Mercredi 20 novembre 2019
La séance est ouverte à dix-sept heures trente.
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(Présidence de M. Brigitte Bourguignon, présidente)
La commission procède à l'audition de Mme Agnès Buzyn, ministre des solidarités et de la santé, sur les nouvelles mesures relatives à l'hôpital et leur articulation avec le projet de loi de financement de la sécurité sociale pour 2020.
Mes chers collègues, le Premier ministre et la ministre des solidarités et de la santé ont annoncé ce matin un ensemble de mesures en faveur de l'hôpital.
La conjonction de ces annonces avec la nouvelle lecture du projet de loi de financement de la sécurité sociale (PLFSS) pour 2020, à laquelle nous procéderons ce soir en commission, rendait indispensable que nous puissions entendre la ministre avant d'entamer nos travaux.
Au cours de cette audition, Mme la ministre nous présentera les décisions du Gouvernement, ce qui nous permettra de mieux comprendre leur impact sur le PLFSS.
Mme la ministre devra nous quitter dans trois quarts d'heure environ mais je tiens à la remercier d'avoir su se rendre disponible très rapidement, à ma demande, afin de donner la possibilité à notre commission de travailler dans de meilleures conditions.
Comme cela vous a été indiqué hier, le rapporteur général puis les orateurs des groupes disposeront d'un temps d'intervention maximal de 3 minutes.
Les Français sont profondément attachés à leur système de santé et à l'hôpital. L'hôpital constitue un des piliers de notre solidarité nationale, un des fondements de notre « vivre ensemble ».
La mobilisation des urgences et la mobilisation hospitalière du 14 novembre ont été autant de rappels des difficultés rencontrées par les personnels hospitaliers. Cette situation est en particulier le fruit de l'accumulation sur un temps long des contraintes financières ayant conduit à la crise de fonctionnement, d'investissement et d'attractivité des métiers du secteur hospitalier que nous connaissons. Cette situation, le Gouvernement en a pris la mesure : 2018 a été l'année du premier dégel intégral des crédits hospitaliers et 2019 est la première année depuis dix ans de hausse des tarifs de l'hôpital.
La stratégie « Ma santé 2022 » lancée en septembre 2018 et la loi d'organisation et de transformation du système de santé promulguée en juillet 2019 ont posé les bases d'un nouveau modèle, adapté aux besoins actuels de la population dans chaque territoire. Cette réforme vise en particulier à instaurer une médecine libérale plus structurée afin de garantir l'accès aux soins partout dans le territoire et de désengorger l'hôpital.
En septembre 2019, fort des ouvertures permises par « Ma santé 2022 », un pacte ambitieux a été mis au point pour refonder les urgences.
Le Président de la République l'a dit : nous devons entendre le besoin exprimé par les personnels hospitaliers pour accompagner leurs efforts et poursuivre la transformation qu'ils ont engagée.
Chaque année, une partie des fonds servant au financement des hôpitaux est mise en réserve en début d'exercice à titre prudentiel. Cette année encore, grâce à l'engagement et aux efforts de chacun, l'objectif national de dépenses d'assurance maladie (ONDAM) sera respecté. C'est pourquoi, pour la deuxième année consécutive, l'intégralité des crédits mis en réserve, soit 415 millions d'euros, sera restituée aux établissements de santé.
Pourtant, il manquait un soutien aux hôpitaux pour accélérer leur transformation. Les patients et leurs familles s'inquiètent et nous ont demandé d'agir. Les soignants, la semaine dernière, nous ont demandé d'agir. Vous, parlementaires, nous avez demandé d'agir.
C'est à ce gouvernement qu'il revient donc de prendre la mesure de la crise et d'apporter des solutions nouvelles et enfin efficaces, après des années de statu quo.
L'échec n'est pas une option.
Comme je vous l'ai indiqué dès le début de la discussion de ce PLFSS, nous travaillons depuis plusieurs semaines à des mesures pour l'hôpital public.
Nous avons lancé aujourd'hui le volet « Investir pour l'hôpital » dans le cadre de la dynamique engagée par « Ma santé 2022 ». Celui-ci vise à redonner de la souplesse et des marges de manoeuvre pour améliorer le quotidien des hospitaliers et mieux les accompagner dans la transformation en profondeur du système de santé à laquelle ils participent.
Il s'articule autour de trois grands axes.
Le premier axe consiste à restaurer l'attractivité des métiers et à fidéliser les soignants du secteur public hospitalier.
Il nous faut mieux reconnaître le personnel en accompagnant les débuts de carrière pour les personnels médicaux comme non médicaux, afin de restaurer la capacité à recruter des hôpitaux.
Il nous faut aussi concentrer l'effort sur la revalorisation des métiers en tension, qu'il s'agisse de tensions territoriales comme à Paris et dans la petite couronne, où une prime annuelle de 800 euros sera attribuée aux infirmiers et aux aides-soignants, ou bien de tensions sectorielles, notamment pour le métier d'aide-soignant dans les établissements d'hébergement pour personnes âgées dépendantes (EHPAD) et en gériatrie. Ceux qui exercent dans les services qui prennent en charge des personnes âgées bénéficieront de la prime « assistants de soins en gérontologie ». Par ailleurs, les aides-soignants pourront désormais accéder à la catégorie B dans le cadre d'un grade de fin de carrière.
Il nous faut, en outre, récompenser l'investissement et l'engagement collectif, avec la création d'une prime collective d'intéressement à la main des manageurs, de manière à pouvoir récompenser les équipes qui s'engagent sur le terrain autour de projets relatifs à la qualité de service et à la transformation.
L'ensemble de ces mesures sera financé par un effort supplémentaire de 300 millions pour l'ONDAM en 2020 et de 1,5 milliard d'ici à la fin du quinquennat. C'est un effort important. Je vous l'annonce dès à présent : un amendement sera déposé par le Gouvernement en ce sens, en amont de votre discussion en commission, pour que cette nouvelle lecture puisse se faire en toute transparence et dans le cadre de débats aussi clairs que sincères. J'aurais naturellement préféré pouvoir aller plus vite mais nous n'étions pas prêts en première lecture – vous savez combien ces sujets sont délicats.
Le deuxième axe de ce plan vise à rétablir le dialogue et la souplesse de la gestion dans le quotidien de nos hôpitaux.
L'hôpital public a connu des évolutions majeures dans son organisation, qui ont parfois donné aux équipes le sentiment d'une mise à l'écart de la prise de décision et d'une perte de sens. La transformation engagée par « Ma santé 2022 » vise à renforcer le dialogue et le sens du collectif au sein des hôpitaux. Dans ce but, le personnel soignant sera mieux intégré à la gouvernance des hôpitaux et le management de proximité sera consolidé et valorisé.
Des mesures de simplification du fonctionnement quotidien seront aussi prévues, notamment pour ce qui concerne les formalités de recrutement ou bien les protocoles de coopération décentralisés entre les professionnels au sein d'un établissement.
Enfin, des mesures seront prises pour lutter contre l'intérim médical qui s'est développé depuis plusieurs années dans des conditions devenues insupportables pour les équipes qui ont la charge d'assurer la continuité du fonctionnement de l'hôpital. Il s'agira ainsi de faire respecter l'encadrement des rémunérations des intérimaires et d'assurer une rémunération attractive des gardes assurées en plus des obligations de service pour un praticien hospitalier au niveau d'un groupement hospitalier de territoire (GHT) ou d'une région.
Le troisième axe du plan repose sur la volonté de réinvestir dans l'hôpital public en lui donnant des moyens nouveaux et de la visibilité dans le temps.
Les tarifs hospitaliers seront en hausse jusqu'à la fin du quinquennat, après la première campagne positive exceptionnelle de 2019, interrompant dix années de baisse.
L'investissement du quotidien sera une priorité. Il s'agit de permettre aux hôpitaux d'acheter le matériel indispensable pour le travail des soignants au quotidien. En 2020, pour répondre au besoin actuel le plus fort, 150 millions d'euros seront fléchés vers l'investissement courant, au lieu d'être affectés à de nouveaux grands projets immobiliers. Ces investissements devront être majoritairement à la main des chefs de service. Cet effort sera reconduit en 2021 et 2022.
À partir de 2020, 10 milliards d'euros de dettes seront repris aux hôpitaux en trois ans afin d'alléger les charges qui pèsent sur les établissements. Cette décision de rupture leur permettra de réduire leur déficit et de retrouver rapidement les moyens d'investir et de se moderniser.
L'hôpital est une communauté formée d'équipes unies par la prise en charge des patients, dans les succès, dans les épreuves, dans les échecs. L'idée de ce plan, c'est de redonner de l'oxygène à cette communauté des soignants. Nous avons montré que nous étions prêts à y consacrer des moyens considérables. Nous croyons dans l'hôpital public, nous croyons dans le dévouement de ses personnels et dans la promesse qui l'anime : être aux côtés de ceux qui souffrent, aux côtés de leurs proches, en des instants de fragilité, parfois d'angoisse, dans des moments de vie très particuliers où l'on est fier et rassuré d'être français.
Merci, madame la ministre, de nous avoir présenté ce plan. Merci aussi d'avoir déposé l'amendement modifiant l'ONDAM avant l'examen du PLFSS par notre commission, initiative qui sera, je crois, appréciée par l'ensemble des membres de notre commission.
D'autres amendements seront-ils déposés d'ici à la séance pour compléter la transcription législative des différentes mesures que vous avez annoncées ?
Deuxième question : y aura-t-il des dispositions spécifiques visant à financer les différents volets du plan ? Des modifications affectant la partie relative aux recettes sont-elles prévues ?
Troisièmement, pouvez-vous nous confirmer qu'au-delà de la prime versée au personnel soignant vivant en couronne parisienne, destinée à tenir compte du prix des logements, vous envisagez des dispositions concernant l'ensemble des soignants sur le territoire national ?
Enfin, la hausse de l'ONDAM aura-t-elle des répercussions sur l'ensemble des établissements hospitaliers ou bien seront-elles ciblées sur le secteur public ?
Alors que le Gouvernement a annoncé ce matin un plan d'ampleur en faveur de l'hôpital public, nous nous apprêtons à nous prononcer en nouvelle lecture sur le PLFSS 2020.
Nous avons tous entendu les annonces faites par le Premier ministre, mesures que les parlementaires de la majorité avaient appelées de leurs voeux dès la première lecture du PLFSS. Pour le groupe La République en Marche, très attaché à l'hôpital, elles apparaissent absolument nécessaires tant la situation vécue par les professionnels est devenue difficile.
La garantie d'une offre de soin de qualité et de proximité est au coeur de nos préoccupations, et c'est pour y parvenir que nous avons adopté en juillet dernier la loi d'organisation et de transformation du système de santé qui réforme dans son intégralité notre système de santé.
Cette réforme s'inscrit dans le temps long : rénovation des études de santé et suppression du numerus clausus, réorganisation de l'offre de soins de proximité autour des soins de ville et des hôpitaux de proximité afin de recentrer l'hôpital sur sa mission première.
Vous l'avez dit, madame la ministre, dans le prolongement de « Ma santé 2022 », le personnel soignant sera mieux intégré à la gouvernance des hôpitaux et le management de proximité sera renforcé et valorisé. Pour relancer l'attractivité des métiers de l'hôpital, les métiers dits « en tension » seront revalorisés en donnant des leviers managériaux aux équipes. La prime d'engagement dans la carrière hospitalière (PECH) sera augmentée pour offrir aux métiers qui connaissent les plus grandes tensions de recrutement de nouveaux leviers d'attractivité.
La situation des professionnels appelait en effet des réponses en matière de rémunération et de conditions de travail. Les mesures annoncées ce matin y concourent, grâce à des moyens dédiés au versement de primes mais également de capacités d'achat de matériels indispensables dans la pratique quotidienne. C'est également à l'endettement des hôpitaux que sera apportée une solution sans précédent afin de dégager de nouvelles marges de manoeuvre et d'investissement. Ainsi, dès 2020, un programme massif de reprise des dettes hospitalières sera lancé sur trois ans, pour un total de 10 milliards.
Ces annonces vont avoir un impact sur le PLFSS. C'est pourquoi cette audition revêt une grande importance. Pour nous prononcer en toute responsabilité, nous attendons les amendements qui intégreront cette nouvelle trajectoire financière pour l'hôpital. Vous venez de nous indiquer qu'ils seront déposés avant la réunion de ce soir, ce qui apparaissait nécessaire. Il s'agit en effet de réponses massives qui augmenteront l'ONDAM des établissements de santé et, par conséquent, l'ONDAM global, tout en ayant des répercussions sur l'équilibre budgétaire de la sécurité sociale auquel nous continuons de veiller.
Madame la ministre, votre prise de parole était attendue par les membres de cette commission et plus généralement par les députés après les annonces médiatiques qui nous sont apparues comme incongrues et maladroites lors des débats en première lecture du PLFSS. Elles ont conduit à des crispations et des blocages, vous le savez, et nos collègues sénateurs ont eu une réaction légitime face à la situation dans laquelle le Gouvernement a placé le Parlement.
La première version du PLFSS ne laissait aucune marge de manoeuvre, problème aggravé par les non-compensations et par le niveau de l'ONDAM hospitalier que nous avons combattus.
Vous avez annoncé une réforme systémique des retraites mais s'il y a une autre réforme systémique à entreprendre, c'est bien celle de l'hôpital public. Chacun s'accorde sur le constat, il faut désormais apporter des réponses.
Vous avez évoqué des années de statu quo mais je crois me souvenir que, lors du quinquennat 2007-2012, un plan de 10 milliards a été consacré à l'hôpital public pour lui permettre d'aller de l'avant.
Face à la crise à laquelle nous sommes confrontés, vous apportez des éléments de réponse à travers les annonces de ce matin. Toutefois, j'observe, sauf erreur de ma part, qu'il s'agit du quatrième plan relatif à notre système de santé en deux ans. On n'y voit pas très clair dans ce qui tient davantage du rafistolage que de l'ambition que nous appelons de nos voeux.
Nous considérons que le retour des médecins dans la gouvernance est de bon augure. Il nous apparaît légitime que la communauté médicale puisse être associée à certaines décisions. Nous approuvons également les mesures contre les mercenaires de l'hôpital.
Pour le reste, j'estime que ce plan vise davantage à apaiser la colère qu'à refonder l'hôpital public. En outre, il ne concerne que l'hôpital alors que c'est l'ensemble de notre système de santé qui est en crise.
Vous allez réajuster l'ONDAM, fort bien. Il ne s'agit en réalité que de la correction d'une erreur initiale. La dynamique des dépenses de santé est de 4,4 % alors l'ONDAM ne va progresser que de 2,4 % : nous sommes bien loin du compte.
Quant aux primes, elles tiennent soit du saupoudrage soit de la discrimination, puisque l'ensemble des personnels hospitaliers n'en bénéficient pas.
Bref, ces mesures semblent être une solution de court terme, bien éloignée des ambitions que le groupe Les Républicains nourrit pour l'hôpital.
Le groupe du Mouvement Démocrate et apparentés salue l'effort budgétaire historique que le Gouvernement vient d'annoncer pour soutenir l'hôpital public. Ces mesures apportent une réponse forte à la détresse et à la colère exprimées par les personnels soignants dont la situation s'est fortement dégradée depuis des décennies. Nous devions les entendre car ils sont des maillons essentiels de notre système de santé. Je crois que nous pouvons collectivement saluer leur dévouement.
Ce plan est également nécessaire car l'accès aux soins est une condition du pacte social français. Nos concitoyens sont d'ailleurs très inquiets des difficultés dans lesquelles se trouve l'hôpital. Je pense notamment à l'émoi provoqué par le mouvement de grève sans précédent qui touche près de deux cent soixante-dix services d'urgence depuis huit mois ainsi qu'au cri d'alarme poussé par les médecins qui, la semaine dernière, dénonçaient les conditions d'accueil préoccupantes des enfants à l'hôpital. Le professeur Rémi Salomon, chef de service à l'hôpital Necker-Enfants malades, expliquait que les restrictions budgétaires avaient pour conséquence la fermeture de lits dans tous les services et qu'en réanimation pédiatrique, l'effectif paramédical avait baissé de 42 %, obligeant en pleine épidémie de bronchiolite à transférer certains enfants en dehors de Paris.
De telles situations ne devraient pas exister en France alors que notre modèle social est l'un des meilleurs au monde.
En premier lieu, les annonces faites par le Gouvernement remettent l'humain au coeur du dispositif en revalorisant financièrement le métier d'aide-soignant et d'infirmier. Il est fondamental que tous ceux qui accompagnent les patients au quotidien soient mieux reconnus et que ces professions redeviennent attractives.
En deuxième lieu, le plan donne des moyens d'investissement considérables aux hôpitaux en leur allouant de nouvelles enveloppes financières et en soulageant leurs dettes. La reprise de 10 milliards de dettes sur trois ans est une décision forte qui rend des marges de manoeuvre pour investir et moderniser les hôpitaux. Pouvez-vous nous indiquer si les hôpitaux d'outre-mer sont concernés par cette mesure ?
Enfin, le groupe du MoDem et apparentés souligne la cohérence de mesures qui s'inscrivent dans la démarche globale votée dans le plan « Ma santé 2022 » qui portera ses fruits à moyen terme en apportant dès maintenant à l'hôpital public l'oxygène dont il a besoin pour aborder cette transition majeure.
Madame la ministre, le groupe Socialistes et apparentés a été d'autant plus attentif à la présentation de votre plan pour l'hôpital ce matin que nous avions proposé il y a trois semaines un plan d'urgence pour l'hôpital et l'autonomie visant à répondre à la situation de crise qui frappe l'hôpital public et les EHPAD. Il s'agissait d'un plan financé, solide et ambitieux : vous n'en avez pas voulu. Vous n'avez même pas eu la curiosité de regarder ce que, de bonne volonté, nous vous proposions pour sortir de la crise par le haut. Mépris et suffisance !
Aujourd'hui, alors que nous avons perdu trois semaines, vous nous proposez un plan financé par du déficit supplémentaire insatisfaisant pour les soignants et très insuffisant, notamment pour ce concerne l'attractivité de l'hôpital public. Inconséquence et désinvolture !
Vous avez annoncé 10 milliards d'euros de reprise des dettes des hôpitaux, mesure que nous soutiendrons. Nous vous proposions la même chose il y a trois semaines mais vous n'en vouliez pas !
Vous prévoyez une hausse du budget de l'assurance maladie de 300 millions en 2020. Nous proposions 830 millions de hausse financés par un report de deux ans du remboursement de la dette à la Caisse d'amortissement de la dette sociale (CADES). Non seulement votre plan est moins ambitieux que le nôtre, mais il s'appuie sur une augmentation du déficit public.
Pour 2020, 800 millions d'économies ont été demandés à l'hôpital dans le budget de la sécurité sociale. En réalité, votre plan consiste à réduire cet effort de 800 millions à 500 millions. Est-ce là une réponse décente à donner aux personnels hospitaliers ?
C'est sur l'attractivité des carrières que votre plan laisse le plus à désirer : vous écartez toute hausse de salaire. Vous mettez sur la table une prime de 66 euros par mois qui ne comptera ni pour la retraite ni pour les droits au chômage et qui concerne uniquement les 40 000 professionnels infirmiers ou aides-soignants de Paris et de la petite couronne. Est-ce là votre sens de l'égalité républicaine ? Je ne minimise pas les problèmes de logement en Île-de-France mais c'est toute la France qui souffre, madame la ministre, pas uniquement Paris. Les personnels de Toulouse, Strasbourg, Bordeaux, Mont-de-Marsan, Marseille n'ont-ils pas manifesté leur insatisfaction le 14 novembre dernier ? Dans mon territoire les soignants dépensent en moyenne 250 euros par mois d'essence pour aller travailler : pourquoi n'y aurait-il pas de prime pour eux ?
Notre plan prévoyait une prime de 100 euros nets mensuels pour les 600 000 professionnels hospitaliers français ; nos propositions étaient financées, nous vous donnions une solution clef en main. Vous comprendrez notre déception car, aujourd'hui, le compte n'y est pas.
Le défi de l'hôpital public, c'est d'éviter la fuite des talents vers le secteur privé, qui offre de meilleures rémunérations et conditions de travail. Avec ce plan, vous confortez le choix des soignants qui souhaitent quitter l'hôpital public. Ils ont fait des efforts extraordinaires, ils s'engagent au quotidien pour soigner les Français. Nous pensons qu'ils méritent mieux qu'un plan de saupoudrage, bricolé à la va-vite, par un gouvernement à court d'idées.
Vous me direz que vous héritez d'une situation ancienne, que vous n'y êtes pour rien, je connais la musique. Mais aujourd'hui vous êtes aux manettes et votre réponse est très insatisfaisante.
Madame la ministre, permettez-moi de faire en premier lieu quelques remarques de forme. Il est difficile de réaliser un travail de qualité quand des modifications incessantes affectent le PLFSS, l'un des textes les plus importants de l'année pour le Parlement, dans un calendrier de plus en plus contraint. Nous découvrons de nouvelles mesures qui ont un impact sur l'équilibre du projet de loi quelques heures avant son examen, sans aucune étude d'impact ni déclinaison opérationnelle. En vue de préparer ce PLFSS, notre groupe avait travaillé en amont, notamment en procédant à de nombreuses auditions. Nos travaux se fondaient sur les chiffres et projections proposés par le Gouvernement et documentés dans l'étude d'impact. Je m'interroge en conséquence quant à l'intérêt de nos propositions d'amendement en première lecture alors que l'indicateur le plus important, l'ONDAM, est modifié en cours d'examen.
Sur le fond, vous proposez une augmentation de l'ONDAM de 300 millions pour 2020 afin de répondre au déficit d'attractivité des carrières hospitalières et de soulager l'hôpital. Ce sont des efforts bienvenus qu'il faut saluer, même s'ils nous semblent en deçà des besoins. Les causes de ce malaise sont anciennes et profondes et il serait intellectuellement malhonnête de vous en attribuer l'entière responsabilité.
La loi de réforme de notre système de santé, que notre groupe UDI, Agir et Indépendants a soutenue, comportait des mesures de refonte utiles de l'organisation de notre système de soins en ville comme à l'hôpital – nous savons à quel point les maux qui affectent la médecine de ville ont des conséquences sur le secteur hospitalier.
Nous avons toutefois la curieuse impression d'assister à une redite de l'an dernier lorsque le Gouvernement avait opéré un revirement de dernière minute, qui avait contraint le Parlement à siéger fin décembre, rendant le PLFSS 2019 insincère et aggravant le déficit de la sécurité sociale de 3,5 milliards.
Je ne reviens pas sur le sujet de la non-compensation. Nous aurons sans doute ce débat dans quelques heures.
Il y a quelques semaines, il était impossible de modifier l'ONDAM ; aujourd'hui, cette évolution est perçue comme la panacée. Ce revirement donne le sentiment que l'on navigue à vue. On a serré la vis des hôpitaux pendant des années pour les obliger à faire des économies. Des économies, ils en ont fait mais essentiellement sur l'investissement, ce qui les a conduits dans une impasse avec un déficit cumulé abyssal de plus de 30 milliards d'euros. Vous envisagez de reprendre le tiers de cette dette, à hauteur de 10 milliards sur les trois prochaines années. Il s'agit d'une mesure réparatrice, qui est forcément la bienvenue au regard de la situation.
Si globalement, nous nous réjouissons des augmentations significatives des crédits consacrés à la santé, nous estimons qu'il est de notre responsabilité de vous interroger sur les modalités de financement de ces nouvelles mesures.
Nous vous avions alertée à plusieurs reprises sur le danger de la cure de rigueur imposée à l'hôpital, particulièrement sur la pertinence du choix de l'ONDAM comme outil de régulation des dépenses. Il serait grand temps de réfléchir à la construction d'un outil qui prenne en compte les inégalités territoriales de santé. Nous avons adopté en première lecture le principe d'une visibilité pluriannuelle sur les ressources des hôpitaux. Il faut aller plus loin en ce sens.
Enfin, si nous comprenons les mesures proposées pour les personnels de Paris et de la petite couronne, nous appelons votre attention, madame la ministre, sur le fait que d'autres territoires sont en tension. Ils mériteraient eux aussi d'être pris en compte.
Merci, d'abord, madame la présidente, de nous permettre d'auditionner Mme la ministre dans des circonstances dont chacun a bien compris qu'elles étaient un peu particulières : un mois après le début des travaux sur le PLFSS, on nous annonce en urgence des mesures correctives pour l'hôpital parce qu'un service d'urgences sur deux est en grève et que les doyens ont décrété leurs facultés « facultés mortes ».
Je connais votre engagement, madame la ministre, et j'ai eu à plusieurs reprises l'occasion de vous dire que vous aviez endossé un véritable fardeau. Mais face à une situation exceptionnelle, il fallait, me semble-t-il, des moyens exceptionnels. Vous avez dit que le plan n'était pas prêt au moment de la première lecture du PLFSS. Vous m'accorderez quand même que tous les éléments d'appréciation étaient disponibles pour préparer un ONDAM qui soit de nature à apporter une réponse aux attentes des hôpitaux, notamment en ce qui concerne les investissements nécessaires. Quoi qu'il en soit, je vous donne acte de la revalorisation de l'ONDAM. Je prends note également du fait que 1,5 milliard d'euros vont arriver. C'est évidemment une très bonne chose. Pourriez-vous toutefois préciser s'ils s'ajouteront aux fameux 750 millions dont vous avez parlé il y a quelques semaines et qui proviennent de redéploiements ?
Par ailleurs – et c'est là un regret que j'exprime –, comme l'avait très bien dit Olivier Véran à Gérald Darmanin dans cette même salle, nous cherchons toujours les 3,5 milliards d'euros qui manquent du fait de la non-compensation des exonérations de cotisations patronales : cette somme, qu'on a fait payer à votre ministère, aurait dû être prise en charge, comme chacun sait, par le budget général de l'État.
La reprise de la dette – 10 milliards sur trois ans – est elle aussi une très bonne chose, mais il faudrait que vous nous précisiez, madame la ministre, comment vous procéderez : y aura-t-il un équilibre entre les centres hospitaliers universitaires (CHU), les centres hospitaliers généraux – je pense notamment au centre hospitalier régional d'Orléans (CHRO) – et les fameux hôpitaux de proximité, vers lesquels 100 millions ont été fléchés en 2020 ? Y aura-t-il un abondement complémentaire pour ces derniers ? Les attentes sont importantes.
S'agissant des personnels et de la valorisation des carrières, il y a la prime de 800 euros. Dont acte. Excusez-moi de vous le dire, mais j'ai peur que les infirmiers et aides-soignants qui vivent à 80 kilomètres de Paris, et ne sont donc pas dans la région d'Île-de-France, voient une forme d'injustice dans le fait qu'ils ne bénéficieront pas de cette revalorisation. En effet, ils ont des temps de transport importants et doivent supporter des surcoûts, précisément parce qu'ils n'habitent pas en Île-de-France.
Je vous donne acte du fait que les contrats d'engagement de service public (CESP) seront ouverts aux professions paramédicales. Les CESP, lancés par Mme Touraine, sont un véritable succès. Parmi les propositions de la commission d'enquête parlementaire sur l'égal accès aux soins que j'ai eu l'honneur de conduire figurait d'ailleurs celle de les revaloriser, car il y va de l'attractivité des professions médicales – enjeu pour lequel vous êtes mobilisée.
Enfin, comme l'ont déjà dit plusieurs collègues, il est temps de remettre les médecins au coeur de la gouvernance de l'hôpital. Nous attendons naturellement, à cet égard, le rapport du professeur Olivier Claris.
Vous êtes donc sur la bonne voie, madame la ministre. Toutefois, chacun ici est en droit de s'émouvoir de la méthode : le Parlement doit être un endroit stratégique, et non une variable d'ajustement. Nous ferons avec ce qui nous est présenté, mais j'ai peur que ce plan ne soit pas à la hauteur des attentes de l'ensemble de la communauté médicale, particulièrement de l'hôpital, que nous aimons tous et auquel nous sommes très attachés.
Madame la ministre, ce matin, nous espérions tous de votre allocution et de celle du Premier ministre qu'elles apportent du soulagement – le nôtre, évidemment, en tant que parlementaires, mais avant tout celui des personnels de l'hôpital public et de ses usagers. Or le plan d'urgence que vous avez présenté est en fait un encouragement à poursuivre la mobilisation, car celle-ci commence à payer.
Je m'explique. Cela fait des mois que vous répétez, y compris dans l'hémicycle, que vous ne croyez pas que le problème de l'hôpital public est lié à une question budgétaire. Il s'agissait bien plutôt, selon vous, d'opérer une réorganisation, un redéploiement, des restructurations – toutes sortes de choses dont nous verrions l'effet dans quelques années. Et puis, peut-être grâce à la mobilisation qui dure depuis plus de huit mois, vous avez compris qu'on ne pouvait pas attendre les hypothétiques fruits de ces politiques de redéploiement et de restructuration. Jeudi dernier, quasiment tous les services de l'hôpital public étaient représentés dans la rue, des urgences aux maternités, mais aussi les médecins et les professeurs, qui ne sont pourtant pas habitués à ce type de mobilisation. Or tous vous disaient en substance : « Oui, il faut du fric pour l'hôpital public ! ». Il semble que vous l'ayez compris.
Toutefois, si on regarde en détail ce que ce plan permet de faire, on s'aperçoit que l'essentiel des revendications ne sont pas satisfaites. Ainsi, il y a des revendications claires portant sur la revalorisation des salaires. Les infirmières françaises, par exemple, sont en bas du classement de l'Organisation de coopération et de développement économiques (OCDE) pour ce qui est de leurs rémunérations. Or vous vous contentez de distribuer quelques primes extrêmement aléatoires, variables et hypothétiques. Vous ne répondez donc pas aux revendications. Vous promettez 1,5 milliard d'euros sur trois ans à l'hôpital public, après nous avoir fait avaler, depuis le début du quinquennat, 12 milliards d'économies sur les dépenses de santé que nous n'avons toujours pas digérées. Ces 1,5 milliard peuvent paraître beaucoup pour des gens qui étaient persuadés qu'il ne fallait pas mettre d'argent sur la table, mais ils correspondent à peu près au budget annuel de fonctionnement du seul CHU de Lille.
Vous reprenez un tiers de la dette. C'est la moindre des choses, car elle est largement de la responsabilité de l'État. En effet, jamais les budgets n'ont été à la hauteur de la hausse de la charge qu'a eu à subir l'hôpital public. La situation est aussi liée au fait que l'hôpital, qui, auparavant, pouvait se financer auprès de la banque centrale à des taux particuliers, doit maintenant faire appel aux banques commerciales ou aux marchés financiers.
Bref, madame la ministre, vous opérez un premier recul, mais je crois que, dans quelques semaines, vous serez contrainte de revenir ici avec un nouveau plan d'urgence, parce que ce que vous proposez n'est pas à la hauteur. Le personnel de l'hôpital public appelle à la mobilisation, alors qu'il espérait lui aussi pouvoir en finir avec cette grève – car, contrairement à ce que vous pensez peut-être, personne n'apprécie de faire grève ; la grève n'est facile ni pour ceux qui la font ni pour ceux qui la subissent, mais tous ont intérêt à ce que vous reveniez devant l'Assemblée nationale avec un peu plus d'argent que ce que vous avez mis sur la table ce matin.
Comme l'ont déjà dit plusieurs de mes collègues, beaucoup de temps a été perdu. Cela fait longtemps que nous vous alertons sur la situation de crise dans laquelle se trouve l'hôpital. J'ai beaucoup insisté, à la tribune, il y a quelques semaines, sur le fait que le plan que vous nous présentiez alors n'était ni sérieux ni réaliste et que vous seriez contrainte d'y revenir, de nous faire de nouvelles propositions. Nous y sommes. Vous avez, d'une certaine manière, été contrainte de revenir avec de nouvelles mesures. Au demeurant, celles-ci sont très décevantes et insuffisantes au regard des attentes et des besoins qui s'expriment depuis très longtemps dans tout le pays. Par ailleurs, je regrette profondément que ces mesures n'aient pas été discutées – en tout cas à ma connaissance – avec les acteurs du mouvement social hospitalier. Ces derniers attendaient de véritables négociations. Il est absolument nécessaire que des discussions de cette nature aient lieu et que les propositions que vous faites ne vaillent pas pour solde de tout compte – tel ne saurait être d'ailleurs le cas, à l'évidence, quand on les observe dans le détail.
L'« amélioration » de l'ONDAM que vous proposez nous semble elle aussi insuffisante. Vous aviez programmé, dans la version initiale de votre budget, 1 milliard d'euros de compressions de dépenses pour l'hôpital public ; vous nous dites que, finalement, il n'y en aura plus que 700 millions. Vous comprendrez bien que, vu l'état de l'hôpital, celui-ci n'est pas en mesure d'absorber le choc, même s'il est réduit par les annonces que vous venez de faire.
Je m'interroge sur la logique de primes qui a prévalu dans le plan que vous annoncez. En effet, les principales revendications consistaient à réclamer une progression salariale durable, pleine et entière, avec des droits pleins et entiers. De plus, les primes que vous annoncez entraîneront des inégalités dans les territoires, y compris entre les différents corps de métiers. Je ne suis pas certain qu'elles trouvent leur pleine efficacité et qu'elles répondent réellement aux besoins, aux revendications et aux aspirations.
En ce qui concerne la reprise de la dette, la question a déjà été posée : comment déterminera-t-on les hôpitaux qui pourront en bénéficier ? Du reste, la reprise ne porte que sur un tiers de la dette globale des hôpitaux publics : il reste donc encore beaucoup de chemin à parcourir.
Par ailleurs, nous ne voyons pas trace d'un plan d'embauche ni d'un grand plan de formation. Or la première revendication des personnels – ils l'ont beaucoup dit – est d'avoir des collègues en plus.
Enfin, quid des fermetures de lits ? Au cours des six dernières années, 18 000 lits ont été supprimés. Cela fait partie des problèmes qui ont été souvent évoqués.
Telles sont les principales questions que je voulais poser, tout en sachant qu'il y en aurait bien d'autres. En tout état de cause, pour l'instant, les annonces que vous avez faites ne sauraient suffire.
Malheureusement, je ne pourrai vous répondre que brièvement, car je dois vous quitter à 18 heures 15. J'ai souhaité être présente devant vous avant de m'exprimer dans les médias, mais je fais mon premier plateau immédiatement après cette audition. Je souhaite néanmoins répondre à chacun d'entre vous.
Monsieur Véran, un amendement portant sur l'ONDAM sera déposé avant la réunion de ce soir. Toutes les mesures d'ordre salarial – je pense aux primes, notamment – et concernant l'organisation sont d'ordre réglementaire : il n'y aura donc pas d'autre amendement. La reprise de la dette, quant à elle, donnera lieu à un vecteur législatif dédié au premier semestre 2020. Nous aurons peut-être besoin d'un autre vecteur législatif encore si nous souhaitons renforcer le contrôle sur l'intérim médical au-delà de ce que nous avons prévu de faire, car ces modifications ne trouveront probablement pas leur place dans le PLFSS de cette année. Il n'y aura pas non plus d'amendement sur la partie recettes.
Vous m'avez demandé si la hausse de l'ONDAM bénéficierait à tous les établissements. Une partie de l'augmentation est dédiée à la revalorisation des tarifs, et nous prévoyons une garantie d'augmentation des tarifs de 0,2 point pendant trois ans. Or, vous le savez, les tarifs concernent la totalité des établissements de santé – publics, privés non lucratifs et privés lucratifs. En revanche, le reste des mesures qui sont incluses dans l'ONDAM visera spécifiquement l'hôpital public. De la même façon, la reprise de la dette ne concerne que les hôpitaux publics. La très grande majorité des mesures concerne donc le secteur public hospitalier.
Il existe de nombreuses primes. Vous m'avez demandé lesquelles seraient concernées en dehors de celle qui concerne la région parisienne. À cet égard, il est vrai que Paris n'est pas la France, mais la situation à Paris présente des spécificités, notamment un défaut d'attractivité considérable, que l'on n'observe pas dans le cas des hôpitaux régionaux, en tous les cas pas dans la même mesure, ni avec de tels dommages pour l'activité.
Pour répondre à votre question, il y a des primes de coopération, qui seront à la main des équipes qui adopteront des protocoles de coopération. Toutes les infirmières – et même, plus largement, tous les professionnels paramédicaux – qui s'engageront dans certaines coopérations à définir au sein des établissements auront accès à une prime de 80 euros nets par mois.
Il y aura une prime d'engagement de service public, versée en deux fois : en début de carrière puis deux ou trois ans après la prise de fonctions. Elle concerne les médecins, pour des primes allant de 15 000 à 30 000 euros, et les professionnels paramédicaux, pour des primes allant de 10 000 à 15 000 euros. C'est donc la totalité des soignants qui est visée.
Nous prévoyons également des CESP pour les professionnels paramédicaux. Ainsi, les étudiants en kinésithérapie – nous savons les difficultés qu'il y a à recruter des kinésithérapeutes, mais aussi des orthophonistes – toucheront 750 euros par mois pendant leurs études s'ils s'engagent à rejoindre l'hôpital public.
Il y aura aussi des primes collectives pour des engagements exceptionnels d'équipe. Un budget considérable sera à la main des établissements pour tous ceux qui s'engagent dans l'amélioration du parcours de soins des patients.
Une mesure générale concernera les aides-soignantes qui s'engagent dans la formation gériatrique. Ainsi, 60 000 aides-soignantes dans les EHPAD et dans les services de gériatrie auront accès à 100 euros nets supplémentaires par mois. Elles accéderont, en fin de carrière, à la catégorie B.
Il y aura, en outre, une prime d'exercice territorial pour les praticiens hospitaliers qui s'engagent dans un exercice multisites. Toujours s'agissant des praticiens hospitaliers, un certain nombre de primes valoriseront leur engagement soit dans le management, soit dans l'enseignement, soit dans la recherche. Elles seront évidemment à la main des commissions médicales d'établissement.
Tous les soignants sont donc concernés – et même au-delà, puisque certaines primes concernent des équipes entières. De même, de très nombreuses mesures concernent la France entière, pas uniquement Paris.
Monsieur Viry, vous avez souligné l'intérêt de modifier la gouvernance. Je rappelle que la loi portant réforme de l'hôpital et relative aux patients, à la santé et aux territoires (HPST), dite « loi Bachelot », a beaucoup bousculé l'hôpital et déstabilisé les soignants, ce qui a participé à la perte d'attractivité de l'hôpital public pour les communautés médicales. Nous souhaitons donc rééquilibrer la gouvernance en faveur des médecins qui s'engagent dans des fonctions managériales.
Vous avez parlé de rafistolage. J'ai entendu le mot au Sénat également ; il me choque. Ce n'est pas du rafistolage : nous consacrons à l'hôpital des budgets sans précédent. Les 10 milliards d'euros de reprise de dette, c'est autant d'argent qui soulage l'investissement dans les hôpitaux. On ne peut pas non plus considérer que 1,5 milliard d'investissements, plus 450 millions d'investissements dans le quotidien des soignants, c'est du rafistolage, ou bien alors je ne sais pas ce que l'on considérera comme étant une véritable politique publique dans notre pays.
Vous dites que ce n'est pas une refondation du système de santé, mais la refondation a été votée : c'est la loi « Ma santé 2022 ». Il s'agit ici simplement d'une accélération pour les hôpitaux publics, mais la refondation a déjà été entreprise. Elle prend en compte la totalité des professions de santé, y compris dans le secteur libéral. Elle comprend un volet concernant la formation, avec la fin du numerus clausus et la modification des études de santé. Elle prend en compte aussi le numérique en santé. Je ne reviendrai pas sur cette loi qui a été unanimement appréciée : il n'y a pas un soignant qui remette en cause le cap de « Ma santé 2022 ».
Madame Elimas, d'abord, je vous remercie de souligner que l'effort budgétaire consenti est historique. Ensuite, vous me demandez si la reprise de la dette concerne les outre-mer. Oui, bien sûr : elle concerne tous les hôpitaux qui s'engageront dans une transformation et qui auront envie de mener des projets. Une mission sera lancée dans les prochains jours pour préciser le cadre de répartition. Ce sera très variable d'un établissement à l'autre, mais tous les établissements, y compris en psychiatrie, seront concernés par cette reprise de dette, qui doit commencer dès 2020.
Monsieur Aviragnet, vous me dites que nous avons perdu trois semaines. Non : nous avons perdu cinq ans. Citez-moi une seule mesure prise par la précédente majorité en faveur de l'hôpital public. J'y exerçais à l'époque ; j'ai bien observé ce qui a été fait. Dites-moi combien d'argent a été investi dans l'hôpital public pendant ces cinq années. Je vais vous répondre : c'est pendant le quinquennat précédent qu'ont été votés les ONDAM et les tarifs les plus bas et que la dette hospitalière s'est trouvée aggravée comme jamais. Quand je suis arrivée au ministère en 2017, il y avait 1 milliard de déficit dans les hôpitaux publics. Je l'ai réduit de moitié l'année dernière. Je suis donc très choquée de ce que vous dites.
Libre à vous de considérer que le plan est insuffisant, mais ne venez pas me dire qu'on a perdu du temps et que vous avez un plan ambitieux pour l'hôpital public : au vu de ce qui a été fait pendant les cinq ans dont je parle, c'est vraiment fort de café. J'exerçais à l'hôpital public pendant que vous étiez aux affaires : j'ai vu la dégradation, je l'ai vécue.
Monsieur Christophe, vous m'avez interrogée sur la préparation. Évidemment, j'aurais préféré être prête au mois de septembre et présenter un PLFSS qui traduise toute cette ambition. Nous n'étions pas prêts. Nous avons mené une concertation. Ainsi, le plan a été enrichi par la contribution des fédérations hospitalières, notamment celle de la Fédération hospitalière de France, mais aussi par les résultats des conférences, par les contributions de doyens, présidents de commissions médicales d'établissement, directeurs d'hôpitaux. Nous avons aussi consulté les syndicats. Nous avons travaillé pendant des semaines pour enrichir le plan. On peut regretter qu'il n'ait pas été prêt plus tôt, mais il ne faut pas oublier les mesures positives qui figuraient déjà dans le PLFSS, notamment le congé pour les proches aidants, ou encore le fonds pour les victimes de produits phytosanitaires – je ne les citerai pas toutes. Le PLFSS était déjà très ambitieux : il comportait des mesures sociales importantes. On ne saurait donc, heureusement, le résumer à l'ONDAM. Nous venons maintenant avec un ONDAM en hausse et des mesures construites. J'espère que le nouvel ONDAM sera voté dans le cadre du PLFSS.
Vous avez évoqué la dimension territoriale. Il y a beaucoup de choses pour les territoires. Nous réarmons les hôpitaux de proximité en les finançant différemment, avec un financement global qui sort de la tarification à l'activité. Nous augmentons le Fonds d'intervention régional. Il y a aussi la dotation populationnelle pour les hôpitaux psychiatriques. Je suis tout à fait d'accord pour avancer plus encore, évidemment, mais il n'est pas possible de nous reprocher de ne rien faire en ce qui concerne la dimension territoriale.
Monsieur Vigier, vous m'avez demandé comment les 750 millions d'euros du plan de refondation des urgences s'articulaient avec le plan annoncé ce matin. Les mesures nouvelles viennent évidemment en plus de ces 750 millions dédiés à la refondation des urgences : ce n'est pas un jeu de bonneteau. Ensuite, qui va reprendre la dette ? Nous allons lancer le programme de reprise de la dette hospitalière sur trois ans avec un vecteur législatif en même temps que la loi de programmation des finances publiques. Cela représentera un allégement de charge de 800 millions à 1 milliard par an chaque année pour les hôpitaux publics. Un organisme centralisateur financera des prêts miroirs qui permettront de reprendre 3,3 milliards d'euros chaque année pendant trois ans. Je n'entrerai pas davantage dans les détails de cette opération qui est en train d'être consolidée, mais qui sera évidemment tout à fait transparente.
Monsieur Quatennens, je n'ai jamais dit que ce n'était pas une question d'argent ; j'ai dit que cela ne pouvait pas être seulement une question d'argent et qu'il fallait refonder notre système de santé, faute de quoi nous ne ferions que remplir le tonneau des Danaïdes. Notre système de santé fuit. Je pense notamment au problème de la non-pertinence des soins, dont la Caisse nationale de l'assurance maladie considère qu'elle correspond, au total, à 20 milliards de dépenses inutiles. De la même manière, une étude qui vient d'être menée en Suisse et dans d'autres pays de l'OCDE évalue entre 10 % et 20 % de dépenses inutiles dans les systèmes de santé observés. C'est là que nous devons faire des économies, en proposant une organisation plus pertinente ; c'est l'objet de « Ma santé 2022 ». Il n'en demeure pas moins qu'il faut de l'argent supplémentaire pour l'hôpital public, pour permettre à ses personnels non seulement de sortir la tête de l'eau, mais de devenir attractifs. Je n'ai jamais nié qu'il fallait de l'argent, mais la politique de santé ne saurait se résumer à remettre indéfiniment de l'argent dans le système sans le transformer.
Monsieur Dharréville, je pense avoir répondu à vos questions par l'ensemble de mes propos.
La réunion s'achève à dix-huit heures vingt.
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Présences en réunion
Réunion du mercredi 20 novembre 2019 à 17 heures 30
Présents. - M. Joël Aviragnet, Mme Delphine Bagarry, M. Belkhir Belhaddad, Mme Justine Benin, Mme Brigitte Bourguignon, Mme Marine Brenier, Mme Blandine Brocard, M. Paul Christophe, Mme Christine Cloarec-Le Nabour, M. Marc Delatte, M. Pierre Dharréville, Mme Nathalie Elimas, Mme Catherine Fabre, Mme Agnès Firmin Le Bodo, Mme Emmanuelle Fontaine-Domeizel, Mme Albane Gaillot, Mme Véronique Hammerer, M. Brahim Hammouche, Mme Monique Iborra, Mme Caroline Janvier, Mme Fadila Khattabi, Mme Charlotte Lecocq, Mme Monique Limon, M. Gilles Lurton, M. Thierry Michels, Mme Michèle Peyron, M. Laurent Pietraszewski, Mme Claire Pitollat, M. Adrien Quatennens, M. Alain Ramadier, Mme Laëtitia Romeiro Dias, Mme Nicole Sanquer, Mme Isabelle Valentin, M. Boris Vallaud, Mme Laurence Vanceunebrock-Mialon, Mme Michèle de Vaucouleurs, M. Olivier Véran, Mme Annie Vidal, M. Philippe Vigier, M. Stéphane Viry, Mme Martine Wonner
Excusés. - Mme Josiane Corneloup, M. Jean-Pierre Door, Mme Caroline Fiat, Mme Claire Guion-Firmin, M. Jean-Philippe Nilor, Mme Nadia Ramassamy, M. Jean-Hugues Ratenon
Assistaient également à la réunion. - Mme Gisèle Biémouret, M. Bertrand Bouyx