La Commission du développement durable et de l'aménagement du territoire a présenté le rapport d'information sur la mise en application de la loi n° 2016-339 du 22 mars 2016 relative à la prévention et à la lutte contre les incivilités, contre les atteintes à la sécurité publique et contre les actes terroristes dans les transports collectifs de voyageurs (Mme Aude Luquet et M. Michel Vialay, rapporteurs).
L'ordre du jour de notre commission appelle maintenant la présentation du rapport d'information sur la mise en application de la loi du 22 mars 2016 relative à la prévention et à la lutte contre les incivilités, contre les atteintes à la sécurité publique et contre les actes terroristes dans les transports collectifs de voyageurs, dite « Loi Savary ».
Je vous rappelle que, le 26 juillet dernier, la Commission a désigné, conformément à l'article 145-7 du Règlement, Mme Aude Luquet, du groupe Modem, et M. Michel Vialay, du groupe LR, comme rapporteurs de ce bilan d'application.
La loi Savary comprenait deux sujets distincts : la sûreté et la sécurité, c'est-à-dire principalement la lutte contre le terrorisme ; la lutte contre la fraude.
L'exercice du bilan d'application permet, en premier lieu, de présenter les décrets pris en application de la loi depuis dix-huit mois. Au-delà de ce recensement, il s'agit de faire le point sur les objectifs poursuivis par la loi et de voir de quelle façon ils ont été atteints ou restent à atteindre.
Présentée par M. Gilles Savary et déposée sur le bureau de l'Assemblée nationale le 7 octobre 2015, la proposition de loi était conçue à l'origine pour lutter contre la fraude et la petite délinquance ainsi que les violences dans les transports en commun. Mais elle a finalement inclus un volet de lutte contre le terrorisme, en réaction à la tentative d'attentat perpétrée le 21 août de la même année dans un Thalys circulant entre Amsterdam et Paris.
La loi du 22 mars 2016 relative à la prévention et à la lutte contre les incivilités, contre les atteintes à la sécurité publique et contre les actes terroristes dans les transports collectifs de voyageurs, dite « loi Savary » qui abordait donc deux sujets distincts, la lutte contre le terrorisme et la lutte contre la fraude, a également été enrichie, au cours des débats, d'un titre relatif à la lutte contre les violences faites aux femmes dans les transports.
Le présent rapport vise à établir un bilan de la publication des textes réglementaires prévus et à dresser une première évaluation des mesures adoptées, lorsque celle-ci est possible à ce stade. Il apparaît, en effet, que certaines dispositions ne sont entrées en vigueur qu'à des dates relativement récentes et que les retours d'expérience fiables ne sont pas encore disponibles.
Il apparaît également que certaines dispositions, ne nécessitant pourtant pas de décret d'application, comme celle concernant la communication des informations relatives au permis de conduire des chauffeurs de transport en commun, n'ont pas toutes été mises en oeuvre.
Le constat commun qui se dégage des travaux que les rapporteurs ont conduits est, d'une part, que la quasi-totalité des textes réglementaires prévus ont été publiés et, d'autre part, que ceux-ci traduisent de manière satisfaisante les intentions ayant présidé à la rédaction de cette loi. En cela, vos rapporteurs ne peuvent que saluer le travail du gouvernement pour assurer dans des délais globalement satisfaisants l'application d'un texte dense et complexe.
La loi a élargi les possibilités de réaliser des palpations de sécurité par les services de sécurité internes des entreprises de transport (essentiellement la Suge à la SNCF et le GPSR à la RATP) ; elle a rendu possible les interdictions d'accéder aux trains dans certains cas. Ces mesures sont entrées en application, mais les agents des services de sécurité internes des transporteurs regrettent les circonstances très strictes qui encadrent les palpations de sécurité et qui leur interdisent, sauf circonstances très exceptionnelles, de fouiller la plupart des suspects. En effet, une autorisation préalable du préfet, qui détermine précisément les lieux et les horaires, est requise. Et il est arrivé que ces agents conduisent au commissariat des délinquants et qu'il soit constaté, au moment de la fouille par la police, que les suspects étaient armés.
La loi permet le criblage des personnels nouvellement engagés, comme de ceux déjà en place, ce qui constitue l'avancée la plus spectaculaire. Mais le nombre de postes concernés apparaît un peu restrictif. Cela concerne principalement les aiguilleurs ; peut-être faudrait-il élargir aux agents de maintenance ? Le débat est ouvert.
La loi introduit l'usage de « caméras piéton » par la Suge et le GPSR. Cette mesure a été saluée par tous, même si certains détails restent à peaufiner comme la durée de conservation des images ou la possibilité de transmission en direct. Il est aussi possible d'envisager l'extension de cet usage aux contrôleurs.
L'élargissement des possibilités pour la Suge ou le GPSR d'agir en civil armé (sur autorisation préalable du préfet) a été salué comme une avancée. Toutefois, cette autorisation préalable est vécue comme une lourdeur administrative qui pourrait avantageusement être remplacée par une simple déclaration préalable, le préfet pouvant toujours refuser ou interrompre une opération en civil.
L'une des dispositions de l'article 7 de la loi a pour objectif d'améliorer l'information des entreprises de transport en permettant aux employeurs d'avoir accès aux éléments relatifs au permis de conduire de ceux de leurs personnels qui sont amenés à conduire des véhicules. En effet, jusqu'à l'adoption de la loi Savary, le code de la route autorisait une municipalité à connaître l'état du permis de conduire d'une personne à qui elle s'apprêtait à confier le volant d'un car de ramassage scolaire, mais une entreprise comme la SNCF ou la RATP ne le pouvait pas.
Or, cette mesure n'est pas entrée en application. Le fichier informatique nécessaire à sa mise en oeuvre n'a pas été créé en raison, semble-t-il, de la vive opposition des syndicats. L'ensemble des organisations de transporteurs déplore cette situation.
Nous regrettons que la volonté du législateur soit ainsi ignorée alors que cette mesure avait fait l'objet d'un consensus. Sur les 17 000 conducteurs d'autobus ou d'autocars employés en France, 15 à 20 sont repérés chaque année comme ayant perdu leur permis de conduire sans en avoir informé leur employeur.
Le jour ou un accident grave se produira avec un chauffeur de transport en commun circulant sans permis, la responsabilité de l'État, qui n'a pas mis en oeuvre cette disposition votée par le Parlement, pourrait être engagée.
Enfin, les responsables de la RATP pointent une vulnérabilité de plus en plus manifeste de la sécurité de leur entreprise liée à la présence d'environ 350 personnes sans domicile fixe qui se laissent enfermer dans les stations la nuit lorsque le trafic s'arrête et que les installations sont laissées sans surveillance entre 1 heure et 5 heures du matin.
Ces personnes ont accès à tous les locaux de sécurité et se déplacent librement. L'alimentation des rails n'étant pas coupée la nuit, les accidents sont fréquents. En outre, livrées à elles-mêmes, elles sont parfois victimes de vols, de rixes, de malaises et il arrive de constater des décès à l'ouverture des stations.
L'entreprise demande que lui soit accordée la possibilité de reconduire à la sortie des stations les seules personnes qui refuseraient d'être prises en charge et conduites vers des centres d'accueil. De la sorte, seuls les réfractaires pourraient être expulsés des stations pendant les quatre heures de fermeture nocturne.
Cette mesure ne serait pas applicable lorsque les autorités mettent en oeuvre le plan « Grand froid ».
En matière de lutte contre les atteintes graves à la sécurité, les préconisations sont les suivantes :
– permettre aux services de sécurité internes des transporteurs de procéder à des palpations de sécurité, même sans le consentement exprès des intéressés, en cas de circonstances particulières liées à l'existence de menaces graves pour la sécurité publique ou pour l'ordre public. Sur cette proposition, une divergence existe avec Aude Luquet quant au consentement des intéressés. Toutes les autres préconisations font l'objet d'un consensus ;
– en matière de fouille et de contrôle, confier à la préfecture de la région Île-de-France ou à la préfecture de police de Paris une compétence globale pour l'ensemble de la RATP et du réseau SNCF d'Île-de-France ;
– permettre aux services de sécurité internes des transporteurs de procéder de manière permanente à des palpations de sécurité dans les enceintes publiques des transports qui relèvent de leur compétence sans autorisation préalable des services préfectoraux ;
– permettre aux contrôleurs d'utiliser des « caméras piétons » lorsque la situation l'exige, à l'instar de ce que la loi autorise pour les agents des services interne de sécurité (Suge et GPSR) ;
– remplacer la demande d'autorisation à agir en civil par une simple déclaration, le ministère de l'intérieur conservant toujours la possibilité de refuser une action civile de manière expresse ;
– étendre le criblage au personnel d'entretien et au personnel intérimaire n'appartenant pas aux transporteurs ;
– réduire à deux mois le délai de réponse du Service national des enquêtes administratives de sécurité (SNEAS) aux demandes d'enquêtes administratives ;
– permettre aux entreprises de transport de saisir le SNEAS en lieu et place de leurs filiales pour des raisons d'efficacité administrative ;
– obliger le SNEAS à informer les salariés faisant l'objet d'un avis d'incompatibilité professionnelle ;
– permettre à titre exceptionnel de licencier sans l'avis de l'inspection du travail les salariés protégés faisant l'objet d'un avis d'incompatibilité ;
– mettre en oeuvre la disposition qui permet aux sociétés de transports en commun de connaître l'état du permis de conduire des salariés à qui elles confient un véhicule ;
– aligner les services internes de sécurité de la Suge et du GPSR sur les règles de la police nationale et des polices municipales en matière de légitime défense élargie et de périple meurtrier ;
– permettre à la RATP et à la SNCF de reconduire à la sortie des stations de métro et de RER à la fin de chaque service les personnes réfractaires à une prise en charge vers des centres d'accueil.
J'en viens maintenant au sujet de la lutte contre la fraude. La fraude mesurée représente 500 millions d'euros par an en France. Ce chiffre ne prend pas en compte les fraudes non détectées. La réalité de la fraude est donc largement supérieure à ce chiffre. Le taux de recouvrement des amendes est très faible, inférieur à 10 % à la SNCF.
Les décrets d'application de la loi sont sortis assez rapidement, sauf celui présenté comme le plus important : il doit permettre de croiser les fichiers de fraudeurs avec ceux d'autres administrations de manière à sécuriser les adresses et ne pas perdre la trace des personnes verbalisées.
Pour la « fraude d'habitude », le seuil a été abaissé de 10 à 5 infractions sur l'ensemble des réseaux. Mais en l'absence d'échange d'informations entre les exploitants, les fraudeurs par habitude sont, en pratique, ceux qui ont fraudé au moins 5 fois sur le même réseau. Le seul moyen de respecter la loi à la lettre serait de constituer un fichier commun des fraudeurs.
Toutefois, l'engorgement des tribunaux ne permet pas à la justice de traiter les dépôts de plaintes des transporteurs. C'est la raison pour laquelle la RATP a renoncé à poursuivre les fraudeurs d'habitude, estimant qu'elle perdait son temps. La SNCF, de son côté, continue à les poursuivre, au rythme d'environ 14 000 par an, avec des succès mitigés selon les juridictions.
La mesure obligeant les fraudeurs à rester à disposition des services de sécurité pendant la vérification de leur identité semble efficace, d'autant qu'elle est assortie d'une sanction financière dissuasive et il s'agit, aux dires des spécialistes, d'une avancée décisive de la loi.
En revanche, l'obligation faite aux fraudeurs d'être munis d'un titre d'identité de manière à être plus facilement sanctionnés est beaucoup moins respectée, d'autant qu'elle n'est assortie d'aucune sanction. Les rapporteurs proposent que l'obligation d'être muni d'un titre d'identité soit étendue à tous les usagers des transports en commun terrestres et propose, dans l'attente qu'une telle mesure soit adoptée sur le plan législatif, que les transporteurs incluent une telle obligation dans leurs conditions générales d'utilisation, à l'instar de ce qui se fait dans le transport aérien.
Enfin, la loi a permis de mieux lutter contre « l'industrie de la fraude » en réprimant plus sévèrement les mutuelles de fraudeurs et les alertes par SMS ou sur les réseaux sociaux en cas de contrôle.
Mais l'une des principales difficultés à laquelle se heurtent les transporteurs pour recouvrer les amendes est celle de fiabiliser les adresses des contrevenants. C'est pourquoi l'article 18 de la loi prévoit la création d'une plateforme d'échange qui doit permettre de confronter l'adresse déclarée par le contrevenant lors de la verbalisation avec celle qu'il a déclarée pour créer un compte bancaire ou percevoir les allocations familiales et qui est, très probablement, plus à jour.
Toutefois, près de deux ans après la promulgation de la loi, le décret d'application de l'article 18, qui doit être signé par le ministre de l'économie et des finances, n'a toujours pas été publié.
L'administration évoque des difficultés techniques et juridiques qui expliqueraient le retard.
Mais les fichiers publics ne sont pas les seuls à pouvoir être utilisés par les transporteurs pour fiabiliser les adresses des contrevenants. Des fichiers constitués par des entreprises privées peuvent aussi l'être. Et si, dans le premier cas, une disposition législative et un décret sont nécessaires, seule une autorisation de la CNIL est requise dans le second.
La CNIL a autorisé, le 9 juin 2016, la SNCF à utiliser les fichiers de sociétés qui font commerce de données personnelles dans le cadre d'actions « ayant pour finalité la gestion des infractions à la police des chemins de fer ».
Dès lors, rien ne s'oppose à ce que le transporteur ferroviaire national fiabilise les coordonnées de ses fraudeurs grâce aux fichiers de géants de la distribution par internet ou de sociétés spécialisées.
Même si elle reste discrète sur ses partenariats, la SNCF a reconnu travailler, comme d'autres, en coopération avec certaines sociétés spécialisées dans la fourniture de données personnelles à grande échelle.
En matière de lutte contre la fraude, les préconisations sont les suivantes :
– prévoir une sanction en cas de fuite d'un contrevenant postérieurement à l'ordre donné par l'OPJ de le retenir (actuellement, la loi ne prévoit de sanction que pour ceux qui prennent la fuite avant que l'OPJ soit prévenu) ;
– demander au ministre de l'intérieur d'adresser une directive aux OPJ pour les inciter à émettre un avis favorable au relevé d'identité chaque fois qu'un équipage de police ou de gendarmerie est envoyé sur place ;
– créer un fichier de fraudeurs commun à l'ensemble des transporteurs publics de manière à mieux réprimer la fraude d'habitude qui, conformément à la loi, doit être regardée d'une manière globale et non par entreprise ;
– autoriser les entreprises de transport à remettre les saisies réalisées dans le cadre de la lutte contre la vente à la sauvette aux forces de police ou de gendarmerie dans le but de les placer sous main de justice ;
– permettre aux entreprises liées par un accord de sous-traitance d'organiser, à leur convenance, des missions de contrôle sur les emprises ou dans les véhicules de leur partenaire ;
– demander au garde des Sceaux d'adresser à l'ensemble des magistrats une directive pénale les incitant à utiliser davantage l'interdiction de paraître dans des gares ou sur des lignes à l'encontre des délinquants récidivistes qui ont l'habitude d'y sévir ;
– étendre l'obligation d'être porteur d'un titre d'identité à l'ensemble des usagers des transports en commun publics et assortir cette obligation d'une sanction ;
– réduire la liste, jugée trop large, des documents susceptibles d'établir l'identité d'un contrevenant ;
– dans l'attente d'une disposition législative obligeant les usagers des transports en commun publics à être porteurs d'un titre d'identité, inciter les transporteurs à inclure une telle obligation dans leurs conditions générales d'utilisation ;
– demander au gouvernement d'accélérer la mise en oeuvre de la plateforme destinée à permettre le croisement des données de manière à fiabiliser les adresses des fraudeurs ;
– porter de deux à trois mois le délai pendant lequel les transporteurs peuvent recouvrer le montant des amendes avant que le Trésor public ne devienne compétent ;
– réfléchir à la possibilité de modifier l'ordonnance du 2 février 1945 relative à l'enfance délinquante de manière à rendre à nouveau les parents solidaires de leurs enfants en cas de fraude dans les transports.
Bien que cette préconisation figure dans notre rapport, j'émets quelques réserves quant à sa constitutionnalité au regard des grands principes de notre droit pénal.
J'y suis pour ma part favorable, afin d'éviter que ne se propage un sentiment d'impunité déjà très développé chez les plus jeunes.
La dernière préconisation en matière de lutte contre la fraude consiste à conditionner la remise d'un certain nombre d'actes administratifs, notamment les visas, à l'apurement des dettes en matière de fraude aux transports en commun publics.
Le troisième et dernier titre de la loi Savary résulte de l'initiative parlementaire de notre collègue, alors députée de Seine-Maritime, et porte sur la lutte contre les violences faites aux femmes dans les transports.
Le sentiment d'insécurité dans les transports en commun est particulièrement fort pour leurs usagères. Ce ressenti ne correspond pas toujours à une insécurité avérée, et n'est pas uniquement lié à des comportements d'individus agressifs : il peut tout aussi bien être causé par un éclairage insuffisant, par un mauvais entretien des infrastructures ou par l'absence de personnels de l'opérateur de transport dans une gare.
Bien que les femmes soient, statistiquement, moins victimes d'atteintes à l'intégrité physique que les hommes, l'insécurité qu'elles ressentent dans les transports est nettement plus élevée que chez les hommes. Lorsque prendre les transports en commun devient une situation anxiogène à part entière, ce sont souvent les femmes qui sont affectées et les comportements agressifs ou intrusifs sont devenus banals : comme l'a souligné l'un des représentants de la RATP que nous avons auditionnés, les violences visant les femmes « ont toujours existé » dans les transports, et une certaine « tolérance sociale » de ces comportements s'est durablement installée, même si elle commence à se réduire.
Le dispositif de l'article 22 de la loi n'est guère ambitieux. Il se borne à prévoir un bilan annuel sur les atteintes à caractère sexiste dans les transports publics collectifs de voyageurs, transmis à trois instances consultatives : le Défenseur des droits, l'Observatoire national des violences faites aux femmes et le Haut Conseil à l'égalité hommes-femmes.
De manière plus opérationnelle, l'article 22 oblige par ailleurs la SNCF et la RATP à faire de la prévention des violences et atteintes sexistes un « axe prioritaire » de la formation de leurs agents de sécurité.
Nous avons constaté que la SNCF comme la RATP ont effectivement mis en oeuvre cette seconde disposition, en intégrant des modules spécifiques dans la formation initiale et dans la formation continue des personnels de la Suge et du GPSR. Mais ce n'est pas suffisant : d'une part, il faudrait étendre cette formation à d'autres personnels – probablement à tous les agents qui sont en contact direct avec la clientèle – et d'autre part, il faudrait que tous les opérateurs de transport aient cette obligation, et pas seulement la SNCF et la RATP.
S'agissant des bilans annuels, ils sont restés « lettre morte » car la loi ne précise pas qui a la responsabilité de les établir – même si l'article concerné du code des transports vise précisément les autorités organisatrices de transport. Par ailleurs, le texte ne prévoit pas de transmission des bilans aux services de l'État, et omet de prévoir que les services destinataires devront les publier ou en publier une synthèse.
La loi est donc largement perfectible sur tous ces points.
Fort heureusement, les acteurs de terrain n'ont pas attendu une nouvelle intervention du législateur pour agir : dans plusieurs agglomérations, par exemple, les conducteurs des autobus de nuit pratiquent l'arrêt à la demande, entre deux arrêts, pour que des usagers – et surtout des usagères – aient moins de chemin à faire à pied pour atteindre leur domicile en soirée. Les « marches exploratoires », souvent organisées en partenariat entre la SNCF, les communes et les associations, permettent d'identifier des lieux et des facteurs propices aux violences ou perçus comme tels.
Nous nous réjouissons tout de même qu'un prochain projet de loi nous permette, au printemps, de traiter la question des atteintes et violences sexistes de manière globale, le harcèlement dans les transports étant souvent précédé ou suivi d'un harcèlement de rue.
En matière de lutte contre les violences faites aux femmes, les préconisations de la mission sont les suivantes :
– établir clairement l'obligation, pour chaque autorité organisatrice de transports, de rédiger et de transmettre le bilan annuel prévu par la « loi Savary » ;
– demander au Groupement des autorités responsables de transport (GART) de distinguer, dans ses statistiques relatives aux incidents et agressions, ceux relevant de la catégorie des atteintes sexuelles ;
– compléter les éléments juridiques et méthodologiques inclus dans les modules de formation par une sensibilisation des agents à la nécessité de réserver aux victimes un accueil bienveillant et une écoute attentive et étendre cette obligation de formation à tous les opérateurs de transport et à tous leurs personnels ;
– généraliser le dispositif d'arrêt à la demande sur les lignes de bus en soirée.
Au nom du groupe La République en Marche, je vous remercie pour la qualité de votre rapport. En ce qui concerne le contrôle, vous avez fait un excellent travail et des pistes très intéressantes ont été avancées pour appliquer un certain nombre de dispositifs d'ordre réglementaire qui n'ont pas été mis en oeuvre à ce jour.
Je souhaite vous interroger sur le dispositif de lutte contre les violences faites aux femmes dans les transports. Un certain nombre de choses ne sont pas encore faites. Les autorités organisatrices de transport respectent-elles les nouvelles obligations qui s'imposent à elles ? Font-elles effectivement le bilan des atteintes à caractère sexiste relevées dans les transports publics ? De quel ordre sont les mesures qu'elles mènent ? Vous avez souligné que les bilans n'étaient pas demandés ou fournis. Que pourriez-vous recommander pour les exiger, étant donné qu'il est très important que le Défenseur des droits, l'Observatoire national des violences faites aux femmes et le Haut conseil à l'égalité entre les femmes et les hommes disposent de ces informations, et que les conclusions soient rendues publiques ?
Par ailleurs, je tiens à indiquer que votre proposition relative à l'arrêt à la demande est en cohérence avec les demandes, remontant fréquemment du terrain, qui ont été constatées dans le cadre des ateliers sur la loi sur les mobilités. Il faudrait que cette possibilité ne soit pas mise en oeuvre qu'en soirée, mais aussi la nuit et le matin très tôt, voire même plus largement.
En ce qui concerne la possibilité pour les transporteurs de demander des enquêtes administratives sur les personnes recrutées ou affectées à des postes liés à la sécurité des personnes, les entreprises font-elles usage de cette possibilité ? Sait-on si ces enquêtes ont permis d'écarter certaines personnes potentiellement à risque de ces postes ?
Au nom du groupe Les Républicains, je vous félicite pour la qualité de vos travaux. Si des améliorations ont pu être apportées avec l'adoption de la loi « Savary », l'absence de mise en oeuvre de certaines mesures réglementaires rend inopérante son application. Avez-vous pu, dans le cadre de vos travaux, obtenir des précisions sur ce sujet ?
La question de la sécurité dans les transports est un enjeu important : une étude réalisée par BVA en janvier dernier intitulée « Les Français et les transports » révèle que près d'un utilisateur de transports en commun sur deux – 47 % exactement – exprime un sentiment d'insécurité, sentiment qui est particulièrement ressenti par les jeunes de 25 à 34 ans – 55 % d'entre eux se sentent en insécurité – et les femmes – 53 % d'entre elles se sentent en insécurité. Avez-vous pu constater des améliorations en la matière, cette étude révélant plus un sentiment que la réalité quotidienne à laquelle sont confrontés les usagers ?
Par ailleurs, la loi prévoit un dispositif d'échange et de coordination entre les exploitants des transports publics et l'administration pour faciliter la recherche des adresses communiquées par les contrevenants et améliorer le recouvrement des amendes infligées. Pouvez-vous nous indiquer si ce dispositif fonctionne correctement et, si ce n'est pas le cas, quels sont les obstacles qui doivent être levés ?
Enfin, parmi les dispositions du titre sur les violences faites aux femmes qui a été ajouté au texte par l'Assemblée en première lecture, figurait la rédaction d'un compte rendu par les exploitants de transports des mesures et actions mises en oeuvre pour lutter contre les actes de violence et de harcèlement à caractère sexiste à l'encontre des usagers et des personnels féminins. Pouvez-vous nous indiquer si ces dispositions ont bien été mises en oeuvre et nous donner des exemples de mesures adoptées pour protéger les femmes – usagères comme agentes – des violences dont elles peuvent être victimes dans les transports ?
Au nom du groupe MODEM et apparentés, je voudrais saluer le travail de nos collègues. Malgré les nombreuses actions entreprises conjointement par les autorités organisatrices de transports et les exploitants – mise en place de portillons, définition de points prioritaires de contrôle, campagnes de communication auprès des usagers – le cadre juridique antérieur ne permettait pas de garantir pleinement la sécurité ni de lutter efficacement contre la fraude. La refonte du cadre juridique opérée par la loi « Savary » de 2016 avait pour objectif de permettre aux différents acteurs de disposer d'outils efficaces, de garantir la sécurité des voyageurs, d'assurer la qualité du service rendu aux usagers et de lutter efficacement contre le manque à gagner généré par la fraude. Les conclusions de votre rapport sur la mise en oeuvre de la loi nous permettent d'affirmer que les attentes des autorités organisatrices de transports et des exploitants ont trouvé une réalisation concrète grâce à la mobilisation de l'ensemble des acteurs concernés et à la publication rapide des décrets nécessaires à la mise en oeuvre de la loi.
Cependant, si la loi « Savary » a renforcé les moyens des acteurs du secteur des transports, des améliorations sont encore possibles. Celles qui relèvent du législatif pourraient trouver leur place dans la discussion qui s'ouvrira bientôt au Parlement sur le projet de loi sur les mobilités que Mme la ministre présentera d'ici quelques semaines en Conseil des ministres.
Il serait intéressant d'approfondir nos réflexions sur la mise en place de deux outils que présente le rapport. Le premier est la création d'un concentrateur qui aurait pour mission de confronter l'adresse déclarée par un contrevenant lors de la verbalisation avec celle déclarée à l'administration fiscale. Dans l'attente du décret d'application de l'article 18 de la loi, les transporteurs se sont d'ores et déjà saisis de ce sujet de première importance. Toutefois des questions relatives au traitement des données personnelles se posent. Des problématiques similaires ont également émergé au sujet de la création du second outil, le fichier global des fraudeurs. À la lecture du rapport, il ressort que l'État, les autorités organisatrices de transports et les transporteurs sont favorables à la mise en place de ces deux dispositifs mais que l'absence de certaines garanties entourant l'accès aux données personnelles et leur utilisation freine leur mise en oeuvre concrète. À cet égard, la loi d'orientation des mobilités sera peut-être l'occasion de s'interroger sur la pertinence d'une nouvelle transformation de l'Autorité de régulation des activités ferroviaires et routières (ARAFER). Nous pourrions imaginer que l'ARAFER devienne l'autorité de régulation des transports en la dotant de nouvelles attributions ; elle serait alors l'entité la mieux placée pour contrôler ce concentrateur et garantir une gestion et une utilisation impartiale et efficace du fichier global des fraudeurs – à condition que ces nouvelles missions s'accompagnent des moyens nécessaires à leur bonne réalisation.
Comme mes collègues, au nom du groupe UDI-Agir et Indépendants, je voudrais d'abord remercier les rapporteurs pour la qualité de leur travail. La loi « Savary » avait initialement pour but de lutter contre la fraude. Suite à l'attentat manqué sur la LGV Nord dans un Thalys, elle avait été élargie à la lutte contre les actes terroristes dans les transports. La sécurité dans les transports publics est un impératif – pas seulement dans les métropoles. Il faut non seulement lutter contre le risque terroriste mais aussi contre les incivilités, le harcèlement et les agressions qui sont malheureusement le lot quotidien sur certaines lignes. L'inspection et la fouille des bagages, le renforcement des contrôles en civil, la généralisation des caméras-piéton ou l'instauration d'enquêtes administratives en amont du recrutement ou de l'affectation des personnes au sein des sociétés de transport sont des mesures qui sont positives à nos yeux. J'espère que leur application le confirme.
Comme l'avait dit notre collègue Stéphane Demilly à l'époque, il aurait été utile d'aller plus loin en ce qui concerne la lutte contre les violences à caractère sexiste. De la même manière, la génération de la vidéosurveillance fixe devrait être privilégiée – ne serait-ce que comme un outil de dissuasion contre les contrevenants. J'aimerais avoir votre analyse sur cette question.
Cette loi avait aussi pour but de renforcer l'exemplarité des voyageurs. Mais il faudrait également que cette exemplarité fonctionne dans le sens inverse ! Les incivilités et la fraude aux titres de transport doivent être combattues mais, pour faire le lien avec l'audition de MM. Guillaume Pepy et Patrick Jeantet, je tiens à rappeler qu'il faut que les voyageurs honnêtes qui payent leur billet ou leur ticket bénéficient en retour d'un service client et d'une information satisfaisants. Il faut également que les dédommagements en cas de retard ou d'annulation deviennent un réflexe. Ceci est d'autant plus nécessaire que, pour les ménages qui utilisent les transports ferroviaires quotidiennement, le coût des transports est un poste de dépenses non négligeable. Cela ne relève bien entendu pas de la loi mais je tenais à rappeler que sécurité et efficacité doivent aller de pair, pour que notre réseau de transport soit performant et satisfaisant pour tous les usagers.
Cela m'amène à ma dernière question : cette loi ayant élargi les prérogatives des agents de la SNCF, faudra-t-il la revoir lorsque, dans quelques mois, nous voterons les conditions de l'ouverture à la concurrence ?
Avant de commencer je voudrais revenir sur le tumulte provoqué par mes collègues de droite au cours de mon intervention lors de l'audition précédente. Comme certains d'entre eux revendiquent le nom de « républicains », je souhaiterais leur rappeler que ma parole et mon analyse ont la même valeur que la leur. Si, dans ces murs, l'objectif est de perturber les interventions des uns et des autres, je tiens à leur indiquer que je possède un certain talent en la matière et qu'ils pourraient être surpris de ma réaction. Enfin, madame la Présidente, je vous remercie d'avoir rappelé qu'ici la parole est libre et que chacun peut s'exprimer.
Ceci étant dit, je vais revenir au sujet de la fraude dans les transports en commun. À l'échelle nationale, son coût est estimé à 500 millions d'euros par an. D'après vos chiffres, les 1 300 agents de la RATP ont relevé en 2016 un total de 1,4 million d'infractions. Ce chiffre est en baisse de 1,4 % par rapport à 2015 mais la RATP attribue cette baisse à une moindre disponibilité de ses agents pour les missions que le contrôle – d'autant que le Parquet n'a pas les moyens de traiter les dossiers d'une manière assez rapide. Dans cette entreprise, l'action contre la fraude permet chaque année le recouvrement de 30 millions d'euros. Or, en même temps, ce recouvrement coûte 150 millions d'euros. Ne verse-t-on pas dans l'absurde au vu de ces chiffres ?
Depuis le 1er septembre 2017, les bus sont gratuits à Niort pour les usagers, gratuité qui est financée par les taxes payées par les entreprises. Plus de contrôle pour les 120 000 habitants de l'agglomération ! La mairie a pris cette décision après avoir constaté que les transports collectifs n'étaient pas pleins et que les recettes de billetterie ne représentaient que 10 % du coût du réseau. Niort rejoint donc la vingtaine de villes où ce type de politique a été mis en place.
À Dunkerque, selon le maire, depuis la mise en place de la gratuité le week-end, les incivilités ont baissé de 60 % et la fréquentation a augmenté de 29 % le samedi et de 78 % le dimanche. Le surcoût pour budget est de 4,5 millions d'euros – ce qui correspond aux recettes de billetterie.
Pourquoi ne pas considérer aujourd'hui les usagers des transports comme des citoyens qui, en changeant leurs modes de transport, apportent des bénéfices à tous, notamment parce qu'en abandonnant leurs véhicules ils contribuent à l'amélioration de la qualité de l'air ? Un rapport récent du Sénat a d'ailleurs estimé ce coût en termes de santé pour la communauté nationale à un montant d'environ 1 000 milliards d'euros.
La loi « Savary » a acté que les autorités devront établir un bilan annuel des atteintes à caractère sexiste relevées dans les transports publics et présenter les actions réalisées pour lutter contre elles. Elles doivent le transmettre au Défenseur des droits, à l'Observatoire national des violences faites aux femmes et au Haut conseil à l'égalité entre les femmes et les hommes. Des engagements ont également été pris dans le cadre du plan national contre le harcèlement sexiste et les violences sexuelles de juillet 2015. Mais je ne vois aucun bilan à l'horizon et la loi ne prévoit la transmission de ce bilan ni au ministère de l'intérieur, ni au ministère des transports, ce qui empêche d'établir des statistiques au niveau national.
D'après l'Observatoire national de la délinquance et des réponses pénales, on a répertorié en deux ans au moins 267 000 personnes majeures qui ont été victimes. 85 % d'entre elles sont des femmes. 80 % des victimes déclarent avoir subi plusieurs actes. Plus d'une femme victime sur deux est francilienne. Plutôt que de mobiliser des agents pour mettre des amendes, pourquoi ne pas renforcer les effectifs de surveillance et de protection ?
Les nouveaux trains sont désormais dotés du système « équipement agent seul », c'est-à-dire circulent, en Île-de-France comme dans les autres régions, avec comme seul agent présent à bord le conducteur. Des brigades anti-fraude sont chargées du contrôle des titres de transport, mais n'interviennent que ponctuellement et sur certains tronçons. Sur la ligne 4 que nombre d'administrés de ma circonscription empruntent, on peut ainsi circuler pendant 50 minutes entre deux arrêts en étant seul à bord. Les réseaux de téléphonie mobile ne fonctionnent que de manière intermittente à bord de ces trains, certains passagers ne sont d'ailleurs pas équipés de téléphones mobiles.
Dans nos territoires, la présence d'agents à bord est indispensable, d'autant qu'ils assurent de multiples missions : ils renseignent les passagers, aident les voyageurs en difficulté et les personnes à mobilité réduite, informent en cas de perturbations et, bien souvent, assurent la vente de titres de transport. Ils sécurisent également les trains et rassurent les voyageurs en cas de retard, en anticipant la continuité des correspondances. Il arrive, de plus, que certains voyageurs n'aient pas pu acheter leur billet en gare, pour cause de guichet fermé. Le train sans contrôleur est-il amené à se généraliser dans les zones peu denses ? Comment rassurer les voyageurs qui empruntent ces lignes sans contrôleurs ? Quel est le protocole prévu en cas d'accident ou d'incident ? Quelle couverture en assurance peut-on garantir aux passagers ayant été dans l'incapacité d'obtenir un billet ?
Merci aux rapporteurs pour leur travail sur la « loi Savary », travail qui tombe à pic dans la perspective de la loi d'orientation sur les mobilités, sur laquelle nous travaillons. Au-delà des chiffres fournis concernant la fraude, on voit bien que la tâche reste immense. On peut constater les nombreux dysfonctionnements de portillons dans les gares.
S'agissant de la lutte contre les violences faites aux femmes dans les transports, je rejoins Mme Maillart-Méhaignerie pour considérer qu'il est urgent de disposer des bilans prévus et que l'on ne peut pas transiger sur ce point. Au-delà, il faut renforcer les dispositifs d'alerte et les rendre plus visibles. Cette question devra être traitée dans le cadre de la loi d'orientation.
Parmi les nombreux projets d'attentats qui ont pu être déjoués, combien l'ont été grâce à cette loi ?
S'agissant des violences faites aux femmes, Madame la rapporteure a parlé de « situation anxiogène » : il faut souligner que le sentiment d'insécurité est dû au harcèlement subi, car il y a un vrai harcèlement. En Île-de-France, 100 % des usagères ont été victimes de harcèlement au moins une fois. Il n'y a pas qu'un problème de ressenti, les faits sont avérés. L'une des solutions serait peut-être de mener davantage d'actions de communication sur ces violences dans les établissements scolaires et dans les entreprises. Il faudrait également développer les espaces d'information destinés aux femmes dans les infrastructures de transports en commun – pourquoi pas des « kiosques », notamment dans le métro – et des numéros d'appel d'urgence, affichés dans les bus et les métros, pour une réactivité immédiate.
S'agissant de l'accueil réservé à cette loi par les transporteurs et les usagers, la loi répond-elle aux attentes ? Les transporteurs font-ils usage de toutes les possibilités que la loi leur offre ? Ont-ils des revendications supplémentaires ? Comment les usagers perçoivent-ils les différents dispositifs mis en place, notamment les interventions en civil et les caméras de sécurité ?
La thématique des violences faites aux femmes a suscité de multiples questions. L'obligation définie à l'article 22 de la loi Savary d'établir un bilan de ces violences n'est toujours pas mise en oeuvre aujourd'hui, même si l'article L. 1632-1 du code des transports prévoit qu'elle relève de la responsabilité des autorités organisatrices de transports (AOT). Il est indispensable que la Représentation nationale veille à son application, éventuellement avant la prochaine loi d'orientation, car aucune statistique n'a encore été transmise. Sinon, comment répondre concrètement aux différentes situations ?
Ces violences recouvrent des cas de harcèlements, de sentiment d'insécurité… Il existe déjà un numéro d'appel et une application proposés par la SNCF, le 3117, que l'on peut activer lorsque l'on se retrouve seul dans un train – sauf, évidemment, quand le réseau est insuffisant.
Quoi qu'il en soit, il importe que l'on obtienne un premier bilan, au moins d'une AOT, pour aller au-delà des constats et proposer des actions. Notre rapport recommande notamment des actions de formation des conducteurs et de tous les personnels travaillant à la réception des clients.
La vidéosurveillance est aussi très développée, même si nous n'en avons pas la mesure précise. En visitant le Pôle Sécurité de la gare du Nord, nous avons pu en constater par nous-même l'ampleur : toutes les gares sont surveillées, avec 40 000 caméras, 10 000 sur les quais de métro. Ce n'est pas suffisant pour évacuer le sentiment d'insécurité, mais sachons que nous ne sommes pas seuls sur les quais ou dans les trains.
Une des difficultés pour mesurer les actes de violence subis par les femmes est que plusieurs acteurs disposent de données mais ignorent à qui les transmettre. Il est actuellement impossible d'obtenir une cohérence globale. D'où notre recommandation d'adresser l'ensemble de ces statistiques au ministère pour qu'il puisse les traiter et publier un rapport sur les violences faites aux femmes et les « contextes spécifiques aux atteintes sexuelles ».
Nous avons également demandé qu'un bilan des formations réalisées soit établi pour connaître les effectifs des collaborateurs qui les auront suivies, et que ces formations soient prévues dans les parcours d'intégration de tous les personnels qui pourraient être confrontés à des victimes de violences – qu'il s'agisse de femmes ou d'hommes – de façon à leur assurer un accueil bienveillant. Aujourd'hui, seuls les membres des services de sécurité bénéficient de ces formations.
Pour répondre à Mme Laurence Maillart-Méhaignerie, la RATP a indiqué avoir demandé 659 enquêtes de criblage ; 309 dossiers ont été traités et 20 avis d'incompatibilité ont été rendus. La SNCF n'a pas donné de chiffres. Mais une fois que l'enquête administrative a conclu à une incompatibilité, il est très compliqué de licencier un employé. Selon des règles proches de la fonction publique, un reclassement doit d'abord être étudié ; un licenciement n'intervient que si ce reclassement ne peut se faire. Nous pensons que le reclassement n'est pas la meilleure solution lorsqu'une incompatibilité est prononcée pour une raison de sécurité – c'est l'objet d'une de nos préconisations.
Nous observons aussi que ce « criblage » ne concerne pas tous les personnels. N'y sont pas soumis les prestataires de service, comme ceux qui font le ménage des équipements. Or, leurs interventions dans les transports, souvent seuls, présentent un risque fort. Aussi recommandons-nous un élargissement du « criblage » à ces divers personnels.
On peut se référer au travail qui a été fait auprès de tous les personnels de l'Éducation nationale sur les atteintes aux droits des enfants et à leur intégrité. C'est un problème extrêmement sérieux que la Représentation nationale se doit de porter et de défendre auprès des services de l'État.
Concernant les pédagogies pouvant être dispensées, nous ne sommes pas allés au-delà du périmètre délimité par la loi Savary et de la vérification de ses effets. Il y a forcément des actions d'éducation très importantes qui doivent être menées dans d'autres domaines.
Concernant la mise en place d'un « concentrateur », évoquée par Mme Florence Lasserre-David, et la réponse que pourrait apporter l'ARAFER, j'avais abordé cette question lorsque nous avons auditionné son président, sans obtenir de réponse. Pour répondre à cette question, ainsi qu'à celle de la fiabilisation des données et au fait qu'il faudrait un unique fichier pour l'ensemble des fraudeurs, un concentrateur a été désigné : c'est l'Union des transports publics et ferroviaires. Ce ne sera donc pas l'ARAFER. Aujourd'hui, nous nous interrogeons sur l'échéance de mise en place de cette plateforme, qui permettrait de réunir l'ensemble des données. Nous ne connaissons pas les raisons réelles de son retard.
M. Loïc Prud'homme a posé une question sur le coût de la fraude, évalué à 150 millions d'euros, dont 30 millions d'euros pour la RATP. Si nous mettons en place un certain nombre des solutions prévues par la loi, notamment cette plateforme, à terme, le coût de la fraude devrait baisser. Quant à la question des transports gratuits, elle ne relève pas de la « loi Savary » mais de choix politiques.
Par rapport à la proposition qui a été faite, nous ne pouvons pas nous prévaloir de nos propres turpitudes, de notre incapacité à identifier l'ensemble des fraudes et, donc, à les contrecarrer et les réduire.
Mme Sandrine Le Feur a souhaité savoir si la « loi Savary » a répondu à certaines des attentes des transporteurs. Le retour que nous avons eu pendant les auditions est que la loi était attendue par les transporteurs et qu'elle a en partie répondu à leurs attentes, notamment sur les caméras de sécurité. Ils nous ont fait part de leur satisfaction. Nous avons également pu être témoins des contrôles en civil à la gare du Nord au mois de septembre dernier. Il s'avère que l'agressivité est moindre et que les personnes n'ayant pas payé leur titre de transport acceptent plus facilement de payer les amendes. Le dispositif ayant été mis en place en juillet 2017, il faudrait peut-être faire un bilan à six mois pour identifier d'autres impacts sur la fraude.
Une question a été posée sur le nombre d'attentats qui auraient pu être déjoués par ces dispositifs. Nous n'avons pas eu connaissance de statistiques de cette nature, qui relèvent davantage de la responsabilité du ministère de l'intérieur et qui comportent sans doute un caractère de confidentialité.
Concernant l'incidence de l'ouverture à la concurrence, il nous semble évidemment souhaitable que ces dispositions, que nous aurons à faire évoluer, s'imposent demain à tous ceux qui interviendront sur notre territoire, voire au-delà. Au fil de notre mission, nous avons fait le choix de ne pas étudier les dispositions prises dans d'autres pays européens pour nous concentrer sur le territoire national.
J'ai le sentiment que les réponses ont été fournies. Je tiens d'abord à vous dire que nous apprécions beaucoup la qualité du travail en commun que vous avez réalisé, tout en mettant en lumière les débats que vous avez eus entre vous.
Il nous reste, chers collègues, à autoriser la publication du rapport.
La commission autorise la publication du rapport.
Comme je l'avais fait pour le rapport d'application sur la loi relative à l'économie bleue, j'ai demandé à ce que ce travail soit poursuivi par une audition du ou des ministres concernés, Mme Elisabeth Borne en l'occurrence, afin de lui remettre solennellement votre travail d'évaluation, et surtout, de l'interroger sur les suites à y donner et répondre à vos questions.
——²——²——
Membres présents ou excusés
Réunion du mercredi 7 février 2018 à 11 h 10
Présents. - Mme Bérangère Abba, M. Christophe Arend, Mme Sophie Auconie, Mme Nathalie Bassire, Mme Valérie Beauvais, M. Christophe Bouillon, Mme Pascale Boyer, M. Guy Bricout, Mme Danielle Brulebois, M. Fabrice Brun, M. Stéphane Buchou, M. Lionel Causse, M. Jean-François Cesarini, M. Jean-Charles Colas-Roy, Mme Yolaine de Courson, M. Vincent Descoeur, Mme Jennifer De Temmerman, M. Jean-Baptiste Djebbari, M. Loïc Dombreval, M. Bruno Duvergé, M. Olivier Falorni, M. Jean-Luc Fugit, M. Guillaume Garot, M. Yannick Haury, Mme Sandrine Josso, Mme Stéphanie Kerbarh, M. Jacques Krabal, M. François-Michel Lambert, Mme Florence Lasserre-David, M. Jean-Claude Leclabart, Mme Sandrine Le Feur, M. Stéphane Le Foll, M. David Lorion, Mme Aude Luquet, Mme Laurence Maillart-Méhaignerie, M. Emmanuel Maquet, Mme Sandra Marsaud, M. Gérard Menuel, M. Adrien Morenas, M. Matthieu Orphelin, M. Jimmy Pahun, M. Bertrand Pancher, Mme Sophie Panonacle, Mme Zivka Park, M. Patrice Perrot, Mme Barbara Pompili, M. Loïc Prud'homme, Mme Véronique Riotton, Mme Laurianne Rossi, M. Martial Saddier, Mme Nathalie Sarles, M. Jean-Marie Sermier, M. Gabriel Serville, M. Vincent Thiébaut, Mme Frédérique Tuffnell, Mme Laurence Vanceunebrock-Mialon, M. Pierre Vatin, M. Michel Vialay, M. Hubert Wulfranc, M. Jean-Marc Zulesi
Excusés. - M. Jean-Yves Bony, Mme Bérangère Couillard, Mme Marjolaine Meynier-Millefert, M. Bruno Millienne, Mme Mathilde Panot, M. Alain Perea, M. Thierry Robert
Assistaient également à la réunion. - M. Thibault Bazin, Mme Valérie Bazin-Malgras, M. Jean-Louis Bricout, M. Dino Cinieri, M. Pierre Cordier, M. Charles de Courson, M. Jean-Jacques Gaultier, M. Benoit Simian, M. Éric Straumann, M. Jean-Pierre Vigier