MISSION D'INFORMATION DE LA CONFÉRENCE DES PRÉSIDENTS SUR LA RÉSILIENCE NATIONALE
Mercredi 5 janvier 2022
La séance est ouverte à quinze heures
(Présidence de M. Thomas Gassilloud, rapporteur de la mission d'information)
Nous accueillons le général Jean-Marie Gontier, commandant de la brigade de sapeurs-pompiers de Paris (BSPP). Le 19 novembre 2021, nous avons entendu le contrôleur général Hugues Deregnaucourt, représentant de la fédération nationale des sapeurs-pompiers de France. Cette audition nous aidera à préciser certains aspects opérationnels de l'action des sapeurs-pompiers de Paris et à cerner les enjeux spécifiques concernant leur territoire d'intervention, à savoir Paris et la petite couronne. En effet, la capitale est exposée à des menaces mettant en jeu la vie de millions de Français et touchant des fonctions vitales pour le pays. Elle est également exposée au risque quasi inéluctable de crue centenale, dont il demeure difficile d'évaluer les conséquences. Nous souhaitons savoir comment la BSPP est organisée pour parer aux scénarios de crise majeure et quelles sont ses recommandations afin que la population soit mieux préparée à y faire face.
La BSPP est une unité dont l'objectif est d'amortir les chocs. Lors d'un événement majeur avec une résonance nationale, tel que la pandémie, les atouts de notre maison sont l'autonomie et la polyvalence de son personnel. La brigade dispose en elle-même de tous les soutiens qui sont nécessaires à son existence. Nous réparons nos camions ; nous intervenons dans notre infrastructure ; nous sommes autonomes pour la préparation de nos repas, de notre habillement et pour la détermination des matériels qui seront mis en œuvre ou sollicités auprès des industriels. Concernant l'alimentation, notre autonomie réelle est d'une semaine. S'agissant des énergies, cette autonomie est de trois mois dans la mesure où nous sommes une réserve institutionnelle de l'État pour la partie police et pompiers sur notre secteur. Toutes nos casernes disposent de groupes électrogènes permettant de faire face à un choc.
Le pompier de Paris, qu'il soit administratif ou directement versé dans l'opérationnel, est polyvalent. Il a été formé au secourisme opérationnel. Notre effectif est de 6 800 pompiers dans les camions et nous disposons d'un back-office d'un peu moins de 2 000 personnes. Face à une crise, ce back-office peut être engagé, ces personnels sont tous mobilisables. Ce fut le cas lors de la vaccination contre le covid-19 et plus généralement lors de la pandémie. Nous avons armé des ambulances supplémentaires grâce à la compétence de secourisme opérationnel de ce personnel administratif. Il s'agit là d'une différence avec nos camarades sapeurs-pompiers professionnels.
La brigade est une unité militaire. Elle dispose d'une véritable capacité à durer, à encaisser le choc, à vivre en rusticité et dans la frugalité. Par ailleurs, nous sommes peu consommateurs de ressources. Notre esprit de corps est particulièrement fort. Notre personnel assure des gardes de 24 à 72 heures. Les familles des cadres vivent dans les casernes, en proximité avec l'ensemble des personnels. L'esprit de famille qui en résulte favorise la compréhension de l'engagement dans une crise et le soutien commun face à la pénibilité. L'esprit de corps et de famille est extrêmement fort et il permet de tenir pour répondre à une crise majeure.
En tant que militaires, nous sommes soumis à cinq principes fondamentaux : neutralité, loyauté, discipline, disponibilité – un sapeur-pompier effectue 3 040 heures de mission par an – et esprit de sacrifice. Malheureusement, l'histoire de la brigade est marquée par des pertes au feu. Les deux dernières se sont produites lors de l'explosion de la rue de Trévise en 2019.
Notre statut offre une réelle plus-value dans la confrontation à la crise. La brigade travaille sur un territoire dont elle est une actrice publique majeure. Nous travaillons avec un certain nombre d'acteurs publics importants. Ce rapport interservice dans notre mode d'action est déterminant lorsque survient une crise majeure. Nous connaissons nos interlocuteurs. Face à une crise, ces interactions font sens puisque nous mettons en commun l'ensemble de nos moyens dans le respect de la subsidiarité. Chacun sait ce qu'il doit faire, tandis qu'une certaine marge de manœuvre est octroyée aux échelons subordonnés. Nous avons également l'habitude d'utiliser les ressources communautaires : le partenariat privé-public. Nous avons l'obligation de connaître nos interlocuteurs institutionnels et privés. Le monde économique est très important. Lors d'une crise, il est courant de se tourner vers l'État et nous oublions que, dans le domaine privé, des individus sont rompus à faire fonctionner des entreprises et des chaînes logistiques et qu'ils disposent de réels savoir-faire. Ces partenariats sont vécus au quotidien et nous souhaitons les pérenniser. À titre d'exemple, au début de la pandémie, les entreprises privées se sont naturellement mises à notre disposition pour nous fournir leur réserve stratégique de masques. Ce don nous a permis, lors du premier mois de crise, de conserver une autonomie et de ne pas représenter une charge vis-à-vis des institutions.
Le sapeur-pompier de Paris est symbole de confiance dans la gestion de crise. Il s'agit d'une force et d'un moyen de marquer le leadership dans la gestion de crise. Nous offrons un chemin et une vision implicative. Nous avons pris en charge plus de 30 000 personnes atteintes par le covid-19. Nous avons vacciné plus 1 100 000 personnes dans les différents centres où nous sommes intervenus. En moyenne, nous effectuons 1 533 interventions par jour.
La brigade vit avec la jeunesse et nous y sommes extrêmement attentifs. Nous recrutons 1 200 jeunes chaque année. En outre, nous participons à l'activation de différents dispositifs s'adressant à 1 300 jeunes qui passent dans nos rangs chaque année en sus des 750 réservistes. Ces 1 300 jeunes sont constitués de 250 volontaires du service civique, 350 jeunes sapeurs-pompiers de Paris, 400 stages de classe de troisième et une centaine d'alternants. Ces personnes passent un temps significatif à nos côtés. Le sens civique ainsi acquis est diffusé dans la société. Cela nous permet de renouveler nos populations de volontaires du service civique (VSC), de jeunes sapeurs-pompiers (JSP) ou de réservistes. Nous avons ainsi une réelle empreinte dans la société.
La brigade n'est pas seule, nous sommes une partie d'un tout. Nous appartenons à la préfecture de police, qui gère le secours et la sécurité sur une zone cohérente : Paris et la petite couronne. Il existe une cohérence dans l'action, une compréhension dans les modes opératoires de secours et de sécurité sous l'ordre du préfet de police. Cette situation est appréciable face à une crise. Par ailleurs, nous appartenons à la constellation plus large de la direction générale de la sécurité civile. Avec notre secrétariat général de zone de défense, nous travaillons à l'échelle de notre région composée de huit départements – quatre pour la BSPP, quatre autres relevant de la compétence des services départementaux d'incendie et de secours. Notre état-major nous permet de travailler sur un secteur cohérent, majoritairement urbain, et nous pouvons nous renforcer les uns les autres. Si nécessaire, nous recherchons une capacité de renforts extraterritoriaux auprès du centre opérationnel de gestion interministérielle des crises (COGIC) ou de la direction générale de la sécurité civile (DSCGC). Parallèlement, nous maintenons à leur disposition une capacité de projection. Nous avons dernièrement été envoyés en Guadeloupe, à la Réunion, en Polynésie.
Nous sommes militaires, nous appartenons à la chaîne du commandement du territoire national et à celle de l'organisation territoriale interarmées de défense. Nous sommes un bras armé à la disposition du gouverneur militaire de Paris ou à celle de l'armée de terre dans le cadre de missions particulières. Nous constituons un amortisseur de crise.
Ayant eu l'occasion d'être intégré dans certaines gardes, j'ai pu mesurer le niveau d'engagement des sapeurs-pompiers de Paris lorsqu'en pleine nuit, ils repartent à plusieurs reprises sur le terrain. La militarité vous permet de répondre à vos missions avec un esprit de corps extrêmement important.
Vous dépendez du ministère de l'intérieur. Par conséquent, votre nomenclature budgétaire se trouve en dehors du périmètre de la loi de programmation militaire (LPM). Toutefois, vous êtes intégré dans l'armée de terre en ce qui concerne la RH, les formations… Votre nomenclature budgétaire dépend-elle du seul ministère de l'intérieur ?
Nous appartenons à l'armée de terre. Ainsi, je ne peux pas fonctionner si la direction des ressources humaines de l'armée de terre (DRHAT) ne recrute pas pour moi. Le recrutement, la sélection, l'acheminement, les militaires du rang et la discipline sont gérés par l'armée de terre. Nous constituons ensuite des moyens qui sont à la disposition du préfet de police et du ministère de l'intérieur.
Nous avons un budget quadripartite. Une part provient de l'État – programme 151 « Sécurité civile ». En effet, 25 % de notre budget est défendu par la direction générale de la sécurité civile. Nous constituons un secteur stratégique et nous assurons la continuité de l'action de l'État. Ce dernier contribue donc financièrement à notre action. Une deuxième partie de notre budget est fournie par la ville de Paris, également considérée comme un département. Les départements et les communes de la petite couronne y contribuent également.
Vous avez évoqué une réserve de trois mois en énergie. Êtes-vous « la pompe à essence ultime » des services de l'État si la région parisienne devait un jour être confrontée à des problèmes de livraison ?
Effectivement, nous avons joué ce rôle en 2010 lors de la grève des dépôts pétroliers. Dans nos centres de secours, nous disposons de pompes pour du carburant de type diesel et essence.
Notre mission d'information porte sur la résilience nationale. Qu'identifiez-vous comme facteur majeur de risque pour la résilience française ? Votre centralité et votre rattachement ne font-ils pas de vous un élément vulnérable qui compromettrait la résilience ? Êtes-vous la cible de menaces particulières, notamment d'attaques cyber sur votre standard téléphonique ? Votre hyper-employabilité n'est-elle pas un facteur de danger ?
Nous sommes répartis sur quatre départements. Pour autant, par son statut, la brigade participe à des interventions à l'extérieur. Ainsi, chaque année, soixante officiers et sous-officiers partent au sein d'unités à l'étranger – Liban, Afrique. Nous disposons d'une ouverture sur le monde. Nous avons également une unité certifiée par l'Organisation des Nations unies qui peut être projetée en milieux urbains dans le cadre du secours, à la suite de tremblements de terre et en cas de risques chimiques ou radiologiques. Dans une crise qui nécessite un sursaut résilient à l'échelle nationale, beaucoup d'éléments seront décidés par le haut, mais il y aura également une nécessité de mener des actions locales. Dans ce cadre, la brigade colle à sa mission et au territoire qui lui est alloué.
En 2021, 111 attaques cyber ont visé notre centre téléphonique et notre système d'information. Huit d'entre elles ont été de nature critique, seize de dangerosité élevée. Nous travaillons avec la préfecture de police sur ces éléments. Des individus essaient effectivement de perturber le recours au secours. Pour autant, notre territorialité, c'est-à-dire notre répartition sur le territoire avec 81 casernes séparées les unes des autres de 10 minutes, constitue un maillage cohérent et robuste. Je vous invite à visiter notre centre opérationnel. Tout est informatisé, tandis que les informations sont reprises de manière manuscrite sur les murs. Nous avons également des téléphones satellitaires. Lors de l'incendie de la cathédrale de Notre-Dame, nous avons utilisé des véhicules d'appui à la communication afin de former des bulles de communication pour éviter la rupture des réseaux. Nous sommes toujours perfectibles, cependant je nous pense résistants.
Par ailleurs, nous disposons d'un centre majeur de prise d'appels, un centre d'évolution qui permet de relever et de reprendre les communications si nous étions l'objet d'un attentat. Dans chaque département, nous disposons de petits centres en mesure de prendre le relais.
Nous nous trouvons dans une zone hyper-urbaine. Les risques sont identiques à ceux encourus au niveau du territoire national hormis celui des feux de forêt. Nous faisons face à des risques climatiques d'inondations, de tempêtes, de canicules. Ces phénomènes pourraient donner lieu à des déplacements de populations. Dans ce cadre, nous travaillons avec nos plans, avec le secrétaire général de zone, avec les armées et l'état-major du gouverneur militaire de Paris, pour mettre en commun nos moyens. Nous disposons également d'un groupement d'appui et de secours intégralement dédié à ce type de sinistre. Nous y avons eu recours en juin 2016 et en janvier 2018 lors des inondations de Paris. Nous savons mettre à l'abri les péniches et les personnes. Pour autant, nous n'avons pas suffisamment de moyens pour faire face à la densité de population sur notre secteur. Nous pourrions avoir besoin d'un renfort intra-territorial de la part de nos camarades de la grande couronne, ou de moyens supplémentaires avec la direction générale de la sécurité civile ou des armées. C'est pourquoi nous sommes intégrés dans le commandement du territoire national et dans la chaîne des armées.
Ensuite, nous sommes confrontés au risque industriel courant – feu d'entreprise, d'entrepôt, d'usine – et exceptionnel, avec des risques de pollution et de contamination. Au cœur de la préfecture se trouve le laboratoire central où travaillent des ingénieurs spécialistes des différents types de pollution. Nous collaborons régulièrement avec eux. Avec l'ensemble des autres services publics, nous constituons une vigie afin de mettre à l'abri nos concitoyens. S'agissant du désordre sanitaire et de la pandémie, j'ai d'ores et déjà fourni des chiffres. La brigade n'a jamais fermé un centre de secours. Elle a toujours répondu à la demande de nos concitoyens.
Pouvez-vous nous confirmer que vous avez de nombreux appels émanant de personnes ne disposant pas d'un schéma vaccinal complet ?
Hier, nous avons effectué 102 interventions concernant le covid-19. Au moment le plus critique de la crise, nous réalisons 450 à 500 prises en charge par jour. Hier, 90 % des personnes prises en charge ont été transportées. Cependant, les formes graves sont moins nombreuses. Au plus fort de la crise, sur les 500 interventions, entre 10 et 15 % concernaient des cas graves. Aujourd'hui, ce taux est de moins de 2 %. Nous transportons énormément pour d'autres raisons. En effet, nous sommes implantés dans un secteur où vit une population fragile, l'Est parisien et les départements du 93, 92 et 94. Ces personnes n'ont pas recours à la médecine de ville et font appel à nos services lorsqu'elles ont besoin d'être vues par un médecin en centre hospitalier. De nuit, ces demandes peuvent parfois emboliser le système.
Par ailleurs, la menace terroriste est présente sur l'ensemble du territoire. Des actions peuvent avoir lieu n'importe où. Nous sommes intégrés à la préfecture de police. Nous échangeons quotidiennement avec nos camarades de la brigade de recherche et d'intervention (BRI), de la direction de la sécurité de proximité de l'agglomération parisienne (DSPAP), de la direction de l'ordre public et de la circulation (DOPC), ou ceux de la direction du renseignement de la préfecture de police de Paris (DRPP). Nous avons dès lors une longueur d'avance quant à la compréhension de ce qui se passe autour de nous. Nous transformons ce savoir en mode opératoire.
Enfin, à la brigade, nous disposons d'un bureau de prospective qui analyse des situations envisageables dans les cinq prochaines années. Cela participe à un champ d'investigation pour la résilience.
La cybermenace pourrait effectivement affecter nos modes de communication, tout autant qu'une perte de l'alimentation électrique. Quels sont vos moyens actuels de transmission pour déclencher une alerte ? Vous basculez progressivement vers un système de radio futur qui s'appuie sur les opérateurs privés de télécommunication. Vous avez également des bases projetables du type PCStorm. Cet appui sur les réseaux civils dépendra de plus en plus d'équipementiers étrangers. Pourriez-vous analyser la résilience de ces modalités, dont dépend la résilience de votre organisation ? N'est-il pas inconfortable que la communication de la BSPP s'appuie sur un réseau que vous ne maîtriserez pas ?
Notre maillage territorial permet à notre population de savoir où se situe le centre de secours. En cas de chute de réseau, la population sera capable d'envoyer un porteur de message jusqu'au centre de secours.
Dans un mode dégradé, une intervention peut être déclenchée par une personne qui se présente dans une caserne.
Aujourd'hui, une vingtaine d'opérations quotidiennes sont effectuées sur ce modèle. La solidarité permet de disposer d'un porteur de message.
Nous ne sommes pas à l'aise avec l'idée de confier à une souveraineté autre que la souveraineté nationale le transfert de données et l'échange d'informations confidentielles. Pour autant, en cas de rupture totale de communication, nous disposons désormais de contrats satellitaires. Ces derniers s'appuient sur ceux de la direction générale de la sécurité civile. Nous pouvons également utiliser le système de communication de l'armée de terre. Par ailleurs, nous devons consolider notre système d'information et de relation avec les réseaux sociaux. Ce travail est actuellement conduit au niveau du secrétariat général de la défense et de la sécurité nationale (SGDSN) et par la direction générale de la sécurité civile. Nous devons être plus solides dans ce domaine.
La résilience n'est pas dans les remparts ainsi, que le disait Thucydide. Les remparts correspondent à l'organisation. Les vaisseaux sont les moyens. Au sein de ces derniers, les réseaux méritent d'être améliorés. Notre souveraineté doit être compensée par la rusticité de notre modèle. Les organisations et les moyens existent et notre système est globalement cohérent. Si chacun accepte d'utiliser ce qui est mis à sa disposition, cela fonctionnera. En revanche, nous devons travailler sur la cohésion sociale. En France, la culture du risque n'est pas suffisamment déployée. Un citoyen sur deux sera confronté dans sa vie à un risque majeur déstructurant autre que la perte d'un de ses proches. L'État ne peut pas tout. La résilience est un mécanisme individuel. Nous devons éduquer notre jeunesse et consolider les connaissances de nos aînés. En ce sens, nous devons œuvrer dans le milieu associatif. En France, il existe 21 millions d'adhérents à des associations, 12 millions de bénévoles et 200 000 personnes qui travaillent dans des associations agrées de sécurité civile. Nous disposons d'un système exceptionnel. Ce tissu doit être activé et stimulé. Nous représentons un des éléments de cette stimulation.
Disposez-vous de système d'intégration de la jeunesse ou de sensibilisation ? Quelle est votre démarche s'agissant des cadets ? Participent-ils au rayonnement de votre métier ? Quelle déclinaison avez-vous du lien armée-nation ?
Statistiquement 75 % des sapeurs-pompiers de Paris sont originaires de province et 25 % proviennent de l'Île-de-France et des quartiers difficiles. Dans la région parisienne, l'effort de recrutement est supérieur à toute autre région. Nous avons des volontaires du service civique dans nos rangs. Ils représentent nos troisièmes secouristes. Le jeune est acteur de son destin. Il appartient à une communauté lorsqu'il est parmi nous. Nous participons à ce dispositif depuis six ans. Deux cent cinquante volontaires passent dans nos rangs chaque année.
Nous participons à tous les forums des communes. Pendant trois ans, les jeunes sapeurs-pompiers sont parmi nous trente week-ends par an avec une autorisation de trois week-ends d'absence. Par ce biais, nous suscitons un véritable engagement.
Nous travaillons avec sept lycées et trois classes de sécurité et de défense globale. Nos cadres interagissent régulièrement avec ces classes que nous accueillons également au sein des casernes. En outre, nous accueillons 400 à 450 stagiaires de troisième pendant une semaine. Nous les groupons et nous leur proposons des activités tous les jours.
Participez-vous également à la protection judiciaire de la jeunesse (PJJ) ? Fournissez-vous du travail d'intérêt général au sein de vos équipes ?
Parmi les cinq qualités du militaire se trouve la discipline. Lorsque nous avons des conducteurs imprudents, ils sont sanctionnés et confinés à la caserne. Concernant la remédiation pour les jeunes, nous organisons un à deux stages par an, qui requièrent beaucoup d'investissement et d'encadrement. Nous participons à ce dispositif sur la base des projets personnels.
Je partage votre regard sur la résilience et la qualité des moyens dont nous disposons. Toutefois, la tradition d'un État fort demeure. Au regard de la situation de nos voisins, notre moindre préparation aux cas extrêmes découle probablement de cette tradition. Ainsi, la Finlande a conceptualisé des scénarios d'engagement total associant les citoyens. Nous sommes encore éloignés de cette culture de la résilience.
Vous montrez l'exemple au travers des 1 300 jeunes qui passent dans vos rangs chaque année. Cependant, sept millions d'habitants vivent sur votre territoire. Par conséquent, le pourcentage d'engagement sur vingt ans reste faible. Comment étendre massivement votre action pour obtenir 20 à 30 % de personnes ayant une certaine culture de la résilience ? Pourrait-on établir un conventionnement avec les collectivités territoriales et les écoles ? Le service national universel (SNU) représente également un mode d'action. Dans certains territoires, vos interventions ne sont pas accueillies favorablement. Le SNU pourrait permettre de tisser des liens avec ces populations.
La résilience n'est pas instantanée. Elle se cultive et se prépare. Dans les pays scandinaves, le secourisme est prépondérant. Dans la Constitution du Danemark, le citoyen est le premier rideau de secours devant l'État, qui assure la souveraineté dans son rôle régalien. Les familles apprennent l'autonomie, car l'État précise qu'en cas de crise, il lui faudra du temps pour s'organiser.
Comment agir afin que nos aînés et notre jeunesse se mobilisent ? Il est nécessaire que notre nation comprenne qu'une crise nationale est possible aujourd'hui – crise climatique, tensions géopolitiques. Nous devons cultiver la réponse au risque. Pour cela, il existe certes les sapeurs-pompiers et les armées, mais nous ne rayonnons pas assez largement. Les communes sont un relais. Il faudrait pouvoir imposer intelligemment l'apprentissage de la réponse aux risques. Nous ne pouvons pas faire peser toute la responsabilité sur l'éducation nationale.
Les associations sont des carrefours de rencontre. L'action de divertissement constituerait un relais positif pour cet apprentissage. Certaines écoles restent ouvertes pour permettre la tenue d'activités à destination de jeunes qui ne partent pas en vacances. Nous participons à ces activités au travers d'un programme autour de la citoyenneté et du civisme. Il s'agit là aussi d'un carrefour de rencontres. La commune constitue également un carrefour, au même titre que les associations ou les services publics.
Nous sommes en relation avec nos collègues israéliens et avec la brigade de Tokyo, avec qui nous échangeons des éléments de doctrine. En Chine, en Corée, au Japon et au Portugal notamment existent de grands centres d'éducation des populations aux risques. Ces centres offrent plusieurs ateliers ludiques qui occupent une journée ou une demi-journée. De tels ateliers pourraient également se tenir dans des colonies de vacances ou des centres de loisirs. Il s'agit de construire des programmes de divertissement autour du risque. Nous y réfléchissons. Ainsi nous avons développé une application nommée Staying alive. Elle permet d'entrer dans une communauté de sauveteurs. En fonction de sa localisation, il est possible d'être contacté pour intervenir en parallèle du déclenchement des services de secours.
La réunion se termine à seize heures.
Membres présents ou excusés
Mission d'information sur la résilience nationale
Présents. – M. Thomas Gassilloud, Mme Sereine Mauborgne
Excusés. – Mme Carole Bureau-Bonnard, M. Alexandre Freschi