La commission entend M. François Villeroy de Galhau, gouverneur de la Banque de France.
En cette fin d'après-midi, nous recevons M. François Villeroy de Galhau, gouverneur de la Banque de France, pour la première fois depuis qu'il a été reconduit dans ses fonctions, après que nous l'ayons auditionné afin de donner un avis, largement positif, sur cette proposition de nomination. Il s'agit très certainement de la dernière fois que nous vous recevons dans le cadre de la commission des finances au cours de cette législature, car l'Assemblée nationale suspendra ses travaux dans une quinzaine de jours.
Nos sujets d'intérêt commun sont nombreux, depuis l'achèvement de l'union bancaire à l'échelle européenne jusqu'à la politique monétaire de la Banque centrale européenne (BCE) ou encore l'état de la dette publique.
Vous vous êtes exprimé à plusieurs reprises depuis le début de l'année. Le vendredi 4 février 2022, vous avez affirmé au Warwick Economics Summit : « Nos institutions économiques européennes peuvent être comparées à un trimaran. Ce trimaran possède déjà une coque centrale robuste composée de la BCE et de l'eurosystème avec sa politique monétaire unique crédible. Deux flotteurs doivent venir parachever ce vaisseau. Un flotteur public doté d'une capacité budgétaire commune permanente et un flotteur privé avec l'union bancaire et l'union des marchés de capitaux sont nécessaires. » Il s'agit d'une belle image. Toutefois, il manque une voile à ce dispositif. Je suis certain que vous ne l'oublierez pas lorsque vous quitterez le port. Cette audition nous permettra d'évoquer le rôle de cette coque centrale et celle de ces deux flotteurs, pour reprendre votre métaphore.
Avec l'indépendance qui s'impose à la Banque de France, j'évoquerai l'empreinte du Covid-19 sur notre économie à court terme, qui ne doit pas masquer les défis structurels de notre pays, puis j'aborderai les évolutions positives récentes en matière de réglementation bancaire et assurantielle.
Tout d'abord, l'économie française a connu en 2021 sa plus forte croissance depuis plus de cinquante ans. Elle s'établit à 7 % selon l'INSEE. Notre pays fait preuve d'une remarquable capacité de rebond, après avoir un peu plus souffert que ses voisins européens lors du premier confinement. En 2022, la croissance devrait rester vigoureuse. Elle atteindra 3,6 %, selon notre prévision de décembre 2021. Nous publierons le jeudi 10 février 2022 notre enquête de conjoncture menée début février auprès de 8 500 entreprises. Même si le point publié ce soir par l'INSEE reste prudent, tout laisse penser que l'activité a bien résisté en ce début d'année, malgré les difficultés de certains services, comme l'hébergement et la restauration. Après avoir rattrapé son niveau pré-Covid-19 l'été dernier, le produit intérieur brut (PIB) rejoindrait ainsi en 2023 sa trajectoire de croissance antérieure et la pandémie ne laisserait que peu de cicatrices sur l'économie française.
Ces mêmes succès justifient de résister fermement aujourd'hui à un retour du « quoi qu'il en coûte ». En effet, les entrepreneurs n'ont pas vocation à être subventionnés à vie, car les entreprises témoignent d'une situation plutôt meilleure que ce que l'on pouvait craindre. Ainsi, l'analyse de la cotation de leur risque de crédit montre que la part des entreprises en bonne situation financière (cote 1+ à 4+) est restée stable par rapport à 2019 et dépasse les 60 %. Depuis fin 2019, leur endettement brut a crû significativement (+237 milliards d'euros à la fin du mois d'octobre 2021), mais leur trésorerie a augmenté presque autant (+230 milliards d'euros). In fine, la dette nette des entreprises est quasi identique à celle de fin 2019 (+0,4 %).
Les prêts garantis aux entreprises (PGE) ont représenté un succès français assez remarquable. Ils ont largement soutenu les entreprises françaises pendant la crise, surtout des petites et moyennes entreprises (PME) et des très petites entreprises (TPE). Selon nos estimations, plus de 95 % des entreprises — y compris des PME et TPE — sont en situation de rembourser ces PGE en temps et en heure. Il s'agit d'une bonne nouvelle, car si les entreprises ne remboursaient pas leur PGE, nous tous — ou nos enfants —devrions tôt ou tard rembourser l'addition à travers la dette publique. Près de la moitié des PGE pouvant commencer à être remboursés l'étaient déjà partiellement ou totalement à la fin de l'année 2021. Par ailleurs, la récente signature d'un accord de place permettra un aménagement supplémentaire des PGE pour les entreprises en difficulté, avec un suivi au cas par cas incluant la médiation du crédit adossée à la Banque de France.
Concernant le solde extérieur, les chiffres de la balance des paiements que nous avons publiés ce matin confirment hélas l'alourdissement de la facture énergétique et du déficit des biens. Toutefois, l'excédent sur les services a fortement augmenté par rapport à 2019 et 2020.
Les entreprises éprouvent cependant des difficultés sérieuses d'approvisionnement du fait de la reprise économique qui, combinée à la hausse des prix de l'énergie, suscite incontestablement une poussée d'inflation en France, à 3,3 % en janvier après 3,4 % en glissement fin 2021 (selon l'indice harmonisé au niveau européen). C'est nettement moins que la moyenne de la zone euro (à 5,1 %). Néanmoins, cette « bosse » est plus haute et plus longue que prévu, tandis qu'elle suscite beaucoup d'interrogations chez nos concitoyens. Pour autant, elle devrait rester temporaire. En effet, d'ici quelques mois, l'inflation en France devrait diminuer progressivement, pour repasser ensuite sous la barre des 2 %. Nous préciserons mi-mars 2022 le calendrier prévisionnel de cette décrue. Je garantis que nous, Banque centrale européenne et Banque de France, ferons ce qu'il faut pour que l'inflation revienne autour de 2 %, dans la durée, en zone euro et a fortiori en France. Nous en avons le mandat, nous en avons la capacité, nous en avons la volonté. En France, ce processus contribuera à conforter les gains de pouvoir d'achat en moyenne, significatifs ces dernières années avec un gain par habitant avoisinant 8 % cumulé sur la période 2015-2021, même si nous sommes conscients que ce taux cumulé ne recouvre pas la diversité des situations individuelles. Les Français peuvent avoir pleine confiance dans la stabilité de leur monnaie, l'euro. Nous en fêtons d'ailleurs cette année le vingtième anniversaire, avec un soutien très élevé des Français, qui atteint 74 % d'avis favorables.
Si l'image est aujourd'hui celle d'une bosse d'inflation et d'une croissance vigoureuse, les préoccupations devraient s'inverser à moyen terme. Ainsi, d'ici deux ans, l'inflation devrait atteindre à nouveau la cible de 2 %, tandis que la croissance ralentirait à 1,4 %. Toutefois, il serait souhaitable de viser un objectif plus ambitieux de croissance potentielle, entre 1,5 % et 2 %, soit un gain d'un demi-point. Seule cette ambition permettrait de mieux concilier pouvoir d'achat des ménages et maîtrise de la dette publique. Ce gain d'un demi-point relèverait, selon nos estimations, pour un tiers des deux transformations européennes à venir — numérique et écologique — et des investissements associés.
Cependant, l'essentiel du chemin tient à un défi français : celui de l'insuffisance de l'offre de travail. La France fait face à un paradoxe inacceptable : des difficultés de recrutement exprimées par plus de 50 % des entreprises, malgré 2,4 millions de chômeurs, dont 600 000 jeunes. Notre déficit de taux d'emploi par rapport à l'Allemagne représente près de 3 millions d'actifs. La majorité d'entre eux sont des jeunes et des seniors. Si nous réussissons collectivement à résorber ce déficit, notamment par l'apprentissage, la formation professionnelle et une réforme des retraites équilibrée, alors nous pourrons augmenter notre croissance potentielle dans les cinq ans et viser, d'ici dix ans, le plein emploi et le désendettement.
L'autre défi pour la politique économique française correspond en effet à celui de l'endettement public. Si son augmentation était justifiée face à la crise du Covid-19, nous devons aujourd'hui nous inquiéter d'une dette qui resterait au niveau de 115 % du PIB. Elle ne serait pas soutenable, en particulier avec des taux d'intérêt plus élevés. Une stratégie de désendettement crédible s'avère possible en combinant trois ingrédients dont le dosage relève du gouvernement et du Parlement : le temps — une stratégie sur dix ans pour revenir aussi nettement que possible sous 100 %, soit le niveau pré-Covid-19 — ; la croissance — augmentée par les réformes précitées — ; et une meilleure efficacité et maîtrise de nos dépenses publiques. Ces dernières sont les plus élevées non seulement d'Europe mais de tous les pays développés. Or il ne s'agit pas de les réduire globalement mais de tendre vers leur stabilisation en volume.
Notre cadre prudentiel a contribué à renforcer la résilience des banques françaises. Leur solidité face à la crise du Covid-19 en témoigne. Contrairement à des craintes régulièrement exprimées par l'industrie bancaire, cette solidité ne s'est en rien opérée au détriment du financement de l'économie française. En effet, depuis dix ans, et y compris en 2020 et 2021, le crédit bancaire en France a augmenté en moyenne de 4,5 % par an (5,2 % pour les PME, 4,7 % pour le crédit immobilier).
La Commission européenne a présenté fin octobre 2021 sa proposition de transposition. Elle tient fortement compte des préoccupations françaises, tout en restant pour l'essentiel compatible avec l'accord international de décembre 2017. Il nous faudra maintenir cet équilibre lors du processus d'adoption qui s'est engagé sous la présidence française de l'Union européenne. Or cet équilibre serait rompu si le caractère transitoire des dérogations sur les entreprises non notées ou l'immobilier était remis en cause. Ici se joue la crédibilité internationale de la France et de l'Europe. J'insiste : aucune banque française n'aura à réduire globalement ses financements ni à réaliser d'augmentation de capital dédiée. Ainsi, vous avez sans doute noté que plusieurs d'entre elles, tout en s'inquiétant encore et toujours de Bâle 3, annoncent au contraire des plans de rachat d'actions.
Du côté des assurances, Solvabilité II a également permis aux organismes d'affronter la crise avec une grande solidité, sans pour autant pénaliser la compétitivité des assureurs. Depuis près de dix ans, le marché français affiche un résultat net supérieur à 10 milliards d'euros. La révision en cours de Solvabilité II — qui devrait également progresser sous la présidence française de l'Union européenne — permettra de mieux prendre en compte l'environnement de taux bas et de faciliter l'investissement durable de long terme (soutien de l'investissement en actions, intégration d'objectifs climatiques), sans accroître les exigences globales de fonds propres des assureurs.
Concernant l'inflation, vous demeurez constant en indiquant qu'il s'agit d'une poussée transitoire. Il est possible de proposer une opinion inverse, bien que je ne la soutienne pas économiquement. Il existe beaucoup de tensions dans ce vaste monde. Or elles n'ont pas uniquement trait aux chaînes de valeur ou d'approvisionnement. Nous avons tous en tête les diverses tensions géopolitiques qui traversent la planète. Parallèlement, nous constatons une poussée salariale, le pouvoir d'achat ayant été soutenu puissamment dans beaucoup de pays, dont la France. Le pouvoir d'achat a été protégé. L'inflation n'est-elle pas un phénomène plus durable ? S'agit-il d'un avantage ou d'un inconvénient pour la dette française ?
Je m'intéresse à votre opinion quant à la politique monétaire et à ses instruments. De nouveaux instruments ont été créés et sur-sollicités pendant cette crise. Pensez-vous que cette crise recouvre des enseignements sur ce sujet ?
Nous vivons une « réinvention » de la monnaie avec la mise en œuvre de monnaies privées et numériques. La politique monétaire peut-elle évoluer sur ce sujet ?
Enfin, comment les règles de Maastricht pourraient-elles évoluer dans les prochains mois ?
S'agissant de l'inflation, les banquiers centraux doivent faire preuve d'une grande modestie. Nous vivons une situation sans précédent qui nous a tous surpris. Il y a un an, l'inflation atteignait -0,3 % dans la zone européenne. Aucun d'entre nous ne pouvait présager la « bosse » d'inflation que nous connaissons désormais. Cette dernière est plus haute et plus longue que prévu. Nous en préciserons le calendrier en mars 2022, lors de nos prochaines prévisions. Néanmoins, j'ai confirmé le caractère temporaire de cette inflation, car deux des facteurs cités, la crise de l'énergie et les tensions sur l'approvisionnement, ne perdureront pas. Si les prix de l'énergie demeurent à ce niveau élevé, cette composante disparaîtra mécaniquement de l'inflation, car nous nous comparons au niveau de l'année précédente. Il s'agit d'un élément fort de décrue de l'inflation. À propos des tensions d'approvisionnement, elles semblent durer plus longtemps que prévu. Toutefois, lorsque nous interrogeons les chefs d'entreprise sur la durée de ces tensions, tous s'accordent pour évoquer une période de quelques mois à un an maximum.
Vous avez mentionné la question salariale. Il ne revient pas à la banque centrale de donner des consignes concernant une éventuelle augmentation des salaires. Dans certains secteurs, une hausse salariale serait justifiée. Cependant, ces éléments relèvent de la négociation décentralisée par branche et par entreprise. S'il devait exister un enchaînement prix/salaires — ce que nous ne constatons pas aujourd'hui en France ou en zone euro —, nous serions amenés à réagir plus fortement sur le plan de la politique monétaire. En effet, une telle spirale ne serait dans l'intérêt de personne.
Concernant la politique monétaire, je ne crois pas avoir changé d'avis quant aux instruments existants. La BCE, comme ses grandes homologues mondiales, a montré sa capacité d'adaptation à des situations nouvelles. Toutefois, nous devons faire preuve de pragmatisme quant au changement des données réelles sur l'inflation. En effet, nous nous dirigeons vers une normalisation progressive. Je resterai totalement pragmatique quant au rythme de cette normalisation qui sera déterminé par les données observées sur l'inflation et l'analyse économique réelle.
Vous avez soulevé la question des nouvelles formes de monnaie. À mon sens, le terme « monnaie » n'est pas approprié concernant des actifs privés ou cryptoactifs. Je note les évolutions du projet Libra. Ces cryptoactifs comportent une part de progrès technologiques bienvenus autour de la blockchain, sur laquelle nous devons rester ouverts, tandis que les risques et dangers devront être régulés. Je ne crois pas que ces actifs puissent durablement prétendre au statut de cryptomonnaie ou de monnaie. Personne n'en est responsable, ils ne sont pas universellement acceptés et leur valeur reste extrêmement volatile.
Sur les règles de Maastricht, la négociation relève des autorités politiques et elle prendra du temps. Il paraît toujours souhaitable d'avoir des règles. Ce phénomène peut contribuer au désendettement de notre pays. Cependant, ces règles doivent être plus simples, mieux partagées et plus crédibles, en particulier celles qui concernent les normes de dépense. La discussion en Europe se focalise toujours sur les budgets. Lorsque je regarde notre union économique et monétaire, nous disposons d'une coque centrale avec la BCE et la politique monétaire. Il nous manque deux flotteurs latéraux : d'une part, un flotteur public, correspondant à une capacité budgétaire commune ‑ en effet, il serait opportun pour l'Europe d'évoluer vers des règles budgétaires nationales dont nous avons besoin ‑ ; d'autre part, un flotteur privé, à ce jour sous-développé, permettant de mieux mutualiser l'épargne des Européens. Cela constituerait un stabilisateur puissant, dans le cadre de l'union des marchés de capitaux et des marchés bancaires. Je souhaiterais que la discussion des Européens mette autant d'énergie sur ce flotteur privé que sur les règles du pacte de stabilité. Toutefois, il ne s'agit pas du seul sujet que nous avons à traiter pour renforcer la zone euro.
Sur la question de l'inflation, il semble que la perception ne soit pas identique entre les États-Unis, leur Federal Reserve System (Fed) et la BCE. La réaction de la Fed a été différente de celle de la BCE. L'inflation est-elle de nature identique aux États-Unis et en Europe ?
Vous avez rappelé que nous souhaitions revenir à un taux d'inflation de 2 %. Cela correspondrait éventuellement à une politique monétaire plus contraignante. Quels en seraient les effets sur la croissance ?
Vous avez indiqué que le manque de main-d'œuvre constituait un handicap pour la croissance de l'économie française. Des débats politiques actuels traitent de l'augmentation du salaire minimum interprofessionnel de croissance (SMIC). Ce phénomène pourrait-il nuire à la compétitivité du pays ?
Enfin, une enquête est en cours concernant le non-recours aux dispositifs de protection contre le surendettement. Disposez-vous des premiers résultats ?
Concernant l'insuffisance de l'offre de travail, vous évoquez 2,4 millions de chômeurs. Il est essentiel d'agir rapidement sur la formation des jeunes et de disposer de réponses concrètes sur la question des retraites. Or il est vrai que le sujet de la formation des jeunes n'est pas nouveau. Ce thème a d'ores et déjà été l'objet d'un grand nombre de réformes récentes. Pensez-vous qu'il est possible de réagir rapidement sur ces deux questions ? L'insuffisance s'avère criante, car de nombreux secteurs affichent un manque de main-d'œuvre. Dans le cas contraire, comment mesurer les impacts ?
Le PGE a apporté une aide importante aux entreprises. Nous arrivons dans la période de remboursement, avec d'éventuels allongements de sa durée de six à dix ans. Avez-vous connaissance d'entreprises qui feraient face à des difficultés quant à l'allongement de la période de remboursement ? Dans de tels cas, le médiateur du crédit a-t-il déjà été saisi ?
L'importante inflation aux États-Unis et en Europe pose de nombreuses difficultés. Conformément à son mandat et aux propos récents de Mme Christine Lagarde à l'issue de la réunion des gouverneurs, la BCE devrait s'engager dans une normalisation très progressive de sa politique monétaire. Quels seraient les impacts de cette normalisation progressive, y compris sur les acteurs financiers et les politiques économiques des différents gouvernements ? Les annonces réalisées par la BCE ont entraîné un petit choc de taux, notamment en Italie. Pensez-vous que les réformes mises en place par la zone euro ces dernières années permettront d'éviter une nouvelle crise ? Quid des conséquences de ce choc de taux sur les différentes économies et budgets des États ?
Au groupe UDI, nous sommes très attachés au défi que représente le désendettement. Nous avons traversé une période très compliquée. Une question demeure sur la dette Covid-19, qui atteint 165 milliards d'euros. En effet, le Gouvernement a choisi de la rembourser à hauteur de 1,9 milliard par an. À titre de comparaison, lorsque nous achetons une voiture, le banquier nous permet d'emprunter pendant quatre à cinq ans, soit la durée de vie du véhicule, non sur vingt-cinq ans. Il s'agit ici d'une dette ponctuelle que nous rembourserons pendant 80 ans. Quid d'un nouvel événement de ce type dans les 80 prochaines années ? N'est-il pas irréaliste, voire irresponsable, de rembourser une dette constituée lors d'un événement spécifique pendant 80 ans ?
Au regard de la situation, le sujet important demeure celui de la croissance dont le rebond salutaire nous rapproche du PIB de 2019. Cependant, il est financé avec des déficits publics. Nous ne pouvons pas continuer dans cette voie. Quelles sont les mesures à prendre ? Quelles sont les solutions existantes pour réduire nos dépenses publiques dans un pays qui apprécie de créer régulièrement de nouveaux services ?
Le passage du taux de rémunération du livret A de 0,5 à 1 % est positif. Toutefois, en comparaison du rythme de l'inflation, il existe un véritable décalage voire un décrochage. Quel est votre commentaire concernant ce niveau de hausse du livret A qui a été adopté à la suite de votre proposition au ministre de l'économie ?
Je souhaite aborder un sujet sur lequel, mon collègue Éric Coquerel a rédigé une tribune. La Banque de France a été encouragée à la disparition de la monnaie fiduciaire, portée par différents gouvernements, notamment dans le cadre du rapport CAP 22. Cela s'est concrétisé par l'effondrement des effectifs de la Banque de France : moins 3 500 personnes en dix ans. Cet encouragement à la disparition de la monnaie fiduciaire, qui correspond à une augmentation des transactions électroniques, engendre plusieurs conséquences. En premier lieu, nous assistons à une augmentation des frais bancaires liés à ces transactions électroniques. Ensuite, nous constatons une fermeture des agences bancaires : 63 700 fermetures en dix ans. Enfin, des automates ont été fermés (6 620 en 2020). Ainsi, moins de 20 % des communes disposent d'un distributeur de billets. Pourtant, comme pour tous les services de proximité, cette dématérialisation de la monnaie et des services afférents occasionne des conséquences dans le maintien des commerces de proximité ; pour les 17 % de la population qui ne peuvent pas utiliser Internet pour procéder à des transactions ; et pour 10 à 15 % de la population qui n'ont pas d'alternative à l'argent liquide, notamment les ménages les plus fragiles. L'usage de la monnaie fiduciaire, gratuite et accessible à tous, constitue un facteur de cohésion sociale, un rempart contre l'exclusion ainsi qu'un moyen de paiement fiable compte tenu du taux de fraudes à la carte bancaire. Ne considérez-vous pas que ce plan stratégique menace l'accès gratuit aux espèces ?
Par ailleurs, je souhaite rappeler que vous avez annoncé la fermeture de 14 caisses régionales d'ici 2024. Par conséquent, vous abandonnez à des sociétés privées de transport de fonds une part croissante du tri des billets, mission institutionnelle importante de la banque centrale. L'avenir de la filière fiduciaire n'est-il pas également menacé ?
Au travers de la politique de quantitative easing, la BCE procède à une injection massive de liquidités dans l'économie européenne. Cette injection, qui augmente la masse monétaire, peut être à l'origine d'une augmentation de l'inflation pour des raisons monétaires. Partagez-vous cette analyse ? Existe-t-il une composante monétaire dans l'inflation que nous constatons ? Vous indiquez que la BCE et la Banque de France feront ce qu'il faut pour freiner l'inflation. J'imagine que vous pensez à l'augmentation des taux d'intérêt et donc au retour de l'usage d'un instrument plus conventionnel. Pourriez-vous préciser vos intentions dans ce domaine ?
Par ailleurs, la France enregistre un déficit de sa balance des biens à hauteur de 85 milliards d'euros en 2021, tandis que l'Allemagne enregistre un excédent très important. Cette situation pourrait laisser penser que l'euro serait sous-évalué pour l'Allemagne et surévalué pour la France. Comme ces deux pays disposent de la même monnaie, les mécanismes d'ajustement monétaires ne sont pas en action, ce qui constitue un inconvénient majeur en présence d'économies aux performances différentes en termes de compétitivité. Quel est votre point de vue sur cette analyse ?
Vous avez comparé nos institutions économiques européennes à un trimaran. Vous indiquez qu'un flotteur privé serait nécessaire pour favoriser une meilleure allocation du capital. Vous plaidez en faveur du renforcement de l'union bancaire des marchés de capitaux pour favoriser la libre circulation des capitaux dans l'ensemble de l'UE. Vous proposez de renommer cette union bancaire union de financement pour l'investissement et l'innovation. Quelles sont vos intentions avec cette nouvelle dénomination ?
Aujourd'hui, les collectivités territoriales sont considérées comme des emprunteurs aussi fiables que l'État et disposent donc de taux d'intérêt faibles. Est-ce toujours d'actualité ? Envisagez-vous la pérennisation de ce phénomène ?
Si l'État doit effectuer des efforts en matière de contrôle de l'inflation et de la dépense, comment peut-il appliquer ces directives à la sphère locale, qui bénéficie d'une autonomie quant à ses ressources et à ses dépenses ? Comment envisagez-vous cette articulation afin que l'ensemble de nos finances publiques soient alignées ?
Vous nous avez indiqué avoir la capacité et la volonté de maîtriser l'inflation. Effectivement, il s'agit d'un sujet qui nous préoccupe. Quels sont les outils envisagés, voire déjà mis en œuvre concernant la stratégie commune de la Banque de France et de la BCE ?
Vous avez évoqué les règles de Maastricht. La clause dérogatoire générale prendra fin officiellement en fin d'année. Pensez-vous que cette dérogation puisse être prolongée ou remplacée par un autre accord.
Vous avez évoqué lors d'une précédente audition le risque souverain et le risque bancaire. Vous surveilliez une fragilité. Qu'en est-il actuellement ?
L'inflation aux États-Unis est plus forte qu'en zone euro. Elle est respectivement de 7 % et de 5,1 %. L'inflation sous-jacente, hors énergie, est supérieure à 5 % aux États-Unis et demeure proche de 2 % en zone euro. La composante énergétique pèse plus lourdement sur la zone euro. Cependant, l'inflation de base est aujourd'hui très forte aux États-Unis. Les tensions salariales y sont également plus importantes. Par ailleurs, l'inflation s'avère être largement un problème d'offre en Europe. Aux États-Unis, il s'agit, en partie, d'un sujet d'excès de demande, notamment de biens. Cette demande est supérieure à la période pré-Covid-19. Au-delà de ces éléments, je ne commenterai pas la politique de la Fed. Néanmoins, ces éléments expliquent que les États-Unis et le Royaume-Uni doivent réagir plus fortement et plus rapidement que la BCE.
La politique monétaire des mois à venir ne serait pas plus contraignante, mais moins accommodante. Nous sortons d'une période de politique monétaire exceptionnellement accommodante avec des taux négatifs, des liquidités fournies à moyen terme aux banques, et une forward guidance qui apportait des indications sur l'avenir. Il s'agit de réduire ce phénomène de manière progressive.
Concernant la pénurie de main-d'œuvre, la réponse salariale peut être une mesure, notamment dans les secteurs ayant un problème d'attractivité. Dans les secteurs où il existe avant tout un problème de compétences, relever les salaires ne modifiera pas cette situation à court terme. Il est important de demeurer décentralisé, de renvoyer à une négociation par branche au plus près de la réalité économique et sociale. Le Gouvernement a choisi d'indexer le SMIC sur l'inflation plus une part du gain du pouvoir d'achat du salaire moyen. C'est une façon de protéger le pouvoir d'achat et de préserver la compétitivité des entreprises.
Je ne dispose pas encore d'éléments sur le non-recours au dispositif de protection contre le surendettement. Nous travaillons sur un certain nombre de pistes, dont le développement du micro-crédit.
La formation ne constitue pas un sujet nouveau. Il existe des actions à temps de retour plus ou moins rapide concernant les jeunes. L'apprentissage représente une solution rapide. En deux ans, un apprenti est formé. La réforme de l'apprentissage au travers de la loi pour la liberté de choisir son avenir professionnel de 2018 prend cette direction. Toutefois, la France n'atteint pas son potentiel. Pour dix jeunes en apprentissage en Allemagne, ils ne sont que six en France. Par ailleurs, la formation professionnelle s'applique à l'ensemble des adultes. Or le compte personnel de formation (CPF) représente un formidable succès populaire. Il convient de conserver l'équilibre général et de réorienter le CPF vers les besoins en compétences des entreprises. Enfin, le meilleur investissement que nous pourrions réaliser est celui de l'éducation. Cependant, un bon système éducatif fournit des résultats au bout d'une génération. Ce sujet demeure central. Il n'existe pas de réformes plus urgentes que celles qui augmentent les compétences et les qualifications. Elles vont dans le sens de la bataille économique et de l'égalité des chances sur le plan social.
L'allongement de six à dix ans de la durée de remboursement des PGE est une mesure par exception, au cas par cas pour les entreprises rencontrant des difficultés sérieuses de remboursement. Nous pensons que moins de 5 % des entreprises se trouvent dans cette situation. Les dossiers à moins de 50 000 euros seront traités par la médiation du crédit. Le dispositif des conseillers départementaux accompagnant les entreprises en sortie de crise, mis en place sous l'égide du ministère de l'économie, des finances et de la relance et de Gérard Pfauwadel, prendra en charge les dossiers dépassant 50 000 euros. À ce jour, je n'ai pas le sentiment que nous soyons débordés par les dossiers déposés. J'ai toutes les raisons de penser que ce dispositif fonctionnera. La réglementation française et européenne nous obligera à constater le défaut et à restructurer l'ensemble des dettes des entreprises faisant exception.
La normalisation de la politique monétaire fait le charme du métier de banquier central. Il n'existe pas de science totalement exacte. Nous devons trouver l'équilibre et agir au bon rythme. Il convient de normaliser la politique monétaire face à une situation d'inflation. Pendant dix ans, avant le choc de la pandémie, nous avons regretté l'absence d'inflation avec une sorte d'anémie de l'économie. C'est dans ce cadre que nous avons instauré des instruments exceptionnels. Après la « bosse », nous ne reviendrons pas à l'inflation faible qui a précédé la pandémie. Nous atteindrons un taux cible de 2 %. Ce nouveau régime d'inflation constitue un meilleur équilibre. Il s'agit de trouver le rythme adéquat et d'éviter les chocs redoutés. À très court terme, il pourra exister des réactions excessives des marchés qui, nous le savons, peuvent être amplificateurs. Nous ne sommes pas à la veille d'une crise de la zone euro, y compris en Italie, car nous disposons de la solidarité européenne à travers le paquet budgétaire Next Generation EU de 750 milliards d'euros. La politique budgétaire évoquée par le président Éric Woerth a joué de manière solidaire aux côtés de la politique monétaire pour renforcer l'unité de la zone euro. En outre, l'Italie semble accélérer sur la voie des réformes avec M. Mario Draghi.
Je n'ai pas connaissance des chiffres cités sur la question du désendettement. La distinction entre une dette Covid-19 et pré-Covid-19 n'est pas opérante face à nos prêteurs. Notre dette correspond à 115 % du PIB. Le passage de 100 % à 115 % du PIB durant la crise Covid-19 était légitime. En revanche, rester à 115 % du PIB ne serait pas légitime. Je partage avec vous un calcul simple : dans l'hypothèse où l'ensemble des taux d'intérêt remonterait de 1 %, la charge de la dette, c'est-à-dire le coût des intérêts sur la dette, aurait augmenté de 39 milliards d'euros d'ici dix ans. Nous ne pouvons pas parier l'avenir sur le maintien des taux d'intérêt actuels. Nous devons nous fixer l'objectif de revenir au modèle prè-Covid-19, sous la barre des 100 % du PIB, d'ici dix ans. Il s'agit d'un impératif réaliste. En effet, cela suppose de combiner trois ingrédients : le temps, la croissance, la maîtrise et l'efficacité sur les dépenses publiques. Je crois profondément au modèle social et environnemental européen. Ce modèle nous coûte nettement plus cher qu'à nos voisins. Nous avons les dépenses publiques en pourcentage du PIB les plus élevées d'Europe et de tous les pays avancés. Il ne s'agit pas de basculer dans une austérité, mais de tendre enfin vers une stabilisation. Hors Covid-19, nous pouvons tendre vers une croissance en volume de la dépense publique de 0,5 %, voire 0 %, ce qui permettrait de réduire notre dette de 115 % du PIB à 100 % du PIB en dix ans.
La Banque de France ne détermine pas la formule de calcul du livret A : ce rôle est dévolu au Gouvernement. La formule appliquée au 1er février 2022 relevait d'un choix du Gouvernement opéré en 2018. La formule donnait un taux de 0,8 %. J'ai pris la liberté de proposer de l'arrondir à 1 %, ce qui n'est certes pas suffisant au regard de l'inflation. À l'inverse, le livret d'épargne populaire est protégé contre l'inflation : son taux a été fixé à 2,2 %. L'usage de ce livret, dont le plafond peut atteindre 7 700 euros, s'avère sous-développé. Il est accessible à 15 millions de Français non imposés ou faiblement imposés. Or seule la moitié d'entre eux dispose d'un livret d'épargne populaire. Il s'avère nécessaire de développer ce produit.
Nous avons un point d'accord total concernant l'importance de l'usage de la monnaie fiduciaire. Il s'agit bien d'un instrument de cohésion nationale et de confiance dans la monnaie. La monnaie fiduciaire doit être accessible à tous avec une égale qualité d'accès, de disponibilité et de sécurité. La Banque de France n'a pas encouragé la diminution de la disponibilité des espèces. Les Français choisissent de moins les utiliser. Je constate avec vous, et je ne m'en réjouis pas, que la part des espèces dans les transactions diminue. Dès lors que les Français font ce choix, notre rôle consiste à maintenir un accès aux espèces. Cependant, les agents de la Banque de France ne peuvent rester en attente de billets qui n'arrivent pas. Par conséquent, nous fermons 14 caisses. Cette fermeture sera accompagnée d'un plan social qui a été salué pour sa générosité. Il a été conclu grâce à l'engagement des organisations syndicales majoritaires de la Banque de France. Par ailleurs, je demeure sensible à la disponibilité des distributeurs. Nous en surveillons la quantité et publions un rapport, chaque année, qui indique une petite érosion du nombre de distributeurs, essentiellement concentrée dans les villes et non en milieu rural. En outre, les transporteurs de fonds privés assureront leur part dans la chaîne de diffusion. Chacun réalise des efforts face au recul de l'usage de la monnaie fiduciaire par les Français. Pour toutes ces raisons, la Banque de France soutiendra toujours les espèces. Nous continuerons de produire de la monnaie fiduciaire en Auvergne, avec l'appareil de production le plus fort d'Europe. Cette monnaie sera distribuée sur tout le territoire par la Banque de France et les autres acteurs de la filière.
Les facteurs de l'inflation que nous subissons ne se situent pas au niveau monétaire. Ils sont très largement liés à l'énergie, dont les fluctuations de prix sont dues aux tensions géopolitiques que nous connaissons. Cela explique la durée et l'intensité de la « bosse » d'inflation. Les phénomènes d'offres consécutifs à la crise du Covid-19, notamment ceux du gaz de schiste aux États-Unis, y contribuent également. Or la demande mondiale est repartie plus rapidement que prévu. Les difficultés d'approvisionnement constituent également un facteur de l'inflation. Nous pourrions aussi citer un facteur salarial.
Effectivement, la politique monétaire peut jouer un rôle à plus ou moins long terme sur l'inflation. C'est ainsi que je formule une garantie de stabilisation autour de 2 %. Le Conseil des gouverneurs décidera des actions à mener au regard de cette garantie. Nous avons été clairs quant à la séquence de normalisation, qui sera particulièrement progressive. Le premier temps de cette séquence correspond à l'arrêt des achats nets. Nous avons décidé de suspendre les achats exceptionnels du Pandemic Emergency Purchase Programme (PEPP) en décembre 2021. Nous n'avons pas encore établi la date de l'arrêt des achats du programme habituel, l' Asset Purchase Programme (APP). Le deuxième temps de cette séquence correspond à un éventuel relèvement des taux d'intérêt. Toutefois, j'insiste, le temps qui sépare les deux séquences reste ouvert. La direction est claire : il s'agit d'une normalisation progressive, et son rythme est soumis à une optionnalité totale. Enfin, la troisième phase correspond à l'arrêt des réinvestissements, c'est-à-dire à la diminution progressive du stock de titres détenu par la Banque centrale. Nous serons d'un pragmatisme total dans le choix du rythme de chaque séquence.
L'euro n'est pas surévalué ; il n'existe pas d'incohérence de la zone euro. En effet, les bénéfices dépassent la part de contrainte qu'il représente. Qui plus est, si nous regardons en détail les résultats et les raisons de notre déficit extérieur, il est frappant de constater qu'entre 2000 et 2010 nous avions un problème de compétitivité des coûts par rapport à l'Allemagne. Or nous l'avons effacé entre 2010 et 2020 grâce aux politiques de compétitivité menées en France, tandis que l'Allemagne, étant en situation de plein emploi, a connu des augmentations salariales supérieures. Nous n'avons plus de problème de compétitivité coût. Il peut certes subsister un effet retard. Cependant, la principale explication correspond à un problème de compétitivité hors coût qui renvoie très largement à notre discussion sur les compétences. Les exportations françaises sont situées moins haut de gamme et donc plus sensibles à la compétitivité internationale que les exportations allemandes. Ce phénomène correspond à un modèle de formation moins élevée.
Je serai d'une grande prudence quant aux collectivités territoriales. La qualité de leur signature ne peut pas être toujours égale à celle de l'État. Elle dépend de la qualité de leur situation financière. Par ailleurs, l'effort sur les dépenses publiques doit s'appliquer à la sphère centrale, locale et sociale, mais de façon différenciée.
Sur les fragilités, nous publions chaque semaine une évaluation du risque systémique. Nous essayons de concrétiser les risques : ils ont plutôt diminué à court terme, compte tenu de la bonne gestion de la crise et du fait qu'il s'agissait d'un transfert du risque privé vers le risque public. L'État a joué son rôle d'assureur pour diminuer le risque des entreprises et des ménages ; la contrepartie de cela est de la création de dette publique. Ce phénomène doit être traité à moyen terme.
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Commission des finances, de l'économie générale et du contrôle budgétaire
Réunion du mardi 8 février 2022 à 18 heures
Présents. - M. Saïd Ahamada, M. Michel Castellani, M. Jean-René Cazeneuve, M. Philippe Chassaing, Mme Stella Dupont, M. Brahim Hammouche, M. Alexandre Holroyd, M. Christophe Jerretie, M. Daniel Labaronne, M. Mohamed Laqhila, M. Michel Lauzzana, Mme Patricia Lemoine, M. Fabrice Le Vigoureux, Mme Véronique Louwagie, Mme Lise Magnier, M. Jean-Paul Mattei, M. Xavier Paluszkiewicz, M. Hervé Pellois, Mme Bénédicte Peyrol, M. François Pupponi, M. Xavier Roseren, Mme Sabine Rubin, M. Éric Woerth, M. Michel Zumkeller
Excusés. - M. Damien Abad, M. Marc Le Fur, Mme Christine Pires Beaune, Mme Valérie Rabault, M. Laurent Saint-Martin, M. Olivier Serva