Commission des finances, de l'économie générale et du contrôle budgétaire

Réunion du jeudi 14 mai 2020 à 16h00

Résumé de la réunion

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La réunion

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La commission entend M. Frédéric Oudéa, président de la Fédération bancaire française.

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Lorsque nous avons auditionné, le 8 avril 2020, la Fédération bancaire française (FBF) et Bpifrance, nous avons évoqué la mise en place du prêt garanti par l'État (PGE), institué par la première loi de finances rectificative pour 2020. Aujourd'hui, l'audition du président de la FBF, M. Frédéric Oudéa, nous conduira à évoquer le mécanisme du PGE mais aussi les questions que la crise actuelle pose au système bancaire dans son ensemble.

Avec la puissance publique, les banques sont au premier rang du soutien exceptionnel qui est apporté à l'économie. Elles sont exposées à des risques accrus de défaut des emprunteurs et il est fondamental qu'elles puissent continuer à jouer leur rôle, sans être affaiblies par la situation, et qu'elles contribuent pleinement à surmonter cette crise.

Pour sa part, la Banque centrale européenne (BCE) a amplifié sa politique accommodante et confirmé le maintien d'un environnement de taux bas, provoquant le soulagement des banques et des marchés, mais aussi des inquiétudes pour le modèle bancaire de notre pays.

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Frédéric Oudéa, président de la Fédération bancaire française

Je suis ravi d'avoir l'occasion de répondre à vos questions, comme avait pu le faire Mme Maya Atig, directrice générale de la FBF, lors de la précédente audition que vous avez évoquée.

La FBF regroupe 340 entreprises bancaires, dont 115 sont étrangères, le marché étant néanmoins assez fortement concentré entre six grandes banques, ce qui explique la capacité de réaction rapide dont nous avons fait preuve. Ainsi, nous avons réussi à adapter rapidement nos modes de fonctionnement, en maintenant accessibles 70 % à 80 % des agences, et en adoptant le télétravail pour certaines fonctions de réseau et de siège. Les paiements ont été assurés et aucune rupture de service n'a été constatée. La priorité absolue était la santé de nos clients et de nos salariés. Enfin, le dialogue social a été très intense au niveau de la branche et de chacune des entreprises.

La mobilisation a été exceptionnelle au service de l'économie, dans le cadre du PGE. Je prends la parole le jour où nous franchissons la limite de 100 milliards d'euros de prêts demandés en sept semaines, dont plus de 65 milliards préaccordés par Bpifrance. Plus de 500 000 entreprises sont concernées, à 90 % de très petites entreprises (TPE), et environ 40 milliards ont été crédités dans leurs comptes à ce jour.

Aucun autre pays européen n'a eu recours à des dispositifs identiques aussi rapidement. Les montants sont de 30 milliards d'euros pour l'Espagne et pour l'Allemagne, de 15 milliards de livres en Grande-Bretagne et de quelques milliards d'euros en Italie. Cette situation traduit la mobilisation exceptionnelle des réseaux. Sur les 100 milliards d'euros demandés, la Société Générale a reçu des demandes à hauteur de 16 milliards d'euros, ce qui dépasse sa production de crédit aux entreprises de l'année dernière.

Au-delà, nous avons mobilisé nos propres ressources en mettant en place des moratoires sur les crédits, pour un montant de 20 milliards d'euros.

Je rappelle également que des entreprises des secteurs du tourisme et de la restauration ont bénéficié de PGE pour 6,3 milliards d'euros.

Nous avons adapté également les dispositifs pour les particuliers.

La crise est d'une ampleur exceptionnelle. Elle a eu des impacts sur les économies et sur les marchés. Je tiens à souligner la réaction très forte des gouvernements et des banques centrales, ainsi que des superviseurs, pour assurer la stabilité des marchés et la liquidité du secteur bancaire. Le dialogue a été constant avec le ministre de l'économie et des finances et le gouverneur de la banque de France, afin d'identifier les solutions adaptées.

Les effets de la crise entraîneront des baisses de revenus en raison du ralentissement de l'économie. Nous examinerons comment les Français réagissent, comment les entreprises s'adaptent et jusqu'à quel point elles investissent. J'espère que nous éviterons une deuxième vague de contagion, qui imposerait un deuxième confinement.

Au-delà, le coût du risque augmentera. Je n'ai pas à commenter la situation des différentes banques françaises. Pour la Société Générale, nous avons indiqué que le coût du risque serait deux fois plus élevé que prévu dans un scénario central et trois fois plus élevé en cas de deuxième vague, avec une baisse du PIB de 13 % en Europe.

Les impacts sont significatifs mais nous savons les gérer car nous entrons dans la crise très différemment par rapport à 2008-2009, notamment grâce aux nouvelles règles en vigueur. Le secteur bancaire français n'a pas subi le même choc que ses homologues européens. De plus, notre modèle d'affaires est équilibré et nous sommes capables de faire face à la crise en termes de revenus. Surtout, nos réserves sont deux fois à deux fois et demie supérieures à ce qu'elles étaient au début de la crise de 2008 et nous disposons des liquidités nécessaires, de 200 à 300 milliards.

Personne ne sait quel scénario nous vivrons in fine. Il convient de relancer l'économie, en assurant la sécurité des salariés. Au-delà de la très grande efficacité de toutes les aides gouvernementales et du PGE, la question est de savoir quel rôle nous pourrons jouer pour aider les entreprises à accéder au marché en fin d'année, notamment celles qui rencontreront des difficultés pour rembourser les prêts.

Avec deux organisations syndicales, nous avons signé un communiqué commun pour rappeler que nous avions fait partie des citoyens français de la deuxième ligne et que nous étions restés au service de nos clients. Nous poursuivrons notre travail lors de la reprise de l'activité économique.

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Bruno Le Maire a indiqué qu'il était en discussion avec les banques pour que les intérêts dus pendant la période de moratoire ne soient pas facturés. Qu'en est-il ?

Pour les PGE, quels sont les principaux motifs de refus des prêts ? Il semblerait par ailleurs que le critère d'un montant correspondant à 25 % du chiffre d'affaires soit en pratique peu utilisé.

Les entreprises ressortiront de la crise avec un endettement très important, qui pourrait s'étaler sur cinq ans. La mission du président Lemière a pour objectif de déterminer comment il sera possible de transformer certains prêts en fonds propres. Quel pourrait être le rôle des banques dans ce cadre ?

Enfin, disposez-vous de bonnes garanties d'une transposition de l'accord dit de Bâle III qui permettrait d'éviter une approche trop standardisée dans l'appréciation des fonds propres ? Quels doivent être les points de vigilance ?

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Je salue l'engagement des chargés d'affaires des banques sur le terrain, personnes qui sont les premières lignes du monde économique.

Lorsque nous avions auditionné la FBF, nous avions fait part d'un différentiel entre les chiffres officiels en matière de PGE et le ressenti du terrain, avec un nombre de refus qui reste assez important. Depuis la promulgation de la deuxième loi de finances rectificative pour 2020, avez-vous constaté une modification de la politique de risque dans les centres d'affaires, notamment vis-à-vis des entreprises en procédure de sauvegarde ?

Pourriez-vous évoquer les solutions que le réseau bancaire peut apporter aux petites et moyennes entreprises sur des financements mezzanines pour faire face à la problématique du mur de dette qui s'annonce pour certaines d'entre elles ?

Quels risques de marché le secteur bancaire peut-il présenter et quelles pourraient être les attaques éventuelles ? Le fait que les banques françaises soient des établissements consolidés renforce-t-il les risques ?

Pour les particuliers, comment anticipez-vous une potentielle reprise du marché immobilier ?

Au cours des deux derniers mois, avez-vous noté une progression du nombre des demandes de crédit à la consommation ?

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Je salue le travail effectué par tous les salariés des banques durant cette période pour diffuser largement le PGE. Disposez-vous du taux des refus apportés aux entreprises, ainsi que des différents motifs associés ? À moyen terme, l'accroissement des prêts accordés ne conduira-t-il pas à obérer votre capacité de crédit ?

Pour les particuliers, quels seraient les critères pertinents pour déclencher plus rapidement l'alerte de fragilité financière, sans attendre les trois mois ? En 2019, vous vous étiez engagés à accroître de 30 % le nombre de personnes concernées par l'offre spécifique. Vous avez respecté cet engagement. Pensez-vous que d'autres objectifs doivent être fixés en la matière ? Enfin, nous aurions intérêt à documenter davantage le parcours des personnes en fragilité financière.

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Pourriez-vous nous fournir, à l'échelle du système bancaire français, le pourcentage de refus de PGE, avant et après intervention du médiateur de crédit ?

Les banques françaises ont été nombreuses à procéder à d'importantes provisions en prévision des non-remboursements de crédits. Quelle appréciation a été portée en la matière ?

Comment les banques françaises pourraient-elles contribuer à améliorer la situation de nos entreprises après l'épidémie ?

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Quels sont les risques d'une augmentation des taux d'intérêt, notamment immobiliers ?

Le monde associatif, sportif et culturel en particulier, a été très bousculé par la crise. Envisagez-vous un plafonnement des taux pour les Dailly bancaires associatifs ?

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La décision de relever la limite applicable aux paiements sans contact de 30 à 50 euros est positive mais représente un défi technique. De quelle visibilité disposez-vous sur la mise en œuvre opérationnelle de cette mesure ? Toutes les banques sont-elles au même niveau ? Les banques devraient-elles faire un effort tarifaire sur les frais d'installation des terminaux et sur les commissions associées aux paiements ?

Pouvez-vous nous informer sur l'évolution des frais bancaires durant la crise ? Pensez-vous retenir les propositions de la mission flash dirigée par Philippe Chassaing ? N'estimez-vous pas que le plafonnement à 25 euros par mois doit être réduit pour les familles les plus précaires ?

Quatre des plus grands établissements bancaires ont alloué 24 milliards de dollars au financement d'entreprises des secteurs du pétrole et du gaz de schiste entre 2016 et 2019, dont la moitié pour la Société Générale. Je m'interroge sur la pertinence de ces investissements, au vu de l'effondrement des cours et plus encore au plan environnemental.

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Que pensez-vous d'outils de financement désintermédiés comme le lease back ?

Le contexte actuel de crise expose les pays d'Afrique à une fuite des capitaux étrangers. Quelles initiatives la FBF a-t-elle prises pour accélérer les investissements de nos banques en Afrique ? Quels facteurs de blocage expliquent la frilosité de nos banques par rapport à leurs concurrentes ? Quelles opportunités identifiez-vous pour des partenariats avec les acteurs africains de la banque et de la finance ? Quels secteurs d'investissement vous paraissent porteurs ?

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Quels taux d'intérêt sont appliqués par les banques aux 20 milliards d'euros de reports de crédits des entreprises ?

Quel pourrait être l'encours des PGE au final ?

Des frais d'assurances sont-ils appliqués sur le PGE et sur la fraction du prêt non garantie par l'État ?

Avez-vous déjà fixé une grille de taux d'intérêt pour ceux qui prolongeront le remboursement du PGE au-delà de la première année ?

N'existe-t-il pas un effet de substitution du PGE au prêt de trésorerie ?

Des banques ont-elles eu recours au chômage partiel ? Envisagez-vous de suspendre le versement de dividendes de certaines banques ?

Le risque sanitaire et les conséquences économiques associées ne risquent-ils pas de fragiliser les banques ?

Vu l'effondrement en bourse de la valeur de la plupart des banques françaises – les valeurs boursières sont même inférieures aux fonds propres –, quels sont les risques d'OPA ?

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Constatez-vous une augmentation des frais bancaires ? Ces derniers pourraient avoir un impact car nos concitoyens n'ont pas de réserves financières. La FBF et les banques se sont-elles dotées d'instruments de suivi des effets de la crise sur les incidents de paiement pour les ménages et les entrepreneurs individuels ? Il semble que le montant des frais bancaires serait de 6,5 milliards d'euros annuels, chiffre que les entreprises du secteur ne confirment pas. Les banques pourraient-elles accepter de pratiquer massivement des remises gracieuses ? Enfin, les frais associés aux paiements sans contact ont-ils été relevés ?

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Les frais bancaires restent particulièrement élevés pour les publics en grande précarité et deux associations de consommateurs ont sollicité la généralisation effective du plafond de 25 euros.

La FBF peut-elle prendre l'engagement que les banques françaises ne procéderont à aucune distribution de dividendes ou de réserves d'ici à la fin de l'année ?

Les bilans de nombreuses banques asiatiques et européennes sont encore fragiles. Ces banques accompagneront-elles les développements nécessaires dans le cadre d'une économie moins carbonée ?

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Frédéric Oudéa, président de la Fédération bancaire française

Pour le PGE, 90 % des dossiers validés concernent des TPE de moins de 10 salariés, dont les chiffres d'affaires sont inférieurs à 2 millions d'euros. Pour la première année, le coût est de 0 %, augmenté du prix de la garantie. Après un an, le chef d'entreprise indiquera à quel horizon il souhaite rembourser (un à cinq ans), toujours au prix coûtant de la liquidité, que nous ne connaissons pas à ce stade et qui sera différent selon les banques. Si les taux restent bas, l'argent devrait rester bon marché.

Parallèlement, il n'est pas prévu de frais d'assurance. Le dispositif a été construit en dix jours et nous n'avons cessé de dialoguer pour l'améliorer. Il intègre maintenant les entreprises en difficulté : aujourd'hui, 23 000 entreprises notées 5 ou 6, et même 7, 8 ou 9, ont bénéficié d'un PGE.

Pour connaître le nombre de refus, nous devons faire remonter les informations de toutes nos agences. Notre estimation est de 2,5 %, avant médiation, soit 12 500 entreprises sur 500 000. Il n'est pas forcément logique d'accorder un prêt à une société qui fera faillite trois mois plus tard. De plus, environ 1 000 entreprises ont recours à la médiation toutes les semaines, soit un total de 8 000 depuis le lancement du dispositif, ce qui assez cohérent avec les 12 500 cas de refus.

Par ailleurs, le PGE ne vise pas à rembourser des prêts de trésorerie existants. En termes de montant total, je pense que nous ne serons pas très loin des 150 milliards d'euros. De fait, au sein des grandes entreprises, les processus à suivre prennent plus de temps, notamment parce qu'elles sont en relation avec plusieurs banques.

Pour les particuliers, nous observons plutôt une diminution des incidents bancaires. Grâce au dispositif de chômage partiel et au maintien de l'emploi, beaucoup de revenus ont été maintenus pour cette population, qui a moins consommé dans le même temps. Les cartes bancaires ont été très utilisées mais les volumes des dépenses ont été divisés par deux au cœur du confinement. Les difficultés sont donc plutôt à venir, si des plans sociaux sont lancés à l'automne.

L'activité des prêts immobiliers et des crédits à la consommation a été très limitée. Au plan immobilier, il est difficile d'anticiper ce que sera la demande à la sortie de la crise, notamment quel type de logement sera plébiscité dans le cadre du développement du télétravail. Je n'exclus pas une correction à la baisse sur le marché. Pour leur part, les taux devraient rester peu élevés. En la matière, le marché immobilier français est probablement le plus compétitif en Europe avec celui de l'Allemagne : il était possible d'emprunter à 1,1 % sur vingt ans. Pour le crédit à la consommation, la question clé sera celle de la reprise de la consommation et des comportements d'épargne. Les Français augmenteront-ils leur taux d'épargne, qui est déjà élevé ? Ce dernier passera-t-il par l'emprunt immobilier ? À ce stade, nous avons constaté une réduction de nombre de dossiers de surendettement.

Les activités de banque de détail en France représentent des dizaines de milliers de personnes qui travaillent dans des agences et des centres spécialisés, au service de leurs clients. Cette activité est en difficulté car elle fait face à des pressions considérables sur ses revenus, en raison du niveau des taux d'intérêt et de la baisse des commissions. Il convient donc de se demander si nous souhaitons conserver un service bancaire de proximité, qui permet notamment l'accompagnement des clients en difficulté. Vous évoquez des remises gracieuses et une réduction des frais : nous devons payer nos salariés, payer nos coûts, investir au plan informatique et dans la formation. La capacité à maintenir ce modèle relationnel passe par les revenus. Sinon, nous serons remplacés par « Amazon Banque ». Au sein de la Société Générale, nous disposons aussi de Boursorama Banque, qui est la moins chère en France et qui bénéficie du plus haut niveau de satisfaction des clients. Toutefois, ce modèle ne correspond pas à tous les types de clientèle.

Nous avons su montrer notre sens des responsabilités. Lors de la crise des gilets jaunes, nous avons pris la décision de plafonner les frais bancaires pour les populations en difficulté, ce qui nous a coûté 600 millions d'euros de revenus. Ces frais n'ont pas été relevés durant la crise actuelle et nous avons continué à prendre des engagements, notamment pour une harmonisation des critères de fragilité financière, à propos desquels la communication doit être assurée. Sur ces sujets, les banques sont contrôlées par l'Autorité de contrôle prudentiel et de résolution (ACPR), qui a indiqué que la quasi-totalité des réseaux respectaient leurs engagements. En fin d'année, tout le monde sera en ordre de marche.

Nous continuerons à travailler sur le rythme de l'identification des situations difficiles. Pour l'offre spécifique, qui concerne 500 000 clients, nous avons tenu nos engagements. Nous sommes très ouverts pour continuer à travailler sur ces sujets car notre intérêt est que nos clients ne basculent pas dans les difficultés.

Même avec une limite fixée à 30 euros, le potentiel de progression du recours au paiement sans contact était élevé. Basculer à 50 euros n'était pas simple. En effet, il convenait d'adapter les terminaux, ce qui est complexe en période de confinement. Aujourd'hui, toutes les banques ont appliqué l'évolution, certaines dès le 27 avril. Au-delà, sur ce sujet, nous sommes très sensibles au risque de fraude.

En ce qui concerne les prêts aux entreprises pour lesquels a été appliqué un moratoire, il n'a pas été effectué de paiement des intérêts, ces derniers étant capitalisés. De plus, toutes les entreprises qui ont bénéficié d'un PGE ne souhaitent pas forcément un moratoire de remboursement. En effet, les secteurs ne sont pas tous dans une situation aussi complexe que l'hôtellerie et le tourisme. Parfois, le PGE a été mobilisé par sécurité, sans atteindre un montant correspondant au quart du chiffre d'affaires annuel.

À ma connaissance, toutes les grandes banques ont indiqué qu'elles ne recourraient pas au chômage partiel, alors qu'elles avaient toutes des salariés qui n'étaient pas employés.

Nous ferons face à des défauts. À la Société Générale, nous estimons notre coût du risque à 3,5 milliards d'euros en 2020, au lieu de 1,7 milliard d'euros, et nous pensons qu'il pourrait être de 5 milliards d'euros si le PIB chutait de 13 %. Dès que nous mettons en place un nouveau crédit, nous provisionnons automatiquement la perte attendue à un an, ainsi que l'anticipation de perte que nous pourrions enregistrer à plus long terme pour les entreprises qui sont sous surveillance. Il est difficile de savoir quel scénario économique se réalisera mais nous sommes en principe capables de faire face.

La BCE nous a demandé de ne pas verser de dividendes et des centaines d'actionnaires individuels ont été impactés par cette mesure, sachant qu'ils achètent des actions pour disposer d'un rendement. Or les valorisations très basses qui sont constatées actuellement ne correspondent qu'à une fraction de nos fonds propres. L'absence de versement de dividendes n'est pas satisfaisante pour une entreprise et nous devons revenir à une situation normale car sinon, nous n'aurons plus d'acheteurs et nous ne pourrons pas financer la reprise de la croissance.

L'un des enjeux est de déterminer quelles sont les règles du jeu. Nous vivons un véritable stress test et les questions essentielles pour le futur sont les suivantes. Comment les banques ont-elles traversé la crise ? Le capital disponible était-il suffisant au sein du système ? Sur ces bases, nous pourrons envisager la transposition des accords de Bâle III. Les années 2021 et 2022 seront des exercices, je l'espère, au cours desquels les entreprises souhaiteront investir et les particuliers consommer. Il sera donc important que nous disposions des capitaux pour financer les nouveaux prêts. Dans l'examen des questions de transposition, nous devrons tenir compte de la question du capital disponible au sein du système.

La FBF travaille sur la sortie de crise et souhaite effectuer des propositions. Le PGE existe, doit continuer à fonctionner comme prévu et doit donc être remboursé. Pour ce faire, certaines entreprises feront appel à des ressources de marché, en levant des obligations ou du capital. Toutefois, de nombreuses petites entreprises n'auront pas accès au marché. Nous cherchons donc à déterminer si de nouveaux instruments pourraient conforter la structure financière des entreprises. Nous pourrions recourir à du quasi-capital, c'est-à-dire un produit beaucoup plus long, avec un rendement meilleur que celui du prêt. Il pourrait notamment s'agir d'investissements issus de fonds publics, provenant de l'Europe, de fonds régionaux... Toutefois, la logique de Bâle III est que les banques ne proposent que des prêts et non du capital ou du quasi capital. Nous avons réussi à conserver des activités de capital régional mais nous ne pouvons pas y consacrer des milliards. Il est donc possible de faire appel à une épargne publique, à condition de ne pas lui faire prendre de risque. Le secteur bancaire constituera un levier intéressant car les tickets moyens seront peut-être de 100 000 ou 400 000 euros. Nous serions bien placés pour identifier le bon calibrage. Nous travaillons sur ces sujets et nous serons prêts à jouer le jeu.

En tant que président de la FBF, je ne suis pas en charge de définir la stratégie des banques françaises. L'Afrique est un territoire complexe et il convient de disposer de la taille adaptée pour y intervenir. Elle est très moderne par certains aspects. Se pose aussi la question de la conformité, qui est une question clé sur ce continent. La Société Générale reste impliquée en Afrique et je suis très heureux de constater que ce continent semble épargné par l'épidémie. Nous disposons de 11 000 collaborateurs sur le terrain et, heureusement, nous n'avons enregistré que 32 cas.

Au plan de l'environnement, je souhaiterais que le débat soit le plus rationnel possible. Je vous garantis que toutes les banques françaises sont engagées et renforceront leurs engagements en matière d'environnement. Durant la crise, nous n'avons pas laissé tomber Air France ou des entreprises du secteur pétrolier. En effet, enregistrer 10 000 ou 50 000 pertes d'emplois ne nous a pas semblé être une bonne solution à très court terme. Je vous assure que nous accompagnerons ces entreprises dans leur transition énergétique. La première banque mondiale est américaine et finance les énergies fossiles pour des montants deux fois supérieurs à ceux investis par toutes les banques françaises. Cette crise est une occasion pour accélérer la transition vers les énergies renouvelables.

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Je salue et remercie tous les employés de banque, qui ont été présents depuis le début de la crise pour soutenir l'économie.

Certaines banques n'ont pas demandé d'intérêts intercalaires et d'autres l'ont fait. Je souhaiterais que vous interveniez pour que les banques proposent le choix entre les solutions accessibles : différé partiel, différé total, allongement pour six mois ou maintien de la durée initiale.

Pour le PGE, il apparaît que les banques commencent à interroger les clients pour connaître l'horizon auquel ils souhaitent rembourser. Ces questions sont sans doute posées prématurément.

Vous estimez que les PGE pourraient représenter un montant de 150 milliards d'euros sur le potentiel de 300 milliards d'euros. Les banques ont-elles été un peu trop strictes à l'origine pour l'octroi des crédits ?

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Trop d'entreprises se voient refuser le PGE, parfois pour des raisons inexplicables. Ne serait-il pas possible que les refus apportés soient justifiés ?

De plus, quelle est votre vulnérabilité vis-à-vis d'un éventuel risque euro ? Quelle est votre position par rapport à la politique monétaire qu'il convient de mener ?

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Certains particuliers ont vu leurs demandes de prêts bancaires refusées car ils travaillaient dans des secteurs exposés, comme la sous-traitance aéronautique ou l'hôtellerie. Quelle est la doctrine des banques en la matière ?

Sur le plan local, ne pensez-vous pas que nous pourrions étendre l'objet des sociétés d'économie mixte locales, afin de favoriser les investissements entre les secteurs publics et privés ?

L'épargne des Français est passée de 1,5 à 3,8 milliards d'euros pendant le confinement. Quels outils fiscaux permettraient-ils d'inciter les épargnants à investir dans les entreprises ?

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Les chefs d'entreprise regrettent l'absence de visibilité du PGE sur le long terme puisque les taux d'intérêt peuvent augmenter en fonction de la durée choisie pour le remboursement. Il serait important de disposer de propositions précises en la matière.

En Corse, la saison touristique sera très mauvaise. Beaucoup d'entreprises ne pourront pas commencer à rembourser en avril 2021 mais seulement à partir de l'automne suivant. Pour toutes les entreprises françaises, pourrait-on espérer un allongement de l'horizon auquel le PGE devra être remboursé ?

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En France, la densité du réseau bancaire est plutôt plus importante que la moyenne européenne, même si elle s'est réduite au cours des dernières années. Quels impacts la crise aura-t-elle sur le comportement de vos clients et, en conséquence, sur vos implantations ?

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Seriez-vous favorable à un assouplissement des conditions du PGE pour les professionnels du tourisme, notamment avec un remboursement possible sur sept ans avec un différé de remboursement de vingt-quatre mois ?

Seule la réouverture, que nous espérons au 2 juin prochain, sauvera nos restaurants, nos bars, nos campings et nos établissements touristiques. Toutefois, les remboursements de crédits représentent parfois de 25 % à 30 % du chiffre d'affaires de certains établissements. Les banques françaises proposeront-elles une pause d'au moins un an des remboursements de ces crédits et l'allongement d'autant de la durée du prêt, sans frais de dossiers ou pénalités ?

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Les résultats globaux du PGE sont satisfaisants mais seulement 2 % des entrepreneurs ayant une note supérieure ou égale à 6 ont obtenu ce prêt. De plus, 5 % des commerçants annoncent avoir enregistré un refus, ce qui correspond à un taux deux fois plus élevé que pour les entreprises.

Je regrette que l'amendement du Sénat proposant l'allongement de l'exonération des frais bancaires n'ait pas été voté. Ces frais sont de 296 euros annuels en moyenne pour les personnes vulnérables, contre 34 euros pour l'ensemble de la population. Un rejet de prélèvement est facturé 20 euros alors qu'il coûte 20 centimes à établir. Vous avez cité le plafond de 25 euros par mois mais 78 % des personnes en situation d'endettement disent ne pas en avoir bénéficié en octobre 2019. La mise en place de ce plafond vous a coûté 600 millions d'euros, soit seulement 10 % des 6,5 milliards que vous avez gagnés grâce aux frais.

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Quelle est la part des PGE octroyés à concurrence de 25 % du chiffre d'affaires ? Quelle est la proportion des PGE accordés pour un autre montant que celui qui avait été sollicité par l'entreprise ? Disposez-vous de statistiques sur le niveau des PGE rapporté aux chiffres d'affaires ?

Si les urgences ont été traitées de façon satisfaisante durant la crise de façon globale, je suis très inquiète vis-à-vis de ce qui se passera à l'automne. Avez-vous déjà établi des orientations pour répondre aux besoins des entreprises à cette époque ?

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Frédéric Oudéa, président de la Fédération bancaire française

Je transmettrai vos remerciements aux salariés du secteur bancaire qui ont été frustrés dans un premier temps par l'absence de reconnaissance.

Je ne dispose pas des données sur les écarts entre les demandes reçues et les prêts accordés, car il s'agit d'un dialogue qui s'engage au niveau de chaque agence et qui n'est pas tracé. Je n'ai pas non plus la répartition précise des prêts accordés à concurrence de 25 % du chiffre d'affaires. Intuitivement, je pense que nous sommes plus proches de 20 % que de 10 % du chiffre d'affaires.

Si certains cas sont difficiles, transmettez-les-nous. Les refus sont accompagnés d'une justification, ce qui aide les entreprises à saisir la médiation du crédit, qui leur est parfois favorable.

Les banques interrogent les entreprises sur l'horizon auquel elles envisagent de rembourser leur prêt pour fixer le financement dont elles auront besoin. Le délai dans lequel les demandes sont traitées est peut-être un peu long mais il n'est pas possible de s'y prendre à la dernière minute.

Il nous est impossible de savoir combien nous coûtera l'argent à cinq ans dans un an. Pour autant, il s'agira certainement d'argent bon marché. Les prêts aux entreprises ont été accordés également à des taux très bas au cours des cinq dernières années.

Pour le secteur du tourisme, qui est plus particulièrement impacté, nous avons travaillé avec le Gouvernement et nous avons accepté le principe d'un moratoire de douze mois. Nous avons accepté également – mais le système doit être validé par Bruxelles – de mettre en place un PGE de saison. Davantage d'argent sera donc disponible pour les chefs d'entreprise concernés. En revanche, appliquer des horizons de sept ans pour la durée du prêt et de vingt-quatre mois pour le différé de remboursement serait dérogatoire et probablement interdit par Bruxelles.

Beaucoup d'épargne a été placée sur l'immobilier et sur la dette souveraine, épargne qui ne rapportera pas énormément. Saurons-nous construire un produit d'épargne finançant les entreprises de proximité, sans faire courir des risques trop importants ? Une incitation fiscale pourrait-elle être appropriée ? Je ne sais pas vous le dire.

Des prêts ont été refusés aux salariés travaillant dans des secteurs exposés. La question est de savoir si quelqu'un qui risque de perdre son emploi doit s'endetter. Notre responsabilité de banquier est d'éviter que les demandeurs prennent des risques inconsidérés.

Il est trop tôt pour identifier les conséquences de la crise sur le réseau bancaire français. Depuis deux jours, les clients se pressent aux guichets de la Société Générale. Je ne sais pas si ce sera toujours le cas dans trois mois. Nos clients se sont habitués aux canaux digitaux et nos propres salariés ont découvert le télétravail. Nous devrons réfléchir aux conclusions qui doivent être tirées. L'unité de l'entreprise et l'appartenance à une équipe sont importantes. Il faut prendre le temps de réfléchir à ce que seront les évolutions à long terme des clients et des collaborateurs, ainsi que leur impact sur le réseau des agences. Dans tous les cas, nous sommes attachés à notre ancrage dans les territoires.

Le secteur bancaire européen en général serait très sensible à des rumeurs de défaut de certains pays, comme en 2011. Je remercie la BCE, les banques centrales et la banque de France pour le travail qui a été conduit afin d'éviter le risque de contagion. Nous devons maintenir les efforts. En effet, suite à la crise, les divergences seront plus marquées en termes de performances économiques et de finances publiques. J'espère donc que le plan de relance sera l'expression d'une solidarité entre les pays européens. Il convient que la BCE maintienne des taux d'intérêt bas pour les États et les entreprises, même si ce n'est pas favorable pour les banques.

Enfin, nous sommes prêts à dialoguer sur le sujet des frais. Toutefois, le service bancaire a un coût, qui ne me semble pas si élevé au regard de ce qu'est le coût des services de téléphonie mobile par exemple.

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Nous vous remercions pour vos réponses très complètes et précises. Nous serons conduits à nous revoir au fur et à mesure des évolutions de la crise. Nous rendons hommage à tous les collaborateurs des établissements bancaires français.

Membres présents ou excusés

Commission des finances, de l'économie générale et du contrôle budgétaire

Réunion du jeudi 14 mai 2020 à 16 heures

Présents. - M. Julien Aubert, M. Jean-Louis Bricout, M. Fabrice Brun, M. Michel Castellani, M. Jean-René Cazeneuve, M. Philippe Chassaing, M. Éric Coquerel, M. Charles de Courson, Mme Marie-Christine Dalloz, M. Jean-Paul Dufrègne, Mme Sarah El Haïry, M. Nicolas Forissier, M. Patrick Hetzel, M. Christophe Jerretie, M. Daniel Labaronne, M. Mohamed Laqhila, M. Vincent Ledoux, M. Fabrice Le Vigoureux, Mme Véronique Louwagie, M. Jean‑Paul Mattei, Mme Cendra Motin, Mme Catherine Osson, M. Hervé Pellois, Mme Christine Pires Beaune, M. François Pupponi, Mme Valérie Rabault, M. Robin Reda, M. Xavier Roseren, Mme Claudia Rouaux, M. Laurent Saint-Martin, M. Jacques Savatier, Mme Marie-Christine Verdier-Jouclas, M. Éric Woerth

Excusés. - M. Damien Abad, M. Joël Giraud, M. David Habib, M. Marc Le Fur, M. Olivier Serva

Assistaient également à la réunion. - M. Éric Alauzet, Mme Danielle Brulebois, M. Alexis Corbière, M. Jacques Marilossian