d'avoir découvert la Comédie française alors que j'étais dans un collège en zone prioritaire. Ces démarches lèvent des barrières et permettent de recréer du lien et de la confiance.

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Sophie Lecointe, cheffe du service de la coordination des politiques culturelles et de l'innovation

Le principe de l'action sur des territoires prioritaires, notamment dans le cadre de la politique de la ville, est de mobiliser les moyens de droit commun du ministère. Chaque fois qu'une DRAC signe une convention avec un département ou un établissement public de coopération intercommunale (EPCI), elle doit prendre en compte les zones qui nécessitent une attention particulière dans le cadre de la politique de la ville ou de zones rurales enclavées. Les DRAC doivent respecter les grands axes stratégiques du ministère : l'accès de tous les enfants à l'éducation artistique et culturelle et la solidarité territoriale.

Par ailleurs, la loi prévoit que les politiques culturelles sont co-construites avec les collectivités territoriales. Elles sont extrêmement présentes dès lors que les moyens du ministère sont insuffisants.

Enfin, les établissements publics doivent rendre des comptes sur l'attention aux publics, y compris les plus éloignés de la culture, dans le cadre d'actions hors les murs et de partenariats. Les partenariats expérimentés dans la région Île-de-France entre les grands établissements publics nationaux et les quartiers de la politique de la ville s'étendent progressivement en province. Au-delà du spectacle, l'objectif est aussi de comprendre ce qui se passe derrière le décor, comment se construit une représentation ou une exposition, pour faire naître des vocations.

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Agnès Saal, haute fonctionnaire à l'égalité, la diversité et la prévention des discriminations au ministère de la culture

Vous avez raison, Ladj Ly n'a pas eu accès à l'avance sur recettes. En revanche, la réussite commerciale du film est une réelle incitation à soutenir ce type de projet. Elle a également produit un effet d'entraînement en termes de rôles modèles.

Il me semble que le soutien financier doit être généraliste. Il était certainement nécessaire, à une époque, qu'il y ait un fonds Images de la diversité, cofinancé par le CNC et l'Agence nationale de la cohésion des territoires ; mais de notre point de vue, l'idéal serait que tous les dispositifs de soutien financier au cinéma et à l'audiovisuel intègrent cette préoccupation majeure de refléter la diversité des talents de la société française.

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Un musée sur la décolonisation aurait-il une place ? Pascal Blanchard milite en ce sens. Tous les témoignages sur le travail de mémoire laissent entendre que ces sujets sensibles devraient entrer dans un musée pour en exposer toutes les facettes.

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Agnès Saal, haute fonctionnaire à l'égalité, la diversité et la prévention des discriminations au ministère de la culture

Nous pourrions imaginer qu'un lieu patrimonial spécifique soit dédié à l'histoire de la colonisation. Nous comprenons les souhaits exprimés avec talent par Pascal Blanchard.

Une autre option pourrait consister à s'emparer de la totalité de notre histoire, dans ses ombres et ses lumières, dans toutes nos institutions culturelles existantes. Quand le musée d'Orsay a proposé une exposition sur l'image du Noir dans les collections, le public était au rendez-vous. Il s'agissait d'une manière de réinterroger l'histoire de l'art. L'institution était à sa juste place en entreprenant ce travail de réinterprétation, de réécriture et de relecture de ses propres collections.

Nous pouvons aussi nous interroger sur l'avenir et sur la manière de donner aux jeunes créateurs d'art contemporain la place qu'ils méritent dans les institutions, au-delà de la réflexion sur un passé parfois douloureux. La programmation du Centre Pompidou montre que les efforts sont nécessaires. Celle du Palais de Tokyo laisse, quant à elle, à penser que cette place commence à se libérer, ce qui est porteur d'espoir pour la jeune génération.

La séance est levée à 13 heures 05.