La séance est ouverte à quatorze heures trente.
La situation sanitaire régionale comme nationale tendant aujourd'hui à s'améliorer, il est donc temps pour nous de dresser un « bilan d'étape » de l'opération « Résilience » et de réfléchir ensemble aux premiers retours d'expérience que nous pouvons en faire, en partant du terrain.
Pour cela, nous avons le plaisir de recevoir aujourd'hui : le général de corps d'armée Christian Bailli, commandant de la zone de défense et de sécurité Est, qui récapitulera les actions entreprises et les moyens investis par les armées dans le cadre de l'opération « Résilience » dans la région Grand Est, ainsi que les éventuels arbitrages et situations particulières auxquels il a dû faire face ; le médecin chef des services hors classe (2S) Jacques Escarment, chef de l'Élément militaire de réanimation de Mulhouse, qui nous expliquera l'organisation et la mission de ce dispositif inédit ; et le commissaire en chef de deuxième classe Antoine de Coster, du centre de planification et de conduite des opérations de l'état-major des armées, sur la partie logistique de cette opération.
Comme vous le savez tous, la région Grand Est a été l'une des premières et des plus sévèrement touchées par la pandémie de Covid-19 en France. C'est particulièrement vrai des environs de Mulhouse, mais pas seulement. Pour cette raison, un nombre particulièrement élevé de missions conduites au titre de l'opération « Résilience » y ont été conduites depuis le déclenchement de cette opération, le 25 mars. Certaines de ces missions ont d'ailleurs précédé le lancement officiel de l'opération.
Si l'opération « Résilience » est inédite à bien des égards, elle obéit néanmoins à une doctrine établie de longue date : la règle dite des « quatre “i” », selon laquelle les moyens des forces armées sont déployés en réponse à une crise ou une catastrophe si et seulement si les moyens civils pouvant remplir la même mission sont insuffisants, inexistants, inadaptés ou indisponibles.
Insuffisants, comme l'hôpital de Mulhouse, submergé par l'afflux de patients victimes de l'épidémie, et que les 30 lits de l'élément militaire de réanimation de Mulhouse ont permis de désengorger. L'adaptation des capacités de ce dispositif à la situation sanitaire locale traduit d'ailleurs bien la nécessaire proportionnalité de l'usage des moyens militaires en renfort des moyens civils. Cette problématique a bien été évoquée hier par le chef d'état-major de l'armée de Terre, insistant sur la nécessité d'avoir des repères. Ce même point de doctrine a par ailleurs motivé la mobilisation des huit hôpitaux d'instruction des armées, et parmi eux l'hôpital d'instruction des armées Legouest de Metz.
Inexistants aussi, comme les modules de réanimation de patients à haute élongation d'évacuation (les désormais célèbres « kits Morphée »), disponibles sur les appareils de transport MRTT de l'armée de l'air ( Multi Role Tanker Transport ou Airbus A330 militarisé), et dont il n'existe aucun équivalent dans le civil.
Inadaptés, comme les hélicoptères de la Sécurité civile, qui ne sont pas prévus pour des évacuations sanitaires sur de longues distances. On leur a donc substitué des hélicoptères de l'armée de l'air et de l'aviation légère de l'armée de terre (ALAT), dont la capacité d'emport est supérieure et qui sont aisément adaptables à ce type de missions. Des patients atteints du Covid-19 ont ainsi pu être évacués hors de la région, voire du territoire national, afin de soulager davantage les services hospitaliers de la région.
Indisponibles, comme c'est le cas de certaines chaînes civiles de livraisons de masques et d'autres matériels médicaux aux établissements de santé et aux EHPAD du grand Est, fortement perturbées et submergées par l'ampleur des besoins. Des soldats appartenant aux régiments de la région ont assuré cette mission.
Comme l'illustrent ces exemples, ces critères d'intervention ont été souvent remplis, et nos armées ont donc été très régulièrement sollicitées. Cette liste que je vous ai dressée n'est d'ailleurs pas exhaustive, puisqu'elle n'inclut pas, par exemple, l'appui aux forces de l'ordre pour les missions d'escorte des convois de masques vers les sites de stockage, notamment ceux arrivant en France par l'aéroport de Vatry, ou de surveillance des hôpitaux, comme celui de Charleville-Mézières.
Conformément à notre droit, l'ensemble de ces missions se sont déroulées à la demande des autorités civiles, et ont été organisées de façon concertée avec elles.
Messieurs les généraux, Monsieur le commissaire, vous pourrez nous expliquer comment l'agence régionale de santé (ARS) du Grand Est a sollicité les armées, notamment pour les distributions de masques, l'appui logistique ou médical aux hôpitaux civils, ou encore les évacuations sanitaires.
Vous pourrez aussi nous dire comment, dans le cas des missions de surveillance des cargaisons et sites « sensibles », ce sont les préfets qui ont sollicité le renfort des armées. Les premiers retours d'expérience que vous pouvez faire de l'articulation entre autorités civiles et autorités militaires me semblent particulièrement intéressants à étudier. Vos différents retours sur cette opération seront précieux pour réfléchir aux éventuelles inflexions à donner à nos doctrines de gestion de crise ‒ sanitaire ou autre –, ainsi que sur les conséquences qu'il faudra tirer concernant le format et l'équipement des armées.
Messieurs les généraux, Monsieur le commissaire, avant de vous passer la parole, je voudrais, au nom de la Commission, vous remercier pour l'ensemble de vos actions, qui ont permis de nous protéger face à cette crise d'ampleur et d'assurer la continuité des services publics essentiels. Je vous cède donc, sans plus tarder, la parole.
La zone Est inclut deux régions – la Bourgogne-Franche‑Comté et le Grand Est –, auxquelles s'ajoute, au titre de mes fonctions organiques de commandant de la zone Terre Nord-Est, la région des Hauts-de-France, et, au titre de mes fonctions de commandant des forces françaises et de l'élément civil stationnés en Allemagne, nos structures implantées sur le territoire allemand. Tout cela représente 12 états-majors, 31 régiments de l'armée de Terre, 4 bases aériennes, 50 000 ressortissants du ministère des armées, soutenus par 12 bases de défense, et 4 000 à 5 000 militaires en moyenne projetés dans nos opérations.
J'insisterai en premier lieu sur la singularité de notre engagement dans cette crise majeure. Alors que la création de l'opération Sentinelle, lors du choc des attentats de 2015, répondait à un besoin massif en forces militaires, la crise du Covid-19 a avant tout mobilisé le monde des soignants et donc, pour notre ministère, le service de santé des armées (SSA) et, plus largement, le personnel soignant du régiment médical de l'armée de Terre (RMED). Nos soldats en armes ne pouvaient pas faire grand-chose contre l'ennemi coronavirus.
La zone Est ayant été très vite et très gravement touchée, nous nous sommes résolument engagés en appui des services publics et de la population, par des actions concrètes qui ont démarré dès le 11 mars.
Dans un premier temps, et c'est une autre singularité, nous nous sommes d'abord trouvés en position de faire des offres de services, qui ont été ensuite mieux structurées en trois catégories – sanitaire, logistique et protection – dans le cadre de l'opération Résilience.
Singulièrement enfin, alors que, d'ordinaire, tous les centres opérationnels des délégations militaires départementales sont activés pour gérer les crises d'envergure nationale, la crise du Covid‑19 a été entièrement conduite à partir de l'état-major de zone de défense Est, en liaison notamment avec la préfecture de zone.
En second lieu, l'échelon zonal de notre organisation territoriale interarmées de défense a parfaitement fonctionné. Il nous a permis d'inscrire notre action dans l'action interministérielle, plus large, conduite par la préfecture de zone et par l'ARS, entité que nous avons appris à connaître. La convergence d'efforts, toujours très synchrone entre mon état‑major et nos partenaires extérieurs, a bien fonctionné, et cela pour plusieurs raisons.
D'abord, nous sommes au bon niveau de subsidiarité. Avoir le contrôle opérationnel de l'ensemble des opérations qui se déroulaient sur le territoire de la zone de défense a permis d'assurer une très forte réactivité et de répondre aux besoins dans l'urgence, laquelle était une donnée déterminante de cette crise.
S'agissant, ensuite, de la préfecture de zone, nous travaillons en relation avec des interlocuteurs avec qui nous avons, de longue date, tissé des relations de confiance, qui nous permettent d'évaluer ensemble la situation dans toutes ses dimensions pour prendre les meilleures décisions. Cela a été un facteur déterminant, comme l'a été le fait que nos délégations militaires départementales nous offrent un maillage territorial qui nous permet d'avoir des remontées de l'ensemble des préfectures de département.
Enfin, j'ai pu m'appuyer en interne, à Metz, sur l'ensemble des chefs de nos services de soutien interarmées, dont la coordination m'a permis d'actionner tel ou tel levier.
En guise de bilan, nous avions sept sections engagées dans des actions de protection de centres hospitaliers, et deux sections engagées sur la protection de dépôts ou de sites sensibles – notamment à Marolles, où sont situés l'établissement ravitailleur du service de santé des armées et un établissement de préparation et de réponse aux urgences sanitaires, ainsi qu'à Vatry où sont entreposés, dans un dépôt de Geodis, les arrivages de masques.
En matière sanitaire, les transferts de patients sur lits de réanimation, ont débuté dès le 14 mars, avec le premier vol Airbus A330 MORPHEE (module de réanimation pour patients à haute élongation d'évacuation) entre Mulhouse et Istres. Trente-six patients ont ainsi été évacués en six vols MORPHEE, ailleurs en France ou en Allemagne ; vingt-quatre rotations d'hélicoptères Caïman ont été effectuées pour transporter quarante-huit patients, enlevés au plus près des centres hospitaliers et convoyés vers l'Allemagne, l'Autriche, la Suisse ou d'autres régions françaises. Il faut encore ajouter une rotation par A400M français et une rotation par A400M allemand, ce qui fait qu'au total quatre-vingt-dix patients ont été évacués par voie aérienne militaire, la dernière en date remontant au 6 avril.
Les hélicoptères ont constitué une réponse à l'urgence, qui était telle que la fréquence des vols MORPHEE était insuffisante. Pour des raisons techniques, aucune disposition ne nous permettait de procéder à des évacuations de lits de réanimation dans nos hélicoptères de manœuvre. Nous avons donc décidé de procéder à une expérimentation avec des équipes du SAMU, et c'est ainsi que, le 27 mars, nous avons fait converger vers Phalsbourg des équipes de la section technique de l'armée de Terre et de son groupement aéromobile pour trouver, en liaison avec le commandement de l'ALAT à Villacoublay, une solution appropriée. En une journée, toutes les conditions et tous les protocoles étaient calés et, dès le 28 mars, nous effectuions les trois premières rotations avec des lits de réanimation.
En matière d'aide sanitaire, l'hôpital des armées Legouest a été fortement mobilisé. Il a créé jusqu'à 52 lits de cohorting Covid pour les patients n'étant pas hospitalisés en réanimation, soit 25 % des lits du complexe hospitalier local, et a accueilli au total 142 patients Covid. Nous avons également apporté des contributions à toutes les structures hospitalières civiles grâce à l'intégration de médecins ou d'infirmiers militaires. Le 4e centre médical des armées, à Metz, a, à lui seul, fait intervenir 17 médecins au profit de structures hospitalières civiles ou en appui aux évacuations. Deux équipes du 2e régiment de dragons nucléaire, radiologique, biologique et chimique (NRBC) de Fontevraud, et une équipe de l'armée de l'air qui a prêté son concours à partir de la base aérienne 133 de Nancy-Ochey, ont procédé à des décontaminations d'hélicoptères, d'avions et de sites, et à des formations aux gestes barrières.
Nous sommes venus en renfort des agences régionales de santé. À Nancy, nous avons apporté une expertise logistique pour la planification et l'organisation des rapatriements des patients à l'étranger. À Dijon, nous avons apporté notre appui logistique pour la gestion des flux d'équipements.
Deux escouades du 511e régiment du train d'Auxonne et du 516e régiment du train de Toul ont procédé à une trentaine de missions, essentiellement des convois lourds de transports interdépartementaux, au profit des préfectures. À ce jour, nous comptons de l'ordre de soixante missions logistiques.
Au total, l'opération Résilience a représenté environ 150 missions, une moyenne de 400 militaires engagés avec des pics allant jusqu'à plus de 1 000, des contributions de 45 formations, régiments, bases aériennes, groupements de soutien, le transport de 30 000 litres de gel hydro-alcoolique et de 14 millions de masques, et la rétrocession de 120 palettes de sur-blouses du ministère des armées (MINARM) à des structures hospitalières.
Nous avons pu fonctionner de manière très optimisée grâce à un excellent dialogue civilo-militaire à trois, c'est-à-dire avec la préfecture de zone et l'ARS.
Merci de nous permettre, par ces chiffres et précisions, de mesurer l'intensité de votre action face à l'ampleur de la crise.
Le 16 mars, le Président de la République a annoncé, la mise à disposition de l'élément militaire de réanimation du service de santé des armées (EMR-SSA). La commande, d'une capacité de trente lits, nécessitait une structure complètement nouvelle ; celle-ci est conçue en quarante-huit heures par la direction des approvisionnements en produits de santé des armées (DAPSA) à Orléans, puis montée sur 1 000 mètres carrés du parking du centre hospitalier Émile-Muller. Les 22 et 23 mars, les équipes de santé installent plus de 300 équipements médicaux, se forment à la biosécurité, réalisent des exercices d'évacuation des malades et définissent la typologie des malades qu'ils seront amenés à prendre en charge. Le 24 mars, les quatre premiers patients sont admis dans un vrai service de réanimation, et le 27 mars l'EMR est totalement opérationnel à 27 lits, ce qui porte la capacité du centre hospitalier Muller de 56 à 83 lits Covid-19 – plus 11 apportés par le Diaconat de Mulhouse.
35 personnes vont assurer la phase d'engagement, avec une entrée de théâtre particulièrement difficile physiquement : les premières équipes vont travailler sans relâche, pratiquement sans dormir, dans un milieu confiné, mal éclairé et chaud. La charge mentale était très importante, car l'ambiance autour de nous était dantesque. Il fallait ouvrir au plus vite, dans des conditions sécurisées, pour soigner les malades avec un vrai standard de réanimation, mais aussi préserver nos personnels de tout risque de contamination.
Au 1er mai, 321 militaires ont participé au pôle EMR-SSA de l'opération Résilience, dont 230 du service de santé des armées, dont toutes les composantes ont été mobilisées – hospitalière, médecine des forces, ravitaillement, recherche, épidémiologie, et 91 de l'armée de Terre. Nous avons adapté nos effectifs en permanence à la situation. Au maximum, 188 personnels ont été présents sur le site de Mulhouse, dont 136 personnels du SSA répartis en équipes équilibrées.
Entre le 1er mars et le 28 avril, 1 700 patients ont été admis au centre hospitalier Émile-Muller ; 277 personnes ont été en réanimation, dont 47 à l'EMR-SSA, et 20 % ont été transférés en région ou vers l'Allemagne.
Nos patients ont représenté une charge de travail de plus de 600 jours d'hospitalisation. Ils étaient plus jeunes qu'attendu – entre 31 et 79 ans –, gravement atteints, nécessitant une durée moyenne d'hospitalisation d'une quinzaine de jours, mais parfois jusqu'à un mois. Tous nos patients ont été transférés, pour la plupart en centre hospitalier, à leur domicile ou en structure de soins de réadaptation ; l'EMR n'en héberge plus aucun.
Nous avons beaucoup aidé à la création d'un parcours de soins conduisant le patient de la réanimation à son domicile, en passant par des unités de sevrage et des structures de réadaptation repensées. Dès notre arrivée, nous avons entrepris un travail très important de mise en relation de tous les partenaires – hôpital, Diaconat, centres de réadaptation – en vue de déployer une chaîne mobile d'évacuation, comme nous le faisons toujours en opération. La direction stratégique de l'ARS Grand Est a grandement soutenu notre action en permettant l'affectation ciblée de patients.
L'EMR estime avoir rempli sa mission. Le SSA, avec le soutien des armées, a montré son expertise, tout le monde étant rassemblé autour d'un objectif commun : gagner. Notre action a bénéficié de l'apport essentiel du régiment médical et du support remarquable de la chaîne de l'organisation territoriale interarmées de défense (OTIAD), sans oublier nos « sentinelles » qui assuraient notre sécurité, le 152e régiment d'infanterie et le régiment de marche du Tchad.
Nous avons été particulièrement vigilants au bien-être de nos équipes, tant au regard du rythme et des conditions de travail, que du logement, des activités sportives, des techniques d'optimisation du potentiel (TOP) et de l'organisation de groupes de parole en fin de mission.
La gestion des communications entre les diverses entités médicales a joué un rôle majeur dans le succès de l'opération. Mettre à plat les choses pour apporter des solutions innovantes au fur et à mesure est essentiel. L'EMR-SSA a été un espace de dialogue pour des professionnels sur-engagés au quotidien.
Je suis également fier du rôle qu'ont joué les élèves des écoles de santé, employés comme aides-soignants ; ils sont le SSA de demain.
Je ne cache pas que cette mission s'inscrit dans un contexte particulièrement difficile pour le service de santé, qui est engagé dans de nombreux combats. Très fortement restructuré et redimensionné, il ne représente que 1 % de la santé publique. Cette mission confirme la nécessité pour le service de santé des armées de disposer de fortes capacités médicales et paramédicales dans l'anesthésie-réanimation. Cette composante doit faire l'objet d'un point particulier d'attention pour demain, car il existe une forte tension sur le territoire national dans cette discipline.
Le service de santé des armées a confirmé, une fois de plus, toute sa résilience et sa très forte militarité. À notre devise qui est « Votre vie, notre combat », j'ajouterai celle de l'école de santé des armées « Sur mer comme au-delà des mers, pour la patrie et l'humanité, toujours au service des hommes ». L'EMR peut être fier de ce qu'il a accompli. Demain, nous célébrerons le 8 mai 1945, mais nous serons toujours en guerre le 9 mai.
J'ai fait part à la directrice centrale du SSA que votre service a été, à certains moments, la seule note d'espoir pour les citoyens qui, derrière leurs écrans, vous voyaient installer cet EMR. La solidarité et l'espoir que vous avez suscités sont, pour nous et pour l'ensemble de la nation, un souvenir indélébile.
Je suis responsable de la logistique pour le territoire national et l'Europe et donc pour l'opération Résilience. Cette opération est consacrée à l'aide aux Français, ainsi qu'à l'appui aux services publics face à la pandémie de Covid-19 dans les domaines sanitaire, logistique et de la protection, en métropole et en outre‑mer. Mon intervention se limitera à ce qui a déjà été fait dans le cadre de l'opération.
Les besoins pris en compte dans le cadre de nos interventions logistiques sont ceux des forces armées en opération et, sur demande de concours ou réquisition de l'autorité préfectorale, ceux des services au public et des populations. Nous disposons d'une chaîne de commandement, comprenant la chaîne logistique, ainsi que de ressources des armées, directions et services (ADS). Le bureau logistique (J4) du centre de planification et de conduite des opérations (CPCO) mobilise les moyens de soutien et les ressources des armées, directions et services (ADS), afin qu'ils se trouvent en quantité suffisante et au moment voulu là où nous en avons besoin. Sur le territoire national, la chaîne de commandement est celle de l'organisation territoriale interarmées de défense (OTIAD), qui conduit aussi l'opération Sentinelle. Les armées interviennent dans la phase d'urgence, le temps que les autres services publics se réorganisent.
Entre le 14 mars et le 7 avril, nous avons transporté 147 patients en réanimation et, en outre-mer, 12 patients non placés en réanimation ; 169 soignants de l'ouest et de la région Provence-Alpes-Côte-D'azur (PACA) ont été acheminés en renfort dans les hôpitaux du Grand Est et de l'Île‑de-France.
Plus de 300 missions logistiques ont été effectuées au profit des ARS, souvent pour effectuer le dernier kilomètre du transport d'équipements de protection individuelle ou de gel hydroalcoolique, en grandes ou petites quantités.
Des sections d'appui sanitaire ont été détachées auprès de certains hôpitaux pour mener des actions immédiates de proximité, du soutien logistique ou des missions de protection.
En outre-mer, le porte-hélicoptères amphibie (PHA) Mistral a acheminé à Mayotte 737 tonnes de fret – eau, nourriture, masques, médicaments et produits de santé – en deux rotations, et d'autres bâtiments des forces armées de la zone sud de l'océan Indien (FAZSOI), à savoir L'Astrolabe, le Champlain et le Malin, en ont apporté 137 tonnes. Dans l'arc Antilles-Guyane, le PHA Dixmude a également transporté du fret au profit de la cellule interministérielle de crise ainsi qu'un hélicoptère Dragon de la sécurité civile, un Écureuil de la gendarmerie et deux Puma de l'armée de Terre. En Polynésie française, après avoir transporté 9 tonnes de fret, dont 7,1 tonnes à usage interministériel, un A400M Atlas est resté positionné sur place afin de faciliter les missions logistiques entre les îles, incluant entre autres une rotation en Nouvelle-Calédonie. Certaines de ces missions sont propres au contexte de crise et du confinement, car, en temps ordinaire, en application de la règle des 4i, elles ne relèvent pas des forces armées.
La chaîne logistique a dû également s'adapter aux contraintes imposées par la crise du Covid-19 pour le soutien de nos opérations militaires. Par exemple, pour la projection vers l'outre-mer des renforts Résilience, des quatorzaines ont été mises en place afin d'éviter une propagation du virus à l'occasion des relèves « in » – vers les outre-mer – et « out » – de retour de mission. Le protocole limitant le nombre de militaires dans les chambres, nous avons fait appel à l'Institution de gestion sociale des armées (IGESA) afin de disposer d'hébergements complémentaires. Outre le service de santé, le service du commissariat joue un rôle essentiel pour le transport des détachements et des unités dans le respect des règles de distanciation, pour le soutien vie sur les sites IGESA et pour le renfort des groupements de soutien sur les sites militaires accueillant les quatorzaines.
Selon la règle des « 4i », les armées interviennent en appui d'un ministère qui conduit la gestion de la crise, en l'occurrence celui des Solidarités et de la Santé. Engagés de façon réactive, les moyens des armées sont comptés, et tous les acteurs doivent être mobilisés.
La cellule logistique de la cellule interministérielle de crise (CIC), créée lors de l'ouragan Irma, permet de mutualiser les achats et les opérations logistiques de crise entre les ministères, et prépare les choix validés ensuite par la CIC, ce qui est gage de réactivité. La pandémie a conduit à renforcer les autres ministères, notamment celui de la santé, avec des logisticiens militaires placés à la cellule de crise « achats logistiques » du MSS, dans les agences régionales de santé (ARS) et les entrepôts de Santé publique France.
Les grands groupes du secteur privé peuvent enfin appuyer l'État en cas de crise, comme l'ont fait à notre profit Airbus, en aidant la direction des approvisionnements en produits de santé à effectuer des achats et Dassault en mettant à disposition deux Falcon.
Le lien que l'armée entretient avec les grands groupes industriels contribue à ce que ceux-ci se mobilisent rapidement en cas de crise.
Plusieurs régiments et spécialités ont fonctionné ensemble dans le cadre de l'opération Résilience. Quel retour d'expérience faites-vous de l'articulation de ces différents corps et régiments, et quelles améliorations envisagez-vous ? Êtes-vous favorables à une préparation accrue de ces spécialités à travailler ensemble ?
Quel est le délai incompressible entre la décision officieuse de déploiement d'une unité et son déploiement effectif ? Étiez-vous préparés à une telle situation avant l'annonce faite par le Président de la République le 16 mars ? Auriez-vous pu intervenir plus tôt si vous en aviez reçu l'ordre ? En cas de besoin, auriez-vous pu installer d'autres unités de réanimation ? Certains médecins militaires ont eu le sentiment d'être sous-utilisés : auriez-vous pu mobiliser davantage de ressources humaines pour soulager la première ligne ? Avez-vous eu des difficultés juridiques ou opérationnelles, notamment dans la prise en charge de civils en dehors d'un contexte de conflit ?
En période de crise, l'intervention de l'armée peut donner lieu à des attentes irréalistes et donc, en dépit des prouesses réalisées, à ce que certains expriment de la déception : cela affecte-t-il le moral des militaires sur le terrain ?
Vous m'avez dit il y a trois semaines, général, que les armées réfléchissaient à la façon de monter d'autres types d'EMR. Où en sont vos réflexions et vos capacités de déploiement d'autres structures si nous devions être confrontés à une deuxième vague épidémique ?
L'EMR a pris en charge 47 patients, ce qui, selon les chiffres dont je dispose, aurait mobilisé 121 personnels, dont 90 soignants et 31 logistiques : le ratio par patient est-il comparable à ce qui se fait dans le civil et, dans la négative, quelles sont les raisons de l'écart existant ?
Quel est l'impact de l'opération Résilience sur la préparation opérationnelle du service de santé des armées ? Ce service peut-il intervenir à la fois sur le territoire national et en opérations extérieures ? Finalement, la plus-value opérationnelle de l'EMR de Mulhouse réside-t-elle dans son déploiement rapide auprès d'un hôpital surchargé et de sa forte visibilité auprès de la population civile, ou dans sa capacité de soin intrinsèque ?
Général, de quelle manière la demande des services civils et l'offre militaire se sont-elles rencontrées dans le cadre de l'opération Résilience ? Les armées ont-elles seulement répondu à cette demande ou se sont-elles parfois montrées proactives ?
Monsieur le commissaire, y a-t-il des enseignements à tirer de cette opération pour les Opex, notamment au regard du travail interministériel ou de compétences particulières qui auraient pu être développées ? Peut-on considérer qu'une telle opération concourt à la préparation opérationnelle ?
Général, avez-vous identifié des points de possible amélioration de la coopération entre militaires et civils dans la gestion de ce type de crise ?
Monsieur le médecin chef, doit-on déduire de vos propos qu'aucun de vos personnels n'a contracté le virus au cours de l'opération ? Dans l'affirmative, ce résultat s'expliquerait-il par des protocoles particuliers à la médecine militaire ?
Qu'avez-vous appris à l'occasion de cette opération mulhousienne ? Avez-vous rencontré des difficultés particulières qui vous conduiraient à modifier certains protocoles ou certains modes organisationnels ?
La couverture sanitaire des militaires participant à des Opex a-t-elle été maintenue ou avez-vous dû procéder à des redéploiements de moyens ?
Le travail interarmées et interarmes est, dans la composante terrestre, constitutif de l'engagement des forces. En matière de coordination, les conditions d'engagement dans cette crise n'ont pas changé la donne ; au contraire, nous avons apporté notre savoir-faire.
La coordination avec les services ministériels concernés – services d'infrastructures de la défense, SSA, commissariat des armées – a été assurée chaque semaine, au niveau zonal, par visioconférence entre tous les chefs de services, mais aussi avec les douze commandants des bases de la zone Est et les représentants de la zone de défense et de sécurité Nord. Ce procédé diffère un peu de la coordination ordinaire de l'engagement des forces armées.
J'ignore s'il y a des enseignements à tirer en termes de limites de conditions d'engagement et d'emplois : quand l'urgence s'impose sur le territoire national, c'est la priorité de tout le monde, et bien sûr celle des armées. Le nouveau contrat de protection prévoit une certaine capacité, mais elle pourrait être bien supérieure si la situation l'exigeait pour la protection de la population.
Les délais d'engagement ont été très rapides lors de cette crise, qui a touché d'abord le monde des soignants et de la santé, très rapidement mobilisés, notamment au travers du plan blanc. Nous n'avons, pour le reste, pas dû faire face à de fortes demandes comme cela a été le cas lors des crises précédentes. En 2015, plus de 10 000 hommes avaient convergé en moins de cinq jours vers Paris et plusieurs autres grandes agglomérations, et la logistique de ce qui allait être l'opération Sentinelle a été élaborée quasiment en temps réel. Nous veillons au maintien de cette capacité d'engagement en tout temps, en tout lieu, quelles que soient les conditions.
L'offre est allée à la rencontre du besoin de façon proactive. Le soutien logistique que nous avons apporté aux ARS, en y postant un logisticien, est le fruit d'un dialogue avec elles. Au niveau local, nos commandants de régiment ont proposé leurs services aux préfets et à certaines collectivités, la règle des « 4i » étant à cette occasion assouplie compte tenu de l'urgence. La levée progressive du confinement et la reprise concomitante des activités des forces vont marquer le retour à une pratique plus vertueuse de cette règle, et l'examen de la possibilité pour d'autres acteurs d'assurer la mission.
Quant aux points d'amélioration éventuelle, notre instruction relative à l'engagement des forces armées sur le territoire national lorsqu'elles interviennent sur réquisition des autorités civiles est très complète : les quatre scénarios qui y sont envisagés couvrent bien la crise que nous vivons. Une amélioration pourrait être apportée par l'aménagement d'espaces de communication interministérielle plus aisés – je ne peux pas organiser de visioconférence avec d'autres ministères à partir de mon poste de travail, ce qui m'oblige à me rendre au centre des opérations de la préfecture de zone.
L'EMR-SSA a été mis en place en sept jours, ce qui constitue une prouesse. Nous nous sommes appuyés sur notre expérience, acquise avec l'élément médical militaire d'intervention rapide (EMMIR), qui a été déployé en particulier à la suite de tremblements de terre au Nicaragua, en Jordanie, au Kurdistan et en Haïti.
Nous sommes aussi en veille permanente, imaginant diverses solutions de déploiement. L'EMR est inspiré d'un modèle d'hôpital médico-chirurgical de campagne auquel nous avions réfléchi il y a quelques années ainsi que de notre expérience du centre de traitement d'Ebola. Il constitue néanmoins une nouveauté par son emploi dans le cadre d'une urgence médicale infectieuse. Nous sommes donc en mesure de déployer rapidement des unités de réanimation de forte capacité.
Vis-à-vis de nos personnels, nous avons adopté une démarche particulière de prévention. Une équipe renforcée d'hygiénistes ayant l'expérience du centre de traitement d'Ebola a formé tous nos personnels sans exception. Des superviseurs ont contrôlé aux entrées et aux sorties la bonne application des protocoles d'habillage et de déshabillage. Notre institut de recherche de biologie appliquée a réalisé différents prélèvements, d'ambiance et sur les patients, afin d'apprécier la contamination éventuelle de notre environnement. L'hôpital de Mulhouse a procédé à une analyse particulaire de l'air à l'intérieur des tentes, dont la qualité s'est avérée comparable à celle observée dans les salles de réveil.
Sur place, nos soldats sont soumis à une surveillance biquotidienne de leur température. Une fois rentrés chez eux, ils bénéficieront d'un suivi personnalisé à la fois psychologique et médical : pendant quatorze jours, ils devront rendre compte de l'évolution de leur état de santé à leur centre médical des armées (CMA) de rattachement, qui les prendra en charge à la moindre alarme. Nous avons eu des alertes, mais aucun cas de Covid-19 confirmé – trois de nos personnels ont été isolés et suivis par l'antenne médicale de Meyenheim, mais ils vont très bien et ont repris leurs activités au sein de l'EMR ; leur contamination n'a pas été confirmée.
Tout le monde craint la seconde vague. J'espère que tous les citoyens continueront à respecter les mesures de distanciation. Nous avons beaucoup échangé sur le sujet avec l'hôpital de Mulhouse, qui est en cours de réorganisation : l'ouverture d'une unité de sevrage et la contribution des centres de réadaptation mulhousiens vont profondément modifier la gestion des patients et permettre des séjours plus courts dans les services de réanimation. Si elle se produit, la deuxième vague sera ainsi d'une amplitude moindre, et nous pourrons l'anticiper. L'EMR-SSA se retire du site de Mulhouse, mais le service de santé des armées continue la bataille contre le Covid-19 ; il réarticule ses moyens (qui sont limités) pour les remettre à disposition du chef d'état-major.
Depuis le début de la crise, nous réfléchissons à des interventions dans d'autres territoires. Nous sommes conscients des défis particuliers qui se présentent en milieu ultramarin, notamment à Mayotte, mais je ne sais pas ce qui sera décidé par le Président de la République.
Quant aux problèmes juridiques, nous nous référons au principe d'assistance à personne en danger. Dans le cadre particulier de l'opération Résilience, grâce au dialogue permanent entre la chaîne OTIAD et les ARS, des agréments temporaires d'exercice ont été délivrés rapidement aux structures de réadaptation mises en place pour accueillir des patients ventilés ou trachéotomisés.
L'EMR-SSA a pris en charge 47 patients pour 600 jours de réanimation au total, ce qui constitue une durée de séjour moyenne très conséquente – près de 15 jours contre 7 à 10 habituellement –, d'autant que certains d'entre eux ne sont sortis que parce que nous avons eu recours à des évacuations médicalisées, organisées pour restaurer le potentiel d'hospitalisation de l'hôpital de Mulhouse.
C'est le rôle de la chaîne OTIAD que de mettre en adéquation à l'échelle nationale les moyens dont disposent les armées, directions et services, avec les besoins exprimés par les autorités civiles. Si les moyens disponibles au niveau zonal ne sont pas suffisants pour répondre aux besoins, elle se charge de faire remonter les demandes de réquisition ou de concours au niveau du CPCO.
Les attentes de la population vis-à-vis des armées peuvent être très importantes, surtout dans une telle situation. L'action des armées doit être expliquée à la population. En cas de crise sur le territoire national, la priorité est de répondre en mettant en œuvre tous les moyens dont nous disposons.
Le retour d'expérience fait partie de la culture des armés et il en est de même avec l'opération Résilience. La gestion de la crise liée à l'ouragan Irma a conduit à la création de la Cellule interministérielle de crise-logistique (CIC-Log) avec laquelle nous savons nous coordonner.
La réactivité fait également partie de la culture des armées. Grâce à la chaîne OTIAD, les délais peuvent être très courts, comme nous l'avons vu, avant même le lancement de l'opération Résilience, lors du rapatriement des Français de Wuhan, avec un accueil organisé de manière réactive sur la base aérienne d'Istres puis un transport par moyens militaires vers le centre de Carry‑le-Rouet.
Nous sommes également proactifs dans le cadre de la gestion de crise, en l'occurrence en ayant proposé les capacités dont nous disposions aux autorités civiles.
La redéfinition des zones de défense et de sécurité s'est opérée à partir des contours des nouvelles régions. Dans le dialogue civilo-militaire, la préfète de zone et moi-même œuvrons ainsi sur un même territoire.
L'ultime recours aux armées sur le territoire national, la présence militaire et sa visibilité contribuent systématiquement à atténuer l'anxiété de nos concitoyens.
Les missions logistiques sont d'un intérêt limité pour la préparation opérationnelle de nos unités, sauf pour le régiment médical qui a nécessairement acquis une précieuse expérience. Il n'en reste pas moins que nos états-majors sont actifs et que c'est un plus pour la préparation opérationnelle de notre centre opérationnel.
Nous sommes organisés pour anticiper, mais dans cette crise, nous avons découvert en même temps que tout le monde ce à quoi nous étions confrontés, ce qui est tout à fait nouveau.
La mission Covid-19 a mobilisé essentiellement les anesthésistes-réanimateurs du service de santé des armées et des personnels paramédicaux. Tous nos médecins d'unités ne sont pas aptes à prendre des gardes aux urgences et certains peuvent avoir le sentiment d'être insuffisamment sollicités, quoiqu'ils participent au maintien en condition des unités qu'ils soutiennent.
Il convient, en effet, de trouver le bon équilibre.
La directrice du SSA a souligné combien le SSA était une armée « autonome », dans les services de laquelle vous avez pu puiser pour votre propre fonctionnement.
En effet, la pharmacie centrale des armées nous permet de bénéficier d'une certaine autonomie et de modéliser des structures sanitaires de soutien innovantes. Nous sommes néanmoins dépendants du soutien et nous constituons un service au service des armées : sans le régiment médical, l'EMR-SSA n'existe pas.
Je vous remercie pour ces interventions, qui enrichiront les travaux de la mission d'information dont le président Richard Ferrand est le rapporteur général.
Au nom de l'ensemble de mes collègues, je vous assure de notre gratitude et de notre fierté. Vous avez su créer des relations vouées à perdurer avec d'autres interlocuteurs, comme les agences régionales de santé.
J'espère que, dans les mois à venir, vous pourrez souffler un peu. Nous saurons, quant à nous, nous montrer reconnaissants et vigilants afin que les moyens du service de santé des armées soient à la hauteur de la situation.
La séance est levée à seize heures quinze.
Membres présents ou excusés
Présents. - M. Stéphane Baudu, M. Thibault Bazin, M. Olivier Becht, M. Christophe Blanchet, Mme Aude Bono-Vandorme, M. Jean-Pierre Cubertafon, Mme Françoise Dumas, M. Jean‑Jacques Ferrara, M. Laurent Furst, Mme Albane Gaillot, M. Claude de Ganay, M. Thomas Gassilloud, M. Fabien Gouttefarde, M. Jean-Michel Jacques, M. Fabien Lainé, M. Christophe Lejeune, M. Nicolas Meizonnet, Mme Monica Michel, Mme Patricia Mirallès, M. Gwendal Rouillard, M. Stéphane Trompille, Mme Alexandra Valetta Ardisson, M. Pierre Venteau.
Excusés. - M. Sylvain Brial, M. André Chassaigne, M. Olivier Faure, M. Yannick Favennec Becot, M. Richard Ferrand, M. Stanislas Guerini, M. Christian Jacob, Mme Manuéla Kéclard‑Mondésir, M. Jean-Christophe Lagarde, M. Didier Le Gac, M. Gilles Le Gendre, M. Jacques Marilossian, M. Philippe Michel-Kleisbauer.