Commission des affaires étrangères

Réunion du mardi 28 mai 2019 à 17h35

Résumé de la réunion

La réunion

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Audition, ouverte à la presse, de M. Jean-Yves Le Drian, ministre de l'Europe et des affaires étrangères.

La séance est ouverte à 17 heures 35.

PermalienPhoto issue du site de l'Assemblée nationale ou de Wikipedia

Mes chers collègues, nous avons le plaisir de recevoir M. Jean-Yves Le Drian, ministre de l'Europe et des affaires étrangères, en audition publique. Je le remercie vraiment pour sa présence parmi nous. Il vient régulièrement devant notre commission, comme il s'y était engagé. Nous lui en sommes tout à fait redevables.

Votre audition, monsieur le ministre, intervient au lendemain d'élections européennes qui ont mobilisé les citoyens, particulièrement les jeunes : plus d'un électeur européen sur deux s'est déplacé pour voter. Une nouvelle législature se prépare. Dès aujourd'hui se tient un Conseil européen où devraient être évoqués les principales responsabilités au sein de l'Union européenne et les contours de la future majorité. Le Brexit s'invitera sans aucun doute aux discussions sur les conséquences à attendre de la démission de Theresa May. Nous aimerions vous entendre sur ces deux points.

Depuis votre dernière audition, nous avons constaté la montée en puissance de tensions, en particulier commerciales, dans le monde. Nous avons évoqué cette situation avec Pascal Lamy et Roberto Azevêdo, l'actuel directeur général de l'Organisation mondiale du commerce – OMC. Avec la guerre ouverte que mènent les États-Unis contre la Chine mais aussi contre le reste du monde, y compris l'Europe, nous voyons bien que nous sommes en face de ce qu'il faut nommer un échec du multilatéralisme. La riposte est difficile, comme le montrent les retards dans l'application d'INSTEX, acronyme d'Instrument in support of trade exchanges, mécanisme européen censé permettre aux entreprises de contourner les sanctions américaines contre l'Iran. J'espère que vous nous en direz davantage sur la question.

Toujours en matière commerciale, je veux saluer la position de la France qui a, avec raison, conditionné son accord à de nouvelles négociations avec les États-Unis au respect par ces derniers de l'accord de Paris sur le climat. D'une manière générale, je pense qu'il convient, au niveau européen, d'élaborer un nouveau cahier des charges en matière d'accords de commerce. La France est-elle prête à prendre une initiative ou à prendre l'initiative d'une telle refondation ? Notre commission va être saisie, en juin, du projet de ratification du traité sur la coopération et l'intégration franco-allemande, signé à Aix-la-Chapelle, concernant l'accord économique et commercial global – AECG ou CETA pour Comprehensive Economic and Trade Agreement. Où en est le calendrier de ratification ?

Les tensions et crises mondiales ne sont pas seulement commerciales. Je pense évidemment à la Syrie et plus particulièrement à Idlib, la dernière grande poche des rebelles où la situation est un cauchemar, selon le mot du secrétaire général de l'Organisation des Nations unies (ONU). Damas tente de reprendre ce territoire par la force, en dépit de l'accord de Sotchi qui devait établir une zone démilitarisée. Cette situation nous inquiète. Les conditions sont-elles remplies pour écarter les risques d'une résurgence de Daech ? Je ne sais qui peut répondre à cette question tant que la stabilité et la reconstruction de la Syrie n'entrent pas dans une phase concrète.

Je pense au Yémen où les tensions militaires s'aggravent en dépit du début de redéploiement des forces militaires à al-Hodeïda. Cette escalade de la violence a été récemment marquée par des attaques de drones, revendiquées par les Houthis, contre des installations pétrolières et un aéroport saoudien, ainsi que par des frappes de rétorsion sur Sanaa par l'Arabie Saoudite. Les risques de déstabilisation de la région étant importants, il est plus que jamais nécessaire de faire respecter l'accord de Stockholm.

Je pense à la Libye, où les forces du chef du gouvernement al-Sarraj et celle du maréchal Haftar s'affrontent. Les risques de déstabilisation profonde et de chaos sont très importants. Un accord politique est-il encore possible ? Si oui, à quelles conditions ?

Pensant à la Libye, je pense aussi à son grand voisin qu'est l'Algérie. Nous suivons de très près ce qui s'y passe. La mobilisation populaire ne semble pas faiblir. Quelle est votre analyse de la situation ? Comment voyez-vous son évolution dans les mois qui viennent ?

Nous aimerions aussi vous entendre sur la situation au Venezuela, alors que ce pays s'enfonce chaque jour davantage dans une crise économique, sociale et humanitaire.

De même j'aimerais avoir votre analyse sur la situation au Soudan après le renversement du régime d'Omar al-Bachir.

Monsieur le ministre, vous nous ferez sûrement un point sur la lutte contre le terrorisme au Sahel. Permettez-moi d'avoir à nouveau une pensée pour nos deux soldats qui sont morts dans une opération de libération d'otages, et auxquels la nation a justement rendu hommage.

Le dernier sujet, qui touche à l'influence de la France dans le monde, nous tient particulièrement à coeur : l'augmentation des frais d'inscription des étudiants étrangers en France. Deux parlementaires – Marion Lenne et Pascal Brindeau – ont rendu un excellent rapport sur ce sujet. Inquiets, des pays qui privilégiaient la France examinent désormais d'autres destinations possibles pour leurs étudiants. Entendez-vous ces inquiétudes, monsieur le ministre ? Comment le Gouvernement compte-t-il y répondre ?

Avant notre traditionnelle séance de questions et réponses, vous avez la parole, monsieur le ministre.

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Jean-Yves le Drian, ministre de l'Europe et des affaires étrangères

Comme vous m'y invitez, je vais d'abord faire quelques remarques sur la situation européenne. Des élections qui viennent d'avoir lieu, je retiens cinq enseignements majeurs.

Premier enseignement : la hausse de la participation après vingt ans d'érosion continue. C'est le signe d'une prise de conscience, d'une forme de sursaut et d'appropriation. Les Européens ont compris l'importance des enjeux. Ils ont compris que l'Europe était un élément majeur de leur destin et qu'il fallait à tout prix éviter qu'elle ne se délite et ne sorte de l'histoire. C'est d'autant plus positif que la participation des jeunes a été importante.

Deuxième enseignement : la recomposition du paysage politique européen. Pour la première fois, le parti conservateur et le parti social-démocrate réunis n'auront pas la majorité. C'est la fin du bipartisme qui structurait la vie politique européenne et, inévitablement, cela va amener à de nouvelles alliances, de nouveaux compromis, une nouvelle donne dans le fonctionnement global du Parlement européen et dans l'instauration de majorités.

Troisième enseignement : à la faveur de cette restructuration, je pense que l'influence de la France au Parlement européen va se renforcer par le biais de Renaissance et d'autres groupes. J'en suis intimement convaincu. C'est aussi une nouvelle donne pour la France dans ce panorama.

Quatrième enseignement : la poussée des forces populistes existe et elle est même parfois assez spectaculaire comme en Italie et en Hongrie, mais elle est moins importante que l'on pouvait le redouter et ces forces sont divisées, notamment sur la manière d'agir au sein du Parlement européen.

Cinquième enseignement, et non des moindres, cette élection a montré l'importance que les Européens, en particulier les jeunes, attachent à l'écologie. Le vote écologiste progresse dans de nombreux pays, en particulier en Allemagne et en Irlande, mais aussi en France.

Sans faire de commentaires sur le Conseil européen qui va se tenir dans quelques instants à Bruxelles, je dirais néanmoins qu'il faudra faire en sorte que la France tienne toute sa place. Des discussions vont avoir lieu ce soir et une partie de la nuit. Elles reprendront lors du Conseil européen qui se déroulera les 20 et 21 juin. Nous espérons qu'elles aboutiront rapidement, sachant que le calendrier s'étalera jusqu'au 31 octobre puisque la nouvelle Commission européenne prendra ses fonctions le 1er novembre prochain.

J'en viens au Brexit. Le parti conservateur britannique a subi un véritable revers aux élections européennes. Comme elle s'y était engagée avant les élections, Theresa May va démissionner le 7 juin de ses fonctions de chef de parti et non pas de celles de Premier ministre. Selon la procédure, le groupe parlementaire devra désigner deux candidats, puis l'assemblée des militants conservateurs désignera le futur leader du parti qui deviendra le Premier ministre.

Il est un peu trop tôt pour spéculer sur les conséquences de cette décision. C'est un épisode supplémentaire dans l'imbroglio consécutif à la décision du peuple britannique de sortir de l'Union européenne, il y a maintenant trois ans. Nous constatons une espèce de contradiction entre deux légitimités : celle du vote du peuple britannique qui, par référendum, a décidé de sortir de l'Union européenne, une décision que nous regrettons mais que nous respectons ; celle du Parlement britannique, élu au suffrage universel, qui n'arrive pas à traduire cette décision du peuple en actes.

Cette contradiction rend le processus assez invraisemblable puisque des députés britanniques ont été élus au Parlement européen où ils sont supposés ne pas siéger. Sans préjuger de ce qui va se passer en Grande-Bretagne, je peux dire une chose : il est temps que cela se termine et se clarifie dans l'intérêt de tous, y compris celui des Britanniques. C'est sans doute ce qu'ont voulu manifester les électeurs britanniques en ne votant pas pour les deux partis qui ont marqué la vie démocratique en Grande-Bretagne depuis de nombreuses années.

Le Conseil européen des 20 et 21 juin sera l'occasion de faire un point sur l'évolution du processus de ratification britannique et sur le respect par le Royaume-Uni des conditions fixées dans les conclusions du 10 avril : la date butoir est le 31 octobre, c'est-à-dire la veille de l'entrée en fonction de la nouvelle Commission ; pendant cette période intermédiaire, le Royaume-Uni ne doit pas intervenir dans le processus de désignation et le mode d'organisation de la nouvelle législature. Nous pouvons espérer qu'il en sera ainsi.

Quant au Parlement européen, il doit se mettre en mouvement et répondre aux principaux thèmes et messages de la campagne électorale, qu'il s'agisse du climat, de l'Europe sociale, de l'asile et des migrations, de la défense ou de la modification de normes de concurrence.

Comme vous avez fait référence à l'OMC, madame la présidente, je voudrais vous faire part de ma grande préoccupation – que vous partagez – face à l'escalade des mesures tarifaires entre les États-Unis et la Chine. Les autorités américaines ont décidé de taxer fortement les produits chinois et les autorités chinoises ont réagi de la même manière. C'est très inquiétant. Il faut essayer d'aboutir à un dialogue, à un compromis, à une réforme de l'OMC. C'est l'un des objectifs du prochain sommet du Groupe des vingt – le G20 – qui va se tenir les 28 et 29 juin à Osaka. Les choses n'avancent que très lentement mais nous mettons tout en oeuvre pour trouver une régulation permettant aux échanges commerciaux internationaux de vivre d'une autre manière.

L'Union européenne n'est d'ailleurs pas épargnée par ces tensions commerciales. Le 17 mai, le président Trump a donné un nouvel ultimatum de 180 jours à l'Union européenne pour parvenir à un ajustement des exportations automobiles européennes et japonaises à destination des États-Unis. Faute d'accord, des mesures pourraient être prises à l'encontre de l'Union européenne. Notre position de principe est très ferme : d'une part, nous respectons les règles de l'OMC ; d'autre part, comme vous l'avez rappelé, nous lions les nouvelles négociations au respect, par les États-Unis, de l'accord de Paris sur le climat. Nous étions un peu seuls sur cette position mais, compte tenu du résultat des élections, je pense que nous allons trouver des alliés.

Le chantier de la régulation et du multilatéralisme, essentiel pour l'Union européenne, est toujours ouvert. Nous espérons progresser lors du sommet d'Osaka. Je ne suis pas encore certain que nous allons y parvenir. Le sujet sera aussi abordé lors de la réunion du Groupe des sept – le G7 – qui aura lieu du 24 au 26 août à Biarritz.

Sur les crises, je vais essayer d'être assez bref pour avoir le temps de répondre longuement aux différentes questions.

En ce qui concerne les crises liées au développement du terrorisme, vous avez rappelé le sacrifice de Cédric de Pierrepont et d'Alain Bertoncello lors de la libération de deux otages français au Burkina Faso. Cet exemple dramatique montre, s'il en était besoin, que la lutte contre le terrorisme n'est pas terminée. À Pâques, les attentats au Sri Lanka avaient déjà montré que la menace reste élevée et qu'elle prolifère en s'appuyant désormais sur de nouveaux réseaux, notamment en Asie. Du Sahel au Moyen-Orient, nous agissons pour endiguer les crises qui la nourrissent, en engageant nos forces sur le terrain, et en menant une action diplomatique résolue pour encourager la mise en oeuvre de solutions politiques préconisées par la communauté internationale.

Au Sahel, les événements liés à la libération des otages m'inspirent deux remarques. Tout d'abord, je voudrais souligner l'excellence, la force et la réactivité de notre dispositif militaire. Si les otages n'avaient pas été libérés à ce moment-là, nous aurions mis beaucoup de temps à pouvoir les repérer dans cet espace très vaste. Il fallait agir au moment de l'itinérance, ce qui a été fait en provoquant, malheureusement, deux victimes. Ensuite, ces événements rappellent la fragilité des pays du Sahel, en particulier du Burkina Faso où les attentats se multiplient – il y en a encore eu un hier, dont on a peu parlé. À présent, ces attentats ciblent des communautés chrétiennes.

Les affrontements prennent des dimensions complexes. Des groupes terroristes, pour la plupart liés au djihadisme, agissent pour ménager leur trafic et pour récupérer des moyens financiers. Il y a aussi des affrontements communautaires où les Peuls occupent une place particulière et cela, dans plusieurs pays du Sahel : certains groupes mobilisent des Peuls, ce qui fait que cette population se sent particulièrement menacée. Il faut maintenant y ajouter des attaques répétées contre des communautés religieuses, en particulier les chrétiens. Au Burkina Faso, nous en sommes à la quatrième attaque contre des processions ou des églises. Au Niger, un pays où les forces sont pourtant aguerries, une attaque terroriste a entraîné la mort de vingt-huit soldats le 14 mai dernier.

Ce mélange rend perplexe et oblige les pays concernés à renforcer leurs mesures de sécurité interne et externe. C'est la raison pour laquelle, comme je le dis régulièrement devant vous, il est tout à fait essentiel que la force conjointe des pays du Sahel puisse progressivement prendre toutes ses responsabilités. Nous le souhaitons et nous aidons ces pays à le faire.

Au Mali, il y a eu un changement de Premier ministre : M. Boubou Cissé a succédé à M. Soumeylou Boubèye Maïga, et il a formé un gouvernement quasiment d'union nationale, ce qui lui donne plus de force. Ce Gouvernement devra appliquer les accords d'Alger sur lesquels il n'est pas question de revenir et qui doivent permettre le désarmement, la démobilisation et l'intégration de certains membres de groupes combattants. Ces accords prévoient aussi la décentralisation et la présence de l'État au nord et au centre du pays, ce qui est encore tout à fait improbable.

Nous espérons que l'esprit de dialogue va perdurer. C'est d'autant plus nécessaire que le mandat de la Mission multidimensionnelle intégrée des Nations unies pour la stabilisation au Mali (MINUSMA) doit être renouvelé fin juin. Ce n'est pas rien. Lorsque je présidais le Conseil de sécurité, j'ai été amené à organiser une réunion spécifique avec les chefs d'État et de gouvernement ou les ministres chargés des affaires étrangères de ces États du Sahel pour montrer leur mobilisation. Le Premier ministre malien était venu. Il s'agissait de faire valoir au Conseil de sécurité la nécessité de poursuivre l'action de la MINUSMA à un moment où les États-Unis voudraient faire des économies sur les opérations de maintien de la paix. Les Américains pourraient convaincre certains acteurs du côté un peu fragile des initiatives autour de la MINUSMA. Nous sommes très vigilants sur ce point et nous soutenons les pays du Sahel pour le maintien de la MINUSMA et pour la poursuite des opérations de formation dans le cadre de la mission européenne. L'opération Barkhane ne peut et ne doit pas tout faire, et elle n'a pas vocation à durer éternellement. Les pays concernés doivent prendre le relais, ce qui est en cours, et les Nations unies doivent jouer totalement leur rôle.

J'en viens à l'Irak et la Syrie, dont nous n'avons pas parlé depuis un certain temps.

Nous avons reçu récemment le Premier ministre irakien. La situation politique est relativement claire dans ce pays. Le Premier ministre Abdel-Mahdi, le président Barham Saleh et l'ensemble des acteurs manifestent leur volonté de faire en sorte que la réponse politique à la succession de crises majeures que connaît ce pays puisse être inclusive et puisse permettre à toutes les communautés de participer à la vie politique. La difficulté est qu'il existe toujours des réseaux dormants de Daech. Même si elle n'a plus de territoire, l'organisation n'a pas renoncé à agir et à exister sur le plan politique. Ses tentatives d'attentats, d'embuscades et d'assassinats visent régulièrement les représentants des institutions de l'État comme les populations civiles.

Il n'y aura pas de véritable victoire contre Daech en Irak sans reconstruction des zones libérées et sans réconciliation nationale. Le processus est complexe, difficile. Les nouvelles autorités irakiennes, issues des élections du mois de mai, ont pris toute la mesure de la situation. Il y a quelques jours, nous avons signé avec le Premier ministre Abdel-Mahdi une feuille de route bilatérale, un accord de coopération qui prévoit que nous allons apporter notre aide aux forces irakiennes en matière de formation, de conseil et de renseignement. Il prévoit aussi une coopération dans le domaine de la reconstruction matérielle et économique du pays, afin que l'Irak redevienne un pôle d'équilibre au Moyen-Orient. Les autorités irakiennes agissent dans cette direction, non sans difficultés. Je me réjouis de voir une bonne mobilisation française autour de sujets tels que la reconstruction de Mossoul, y compris de la part des régions et des collectivités territoriales. L'état d'esprit est très positif mais nous devons mobiliser tous les acteurs pour que l'Irak retrouve une existence et une force perdues depuis près de vingt ans. C'est la volonté de ces acteurs et je pense que nous pouvons continuer à les soutenir dans cette tâche.

En Syrie, nous nous heurtons toujours à l'absence de règlement politique et à des difficultés majeures dans deux zones, celle d'Idlib et celle du Nord-Est syrien.

Au fur et à mesure de la reconquête par le régime de Bachar al-Assad d'espaces qui étaient hors de sa maîtrise, la région d'Idlib a réceptionné divers groupes terroristes, certains liés à Hayat Tahrir al-Cham, c'est-à-dire à al-Qaïda, d'autres liés à Daech, d'autres – qui ne sont pas tous terroristes – liés directement ou non à la Turquie. Ils se retrouvent tous dans une poche où vivent 3 millions d'habitants dont un million de réfugiés, non loin de la frontière turque, en situation de forte déshérence. Au milieu des 3 millions d'habitants, il y a quelque 30 000 combattants en tous genres, dont certains ne sont pas terroristes. Il est très difficile de maintenir un minimum de régulation et de maîtrise dans cette poche.

À l'automne 2018, le président Poutine et le président Erdogan avaient signé un accord visant à éviter que cette situation ne devienne une bombe à retardement. C'est une bombe à retardement parce que l'accord n'est pas vraiment respecté. Il n'est pas exclu que le régime al-Assad reprenne l'offensive sur une partie d'Idlib, en utilisant même des armes chimiques – nous avons quelques indices préoccupants en ce sens – ce qui entraînerait un exode considérable de la population.

Cette situation épouvantable représente une menace insupportable pour la stabilité de la région et, indirectement, pour notre propre sécurité. C'est la raison pour laquelle notre diplomatie insiste sur le respect du cessez-le-feu et sur la prise de mesures de lutte contre les groupes terroristes. Je vais me rendre à Ankara dans quelques jours pour aborder cette question avec les autorités turques qui sont directement concernées et qui se sentent un peu menacées et angoissées par rapport à cette évolution.

Dans le Nord-Est syrien, dans la dernière zone occupée par Daech où ont eu lieu les combats de Baghouz, la situation est aussi très compliquée. Des camps ont été créés où s'entassent des prisonniers et des réfugiés qui vivent dans des conditions extrêmement difficiles. Le camp al-Hol était prévu pour 15 000 réfugiés et il en compte actuellement 70 000. La maîtrise de la zone est assurée par les Forces démocratiques syriennes – FDS –, dominées par les Kurdes. Les FDS assurent la sécurité de la frontière.

Les Turcs ont heureusement renoncé à l'offensive qu'ils avaient annoncée, à un moment donné, sur cette partie de la Syrie. Les forces loyalistes voudraient la récupérer. La tension est grande et le statu quo reste fragile dans cette région où Daech conserve aussi des éléments dormants qui ont repris les attentats, notamment à Raqqa. Le combat n'est pas fini et il importe de rester vigilant, quasiment jour après jour, face à cette situation dramatique.

À ce stade, je rappelle notre position concernant le sort des combattants étrangers – notamment français – que se trouvent dans la zone d'Idlib et le Nord-Est syrien. Sur plusieurs milliers de combattants étrangers, il y a une centaine de Français dans la zone d'Idlib et entre 400 et 450 autres dans le Nord-Est syrien. Certains de ces combattants étrangers sont dans des camps, d'autres sont prisonniers. Il y a des enfants. Contrairement à ce que d'aucuns prétendent, nous n'avons pas changé de logique en la matière. Nous sommes toujours sur la même ligne, je le répète, et nous n'en bougerons pas : les combattants doivent être jugés là où ils ont commis leurs crimes ; les enfants pourraient être rapatriés en France s'ils sont orphelins ou si, d'aventure, leur mère l'autorisait. Nous avons commencé ces rapatriements et nous les poursuivrons. L'orientation est claire et nous n'envisageons aucune modification.

Revenons à la situation globale en Syrie, au-delà de ces deux zones particulièrement compliquées. La solution ne peut être que politique et nous savons quelle est la marche à suivre : réforme de la Constitution, mise en oeuvre d'un processus électoral, début de la reconstruction, élections libres auxquelles doivent participer ceux qui sont restés sur place mais aussi les réfugiés et les déplacés. Pour l'instant, nous n'en sommes pas encore arrivés au premier point car la constitution du comité constitutionnel fait l'objet de discussions qui n'aboutissent pas. Nous en sommes là. Les discussions portent sur trois ou quatre noms. Cette situation est l'objet de l'attention permanente de l'envoyé spécial du secrétaire général des Nations Unies, M. Geir Pedersen dont nous soutenons l'action.

En Libye, la situation est extrêmement préoccupante. Les affrontements qui se poursuivent dans les faubourgs de Tripoli ont déjà fait plus de 500 morts et 75 000 déplacés. Des milices islamistes radicales et des individus sanctionnés par le Conseil de sécurité ont investi une partie de la capitale. Les forces du maréchal Haftar sont à proximité de la capitale. Pour l'instant, nous sommes dans une forme de statu quo. Il n'est dans l'intérêt de personne – et certainement pas dans celui des Libyens qui sont les premières victimes de cette situation – que le statu quo demeure. Nous faisons des efforts de persuasion pour obtenir une solution politique qui commence par un cessez-le-feu sans condition.

Le maréchal Haftar dit qu'il veut bien arrêter le combat si les groupes islamistes qui appuient le président al-Sarraj se retirent. Et le président al-Sarraj dit qu'il veut bien donner un ordre d'arrêt des combats si le maréchal Haftar se retire. Dans ces conditions, nous n'en sortirons pas. Le Président de la République a récemment reçu le président al-Sarraj et le maréchal Haftar, et je l'ai accompagné dans sa démarche. Il y a des solutions puisque les deux parties se sont mises d'accord, à Abou Dhabi, sur une méthode et un contenu qui entraînent un processus électoral. Mais, pour l'instant, la situation est un peu tendue.

Précisons que l'Italie est sur la même ligne que la France en ce qui concerne la Libye. À un moment donné, il y a eu des dissensions et des divergences d'interprétation et d'analyse, mais ce n'est plus le cas. J'ai pu constater cette convergence de vue lors d'une récente rencontre à Florence avec mon homologue italien et le président Conte. C'est la vision européenne qui est aussi, d'une certaine manière, celle des Russes et des Américains. Il faut donc accentuer la pression internationale et nous allons essayer de le faire au sein du Conseil de sécurité pour aboutir à une solution politique sur laquelle il y avait un accord des deux parties quand elles se sont retrouvées, fin février, à Abou Dhabi.

Je voudrais maintenant faire le point sur un sujet majeur pour la sécurité collective : l'Iran. Le premier anniversaire de la sortie américaine du Joint Comprehensive Plan of Action (JCPoA), le 8 mai, a été marqué par une déclaration du président Hassan Rohani et par une lettre de mon homologue, M. Mohammad Javad Zarif, à la Haute représentante de l'Union pour les affaires étrangères et la politique de sécurité, Mme Federica Mogherini. Ils annoncent vouloir passer à une application partielle du JCPoA dans un délai de deux mois. Cela signifie qu'à partir du 8 juillet, l'Iran pourrait ne plus respecter certaines normes de l'accord de Vienne, notamment les limites relatives aux stocks d'uranium faiblement enrichi et aux stocks d'eau lourde. Dans le même courrier, ils demandent la reprise des exportations de pétrole au même niveau que par le passé et formulent des menaces.

Ce ne sont pas des décisions, mais des annonces, destinées à faire pression sur nous. Ce qui est curieux, c'est que l'Iran fait pression sur les États européens, qui continuent pourtant de respecter l'accord de Vienne. L'Agence internationale de l'énergie atomique (AIEA) publiera à la fin du mois de mai sa seizième communication : on découvrira alors les conclusions de sa mission de vérification, mais tout nous donne à penser que l'Iran respecte ses engagements.

Parallèlement, les États-Unis ont adopté la stratégie de la pression maximale. D'abord, ils ont décidé de ne pas renouveler les exemptions dont bénéficiaient jusqu'ici certains des pays qui achètent du pétrole à l'Iran, comme la Chine, l'Inde, l'Italie ou la Grèce. Ensuite, ils ont procédé à l'envoi sur zone de forces militaires. Enfin, mon homologue Mike Pompeo s'est rendu à Bagdad et a fait une visite surprise à Bruxelles pour nous rencontrer, nous faire part de son inquiétude et nous dire qu'il fallait continuer de faire pression sur l'Iran. Nous sommes en désaccord avec lui. Nous n'avons pas changé de logique et nous voulons simplement que les autorités iraniennes se rendent compte qu'elles doivent rester dans l'accord. Si elles en sortaient, nous ne pourrions pas y rester, et cela ne serait pas favorable aux Iraniens.

Cela ne nous empêche pas d'être très exigeants sur les questions que soulèvent les autorités américaines, comme le risque de déstabilisation de l'ensemble de la région par l'Iran ou le transfert de missiles en direction d'un certain nombre de groupes armés, notamment les houthis et le Hezbollah. Nous faisons preuve de fermeté sur ces sujets, mais nous estimons que l'enjeu de la prolifération nécessite de préserver les accords de Vienne. Nous poursuivons les discussions avec les uns et les autres pour garantir l'ensemble de nos engagements, y compris grâce à l'Instrument of Trade Exchanges (INSTEX), auquel vous avez fait allusion, madame la présidente.

Ce dispositif, qui a son siège en France, associe l'Allemagne, qui assure sa présidence, et les Britanniques. C'est un outil financier qui permet d'éviter les sanctions américaines extraterritoriales. L'Europe s'est engagée fortement et nous attendons maintenant que l'Iran adopte un dispositif miroir pour commencer à échanger par ce système. Nous estimons que les Russes et les Chinois doivent eux aussi trouver un dispositif pour assurer la pérennité de l'accord de Vienne et permettre aux Iraniens de bénéficier des retombées commerciales et financières de celui-ci.

La situation, vous le savez, est extrêmement tendue : il y a eu les attentats contre quatre bateaux dans le golfe arabo-persique et l'attaque au drone sur un pipeline en Arabie saoudite, à proximité de Riyad. La tension s'est encore accrue avec l'envoi supplémentaire de 1 500 soldats américains il y a trois jours. Personne ne dit vouloir la guerre et je pense que personne ne la souhaite vraiment, mais la situation est extrêmement tendue et, dans un contexte marqué par les provocations, un accident est vite arrivé : nous devons donc rester extrêmement vigilants.

Je voudrais clore mon propos en évoquant trois pays qui font l'objet d'une attention toute particulière et qui connaissent actuellement un processus de transition démocratique : la République démocratique du Congo (RDC), l'Algérie et le Venezuela. En RDC, où je me suis rendu la semaine dernière, j'ai pu constater avec plaisir que l'alternance était effective. En effet, le jour de mon arrivée, le président Félix Tshisekedi a nommé un Premier ministre, qui n'était pas celui que voulait lui imposer M. Joseph Kabila. Le même jour, il a permis le retour, après trois ans d'exil, de l'opposant principal, Moïse Katumbi. Il a également pris une série de mesures garantissant les libertés publiques. La vie internationale étant souvent triste et lugubre, nous pouvons nous réjouir de ces nouvelles. L'Est du pays connaît cependant une nouvelle épidémie d'Ebola, notamment dans le Nord-Kivu et l'Ituri : c'est la dixième épidémie, et la plus grave. Elle est d'autant plus grave que, dans cette partie du pays, des groupes armés, qui existaient déjà du temps de Joseph Kabila, perturbent l'administration des soins et empêchent même les humanitaires d'intervenir.

J'en viens à l'Algérie. Cela fait maintenant trois mois que la contestation a commencé dans ce pays et, après plusieurs semaines de manifestations pacifiques, le président Abdelaziz Bouteflika a présenté sa démission le 2 avril. Cette démission a été reçue par le Conseil constitutionnel. Le Parlement algérien s'est réuni en Congrès et a désigné un président par intérim, dans l'attente d'une nouvelle élection, qui devrait normalement avoir lieu le 4 juillet. Mais, pour qu'il y ait une élection, il faut qu'il y ait des candidats. Or, à cette heure, le Conseil constitutionnel n'a reçu que deux candidatures.

La situation est assez particulière. D'un côté, les manifestations se poursuivent et la population exprime une profonde aspiration au changement et la volonté d'ouvrir un nouveau chapitre de l'histoire de l'Algérie. D'un autre côté, les autorités militaires veulent que la Constitution s'applique, et c'est pourquoi M. Ahmed Gaid Salah, le chef d'État-Major de l'armée algérienne, veut faire en sorte que les élections aient bien lieu le 4 juillet. Il y a deux voies parallèles, vous le voyez, et nous souhaitons que les Algériens trouvent ensemble le chemin de la transition démocratique. C'est ce que nous voulons pour l'Algérie et c'est ce que nous espérons, compte tenu des liens profonds qui nous lient à ce pays. Dans ces moments, nous continuons de nous tenir auprès des Algériens, dans le respect de l'amitié qui doit toujours présider à nos relations.

Je voudrais dire un mot, pour finir, du Venezuela. Ce pays a connu une tentative de soulèvement militaire le 30 avril, et les manifestations qui ont suivi ont fait l'objet d'une répression violente, qui a contribué à exacerber les tensions. La tendance est à la polarisation et à l'affrontement et il faut éviter d'entrer dans la spirale de la violence. Les événements du 30 avril et du 1er mai ont confirmé, une nouvelle fois, que la solution de cette crise ne pouvait être que politique, pacifique, démocratique et vénézuélienne.

Nous condamnons fermement, aussi bien la répression violente des manifestations que la violation des droits de l'homme dont ont été victimes plusieurs élus : le président de l'Assemblée nationale, M. Edgar Zambrano, a été placé en détention et une dizaine de parlementaires ont trouvé refuge dans des ambassades. Nous appelons à la libération immédiate des prisonniers politiques, mais nous sommes également très attentifs aux droits et à l'intégrité physique du président Juan Guaidó. Nous condamnons, enfin, toute tentative d'opération par la force.

La France participe à un Groupe de contact international (GCI), qui parle aux différents interlocuteurs et dont le but est de trouver une solution politique, c'est-à-dire d'organiser des élections libres et démocratiques. Nous poursuivons cet engagement avec tous les réseaux que nous pouvons mobiliser. À cet égard, j'ai rencontré hier le Premier ministre du Chili : nous essayons d'agir ensemble, dans le cadre à la fois du groupe de Lima et du Groupe de contact international. Mais, pendant ce temps-là, 24 % de la population vénézuélienne, soit 7 millions de personnes, ont besoin d'une aide humanitaire et, chaque jour, 5 000 personnes environ quittent le pays, ce qui cause des problèmes dans les pays voisins, en particulier en Colombie. À ce rythme, cet exode pourrait concerner 7 millions de personnes d'ici la fin de l'année prochaine, et le mouvement de réfugiés du Venezuela est d'ores et déjà le plus important au monde : il est plus massif que celui qu'on a connu dans l'ensemble du Moyen-Orient.

Voilà, madame la présidente, les quelques mots que je pouvais vous dire sur quelques crises. Il faut reconnaître que le monde n'est pas calme…

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Je vous remercie, monsieur le ministre. Nous en venons aux questions des orateurs des groupes.

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Monsieur le ministre, je vous remercie, au nom du groupe La République en marche, d'être présent aujourd'hui, à l'heure où la situation européenne est aussi mouvementée que passionnante.

Les accords de Sotchi, conclus par la Turquie et la Russie le 17 septembre 2018, prévoyaient un cessez-le-feu dans la province d'Idlib, en Syrie, qui devait accorder un répit aux populations civiles. Malheureusement, ce répit ne fut que de courte durée puisque, depuis le début du mois de mai, les bombardements russo-syriens s'intensifient dans cette zone. Hier, l'Observatoire syrien des droits de l'homme a indiqué, dans un communiqué à l'AFP, que dix-huit civils, dont six enfants, avaient été tués lundi dans des frappes aériennes et des tirs de missiles contre la province d'Idlib. Le régime syrien semble absolument déterminé à reconquérir ce dernier bastion rebelle et djihadiste, au mépris de la vie des civils. Alors que la situation humanitaire était déjà atroce, les Américains soupçonnent le régime syrien d'avoir utilisé des armes chimiques le 19 mai.

Monsieur le ministre, pouvez-vous nous en dire plus sur l'utilisation éventuelle de ces armes ? Quelles nouvelles actions la France peut-elle mener pour répondre à l'escalade de la violence dans la région d'Idlib ?

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Monsieur le ministre, je souhaite, au nom du groupe Les Républicains, vous poser quelques questions sur des sujets assez divers.

La première concerne la soeur Inès Neves Sancho, une religieuse de soixante-dix-sept ans qui a été égorgée le 19 mai en Centrafrique. J'aimerais savoir si cet assassinat a été revendiqué et s'il a eu des conséquences sur la présence française dans la région. Des mesures de sécurité ont-elles été décidées ?

Ma deuxième question concerne la remilitarisation, qui est manifeste à l'échelle mondiale depuis deux ans. Les dépenses militaires ont progressé de 2,6 % en 2018, les discours belliqueux reviennent sur le devant de la scène internationale et les zones de conflit se dessinent peu à peu, quand elles ne sont pas déjà une réalité. Je pense aux tensions en mer de Chine, à la guerre en Syrie et à l'escalade des menaces de Donald Trump contre l'Iran, la Corée du Nord et la Chine. Comment analysez-vous cette remilitarisation ?

Ma troisième question concerne les six prisonniers français qui ont été condamnés à mort par la cour de Bagdad. Ces six hommes, accusés d'appartenance à l'État islamique, ont trente jours pour faire appel de cette sentence, ce qu'ils ont déjà fait. La France a rappelé son opposition à la peine de mort et indiqué qu'elle négocierait avec les autorités étrangères, afin que cette sentence ne soit pas appliquée. Je souhaiterais, monsieur le ministre, vous entendre sur ce sujet.

J'aimerais également vous interroger au sujet du Brésil, puisque vous avez rencontré, il y a quelques jours, votre homologue brésilien, Ernesto Enrique Fraga Araújo. Vous avez évoqué avec lui la situation du Venezuela, dont vous venez de nous parler. Vous vous êtes également entretenu avec lui de la frontière commune entre la Guyane et le Brésil. Avez-vous évoqué les questions de sécurité que pose cette frontière, notamment celle des orpailleurs clandestins ?

J'ai une question subsidiaire, qui concerne le projet de loi sur l'aide au développement. Je souhaiterais savoir où en sont les arbitrages budgétaires et quel est le calendrier d'examen de ce texte de loi.

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Monsieur le ministre, je vous remercie, au nom du groupe du Mouvement démocrate et apparentés, de ce tour d'horizon de l'actualité internationale. Ma question s'inscrira dans le prolongement de l'exposé que vous venez de nous faire sur votre déplacement en République démocratique du Congo.

Vous avez indiqué qu'au lendemain des élections présidentielles et législatives, la transition s'était déroulée dans des conditions tout à fait démocratiques et qu'il y avait lieu de s'en réjouir. Il n'en demeure pas moins que l'absence de notre pays en RDC, même si elle n'a été que temporaire, a bénéficié à d'autres États, qui en ont profité pour se faire une place de choix dans le domaine de la coopération et de la sécurité. Je pense notamment aux États-Unis et à la Russie. Il y avait donc urgence à ce que la France réinvestisse ces relations pour ne pas laisser le champ libre à d'autres pays, comme ce fut le cas pendant la dernière période.

Vous avez appelé, monsieur le ministre, à une nouvelle étape de la coopération entre nos deux pays. Nous savons que les attentes sont fortes et les besoins nombreux. La sécurisation du fleuve Congo et de la façade maritime, le développement d'une armée de l'air capable de couvrir les immenses distances de cette partie du continent africain, la gestion de la relation transfrontalière avec la République centrafricaine : voilà autant de thèmes qui nous paraissent importants.

L'essentiel de notre attention se porte aujourd'hui, vous l'avez dit, sur le Sahel, et c'est normal. Il nous semble toutefois important de trouver la voie d'une coopération plus poussée entre la France et la République démocratique du Congo, via l'Agence française de développement (AFD), Expertis France ou le secteur privé, voire selon d'autres modalités, qui restent à préciser. Plusieurs initiatives, comme la création d'un collège interarmées de défense ou la coopération en matière éducative, ont déjà été lancées. Pouvez-vous, monsieur le ministre, nous donner quelques précisions sur le contenu que pourrait avoir cette future coopération et sur les moyens dont la France dispose face à des concurrents très puissants ?

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Monsieur le ministre, madame la présidente, je vous remercie, au nom du groupe UDI, Agir et Indépendants, d'avoir rappelé la mémoire de nos héros morts pour la France à des milliers de kilomètres de chez eux, dans la guerre contre le djihadisme. Ma question portera sur les relations entre la France et Israël.

Nous sommes aujourd'hui à quelques semaines du dévoilement du « Deal du siècle » : le plan Trump pour la paix au Proche-Orient. Ce plan semble vouloir adopter une approche nouvelle pour sortir de l'impasse de la solution dite à deux États dans les frontières de 1967. Je voulais, au nom des 150 000 Franco-Israéliens, vous interroger sur la multiplication des petites frictions entre la France et Israël, qui donnent l'impression que le dialogue diplomatique et stratégique est de plus en plus difficile entre les deux pays.

Je me contenterai d'évoquer deux démarches qui ont été mal accueillies à Jérusalem et, plus globalement, par les amis d'Israël et par nos compatriotes demeurant en Israël. Je pense d'abord à la demande que le Gouvernement français a adressée au Gouvernement israélien, le 19 avril, d'abroger sa décision de geler les 138 millions de dollars destinés aux familles des terroristes palestiniens. Cette mesure de rétorsion décidée par la Knesset était une manière de lutter contre la politique d'incitation à la terreur mise en oeuvre par l'Autorité palestinienne de Mahmoud Abbas. La France n'accepterait pas qu'une entité verse des pensions aux familles des terroristes de Charlie Hebdo et du Bataclan, a fortiori une entité dont elle gérerait la collecte d'impôts et les droits de douane.

Le même jour, notre ancien ambassadeur à Washington et à Tel-Aviv, M. Gérard Araud, qualifiait Israël d'État d'apartheid. Ces propos n'ayant jamais été démentis par la chancellerie, notre ambassadrice, Mme Hélène Le Gal, a été convoquée par les Israéliens. Je ne parle pas de l'annulation, à deux reprises, du voyage du Premier ministre en Israël, ni du report de celui du Président de la République. Le fait que ce dernier ait reçu M. Yaïr Lapid à l'Élysée, à quatre jours des élections israéliennes, a également pu être perçu comme une forme d'ingérence. On peut imaginer que si le Premier ministre israélien rencontrait, à trois jours de l'élection présidentielle, l'adversaire du Président de la République, ce ne serait pas perçu comme un geste amical.

J'aimerais donc, monsieur le ministre, que vous fassiez le point sur les relations entre la France et Israël. Vous savez que c'est un sujet qui me tient à coeur, et qui concerne aussi nos 150 000 compatriotes vivant en Israël.

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Monsieur le ministre, je ne reviendrai pas sur le fameux tweet du Président de la République qui a légitimé le président autoproclamé du Venezuela. Je me concentrerai plutôt sur la situation politique, qui ne fait qu'empirer dans ce pays, et sur la crise économique qui s'aggrave. Vous nous avez dit que des pourparlers étaient engagés à Oslo : je souhaiterais savoir si la diplomatie française est associée à ces discussions sous l'égide de la Norvège. Comment peut-on contribuer à l'apaisement ? Quelle est la situation de nos ressortissants dans ce pays ?

J'aimerais également vous entendre sur le Cameroun et sur la situation très préoccupante de la population anglophone, qui semble être victime d'assassinats de masse.

Pouvez-vous, enfin, nous assurer que les armes vendues à l'Arabie saoudite ne sont pas utilisées dans le conflit du Yémen ?

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Monsieur le ministre, quand le Gouvernement et vous-même cesserez-vous de prendre les députés et les Français pour des gogos ? Nous vendons des armes à l'Arabie saoudite, nous sommes son deuxième client sur les dix dernières années et son troisième fournisseur d'armes. Qu'importent les 148 décapitations qui ont eu lieu en 2018, qu'importe l'assassinat d'un journaliste, qu'importe la guerre menée au Yémen, intitulée « Tempête décisive », qu'importent les 10 000 morts, qui sont à 90 % des civils, qu'importent les raids aériens sur les cars d'enfants, et les femmes visées par les bombardements, qu'importe que, d'après l'ONU, 14 millions de personnes soient menacées de famine ! Qu'importe : ce sont nos très chers amis ! L'Allemagne a décidé d'arrêter les ventes d'armes à l'Arabie saoudite et nous, nous continuons. Le pape François a pourtant déclaré que les pays qui envoient des armes en Arabie saoudite n'ont pas le droit de parler de paix.

Mais, et c'est là qu'on nous prend pour des gogos, on nous dit que ces armes ne servent pas à la guerre ! Mon oeil ! Comment croire que les chargements d'armes que l'on envoie à l'Arabie saoudite ne sont pas utilisés dans la guerre au Yémen ? On nous dit que ces armes sont seulement utilisées de manière défensive, mais il a été démontré, y compris par des notes internes, qu'elles servent de manière offensive. Une fois que cette preuve a été apportée, la seule réaction du Gouvernement a consisté à menacer les journalistes et à lancer des procédures contre eux : celui qui dit la vérité doit être bâillonné. À présent, on nous dit que même si ces armes font peut-être l'objet d'un usage offensif, elles ne sont pas dirigées contre les civils. Comment faire le tri entre toutes ces informations ?

Aujourd'hui, un cargo appartenant à l'Arabie saoudite et chargé d'armes se trouve à Fos-sur-Mer. Et que nous dit la ministre ? Qu'elle n'en savait rien ! Comment la croire ? J'aimerais que vous nous disiez franchement que vous vous fichez de ces massacres, que vous vous fichez que la France ait du sang sur son drapeau. Au nom du groupe La France insoumise, je tiens à vous qu'il serait plus honnête de le reconnaître avec franchise et sincérité.

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Monsieur le ministre, M. Horst Köhler a démissionné de ses fonctions au Sahara occidental pour des raisons de santé. Quelle est la position de la France sur ce sujet ? Comment pensez-vous que la situation va évoluer dans la région ? Chacun sait que la France aura un poids important dans le règlement de ce conflit.

La dernière fois que vous êtes venu devant notre commission, je vous ai interrogé sur la situation de Georges Ibrahim Abdallah. Vous aviez esquivé en disant qu'il s'agissait d'une question judiciaire et que vous ne pouviez pas me répondre. Après vérification, lorsqu'on a passé la peine de sûreté de trente ans, cela devient une question politique. Un pays étranger fait-il pression sur vous pour que vous mainteniez Georges Ibrahim Abdallah en prison ? Si tel n'est pas le cas, quand envisagez-vous de le libérer ?

En novembre 2004, deux pilotes biélorusses commandant des avions de l'armée ivoirienne ont bombardé une caserne française à Bouaké, en Côte d'Ivoire, tuant neuf militaires français et faisant plus de trente-huit blessés. Ils ont été interceptés alors qu'ils tentaient de franchir la frontière ivoirienne et ils ont été relâchés, parce que Paris n'a pas demandé qu'ils soient entendus. La Cour de Justice de la République a finalement indiqué, jeudi dernier, que les trois ministres en exercice à cette époque, Mme Michèle Alliot-Marie, M. Dominique de Villepin et M. Michel Barnier ne seraient pas poursuivis dans cette affaire pour leur inaction. L'abandon de ces poursuites, non susceptible de recours, est pour le moins étonnant, mais j'en prends acte. J'aimerais toutefois, au nom du groupe de la Gauche démocrate et républicaine, connaître votre avis, monsieur le ministre, sur les dysfonctionnements qui ont eu lieu au plus haut niveau de l'État et qui ont permis à ces pilotes d'être laissés en liberté. J'en profite pour demander à notre commission des affaires étrangères de se saisir de ce sujet, voire d'envisager la création d'une commission d'enquête, maintenant que tous les recours judiciaires concernant les anciens ministres français sont épuisés. Nous avons en effet le devoir de faire la lumière sur ces événements, pour les familles des militaires français tués et blessés dans cette affaire.

Je vous ai également interpellé, lors de votre dernière audition, sur l'affaire Laurent Gbagbo : la France ne devrait-elle pas s'élever contre cette situation qui est contraire à tous les principes du droit ? M. Laurent Gbagbo, qui a été acquitté, est toujours contraint par la Cour pénale internationale (CPI) à un régime qui l'empêche de quitter la Belgique, en attendant un éventuel appel. Ce n'est pas une question judiciaire, mais une question politique, sur laquelle la diplomatie française pourrait peser. Lors d'une prochaine assemblée des États parties au Statut de Rome, la France ne pourrait-elle pas proposer une réforme à ce sujet, pour éviter ce genre de situation, qui jette le discrédit sur la Cour pénale internationale ?

Je partage, enfin, tout ce qu'a dit François Ruffin sur les ventes d'armes à l'Arabie saoudite. La société civile s'est mobilisée au Havre, puis en Italie, pour empêcher le chargement d'un bateau, et j'espère qu'elle se mobilisera de la même manière à Fos-sur-Mer. Monsieur le ministre, on nous apprend qu'un million de Palestiniens vont manquer de nourriture d'ici le mois de juin. Quelle est la position française à ce sujet ? Comment comptez-vous intervenir pour créer un corridor humanitaire, afin de permettre à la population de Gaza de survivre ?

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Je propose, monsieur le ministre, que vous répondiez à cette première série de questions, avant que je donne la parole aux autres membres de la commission.

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Jean-Yves le Drian, ministre de l'Europe et des affaires étrangères

S'agissant d'abord d'Idlib, les accords de Sotchi avaient effectivement permis de trouver un compromis de cessez-le-feu, mais ils ne sont pas respectés par les autorités syriennes de Damas, qui ont repris les combats sur une partie du territoire. Je vous ai dit tout à l'heure que je souhaitais que l'on puisse avoir avec la Turquie, mais aussi avec la Russie, une discussion sur ce point extrêmement sensible, car c'est une vraie bombe à retardement.

La logique de Bachar el-Assad, depuis le début, c'est de reconquérir l'ensemble de la Syrie par la force – peu importe le temps qu'il faudra. Il ne faut pas se leurrer sur sa détermination. Seule la pression internationale, notamment celle de ses « partenaires », la Russie et l'Iran, pourrait peut-être infléchir sa décision, mais nous ne sommes pas dans cette configuration aujourd'hui. Il faudrait que de nombreuses protestations s'élèvent contre sa politique, mais elles sont trop rares.

S'agissant de l'utilisation d'armes chimiques, nous sommes prudents : nous réagirons si cet usage est avéré et létal. Cela fait partie des lignes rouges qu'a fixées le Président de la République et qui nous ont amenés à intervenir antérieurement. Nous avons des indices qui nous laissent penser que des armes chimiques ont pu être utilisées dans la région d'Idlib, mais cela doit encore être vérifié.

Madame Poletti, vous m'avez posé de très nombreuses questions et je dois vous répondre brièvement. La religieuse qui a été assassinée en Centrafrique n'était pas française, mais espagnole. Elle appartenait néanmoins à une congrégation française, ce qui a créé une confusion. Il n'y a pas eu de revendication et il s'agit manifestement d'un crime crapuleux. En Centrafrique, les accords de Khartoum entrent progressivement en application et la situation s'améliore.

Vous m'interrogez sur la remilitarisation : il est vrai, et j'en ai parlé, que nous sommes dans un contexte d'aggravation des tensions au niveau international. Quand je me suis rendu à Pékin il y a un mois, un bateau français a été interpellé dans les eaux internationales, le jour de mon arrivée. Les tensions s'accroissent partout et il faut que nous fassions tous notre possible, au Conseil de sécurité, pour trouver des solutions politiques à toutes les crises qui se manifestent dans le monde. J'ai évoqué les plus importantes, mais il y a des menaces partout : les crises sont malheureusement nomades et itinérantes. Je partage votre sentiment sur la multiplication des discours belliqueux et sur les risques de dégradation de la situation internationale.

Au sujet des six Français condamnés à mort, nous avons dit, nous disons et nous redirons aux autorités irakiennes notre position sur la peine de mort. Nous n'avons pas changé de position sur ce sujet : elle est ferme et nous la rappelons sans cesse, quel que soit le pays où la peine de mort est appliquée, y compris les États-Unis. Je rappelle en effet à ceux qui l'auraient oublié que la peine de mort est également appliquée aux États-Unis. Aujourd'hui, nous avons un millier de Français emprisonnés à l'étranger. Tous ne sont pas susceptibles d'être condamnés à mort, mais nous veillons sur chacun d'eux, grâce à la protection consulaire, qui n'est pas rien.

À Bagdad, nous avons demandé au consul de contrôler la bonne tenue des audiences. Nous lui avons demandé de s'assurer de la présence de l'avocat, mais aussi d'un interprète : c'est l'interprète de l'Ambassade qui sert d'interprète aux terroristes français qui sont jugés.

Nous sommes, vous le voyez, très respectueux des droits de la défense : nous donnons aux accusés des avis sur leurs capacités de faire appel et nous faisons systématiquement valoir la position française sur la peine de mort. J'en ai moi-même parlé au Président de la République irakienne et nous sommes très clairs sur le sujet. Nous assistons aux audiences et nous vérifions qu'elles se déroulent dans les règles. Elles sont publiques et conduites par un magistrat du siège, assisté de deux assesseurs. Le réquisitoire est prononcé par un procureur, en présence de l'avocat et d'un greffier. La justice irakienne fonctionne : elle admet la peine de mort, mais elle fonctionne, et nous nous en assurons dans le cadre de la protection consulaire que nous accordons à tous nos ressortissants, y compris aux Français qui sont jugés pour des faits de terrorisme.

Vous m'avez interrogé sur le Brésil. Avec mon collègue brésilien, que j'ai reçu avant-hier, nous sommes convenus de réactiver une commission qui était tombée en désuétude, afin d'échanger sur toutes les questions relatives à la frontière avec la Guyane. Il y sera notamment question des visas et des passages illégaux d'orpailleurs et de pêcheurs. J'ai par ailleurs rappelé à mon collègue nos principes fondamentaux sur le respect du droit. Il m'a fait une observation intéressante, qui montre que la pression internationale et la persuasion peuvent fonctionner : il m'a dit qu'il n'était plus envisagé que le Brésil sorte des accords de Paris.

Quant au projet de loi relatif à l'aide publique au développement, nous y reviendrons, je crois, à une autre occasion.

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Nous consacrerons en effet une réunion spécifique à l'aide au développement.

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Jean-Yves le Drian, ministre de l'Europe et des affaires étrangères

Le calendrier sera arrêté dans quelques jours à l'occasion d'un conseil du développement présidé par le Président de la République.

Monsieur Joncour, la République démocratique du Congo, avec plus de 80 millions d'habitants, est le pays francophone le plus peuplé du monde. Après avoir traversé une période très difficile sous les présidences de Kabila père et Kabila fils, il est entré dans la une voie d'alternance. Le président Tshisekedi fait preuve d'une volonté d'ouverture assez forte et je dois dire qu'il est réconfortant de constater cette évolution. Pourvu que ça dure !

N'oublions pas que dans l'est du pays, il existe des groupes armés, les Allied Democratic Forces (ADF), qui se réclament de Daech, ce qui montre bien que cette organisation évolue sous d'autres formes.

Nous avons décidé d'aborder la question de l'épidémie du virus Ebola au conseil des ministres afin d'engager une collaboration beaucoup plus resserrée entre la France et les autorités locales. Mille personnes sont déjà mortes et les risques de propagation sont grands car, compte tenu des pratiques culturelles, il est difficile de placer les malades à l'isolement et d'enterrer les morts avec toutes les précautions nécessaires.

Lors de mon récent déplacement en RDC, j'ai annoncé que nous allions lancer un partenariat franco-congolais autour des priorités que constituent la santé, l'éducation et le développement, auquel nous consacrerons 300 millions d'euros sur cinq ans.

Monsieur Habib, notre position n'a pas changé et elle ne changera pas : nous sommes favorables à une sortie de crise au Proche-Orient passant par la reconnaissance de deux États, aux frontières sécurisées, avec Jérusalem comme capitale. Quand le président israélien Reuven Rivlin est venu à Paris le 23 et 24 janvier, nous avons eu des échanges très sereins à ce sujet. Je reprends la formule qu'il a lui-même employée car je la trouve très bonne : « Nous sommes d'accord sur beaucoup de choses et nous sommes d'accord sur ce sur quoi nous ne sommes pas d'accord. » Je n'en dis pas plus sur la situation. Vous dites que le plan américain de paix sera dévoilé dans quelques jours, je suis heureux de l'apprendre. J'espère que ce n'est pas une fausse information. La première fois que je me suis rendu aux États-Unis en tant que ministre des affaires étrangères, les autorités américaines l'annonçaient déjà pour la semaine suivante. Longue semaine puisqu'elle dure depuis deux ans !

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Monsieur le ministre, permettez-moi de vous demander de vous acheminer vers votre conclusion car je veux pouvoir donner la parole à tous les membres de la commission qui ont demandé à poser une question.

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Jean-Yves le Drian, ministre de l'Europe et des affaires étrangères

Monsieur Ruffin, je ne vais pas rentrer dans la polémique. La ministre des armées s'est déjà exprimée devant cette commission sur ce sujet. Je voudrais simplement dire que lorsque l'on parle du Yémen, il faut parler de tout. Rappelons qu'en 2015, à l'occasion du Printemps arabe, ce pays s'est débarrassé de la dictature et a élu un président de la République, Abdrabbo Mansour Hadi. Celui-ci a été ensuite renversé par un coup d'État perpétré par les Houthis, soutenus par l'Iran qui leur a fourni des armes, notamment des missiles et des roquettes, puis il s'est réfugié en Arabie saoudite. Rappelons aussi qu'au Yémen, il y a des combattants d'Al-Qaïda. Pour ceux qui ne le sauraient pas encore, je précise que les auteurs des attentats de 2015 ont été formés dans ce pays. Rappelons encore qu'il y a des groupes de Daech. Ces forces ont attaqué l'Arabie saoudite par des tirs de missile et de roquette, et pas n'importe où : au-delà de la frontière, à proximité de l'aéroport. L'Arabie saoudite a essayé de se défendre en rassemblant une coalition, ce qui peut paraître une réaction normale quand on la resitue dans son contexte.

Aujourd'hui, la situation est dramatique. Il faut que tout le monde arrête, ce que j'ai dit aux Iraniens. Nous soutenons la mission menée par l'envoyé spécial des Nations unies, M. Griffiths.

Nous avons des relations avec l'Arabie saoudite, chose que vous condamnez, monsieur Ruffin, et je respecte ce point de vue même si ce n'est pas le mien, mais, je vous le répète, il ne faut pas se contenter d'un seul aspect des choses.

Monsieur David, il y a à Oslo deux types de discussions. Les unes sont menées dans le cadre du groupe international de contact dont nous faisons partie. Il essaie de parler aux deux parties pour essayer d'organiser des élections libres et démocratiques au Venezuela contrôlées au niveau international et éviter toute intervention de la force. Les autres, plus discrètes mais cohérentes et complémentaires des premières, sont menées par des diplomates norvégiens.

La France a 3 000 ressortissants au Venezuela. Ils sont pour l'instant en sécurité. Nous restons informés grâce à notre réseau de veille.

S'agissant du Cameroun, je partage votre inquiétude. Dans les régions anglophones de ce pays, la situation continue de se dégrader. Les pertes humaines sont de plus en plus lourdes. Nous poursuivons nos efforts à Bruxelles et à New York pour convaincre le gouvernement camerounais de prendre des initiatives afin d'aller vers un règlement politique durable de la crise. Nous sommes très préoccupés par l'emprisonnement du juriste international Maurice Kamto, inculpé mi-février. Nous faisons régulièrement pression pour qu'il soit libéré. Le Président de la République a appelé le président Biya pour qu'une solution soit trouvée. L'évolution du pays reste préoccupante, d'autant que Boko Haram sévit dans certains territoires.

Monsieur Lecoq, vous le savez, je ne me prononce jamais sur des affaires judiciaires en cours.

S'agissant de vos autres questions, je peux vous dire que nous espérons que le prochain émissaire des Nations unies pour le Sahara occidental poursuivra le travail entamé par Horst Köhler qui a permis qu'un dialogue s'instaure.

À propos de la question palestinienne, je crois avoir déjà répondu sur le fond. Nous gardons des relations avec l'Autorité palestinienne et sommes soucieux du fait qu'elle puisse continuer son action. Après que les États-Unis se sont retirés du financement de l'Office de secours et de travaux des Nations unies pour les réfugiés de Palestine (UNRWA), nous avons payé un complément afin que les dispositifs de formation puissent continuer de fonctionner.

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Je vais demander à chacun de poser sa question en moins d'une minute et à ceux qui le peuvent de renoncer à la leur.

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Monsieur le ministre, le 9 mai dernier, vous avez indiqué avoir une « pensée » pour Sophie Pétronin, otage au Mali où son fils repart pour lui porter secours. J'espère que l'attention portée à sa situation ne se relâchera pas.

Le Président de la République a annoncé en novembre dernier la restitution de vingt-six oeuvres au Bénin. Six mois ont passé et le transfert n'a toujours pas été réalisé. Y a-t-il des points de blocage ? Une date précise a-t-elle été fixée ?

Comme vous le savez, une initiative française a conduit à la création d'un comité interparlementaire du G5 Sahel. Sa constitution officielle a eu lieu le 13 mai à Ouagadougou. Nous souhaitons réaliser une promesse commune : mettre en oeuvre un contrôle interparlementaire des pays contributeurs et des pays bénéficiaires sur les projets. L'Agence française de développement serait-elle disponible pour mettre en place des opérations pilote de contrôle ?

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Entre le 29 avril et le 10 mai dernier, a eu lieu à New York une conférence sur le désarmement où l'accent a été mis sur la nécessité d'un climat apaisé pour aborder ce problème. Après une succession d'échecs du leadership américain sur la diplomatie nucléaire – pensons au Joint Comprehensive Plan of Action (JCPOA) ou aux accords de paix entre les deux Corées –, vous avez dit votre inquiétude.

Avec mon collègue Jean-Paul Lecoq, dans le cadre d'une mission sur le traité de non-prolifération, nous avons lancé une campagne internationale en faveur de l'entrée en vigueur du traité d'interdiction complète des essais nucléaires (TICE), qui correspond à la recommandation n° 5 de notre rapport dont nous allons vous remettre officiellement un exemplaire à la fin de la réunion, avec l'autorisation de notre présidente.

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Vous avez été ministre de la défense : vous savez que le Burkina Faso est confronté depuis quatre ans à des attaques de groupes djihadistes de plus en plus fréquentes et meurtrières dont l'objectif est de déstabiliser la sous-région sur un vaste territoire dont le Ghana, le Togo et le Bénin font désormais partie, sans oublier la zone sahélienne méridionale regroupant les frontières communes du Nigéria, du Tchad, du Cameroun et de la Centrafrique. Vous le savez aussi, les enjeux de sécurité prennent de plus en plus le pas sur les enjeux de développement et nous mesurons pleinement aujourd'hui l'impact négatif de cette situation sur les ressources naturelles, les populations locales et les politiques nationales.

Permettez-moi de vous rappeler que, dès juillet 2018, nous avons adopté la loi relative à la programmation militaire pour les années 2019-2025 et que nous attendons toujours l'agenda du projet de loi d'orientation et de programmation relatif à la politique française de développement et de solidarité internationales, qui répond aux ambitions affichées par le Président de la République, parfaitement en phase avec les objectifs de développement durable et l'Accord de Paris sur le climat.

La semaine dernière, nous avons auditionné Rémy Rioux dont je salue la réélection à la tête de l'Agence française de développement (AFD). Les chiffres qu'il nous a fournis montrent que cette agence vise clairement à sécuriser les investissements français à l'étranger et à promouvoir la francophonie. Pouvez-vous nous dire quand et comment vous proposerez une véritable politique française de solidarité internationale, de développement soutenable pour les générations futures et de paix durable ?

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Ma question porte sur l'engagement de la France dans la région des Balkans occidentaux. Le Président de la République a déclaré lors du dernier sommet informel du processus de Berlin qui s'est tenu dans la capitale allemande fin avril que la France et l'Allemagne allaient travailler ensemble non pas à l'élargissement de l'Union européenne mais à une politique de stabilité dans la région. Cette orientation ne risque-t-elle pas de décourager certains de nos partenaires engagés depuis plusieurs années dans une démarche d'adhésion ?

Alors que des violences ont éclaté aujourd'hui après une opération de police dans les zones serbes du Kosovo et que le président serbe a placé l'armée en état d'alerte, pouvez-vous nous indiquer de quelle manière la France souhaite s'engager dans le dialogue entre Belgrade et Pristina ?

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Monsieur le ministre, la Guinée Conakry n'est pas en état de crise mais elle y entrera très rapidement si rien n'est fait. Le président Alpha Condé, ami de la France depuis quarante ans, est victime du syndrome du troisième mandat, pourtant interdit par l'article 27 de la constitution de son pays. Son article 154 précise que le nombre et la durée des mandats ne peuvent faire l'objet de modifications constitutionnelles et hier, le ministre de la justice a démissionné pour marquer son opposition à tout changement de la constitution.

Deux scénarios sont possibles : soit la rédaction d'une nouvelle constitution qui permettrait au président Condé d'effectuer le premier mandat d'une nouvelle république ; soit une dérive à la Kabila. L'Assemblée nationale devait être réélue avant avril 2019 mais cela n'a pas été le cas. Quelle sera la position de la France en cas de troisième mandat ? Jusqu'où est-elle prête à intervenir ?

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Monsieur le ministre, je suis atteint d'une forme de délire obsessionnel face à la cécité et la surdité du Gouvernement. Je pensais être le seul dans ce cas mais j'ai découvert que Mme la présidente en était atteinte aussi, tout comme deux parlementaires qui ont effectué une mission et la quasi-totalité des membres de cette commission.

Nous comptons beaucoup sur vous pour secouer le Gouvernement au sujet de la hausse des frais d'inscription pour les étudiants étrangers. C'est une calamité qui peut avoir une incidence au niveau de la diplomatie et du rayonnement de la France dans le monde.

Si vous pouviez nous guérir collectivement, nous vous en saurions gré, monsieur le ministre.

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Monsieur le ministre, j'aimerais évoquer la situation préoccupante des Peuls.

En 2018 et 2019, les violences communautaires ont tué des centaines de civils, chassé de chez elles des milliers de personnes, détruit les moyens de subsistance et provoqué la généralisation de la famine. Les victimes sont principalement des Peuls, ciblés par les groupes d'auto-défense des ethnies dogon et bambara au motif qu'ils soutiendraient des islamistes armés liés à Al-Qaïda.

La communauté internationale et les organisations non gouvernementales s'inquiètent de cet amalgame liant djihadistes et Peuls. Comment, d'après vous, remédier à cette situation qualifiée par certains de nettoyage ethnique ? Comment protéger ces populations vulnérables et stabiliser cette zone ?

En matière de crises liées au développement du terrorisme, vous avez insisté sur la responsabilité des États mais on peut toutefois se demander comment le G5 Sahel et la force Barkhane pourraient être mobilisés.

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Ma question porte sur le gazoduc Nord Stream 2 qui relie la Russie à l'Allemagne. Il divise l'Europe. La Pologne y est opposée alors que l'Allemagne attend son achèvement. Quelle est la position de la France ?

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Je souhaite revenir sur la situation en Algérie. Le Conseil constitutionnel a dix jours pour statuer sur la validité des deux dossiers de candidature aux présidentielles. Ils ont peu de chances d'être acceptés. La tenue des élections prévues le 4 juillet semble donc mal engagée. Il apparaît peu probable que le délai constitutionnel prévoyant l'élection d'un nouveau chef de l'État dans les quatre-vingt-dix jours suivant le début de l'intérim soit tenu. Quelles sont les options possibles dans les semaines qui viennent ? Les Algériens restent massivement mobilisés et rejettent globalement la tenue d'élections sans structure de transition à même de garantir qu'elles soient libres et équitables. On peut craindre que toutes les conditions d'une perte de contrôle de la situation ne soient réunies. Le pouvoir en place ne semble en effet pas prendre la mesure des aspirations des Algériens.

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Ma première question portait sur les relations entre la France et le Brésil, mais vous avez déjà éclairé ma lanterne. Je me réjouis que le Brésil reste dans l'Accord de Paris même si cette décision peut rendre sceptique, compte tenu de la politique agricole menée par Bolsonaro.

Je souhaiterais vous interroger sur la situation au Sud-Soudan que vous n'avez pas encore évoquée. Quel impact régional peut avoir cette crise politique ? Le pétrole est bloqué à Port-Soudan, ce qui préoccupe beaucoup Djouba. Peut-être est-ce ce qui a motivé le président Salva Kiir et quatre de ses vice-présidents, dont le chef rebelle Riek Machar, à faire une retraite spirituelle au Vatican ? Quand plus aucune solution n'émerge, il peut paraître judicieux de se tourner vers la richesse intérieure de la prière. Mais cela montre peut-être simplement le poids de l'Église dans cette région où l'islam est prépondérant.

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Je remercie Laurence Vichnievsky et Hervé Berville d'avoir renoncé à leurs questions.

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Jean-Yves le Drian, ministre de l'Europe et des affaires étrangères

Monsieur Maire, concernant les otages, ma démarche ne varie pas. Je n'en fais pas écho. Sachez seulement que la France reste toujours mobilisée sur le cas de Sophie Pétronin. Il ne faut pas toujours croire ce que disent les journaux.

Lorsqu'une intervention n'a pas lieu tout de suite après une prise d'otages, les délais de détention peuvent être extrêmement longs dans cette zone. En tant que ministre de la défense, j'ai connu le cas d'otages libérés au bout de 1 500 jours. Tout cela réclame un travail méticuleux que nos services effectuent de façon méthodique et organisée.

La restitution des oeuvres au Bénin est une mission de longue haleine mais l'engagement du Président de la République sera tenu. La volonté politique est là. Des missions conjointes du ministère de la culture et du ministère des affaires étrangères se sont rendues au Bénin pour évaluer les conditions d'accueil et nous travaillons à élaborer un cadre juridique adéquat.

Quant au comité interparlementaire G5 Sahel, je salue cette initiative qui me paraît à tous égards être une bonne idée. Si l'AFD vous accompagne, tant mieux. En séance publique, je suis toujours obligé d'être un peu en retrait. Ici, je peux vous dire les choses autrement : il ne faudrait pas que les autorités politiques des États du Sahel s'installent dans le confort d'avoir la force Barkhane derrière elles. Il est nécessaire qu'il y ait une prise de conscience progressive du fait que la sécurité des Africains doit être assurée par les Africains eux-mêmes. C'est un problème de culture. Barkhane n'a pas vocation à rester éternellement dans cette zone.

Monsieur Fanget, je serai ravi de lire votre rapport commun et vous remercie pour le travail que vous avez accompli avec M. Lecoq. Nous sommes dans une période compliquée en matière de prolifération, en particulier avec l'Iran et la Corée du Nord. La situation est abordée de manière contradictoire par les autorités d'un certain pays : on ne peut pas à la fois aller voir celui qui continue à proliférer et condamner celui qui y a renoncé. Nous partageons votre combat pour le désarmement nucléaire et sommes favorables à une application du TICE. Il faut toutefois rester vigilant car nous arrivons à des échéances importantes. Le traité New Start arrivera en effet à expiration en 2021, or c'est le seul traité encore en vigueur, du fait du retrait de la Russie et des États-Unis du traité sur les forces nucléaires à portée intermédiaire (FNI). La prolifération est le risque le grave qui existe aujourd'hui dans le monde pour notre sécurité et notre survie.

Madame Lenne, je ne vais pas pouvoir reprendre l'ensemble de la problématique de l'aide au développement. Vous connaissez les engagements et les déclarations du Président de la République à ce sujet. Nous prévoyons un projet de loi pour fixer un cadre. À cet égard, le rapport de M. Berville constitue une référence. Nous sommes dans une logique totalement nouvelle qui nécessite beaucoup de détermination. La mienne sera au rendez-vous, ne vous inquiétez pas.

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Jean-Yves le Drian, ministre de l'Europe et des affaires étrangères

Cela nous permettra d'apporter des réponses dans le cadre des « 3 D » – diplomatie, défense, développement. Je pense que l'audition de M. Rioux vous a permis de faire part de votre exigence, que je comprends.

Le Burkina Faso est le pays qui me préoccupe le plus en ce moment. Dans une partie de son territoire, des milliers d'enfants ne peuvent plus se rendre l'école, compte tenu des risques d'attentats.

S'agissant des relations entre le Kosovo et la Serbie, nous avons un temps eu des espoirs. L'arrivée du président Vučić à Belgrade et du président Thaçi à Pristina laissait présager une évolution positive. Je me suis rendu à Belgrade et le Président de la République a examiné la possibilité de rencontres entre Kosovars et Serbes. La situation s'est tendue depuis. Le président kosovar est contesté. Il y a des populations serbes au Kosovo et kosovares en Serbie. Des échanges de territoires ont été envisagés mais ce processus a été bloqué par des prises de position radicales. Je pense en particulier à la décision du Kosovo de taxer à 100 % les productions serbes. Le Président de la République et la Chancelière allemande ont co-organisé un sommet à Berlin le 29 avril dernier et nous espérons qu'un nouveau sommet permettra de relancer le dialogue entre Belgrade et Pristina. Vous savez que je suis avec une attention particulière cette situation préoccupante qui appelle une vigilance constante.

Monsieur Fuchs, mon audition est publique et je ne peux que constater avec vous que la situation en Guinée Conakry est préoccupante. J'ai bien noté la démission du ministre de la justice, les bruits qui circulent au sujet d'une éventuelle réforme constitutionnelle destinée à modifier la durée du mandat du président de la République. Je travaille avec les pays voisins dans le cadre de la Communauté économique des États de l'Afrique de l'Ouest (CEDEAO) afin de préserver l'esprit de la constitution et garantir que la prochaine élection présidentielle se déroule librement, paisiblement et de manière transparente.

Monsieur Hutin, je suis impressionné par votre détermination, qui ne m'étonne pas. Je veillerai à ce que les nouvelles conditions mises en place soient compensées par des exonérations et des bourses supplémentaires.

Madame Trisse, je crois que vous vous inquiétez peut-être outre mesure au sujet du gazoduc car il y a désormais un compromis entre les pays européens. Il a été long à mettre en place. Nous avons soutenu la révision de la directive « gaz » qui vise à appliquer les règles européennes aux gazoducs offshore afin que ces projets soient encadrés au niveau européen. Les initiatives communes que nous avons eues avec les Allemands ont permis de clarifier le cadre juridique. Nous sommes sur la voie d'un accord qui permettra d'éviter des complications et des tensions franco-allemandes.

Madame Sylla, je crois avoir dit dans mon propos introductif que la stigmatisation dont les Peuls étaient victimes nous préoccupait beaucoup, d'autant qu'elle touche plusieurs pays, dont le Nigéria. Quelques Peuls ont rejoint les djihadistes et certains en ont profité pour ostraciser une population tout entière. Il appartient aux États concernés d'agir. Les responsables politiques doivent faire en sorte de mener des politiques inclusives à l'égard de cette communauté pour laquelle nous avons la plus grande considération.

S'agissant du Soudan du Sud, nous appelons à ce que l'accord de paix entre toutes les parties prenantes puisse être mis en oeuvre. Lors d'un déplacement à Rome, j'ai évoqué cette question avec la communauté Sant'Egidio et le cardinal Parolin, qui ont été acteurs de l'accord de paix. Les autorités du Saint-Siège ont un rôle diplomatique non négligeable, y compris pour le processus de paix au Venezuela.

Sur l'Algérie, je ne peux pas m'exprimer plus que je ne l'ai déjà fait. J'observe qu'il y a deux situations parallèles. J'observe aussi que trois personnalités ont demandé l'ouverture d'un dialogue entre le haut commandement de l'armée, l'opposition et le mouvement populaire : Ali Yahia Abdennour, Ahmed Taleb Ibrahimi, et Rachid Benyelles. Cela concerne les Algériens eux-mêmes et c'est aux Algériens eux-mêmes de prendre cette situation en main. Nous sommes les amis de l'Algérie et nous souhaitons que la transition démocratique s'effectue dans les meilleures conditions.

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Merci beaucoup, monsieur le ministre. J'invite Jean-Paul Lecoq et Michel Fanget à vous remettre officiellement leur rapport d'information sur l'arme nucléaire dans le monde, cinquante ans après l'adoption du Traité sur la non-prolifération nucléaire (TNP).

La séance est levée à 19 heures 30.

Membres présents ou excusés

Réunion du mardi 28 mai 2019 à 17 h 35

Présents. - M. Hervé Berville, M. Pierre Cabaré, Mme Annie Chapelier, Mme Mireille Clapot, M. Alain David, M. Michel Fanget, M. Bruno Fuchs, Mme Olga Givernet, M. Meyer Habib, M. Christian Hutin, M. Bruno Joncour, M. Rodrigue Kokouendo, M. Jean-Paul Lecoq, Mme Marion Lenne, Mme Nicole Le Peih, Mme Brigitte Liso, M. Jacques Maire, Mme Bérengère Poletti, Mme Isabelle Rauch, Mme Laetitia Saint-Paul, Mme Marielle de Sarnez, Mme Sira Sylla, Mme Liliana Tanguy, Mme Nicole Trisse, Mme Laurence Vichnievsky

Excusés. - M. Lénaïck Adam, Mme Ramlati Ali, M. Frédéric Barbier, M. Moetai Brotherson, M. Olivier Dassault, M. Bernard Deflesselles, M. Christophe Di Pompeo, Mme Laurence Dumont, Mme Valéria Faure-Muntian, Mme Anne Genetet, M. Philippe Gomès, M. Michel Herbillon, Mme Amélia Lakrafi, Mme Marine Le Pen, M. Jean-Luc Mélenchon, M. Jean-Luc Reitzer, M. Hugues Renson, M. Bernard Reynès

Assistaient également à la réunion. - M. Jean-Michel Jacques, M. Christophe Lejeune, M. Philippe Michel-Kleisbauer, M. François Ruffin