La séance est ouverte à quinze heures cinq.
Mes chers collègues, nous en venons cet après-midi aux interventions des orateurs de groupe, puis à l'examen des amendements et au vote sur les missions Défense, Anciens combattants, mémoire et liens avec la Nation, et Sécurités.
Pour la cinquième année consécutive, le budget de la défense est en augmentation. Pour la quatrième année consécutive, il est conforme à la trajectoire de la loi de programmation militaire (LPM) 2019-2025. Les crédits de la mission Défense pour 2022 s'élèvent à 40,9 milliards d'euros, contre 32,3 milliards en 2017, soit un effort de 26 milliards en cinq ans.
Depuis 2017, la volonté politique du Président de la République, du Gouvernement et du Parlement a permis de sortir nos forces armées d'un cercle vicieux fait de réductions des capacités, des effectifs, mais aussi des ambitions. Nos armées avaient fini par mettre en pratique un terrible concept : perdre la guerre avant la guerre. Nous avons mis fin à ce cercle vicieux pour leur redonner les moyens qui leur permettront d'assumer à nouveau la vocation mondiale de puissance d'équilibre de la France. Comme l'a dit Mme Parly, d'ici à 2030, la France doit pouvoir intervenir partout où ses intérêts sont en jeu, gagner sur tous les terrains et l'emporter face à tous les ennemis, seule ou en coalition.
En examinant chaque année le budget de la défense au sein de notre commission, nous avons contribué, à notre façon, selon nos sensibilités politiques, à soutenir le modèle d'armée complet, équilibré, dans la durée, qui est notre objectif depuis la revue stratégique de 2017. Je tiens à féliciter l'ensemble des rapporteurs, qui ont apporté une pierre à l'édifice et ont contribué à la renaissance de nos forces armées – j'ai été moi-même rapporteur pour avis du budget de la marine pendant les trois premières années de la législature.
La ministre de la défense nous a annoncé, pour 2022, des livraisons d'équipements à hauteur de 23,7 milliards, mais aussi une commande militaire d'un montant de 36 milliards, dont plus de 8 milliards pour les programmes majeurs. L'ensemble des armées sont concernées, des véhicules blindés aux frégates, en passant par les équipements radio, les avions, les satellites, etc. N'oublions pas les 603 millions de commandes anticipées dans le secteur aéronautique, qui portent sur trois A330 de transport stratégique, huit hélicoptères Caracal et des systèmes de drone pour la marine. Ces commandes permettent à nos industries de défense d'innover et de produire. Elles sont le tissu indispensable à notre autonomie stratégique nationale mais aussi européenne. Nous pouvons nous féliciter que, face aux conséquences de la pandémie mondiale, qui ont logiquement affecté les livraisons, nous ayons pu ajuster les priorités aux disponibilités, tout en maintenant le niveau d'investissement.
La mission Défense prévoit d'importantes livraisons d'équipements en 2022, comme, par exemple, 245 véhicules blindés Griffon, les premiers engins blindés de reconnaissance et de combat Jaguar, les drones Patroller, une frégate – La Lorraine –, un sous-marin nucléaire d'attaque (SNA), des capacités exploratoires pour les grands fonds marins, des avions ravitailleurs MRTT Phénix et des satellites.
Le maintien en condition opérationnelle (MCO) bénéficie en 2022 d'un investissement de plus de 5 milliards d'euros ; 2,4 milliards sont consacrés au renouvellement de nos infrastructures, notamment pour les équipements à venir. Des moyens substantiels sont encore affectés, cette année, au renseignement, à l'espace, à la cyberdéfense – 376 nouveaux postes sont créés dans le cyber – et, bien sûr, à la dissuasion nucléaire, afin de préserver notre souveraineté.
S'agissant de la recherche, l'Agence de l'innovation de défense (AID) bénéficiera d'un soutien de plus de 1 milliard d'euros. Pour les hommes et leur famille, le budget 2022 consacre 2 milliards au plan famille, aux petits équipements du quotidien et aux structures d'hébergement. L'effort budgétaire consenti encore cette année n'ignore donc pas ce qui fait le cœur de nos armées : les femmes et les hommes, qu'ils soient sur terre, dans les airs ou en mer. Rappelons qu'en 2022, nous recruterons plus de 26 000 personnes.
Le budget 2022 est bien au service d'une démarche stratégique qui, comme l'a dit le chef d'état-major, nous permet de gagner la guerre avant la guerre. Plusieurs défis continueront cependant à se poser à nos forces armées dans le cadre de la prochaine législature et de la future loi de programmation militaire. Sur un plan opérationnel, j'en retiens deux en particulier : des tensions dans le recrutement et la fidélisation des hommes ; l'approvisionnement en munitions pour la préparation opérationnelle.
Enfin, sur le plan stratégique, nous devons poursuivre l'effort de défense, afin que la France puisse continuer à défendre sa souveraineté, à jouer son rôle de puissance d'équilibre dans le monde – je pense bien sûr à la zone Indo-Pacifique.
Avant de disposer d'une véritable défense européenne, autonome, dotée d'une boussole stratégique, nous devons nous préparer au retour du combat à haute intensité et aux défis que nous lancent les puissances autoritaires et agressives dans de nombreuses régions du monde. Poursuivre nos efforts, c'est bien l'ordre de marche qui doit être le nôtre !
Le groupe La République en marche votera ce budget.
Il est difficile de se prononcer sur ce budget, car on peut voir à la fois le verre à moitié plein et à moitié vide. D'un côté, nous ne pouvons que constater un certain nombre d'éléments très positifs : la LPM est respectée de bout en bout, le budget est en hausse de 1,7 milliard et on observe, sur le terrain, un mouvement de réparation, une remontée en puissance de nos forces. Tous ces facteurs nous inciteraient à voter le budget.
Cela étant, un phénomène s'est aggravé depuis la revue stratégique de 2017 : la poussée des tensions dans la zone Indo-Pacifique. Nous savons ce qui s'est passé avec l'Australie et nous observons les actions en cours à l'égard de Taïwan. Il y a aujourd'hui un véritable débat de fond sur le format de notre marine – l'amiral Vandier nous l'a rappelé.
D'autres questions restent ouvertes, comme l'a montré le rapport de Jean-Jacques Ferrara sur la force aérienne. Je salue les exportations de Rafale en Croatie et en Grèce, qui constituent un succès collectif de la Team France. Cela étant, nous connaîtrons une baisse capacitaire temporaire liée à ces ventes de matériels d'occasion, puisque nous ne disposerons plus que d'un parc de 117 Rafale au lieu de 129.
Il est un autre sujet, un peu plus marginal, mais qui n'en constitue pas moins un signe un peu inquiétant : la décision prise par l'armée de retarder quelques commandes de Griffon pour développer les matériels dont nous avions un besoin impératif : le véhicule blindé d'aide à l'engagement (VBAE) et les engins du génie. On a connu la même tendance pour toutes les LPM : afin de respecter les impératifs budgétaires, on retarde des programmes.
Deux raisons expliquent que notre groupe, après des débats nourris, s'abstiendra lors du vote de ces crédits.
Premièrement, il était prévu initialement que nous débattions de l'actualisation de la LPM. Nous regrettons tous que cela n'ait pas été le cas.
Deuxièmement, j'avais milité pour que le plan de relance comporte un quatrième pilier, consacré à la défense et à la sécurité. Rappelons que le déficit public est passé de 3,3 % du PIB avant la crise du covid à 6,7 % aujourd'hui. Ces quelques milliards supplémentaires nous auraient permis de conserver notre avantage compétitif, qui repose sur un modèle d'armée complet, d'emploi, et notre capacité à jouer un rôle d'équilibre.
Je qualifierai notre abstention de « bienveillante ». Nous saluons les efforts accomplis, mais nous savons combien il est difficile de rattraper des engagements budgétaires non tenus – toutes les familles politiques ont leur part de responsabilité en la matière. Les décisions que nous prenons aujourd'hui affectent les hommes et les femmes de nos armées, qui sont en première ligne. À l'avenir, c'est à eux, d'abord, que nous devrons rendre des comptes.
Ils ont aussi en mémoire les décennies de restrictions, qui n'ont pas encore été rattrapées. Je peux concevoir que vous fassiez le choix de l'abstention pour des motifs politiques, mais c'est plus difficile à comprendre pour nos soldats, qui ont subi, depuis vingt ans, les conséquences de choix budgétaires auxquels votre groupe a pris part.
Nous sommes réunis pour examiner notre cinquième et dernier budget de la défense de la législature, qui est aussi le quatrième de la LPM 2019-2025, ainsi que les crédits de la mission Anciens combattants, mémoire et liens avec la Nation et ceux de la gendarmerie.
La surprise réservée par le budget de la défense est qu'il est sans surprise. Il résulte d'une volonté politique et se concrétise par une augmentation des crédits de 1,7 milliard d'euros, laquelle respecte parfaitement les engagements pris dans le cadre de la LPM 2019-2025. Certaines recommandations du groupe Agir ensemble ont été prises en compte. Lors de l'examen du PLF 2021, nous avions alerté le Gouvernement sur deux points : le manque de déclinaison opérationnelle sur le retour de la haute intensité et la nécessité d'adapter notre stratégie au Sahel. Le budget répond à ces attentes. D'une part, il prévoit la livraison des capacités critiques nécessaires pour crédibiliser notre force armée dans l'hypothèse d'un conflit de haute intensité. D'autre part, l'action Surcoûts liés aux opérations extérieures du programme 178 permet à notre dispositif militaire au Sahel d'évoluer.
Par ailleurs, le budget exploite l'hybridité pour offrir à la France de meilleurs leviers d'influence, notamment en consacrant 646 millions à l'espace, 231 millions au cyber et près de 400 millions au renseignement.
Je voudrais également souligner la complémentarité des plans France relance et France 2030, qui font la part belle aux enjeux militaires et de dualité, qu'il s'agisse du nucléaire, de l'espace, du cyber et des fonds sous-marins. Ces crédits s'ajouteront au budget prévu par la LPM. La défense contribue ainsi à favoriser le développement technologique du pays.
Je rappelle aussi que les crédits du Fonds européen de la défense (FED), dont le montant annuel s'élève à 1,2 milliard d'euros, s'ajouteront aux efforts nationaux.
Cela étant dit, nous aurions aimé que le budget alloué aux forces des réserves suive la dynamique générale, notamment s'agissant de la réserve opérationnelle.
Par ailleurs, il faut veiller à ce que les moyens alloués au cyber, au renseignement et à l'espace s'inscrivent dans un cadre équilibré, qui préserve le financement des autres armées. Avec Sereine Mauborgne, je serai particulièrement attentif aux effectifs de la force opérationnelle terrestre.
La mission Anciens combattants, mémoire et liens avec la Nation envoie des signaux forts au monde combattant, dans le prolongement de ce qui a été fait depuis 2017. Cette année, on doit noter l'évolution du point de la pension militaire d'invalidité (PMI). Par ailleurs, les crédits affectés à la journée défense et citoyenneté (JDC) sont en hausse de 2 millions d'euros et ceux dédiés au service militaire volontaire (SMV) sont confortés à un niveau de 3 millions d'euros.
Nous voterons donc sans réserve et avec enthousiasme les crédits des missions Défense et Anciens combattants, mémoire et liens avec la Nation.
En dressant le bilan de notre action depuis 2017, je ne vois pas un seul domaine dans lequel on aurait régressé. Jacques Marilossian et Thomas Gassilloud ont très bien décrit tout ce qui a progressé. Il y a des programmes dont le démarrage a été retardé, mais pour des raisons qui tiennent plus à la chronologie et à la préparation qu'au budget proprement dit. La trajectoire financière a été pleinement respectée depuis le début de la LPM.
Je tiens à rassurer ceux qui ont peur pour l'avenir. Nous pouvons être fiers de ce que nous avons fait. Nous avons pesé, par notre soutien – je pense, par exemple, aux rapporteurs successifs du budget de la marine – sur cette évolution budgétaire.
Le Figaro d'hier faisait état de la bataille relative aux Small Modular Reactors (SMR), que j'évoque depuis plusieurs mois. Le Président de la République a souhaité que nous entrions dans la compétition, en développant une filière 100 % française du nucléaire civil faiblement enrichi à 4 ou 5 %. Ce projet résulte, pour partie, des travaux de notre commission. Naval Group et TechnicAtome développent les microcentrales les plus performantes en Europe, et probablement au monde. Là où les Américains ont inventé le nucléaire, nous concevons les micro-chaudières les plus compactes.
Au-delà de la trajectoire financière adoptée dans la LPM, nous avons su réagir au moment où il le fallait. Cela a été le cas pour le nucléaire, mais aussi pour la défense et l'espace. La ministre de la défense a ainsi augmenté les budgets pour permettre à Toulouse de remporter la compétition relative à l'implantation du centre d'excellence de l'Organisation du traité de l'Atlantique Nord (OTAN) pour l'espace. Je citerai également notre action en matière de cybersécurité. En février 2018, Louis Gautier, alors à la tête du Secrétariat général de la défense et de la sécurité nationale (SGDSN) nous présentait la première revue stratégique de cybersécurité. Dès l'hiver suivant, la ministre exposait la doctrine de la lutte informatique offensive (LIO), autrement dit la capacité de riposte cybersécuritaire, dotée d'effectifs en hausse. Nous avons consolidé les domaines stratégiques à mesure que les besoins apparaissaient.
Des inquiétudes sont nées du fait que l'on puise dans les réserves de Rafale pour l'exportation, ce qui réduit notre parc à 117 avions au lieu de 129. C'est sans compter sur ce que nous allons peut-être vendre d'ici au prochain exercice budgétaire. Je compte bien que l'on obtienne de nouvelles commandes ! Peut-être pourra-t-on également « rétrofiter » des Mirage 2000, que l'on récupérera quelque part. On pourrait donc passer en dessous des 117 Rafale. Cela étant, je suis sûr que nous passerons la commande des douze Rafale évoquée par Jean-Jacques Ferrara ce matin et que nous atteindrons, à terme, le nombre d'appareils promis.
Le groupe Modem et démocrates apparentés votera évidemment ces budgets, mais nous voudrions que toutes les hypothèques soient levées. Nous ne pensons pas une seule seconde que l'effort que nous avons fait pendant cinq ans ne sera pas prolongé.
Nos forces armées sont fortement mobilisées, depuis plusieurs années, dans le cadre des opérations extérieures et intérieures, sur fond de terrorisme et de crise sanitaire. Je salue le travail remarquable qu'elles accomplissent dans un contexte parfois difficile, compte tenu de la multiplication de leurs missions et de leurs engagements. Face à la montée des tensions internationales et aux menaces croissantes provenant des nouvelles tactiques de guerre hybride, les défis qui nous attendent n'ont peut-être jamais été aussi grands depuis la fin de la guerre froide. Nous mesurons jour après jour leur implication stratégique : je pense aux actions belliqueuses de puissances étrangères – Russie et Chine, pour ne citer qu'elles. L'environnement mondial est également soumis à de nombreux aléas potentiellement périlleux pour l'équilibre mondial et la paix, à l'image de l'architecture de sécurité liée à l'armement nucléaire et des tensions persistantes au sein de la zone Indo-Pacifique. Le PLF 2022 et sa mission Défense doivent s'adapter aux problématiques actuelles et à venir, ainsi qu'aux menaces grandissantes.
Je tiens à souligner ce qui va dans le bon sens. Les efforts budgétaires sont indéniables, dans la continuité d'actions déjà engagées, qui portent leurs fruits sur le terrain. La hausse de 1,7 milliard, inscrite dans la LPM, est, cette année encore, maintenue. Dans le même sens, l'effort substantiel consacré au programme 146 Équipement des forces est conforté : les crédits de paiement, qui excèdent légèrement 860 millions, financeront notamment les grands programmes d'armement, dont l'importance est cruciale. Nous notons une augmentation de 1 348 emplois comptabilisés en équivalents temps plein (ETP) entre la loi de finances initiale (LFI) 2021 et le PLF 2022. Relevons aussi les investissements en faveur des hommes, comme l'illustrent, par exemple, le plan famille et le plan ambition logement.
Mon groupe souhaite cependant vous alerter sur quelques points, notamment la baisse drastique des autorisations d'engagement des programmes 144, 178 et 146 par rapport à 2021, ce qui laisse craindre une baisse future des crédits de paiement. Des sujets primordiaux sont pourtant en jeu. Le programme 144 concerne l'anticipation des menaces, qui doit permettre d'adapter l'outil de défense aux risques émergents. Le programme 178 a trait, quant à lui, à l'amélioration de la préparation opérationnelle. La révision de la LPM indiquait que cette préparation devait faire l'objet d'une attention particulière, pour préparer nos armées aux conflits de haute intensité. Nous nous interrogeons sur la pérennité des hausses de crédits prévus par la LPM 2019-2025, dans la mesure où la marche sera encore plus haute à franchir à partir de 2023. En effet, à compter de cette date, les augmentations annuelles de crédits passeront de 1,7 à 3 milliards. Comment les objectifs financiers finaux de la LPM seront-ils tenus ?
Il n'en reste pas moins que les efforts sont indiscutables. Même si nous faisons usage de notre droit d'alerte sur plusieurs sujets, nos soldats et nos armées attendent un soutien massif et éclairé, que nous devons leur apporter. C'est pourquoi le groupe Socialistes et apparentés votera les crédits de la mission Défense.
Depuis le début de la législature, les députés du groupe UDI et indépendants se sont efforcés de faire preuve d'une opposition constructive à l'égard des mesures proposées par le Gouvernement et la majorité. Lorsque nous avons considéré qu'ils faisaient fausse route, nous avons affirmé notre opposition, parfois avec force, mais toujours avec l'intérêt général en ligne de mire. À l'inverse, lorsque nous avons estimé qu'une mesure allait dans le bon sens, ou qu'une réforme était bonne pour le pays, nous l'avons votée, en faisant fi de nos différences ou de nos nuances politiques. C'est sans doute cela, aussi, être centriste.
La mission Défense est dotée, pour 2022, d'un budget de 40,9 milliards d'euros. L'augmentation de 1,7 milliard de ses crédits par rapport à 2021 respecte les engagements pris dans le cadre ambitieux de la LPM. Disons-le sans ambages : ce budget nous satisfait pleinement. Alors que notre pays et notre économie ont été profondément bouleversés par la crise sanitaire, le Gouvernement aurait pu choisir la facilité, privilégier le court terme et mettre un coup de canif dans la LPM, comme bien d'autres gouvernements l'ont fait par le passé. Tel n'a pas été le cas. Nos armées et nos militaires ne servent plus de variables d'ajustement, ce dont nous nous réjouissons. Avec ce budget, la parole donnée est respectée : c'est le minimum que nous devons à ceux qui consacrent leur quotidien à la protection de la France, parfois, il faut le dire, au détriment de leur vie.
Je voudrais souligner les aspects les plus saillants du budget et renouveler les craintes que nous avions formulées en 2018 lors de l'examen de la LPM.
Parmi les éléments satisfaisants, je relèverai le milliard consacré à l'innovation, pour concevoir les technologies de demain, les 500 millions supplémentaires pour les programmes d'armement majeurs, les 337 millions destinés à l'amélioration des conditions d'hébergement et de logement de nos militaires, les 300 millions supplémentaires consacrés à l'entretien des matériels, la création nette de 450 postes dans des domaines aussi essentiels que le renseignement et la cyberdéfense, ou encore le nombre substantiel de nouveaux véhicules – 5 000 – destinés à nos gendarmes.
Concernant nos craintes, n'oublions pas que, si la LPM est respectée quasiment à la lettre, 2023 sera marquée par une hausse de 3 milliards du budget de nos armées. Cette marche sera haute, et son franchissement ne sera pas un cadeau pour le prochain gouvernement, compte tenu notamment des nombreuses dépenses réalisées dans le présent PLF. Dit autrement, nous considérons que, pour le bien et l'avenir de nos armées, il aurait fallu mieux répartir les efforts, afin de réduire à néant les risques de faiblir.
Cela étant dit, le groupe UDI et indépendants votera néanmoins les crédits de la mission Défense.
En ce qui concerne la mission Anciens combattants, mémoire et liens avec la Nation, notre groupe se réjouit de la subvention de 56,36 millions d'euros au profit de l'Office national des anciens combattants et victimes de guerre (ONACVG), ainsi que du maintien à 25 millions d'euros du budget consacré à l'action sociale. De même, notre groupe salue la volonté du Gouvernement d'augmenter le point de la PMI, qui s'inscrit dans la droite ligne des mesures prises en faveur du monde combattant depuis le début de cette législature.
Toutefois, notre groupe regrette que la baisse naturelle du nombre des ayants droit et ayants cause se traduise par une énième baisse du budget de la mission. Maintenir le budget à hauteur de son niveau de 2021 aurait permis, sans doute, de répondre à de nombreuses requêtes légitimes formulées depuis longtemps par le monde combattant. Le groupe UDI et indépendants proposera, en ce sens, un certain nombre d'amendements en séance publique, afin de répondre aux attentes de ces femmes et de ces hommes.
Enfin, puisqu'il s'agit de notre dernier exercice budgétaire, je vous remercie, madame la présidente, pour votre bienveillance et votre sens de l'équité.
Malgré les points de désaccord que je fais entendre, et même si cette commission mériterait d'être le lieu de débats un peu plus animés, je vous remercie moi aussi pour la présidence bienveillante que vous exercez.
C'est sans doute la dernière fois de la législature que nous nous retrouvons pour parler de ces sujets importants. Cette cinquième hausse successive du budget ne doit pas faire oublier l'absence d'actualisation de la loi de programmation militaire en 2021 – et l'absence de débat sur la question.
Trop souvent, la commission de la défense est une commission de la défiance vis-à-vis des parlementaires. Vous n'en êtes pas responsable, madame la présidente : ce sont les institutions qui sont en cause. On discute chiffres et comptabilité, mais bien peu des grandes options stratégiques et géopolitiques ainsi que des conséquences que nous devons en tirer : ce ne sont pas des questions dont le Parlement se saisit. C'est là un problème de fond qui nous amènera à voter contre le projet de loi de finances, car c'est la seule manière que nous avons de manifester une opinion sur les grands choix en matière d'interventions militaires.
La LPM était censée faire l'objet d'une actualisation. Or cela n'a pas été le cas. L'environnement stratégique a pourtant connu une évolution extrêmement importante, et la pandémie a été un choc mondial. Tout cela aurait justifié des débats de fond sur les grandes orientations stratégiques à venir.
De plus, on nous soumet un budget à trous : il y a des trous capacitaires et d'autres qui sont liés aux surcoûts des opérations extérieures et des missions intérieures. Nos collègues du Sénat avaient ainsi identifié, concernant les OPEX, un surcoût de 8,6 milliards d'euros. Il m'a été répondu que les critiques du Sénat n'étaient pas pertinentes, mais les arguments avancés me laissent sur ma faim.
La LPM court jusqu'en 2025, soit au-delà de la fin du quinquennat. Une augmentation des crédits est proposée cette année, à hauteur de 1,7 milliard, mais les hausses les plus importantes sont prévues après ce quinquennat, ce qui revient à dire qu'il s'agit en réalité d'un programme électoral. Pourquoi pas, mais il faut le considérer comme tel : ce sont d'abord et avant tout des promesses qui sont faites dans l'hypothèse où la même équipe serait reconduite. On peut donc se demander si les prévisions se réaliseront dans le cas contraire. Je me méfie de cette manière de faire de grandes annonces dont l'exécution est renvoyée à une époque où le gouvernement et la majorité actuels ne sont pas assurés d'être encore aux responsabilités.
Par ailleurs, entre 2019 et 2025, 10 % de la hausse sera absorbée par la seule dissuasion nucléaire.
Nous regrettons aussi le niveau de disponibilité trop faible des appareils et l'insuffisance des moyens pour protéger les espaces maritimes. Au-delà de la bataille des chiffres, il faudra que nous ayons un jour, dans le cadre d'une vraie vie parlementaire, une réflexion collective sur la stratégie et la doctrine. Les conséquences géopolitiques de la pandémie ont changé la donne. Il en est de même du comportement de nos « amis » australiens et de l'affaire des sous-marins, qui doivent nous conduire à reconsidérer les modalités de notre participation à l'OTAN. Qu'attendons-nous pour remettre en cause notre participation à son commandement intégré ? Faudra-t-il subir de nouveaux affronts ?
L'enlisement militaire au Sahel, après huit années de guerre, devrait également nous amener à réfléchir. Depuis 2013, cinquante-deux de nos soldats sont tombés. Chaque fois que nous apprenons l'une de ces disparitions, nous sommes tous bouleversés. Mais cela devrait nous conduire à avoir une discussion politique sur les raisons de notre engagement et à envisager la possibilité de sortir de ce conflit. Nos armées font leur devoir avec beaucoup de courage, mais aucun plan politique n'accompagne l'intervention militaire. Or nous ne pouvons pas demander à nos soldats de régler des problèmes politiques.
En ce qui concerne la mission Anciens combattants, mémoire et liens avec la Nation, je salue la revalorisation du point de la pension militaire d'invalidité (PMI), qui sera porté à 15,05 euros à partir du 1er janvier 2022. C'est une bonne chose, mais le rattrapage est loin d'être terminé. Des écarts se sont creusés, et aucune réforme significative du système d'indexation du point n'a été engagée. La composition de la commission tripartite chargée de travailler sur le point PMI pose de nombreuses questions. Le niveau de vie des pensionnés militaires ne devrait pas être négociable. Il faut mettre en place un calendrier de rattrapage du point d'indice ; nous avons déjà perdu assez de temps. Il en va de même pour la demi-part fiscale des veuves de guerre.
Nous voterons contre ce budget en raison des nombreuses critiques que nous formulons à son encontre, mais aussi – et avant tout – car c'est pour nous une façon d'exprimer l'idée selon laquelle, dans le monde incertain qui se dessine devant nous, le Parlement doit plus que jamais se saisir de ces enjeux et mener des débats sur le fond, au lieu de se limiter à des discussions comptables.
Nous sommes dans un temps de discussion budgétaire : il paraît logique que nous parlions un peu de chiffres… Par ailleurs, nous avons mené de nombreuses auditions sur les conséquences de la rupture de l'accord-cadre avec l'Australie et avons eu de multiples discussions géostratégiques autour de la question. Je serais d'ailleurs ravie que vous soyez présent la semaine prochaine, lorsque nous entendrons Philippe Errera et Alice Guitton sur les futures options stratégiques en Indo-Pacifique. Cela nous permettrait de bénéficier de votre éclairage.
Je m'attache à ce que nous ayons des discussions sur les grands enjeux et sur la nécessité d'adapter nos armées, tant dans leurs moyens que dans leur stratégie opérationnelle, pour faire face aux nouvelles formes de conflictualité.
Vous parlez d'or, mais il était question dans mon propos de délibération et de vote, et vous me répondez en évoquant des auditions, alors qu'il est évident que nous en menons un grand nombre.
Vous nous reprochez un manque de réflexion et de débat sur des questions essentielles, aussi je souligne que nous ne parlons pas seulement de chiffres.
Les auditions servent à nous éclairer pour qu'ensuite nous soyons en mesure de débattre et décider. Si vous considérez que notre commission n'est pas un lieu de dialogue et que les auditions que nous menons ne sont pas des moments de dialogue, j'aimerais que vous m'expliquiez où vous en trouverez !
Je constate que certains de nos collègues sont non seulement désagréables politiquement, mais en plus mal élevés !
C'est le dernier budget que nous examinons au cours de cette législature. Je profite donc de l'occasion pour vous remercier à mon tour de votre bienveillance et de votre écoute, madame la présidente. J'inclus également dans mes remerciements votre prédécesseur : lui aussi s'est montré bienveillant, particulièrement à mon endroit.
Depuis 2017, les lois de finances successives témoignent d'un renforcement des missions régaliennes de l'État. C'est encore le cas avec le budget pour 2022 de la mission Défense, dont les crédits augmentent pour la troisième année consécutive. De ce point de vue, le projet de loi est en conformité avec la loi de programmation militaire. Le budget de la défense augmente de 1,7 milliard d'euros. Depuis 2017, la hausse totale est de 7,7 milliards. Dans le monde troublé qui est le nôtre, c'est une bonne chose pour notre défense collective comme pour l'innovation de nos entreprises les plus performantes, et donc pour l'emploi. Cette montée en puissance devrait en effet permettre d'augmenter les capacités opérationnelles de nos armées, de renforcer les équipements et les infrastructures militaires, y compris dans les domaines du renseignement, de la cybersécurité et de la maîtrise de l'espace, qui sont au cœur des enjeux actuels.
Toutefois, je voudrais relativiser cet effort, car si nos dépenses de défense ont augmenté de 4 %, l'augmentation moyenne en Europe est de 4,2 % et celles des États-Unis et de la Chine dépassent 6,6 %. Dans ce contexte, mon groupe souhaite vous faire part de ses inquiétudes. Comme l'an dernier, celles-ci concernent la compétitivité de nos industries de défense, fortement mises à mal par la crise sanitaire et les évolutions stratégiques mondiales, mais aussi l'excessive externalisation du soutien aux forces en opérations extérieures, notamment en matière de transport et d'affrètement aériens, que la Cour des comptes avait déjà signalée en posant la question de la qualité et de la sincérité des contrats.
Dans la loi de finances initiale de 2021, le budget total de la mission Anciens combattants, mémoire et liens avec la Nation s'élevait à 2 089 millions en crédits de paiement. Le PLF pour 2022 propose quant à lui de doter la mission à hauteur de 2 016 millions d'euros. Les autorisations d'engagement suivent la même trajectoire à la baisse. Ce projet de budget ne fait donc pas exception à la baisse annuelle des crédits de cette mission, en raison de la diminution tendancielle du nombre de bénéficiaires des prestations. Nous regrettons que ces financements n'aient pas été utilisés pour répondre à d'autres besoins et d'autres attentes. En revanche, nous saluons la revalorisation du point PMI.
Pour toutes ces raisons, le groupe GDR émet des réserves concernant ce budget. Pour ma part, à titre personnel, je le soutiens, compte tenu de l'écoute de la ministre des armées et de ses efforts en faveur des outre-mer, notamment la Martinique, où les besoins étaient importants à la suite de certains événements climatiques tels que l'ouragan Irma : Mme la ministre nous a fait parvenir des équipements.
M. Thiériot a parlé de l'abstention de son groupe. Je lui soumets donc cette citation d'Alphonse Allais : « Il y a des circonstances où il faut s'abstenir de jouer à la bourse, aux courses, au baccarat ou à la roulette : primo, quand on n'a pas les moyens et secundo, quand on les a ». Les militaires, eux, ne s'abstiennent pas, malgré le non-remplacement d'un fonctionnaire sur deux, dont ils ont subi les conséquences dans les années 2010 – et les sous-officiers continuent à payer un lourd tribut à cette politique.
La commande de VBAE a effectivement été avancée, ce qui a nécessité un ajustement mineur de la trajectoire du programme SCORPION. Toutefois, celui-ci avait été accéléré en 2019, comme Thomas Gassilloud et moi-même le proposions en 2019 – cette recommandation figurait dans l'avis budgétaire relatif à la préparation et à l'emploi des forces terrestres. Malgré le ralentissement que vous évoquez, la progression reste supérieure à la prévision initiale.
Par ailleurs, nos soldats sont fortement exposés à des risques de blessures, voire à la mort : au cours des seuls mois de décembre de l'année dernière et de janvier, cinq ont perdu la vie lors de missions de reconnaissance. Celles-ci requièrent à la fois de l'agilité et de la réactivité. La décision a donc été prise en urgence de consolider les véhicules blindés légers (VBL) MK1. Le programme a démarré en février 2020, et les premiers véhicules ont été projetés en opération extérieure dès le mois de juin – je salue à cet égard l'engagement de l'équipe de Clermont-Ferrand. Il était donc nécessaire d'engager l'acquisition de VBAE. Notre mission est de protéger nos soldats, pour eux et pour leur famille. Nous devons leur donner ce qu'il y a de meilleur.
Je vous remercie au nom de notre groupe, madame la présidente, pour le bon climat qui, dans l'ensemble, a régné dans la commission au cours de la législature. Au-delà de votre présidence et de celle de votre prédécesseur, les relations entre les commissaires ont été bonnes. Nous avons ainsi mené à bien des missions associant des représentants de partis différents. Il est agréable de le noter et de le rappeler. Je remercie également l'ensemble du secrétariat de la commission pour son travail.
Je ne relancerai pas le débat en répondant à Mme Mauborgne. J'indiquerai simplement que vous devez respecter notre choix. Notre abstention sera bienveillante. Nous avons souligné les efforts importants qui ont été consentis. Toutefois, nous sommes vigilants. Nous ne sommes pas à l'école, où chacun doit suivre le maître. Comme l'a rappelé M. Favennec-Bécot, la fameuse marche de 3 milliards est devant nous. L'ensemble des soldats qui nous écoutent se disent certainement que c'est une bonne chose que certains élus soient vigilants. De fait, nous devons savoir si les engagements seront tenus et si le mouvement engagé à travers la loi de programmation militaire se poursuivra. Nous avons tous souligné la pertinence de la LPM et salué la hausse des engagements financiers. Cela dit, comme l'ont souligné mes collègues rapporteurs pour avis s'agissant de l'armée de l'air et de la marine, un certain nombre d'interrogations demeurent. Il est sain, dans une démocratie, que certains se posent en vigies.
Nous sommes tous extrêmement attentifs et vigilants, monsieur de Ganay.
Nous en arrivons aux amendements sur les crédits des trois missions dont nous sommes saisis. À l'issue de l'examen de chaque série d'amendements, nous émettrons un avis sur les crédits de la mission correspondante.
Mission Anciens combattants, mémoire et liens avec la Nation
Article 20 et état B : Crédits du budget général
Amendement II-DN1 de Mme Isabelle Santiago.
Nous proposons de soutenir le dispositif du service militaire volontaire en augmentant ses moyens proportionnellement aux ambitions affichées. Le SMV s'inspire du service militaire adapté, qui a fait la preuve de son efficacité dans les outre-mer : il améliore considérablement le taux d'insertion professionnelle des jeunes ayant bénéficié du dispositif, alors même qu'ils étaient souvent éloignés de l'emploi. Le Gouvernement annonce que le SMV accueillera 1 500 jeunes en 2022, soit une hausse par rapport à cette année ; nous souhaitons donc augmenter la dotation du programme en conséquence.
Vous avez raison de souligner que le service militaire adapté est une parfaite réussite, mais le SMV est construit selon un modèle différent.
C'est une bonne chose de proposer des crédits supplémentaires pour le dispositif, mais ce ne sont pas ceux que vous visez qui permettront de prendre en charge davantage de jeunes : c'est de l'assiette totale des effectifs que dépend la capacité à dégager le personnel nécessaire. Or la masse salariale des militaires est financée par une autre mission. Du reste, la dotation du SMV augmente de 240 000 euros.
Toutefois, nous prenons note du fait que vous souhaitez que nous allions encore plus loin dans ce domaine. Alors que le SMV accueillait 1 000 jeunes par an au début de la législature, il y en avait 1 200 en 2021, et l'an prochain ils seront 1 500. Ainsi, nous essayons d'atteindre l'objectif consistant à proposer l'accès au SMV dans chaque région.
Je vous invite donc à retirer votre amendement, quitte à le déposer de nouveau en séance. Quoi qu'il en soit, nous avons pris note du fait que vous voteriez ce budget, et nous en sommes très heureux.
L'amendement est retiré.
Amendement II-DN2 de Mme Isabelle Santiago.
Il a pour but d'augmenter les crédits de l'action 07 Actions en faveur des rapatriés, qui comprend l'allocation de reconnaissance de la nation en faveur des Français rapatriés, des harkis et de leurs enfants, ainsi que divers soutiens aux conjoints survivants.
La question de la mobilisation de la trésorerie de l'Office national des anciens combattants et victimes de guerre (ONACVG) est récurrente. L'an dernier, nous avions ainsi mobilisé 4 millions d'euros provenant de la cession des maisons de retraite gérées par cet organisme. Tout l'enjeu est d'éviter que Bercy, institution aussi efficace que gourmande, n'emploie ces fonds à d'autres fins. Le contrat d'objectifs et de performance (COP) de l'ONACVG a donc défini une trajectoire budgétaire stabilisant les ressources de l'organisme pendant cinq ans. Comme vous l'avez constaté hier, tous les anciens combattants approuvent cette démarche.
Je demande le retrait de l'amendement ; à défaut, avis défavorable.
La commission rejette l'amendement.
Amendement II-DN3 de Mme Isabelle Santiago.
Avoir confiance dans les engagements pris lors des discussions budgétaires n'empêche pas d'être vigilant, monsieur le rapporteur pour avis.
Avec l'amendement II-DN3, il s'agit, là encore, de sécuriser le budget de l'ONACVG. Nous proposons de lui affecter 1 million d'euros supplémentaires pour faire face plus particulièrement aux surcoûts liés à la gestion opérationnelle du plan en faveur des rapatriés et des harkis.
Premièrement, les fonds prévus pour la gestion opérationnelle du plan en faveur des harkis sont suffisants. D'ailleurs, chaque année, l'exécution montre une sous-consommation des crédits.
Deuxièmement, les mouvements de crédits que vous proposez posent problème. Je me suis abstenu de le relever jusqu'à présent, car l'exercice n'est pas facile : on est obligé de prélever ailleurs les crédits supplémentaires que l'on souhaite affecter à telle ou telle ligne budgétaire. Cela dit, diminuer les crédits du programme 158 Indemnisation des victimes des persécutions antisémites et des actes de barbarie pendant la seconde guerre mondiale, qui possède une importance particulière et dépend de Matignon, ce ne me semble pas adapté…
Je demande le retrait de l'amendement ; à défaut, avis défavorable.
La commission rejette l'amendement.
La commission émet un avis favorable à l' adoption des crédits de la mission Anciens combattants, mémoire et liens avec la Nation non modifiés.
Je vous rappelle que les crédits de cette mission seront examinés en séance mardi 26 octobre dans la soirée.
Mission Défense
Article 20 et état B : Crédits du budget général
Amendement II-DN10 de Mme Isabelle Santiago.
Il s'agit ici d'une question dont on parle beaucoup : le prix du pétrole. Nous proposons d'augmenter la dotation en gazole, compte tenu des incertitudes géopolitiques et de la hausse du prix du baril.
Je suis plutôt défavorable à l'adoption de cet amendement, que le groupe Socialistes et apparentés présente chaque année.
Un dispositif spécifique du service de l'énergie opérationnelle permet d'atténuer les variations annuelles du cours du baril et le compte 901 « Approvisionnement de l'État et des forces armées en produits pétroliers, biens et services complémentaires » permet de constituer des stocks de carburants grâce à un découvert autorisé de 125 millions. La gestion de sa trésorerie est donc très proactive.
Mme Santiago est envoyée au charbon par son groupe mais, en effet, cette argumentation est répétée chaque année. L'article 5 de la loi de programmation militaire votée au début de la législature prévoit un mécanisme en cas de forte hausse des cours du pétrole.
Notre groupe vous propose donc de retirer cet amendement ; à défaut, nous voterons contre.
La commission rejette l'amendement.
Après l'article 42
Amendement II-DN4 de Mme Isabelle Santiago.
Un rapport doit être remis dans les douze mois à compter de la promulgation de la loi sur l'évaluation des programmes de coopération européenne dans le secteur de la défense.
Si vous le permettez, je donnerai également un avis sur cet amendement et sur celui à venir, le II-DN9.
Depuis 2017, la réponse est identique. Mon prédécesseur Jean-Charles Larsonneur l'a donnée, comme je l'ai donnée l'année dernière. Lorsque nous jugeons qu'il est nécessaire de le faire, nous auditionnons des industriels et toutes les personnes que nous souhaitons. Je ne vois donc pas l'utilité d'un rapport global. En revanche, notre commission pourrait se saisir de points particuliers et auditionner le délégué général pour l'armement afin de les lui soumettre.
Demande de retrait ou avis défavorable.
La commission rejette l'amendement.
Amendement II-DN5 de Mme Isabelle Santiago.
Un rapport doit être remis afin d'évaluer nos équipements, notamment leurs coûts par rapport à ceux de nos alliés européens et au sein de l'OTAN.
La commission rejette l'amendement.
Amendement II-DN9 de Mme Isabelle Santiago.
Dans notre rapport sur les enjeux de la transition écologique pour le ministère des armées, M. Fiévet et moi-même avions souligné combien les budgets doivent être lisibles quant aux actions menées dans les domaines de la biodiversité, de l'énergie et de l'environnement. Là encore, nous demandons un rapport sur ces questions.
Telle qu'elle est, la rédaction de cet amendement est problématique puisque nous demandons un rapport chiffré et l'inscription d'une ligne budgétaire transversale. Quel que soit votre vote, je le représenterai en séance publique dans une rédaction différente.
Je m'associe aux propos de M. Gouttefarde. Nous verrons en l'occurrence ce que Mme la ministre dira dans l'hémicycle.
La commission rejette l'amendement.
La commission émet un avis favorable à l' adoption des crédits de la mission Défense non modifiés.
Je vous rappelle que ces crédits seront examinés en séance publique le mardi 26 octobre, après-midi et soir.
Mission Sécurités
Article 20 et état B : Crédits du budget général
Amendement II-DN12 du rapporteur pour avis.
Vous avez tous eu l'occasion de rencontrer l'un des 371 commandants de compagnies de gendarmerie. Souvent, ils sont confrontés aux mêmes problèmes – casernement, intendance – et, malgré la dotation financière des unités élémentaires (DFUE), ceux-ci ne peuvent pas être traités au plus près des territoires : ils le sont au niveau des groupements, voire des régions, des zones de défense ou de la direction générale de la gendarmerie nationale (DGGN).
Je propose que chaque compagnie bénéficie d'une enveloppe supplémentaire afin de leur donner une marge de manœuvre et de leur permettre de résoudre des problèmes du quotidien par un transfert de crédits de 9 millions du budget de la police nationale vers celui de la gendarmerie nationale, ce qui représente une enveloppe de 25 000 euros par commandant de compagnie.
Les besoins de la gendarmerie sont importants. Une telle augmentation de son budget serait une aubaine mais quel message enverrait-on en retirant aux uns pour donner aux autres ? Je ne suis d'ailleurs pas sûr que ce serait rendre service à cette institution tant nous avons intérêt à faire preuve d'unité. Je ne suis donc pas favorable à l'adoption de cet amendement.
Les besoins de la gendarmerie sont réels mais ceux de la police nationale le sont tout autant, notamment outre-mer. Je ne peux pas soutenir une telle disposition.
Notre position est identique. Nous aurions sans doute pu discuter de cette question autrement qu'à travers un amendement. Nous sommes certes conscients que la gendarmerie a besoin de moyens mais il n'est pas envisageable de les prélever sur ceux de la police nationale. Je ne suis d'ailleurs pas sûre que ce serait un bon point pour la gendarmerie. Nous ne voterons donc pas cet amendement.
Nombre d'arguments viennent d'être donnés. Ceux que je vais avancer valent également pour les amendements relatifs à la réserve qui seront bientôt présentés.
Outre que le Gouvernement, à ce stade, n'a pas l'intention de lever ce gage, ceux de nos collègues commissaires aux lois qui connaissent cet amendement s'étranglent puisqu'un programme qui relève de leur compétence subirait les conséquences de son adoption.
J'invite nos collègues à ne pas entrer dans une guerre des forces de sécurité.
De plus, je ne suis pas certain que le problème soulevé soit seulement budgétaire. Le rapporteur pour avis, très légitimement, souhaite aussi que les crédits de la gendarmerie soient gérés au plus près des unités. Nous sommes donc confrontés à un problème de déconcentration – l'opération « Poignées de porte » étant quant à elle gérée sur un plan national.
Je rappelle que près de 60 % de la dépense, hors titre 2, donc hors les ressources humaines de la gendarmerie, sont d'ores et déjà déconcentrés, en ce qui concerne tant les crédits de fonctionnement que les crédits d'investissement. En outre, les échelons locaux sont pleinement responsabilisés dans l'emploi de la réserve opérationnelle puisque la totalité des crédits est mise à la disposition des unités concernées.
Nous invitons notre rapporteur pour avis à retirer son amendement et à discuter avec le Gouvernement d'ici à la séance publique, sinon nous appellerons à voter contre.
Qui sommes-nous pour mettre en concurrence deux forces de sécurité ? On ne déshabille jamais Pierre pour habiller Paul.
Je suis d'accord avec mes collègues : sur le plan budgétaire, cet amendement n'est pas acceptable. Le principe de subsidiarité me semble néanmoins intéressant et sans doute serait-il en l'occurrence de bonne politique d'offrir plus de possibilités aux chefs de compagnie et de corps.
Sur le fond, nous sommes tous d'accord pour convenir que plus les moyens sont importants, mieux cela vaut.
Mon département de la Mayenne comporte une zone de police et une zone de gendarmerie et je me vois difficilement opposer les uns aux autres.
J'espère que ce débat aura lieu dans le cadre de la nouvelle loi d'orientation et de programmation pour la sécurité intérieure (LOPSI) que le Président de la République a annoncée en conclusion du Beauvau de la sécurité. Ce sera vraiment le vecteur idoine, sans que l'on ait besoin de déshabiller Pierre pour habiller Paul. Nos services de sécurité ont tous besoin de moyens et de considération.
Cet amendement visait surtout à susciter le débat au sein des commissions de la défense et des lois ou dans l'hémicycle. J'aurai d'ailleurs l'occasion d'en rediscuter avec les ministres concernés d'ici à la séance publique, en particulier avec le ministre délégué auprès du ministre de l'économie, des finances et de la relance, chargé des comptes publics, qui doit bien avoir encore un peu d'argent dans les tiroirs.
Ce dispositif pourrait être un très bon levier de commandement pour les 371 commandants de compagnie. L'opération « Poignées de porte », quant à elle, vise à rattraper ce qui n'a pas été fait depuis dix ou quinze ans dans les domaines de l'immobilier et du logement et pas à résoudre les problèmes quotidiens.
Au moins, que cet amendement d'appel permette que ce problème soit pris en compte dans le cadre de la LOPPSI qui devrait être présentée au mois de janvier ! Je retire l'amendement.
L'amendement est retiré.
Amendements II-DN13 et II-DN14 du rapporteur pour avis.
Ils concernent donc le budget de la réserve de la gendarmerie.
J'ai été interrogé ce matin sur l'emploi des réservistes et, ces dernières semaines, sur l'arrêt de l'appel aux réservistes, en septembre, pour des raisons budgétaires.
Je propose donc d'abonder le budget consacré à la réserve de la gendarmerie nationale à partir de celui de la police nationale – étant entendu que le Gouvernement peut lever le gage – pour le porter de 70 à 80 millions.
Je propose en outre d'abonder ce budget de 45 millions pour que 35 000 réservistes soient employés trente jours par an. Le Président de la République a annoncé une hausse des effectifs mais, à budget constant, l'emploi diminue. Dans l'armée de terre, un réserviste est employé 33,1 jours ; dans l'armée de l'air, 33,4 jours et dans la marine, 32,4 jours ; un gendarme réserviste l'est 23,7 jours. Avec l'augmentation des effectifs et à budget constant, il le sera pendant 20 jours, ce qui ne suffira pas pour rendre la réserve attractive.
Les mêmes causes produisant les mêmes effets, le problème du gage demeure et s'approfondit. J'invite donc les collègues à se montrer cohérents : il était question de 9 millions et, maintenant, de 10 puis de 45 millions !
Selon les exposés des motifs de ces deux amendements, « la gendarmerie se prépare à faire face à un empilement des missions actuelles et à venir, en faveur de la sécurité du quotidien, de la lutte contre la menace terroriste, de la lutte contre l'immigration irrégulière, de la lutte contre les violences intrafamiliales et de la lutte contre les trafics de stupéfiants, pour ne citer que les principales. À ces missions s'ajoutent plusieurs rendez-vous internationaux tels que la présidence française de l'Union européenne, la coupe du monde de rugby en 2023 et les jeux olympiques de Paris en 2024. » Personne ne contestera que l'on pourrait fort bien substituer les mots « police nationale » à ceux de « gendarmerie nationale » puisque la première sera elle aussi aux premières loges.
Par ailleurs, la loi relative à la responsabilité pénale et à la sécurité intérieure prévoit de développer la réserve opérationnelle de la police nationale. Ce n'est donc pas le moment d'enlever 45 millions à la direction générale de la police nationale !
Nous voterons contre ces amendements.
Je n'essaie pas de « monter » la gendarmerie contre la police et j'ai bien précisé que le Gouvernement pouvait tout à fait lever le gage. Il importe surtout de dialoguer et de prendre conscience que la montée en puissance de la réserve de la gendarmerie doit s'accompagner des moyens budgétaires idoines, faute de quoi elle ne sera plus attractive. Les événements que j'ai mentionnés dans les exposés des motifs se préparent bien à l'avance.
Je compte sur vous pour m'épauler auprès du ministre délégué afin de trouver des solutions. Je retire les amendements.
Vous avez pris une sage décision. Nous partageons votre souci mais ce que vous proposez n'est pas acceptable.
Les amendements sont retirés.
La commission émet un avis favorable à l' adoption des crédits de la mission Sécurités non modifiés.
Ces crédits de la mission « Sécurités » seront examinés le mercredi 27 octobre dans l'après-midi.
La séance est levée à seize heures trente-cinq.
Membres présents ou excusés
Présents. - Mme Françoise Ballet-Blu, M. Xavier Batut, M. Jean-Jacques Bridey, Mme Carole Bureau-Bonnard, M. Alexis Corbière, M. Rémi Delatte, Mme Marianne Dubois, Mme Françoise Dumas, M. Yannick Favennec-Bécot, M. Jean-Jacques Ferrara, M. Claude de Ganay, M. Thomas Gassilloud, M. Fabien Gouttefarde, M. Jean-Michel Jacques, Mme Manuéla Kéclard-Mondésir, M. Fabien Lainé, M. Didier Le Gac, M. Gilles Le Gendre, M. Christophe Lejeune, M. Jacques Marilossian, Mme Sereine Mauborgne, M. Philippe Michel-Kleisbauer, Mme Patricia Mirallès, Mme Florence Morlighem, Mme Josy Poueyto, Mme Muriel Roques-Etienne, M. Gwendal Rouillard, Mme Isabelle Santiago, Mme Nathalie Serre, M. Jean-Louis Thiériot, M. Stéphane Vojetta
Excusés. - M. Florian Bachelier, M. Olivier Becht, M. Christophe Castaner, M. André Chassaigne, M. Olivier Faure, M. Richard Ferrand, M. Stanislas Guerini, M. David Habib, Mme Anissa Khedher, M. Jean-Christophe Lagarde, M. Joachim Son-Forget, M. Aurélien Taché