COMMISSION DES AFFAIRES SOCIALES
Lundi 11 octobre 2021
La séance est ouverte à treize heures cinq.
La commission entend, au Palais Bourbon et en visioconférence, M. Olivier Véran, ministre des solidarités et de la santé, Mme Brigitte Bourguignon, ministre déléguée auprès du ministre des solidarités et de la santé, chargée de l'autonomie, et M. Olivier Dussopt, ministre délégué auprès du ministre de l'économie, des finances et de la relance, chargé des comptes publics, sur le projet de loi de financement de la sécurité sociale pour 2022 (n° 4523).
Notre ordre du jour appelle l'audition des ministres et la discussion générale du projet de loi de financement de la sécurité sociale (PLFSS) pour 2022, le dernier de la législature, dont notre commission examinera les articles après-demain.
Je remercie les ministres de leur présence, physique ou virtuelle, à un horaire inhabituel, mais il a été difficile de trouver un moment qui convienne à tout le monde. L'horaire aura du moins permis à chacun de prendre connaissance du texte, qui a été rendu public jeudi dernier.
Pour la première fois dans notre commission, le format de la réunion est mixte. Je crois toutefois que personne ne souhaite que le recours à une telle modalité de travail devienne habituel : nous nous souvenons tous que « partout où ses membres sont réunis, là est l'Assemblée nationale ».
Madame la présidente, j'ai noté vos observations concernant le jour et l'horaire inhabituels de nos travaux parlementaires. Surtout, l'audition se tient au-delà de la date limite pour le dépôt des amendements. Une autre date aurait permis que nous modifions notre production législative. Par ailleurs, il est prévu que le PLFSS soit examiné en une seule journée. Il est inouï que la commission des affaires sociales ne dispose que de trois séances pour prendre la mesure d'un texte d'une telle portée et l'amender. Un examen mercredi au pas de charge laisse dubitatif, à moins qu'un filtre préalable d'irrecevabilité ne soit appliqué, ce qui serait inacceptable. Enfin, l'examen du dernier PLFSS de la législature est programmé un weekend, samedi 23 et dimanche 24 octobre. Cela fait beaucoup pour nous permettre de travailler en toute quiétude sur un texte majeur.
Nous entamons l'examen du texte mercredi, mais nous ne sommes pas obligés d'aller au pas de charge. Si nous ne l'avons pas fini le soir, nous pourrons le poursuivre jeudi matin.
L'examen d'un PLFSS est un moment particulier. Cela vaut d'autant plus pour celui que nous examinons, le dernier du quinquennat. Je salue à ce titre la « promotion 2017-2022 », que j'ai connue à la fois comme député et rapporteur général, et comme ministre. Elle compte des personnalités engagées au service de nos concitoyens, d'où qu'ils viennent et où qu'ils se trouvent, politiquement. J'ai été très heureux de participer à cette commission, et de poursuivre le travail comme ministre.
Malgré l'amélioration des conditions de circulation du virus, la situation sanitaire continue de marquer le PLFSS. Les mesures sanitaires ont eu un coût en 2021, avec plus de 3 millions de tests réalisés, avec les vaccinations, les hospitalisations et toutes les opérations d'« aller‑vers ». Un déficit durable d'environ 15 milliards d'euros est prévu, qui est non seulement la conséquence de la gestion de la crise sanitaire, pour protéger les Français, mais aussi le résultat des conséquences de la crise et des confinements. Il nous faudra définir collectivement une solution structurelle, qui devra faire jouer la solidarité entre les branches, notamment la branche vieillesse, et, pour la branche maladie, poursuivre ce qui a été engagé pendant le quinquennat, quoique ralenti par la crise – la prévention, le parcours de soins, la pertinence des soins. Le PLFSS 2022 le montre, nous ne reviendrons pas aux solutions du passé.
Ce PLFSS est donc celui de la sortie de crise. Il doit nous conduire non à tout figer mais, au contraire, à réagir. Pendant la crise, nous avons réagi avec le « quoi qu'il en coûte », le Ségur de la santé, le maintien des grands principes comme l'accès gratuit aux soins. C'est cela, la sécurité sociale.
La crise sanitaire a rendu d'autant plus flagrant le besoin de réinvestissement dans notre système de santé. Nous poursuivons avec beaucoup de détermination cette dynamique en faveur de la santé de nos citoyens et de ceux qui les soignent. Les efforts consentis dans le réarmement de notre système de santé, dans la revalorisation des salaires, des carrières des soignants ou dans les investissements dans le numérique étaient indispensables, et se poursuivront.
Le PLFSS 2022 traduit sans ambiguïté la poursuite de la réalisation des engagements du Ségur de la santé, pour bâtir un système de santé plus résilient. L'objectif national de dépenses d'assurance maladie (ONDAM) intègre 2,7 milliards d'euros de financements supplémentaires au titre du Ségur par rapport à 2021. Le total des dépenses inscrites en base pour le Ségur s'élève donc à 12,5 milliards. C'est du jamais-vu !
Sur ces 12,5 milliards, 10 milliards sont directement à destination de celles et ceux qui soignent, c'est-à-dire des 2,5 millions de salariés des établissements sanitaires, médico-sociaux, et des soignants dans les établissements sociaux. En 2022, plus de 2 milliards supplémentaires sont consacrés à ces revalorisations et aux mesures qui prolongent le Ségur, afin de promouvoir la transformation des métiers et la revalorisation des soignants. 1 milliard est consacré à la montée en charge des mesures du Ségur à l'hôpital ; 770 millions concernent des revalorisations dans le secteur médico-social, après l'extension du Ségur au médico-social, à la suite de la mission Laforcade ; 500 millions supplémentaires visent de nouvelles revalorisations auxquelles le Gouvernement entend procéder dès le 1er janvier 2022. Il s'agit notamment de revaloriser les salaires des agents de catégorie C dans la fonction publique hospitalière – les aides-soignants de l'hôpital, qui touchent les plus petits salaires, bénéficieront d'un geste supplémentaire –, des sages-femmes, des médecins contractuels et d'instaurer des primes pour reconnaître les fonctions managériales des chefs de service et des chefs de pôle.
Les mesures se traduiront par une revalorisation. Avec les dispositifs du PLFSS, les sages-femmes hospitalières toucheront 4 500 euros net de plus par an à l'hôpital, soit 360 euros net par mois. L'effort est sans précédent. Par ailleurs, les chefs de service toucheront 200 euros de plus ; les chefs de pôle, 400 euros et les présidents de conférence médicale d'établissement ou de commission médicale de groupement, 600 euros.
Les mesures s'ajoutent à l'ensemble des revalorisations, regroupées dans le fameux complément de traitement indiciaire (CTI) de 183 euros net par mois, ainsi qu'à la refonte des grilles salariales et à l'investissement collectif. Ce que vous êtes amenés à voter vient donc en plus de ce qui a été signé avec les partenaires sociaux dans le cadre du Ségur de la santé l'été dernier : le Gouvernement fait un geste supplémentaire par rapport à l'accord majoritaire.
S'agissant des investissements matériels, plus de 2 milliards d'euros seront consacrés au soutien national à l'investissement au sein de l'ONDAM. Au-delà du Ségur, le PLFSS marque un effort exceptionnel pour l'hôpital dit en régime de croisière. En 2022, l'ONDAM hospitalier, hors Ségur et hors crise, augmentera de 2,7 %. Le Président de la République s'était engagé durant sa campagne et avec les fédérations, à augmenter le budget hospitalier de 2,4 % par an : nous allons au-delà des engagements que nous avions pris.
C'est mon huitième PLFSS : pour la première fois, il n'y a pas d'économies cachées dans le budget hospitalier. Habituellement, 700 millions à 1,2 milliard sont prélevés sur telle ou telle ligne de crédits de l'hôpital. En plus de cette rupture historique, si les hôpitaux faisaient des économies, ils garderaient la totalité de leur bénéfice et l'État ne récupérerait rien. Cela signifie non pas que l'on renonce à des gains d'efficience – au contraire, le mécanisme les encourage – mais que l'on donne une respiration dans les finances hospitalières, après une crise qui a mis les hôpitaux à rude épreuve.
En 2022, plusieurs réformes du financement, dont nous avions parlé les années précédentes, entreront en application, qu'elles concernent la psychiatrie, les activités forfaitaires de médecine ou les hôpitaux de proximité.
L'accès aux soins, y compris les plus innovants sera facilité. On généralisera les premières expérimentations issues de l'article 51 de la loi de financement de la sécurité sociale (LFSS) pour 2018, et on tirera les leçons de ce qui fonctionne. À titre d'exemple, l'expérimentation « Retrouve ton cap » promeut une approche globale de lutte contre l'obésité infantile.
L'accès aux soins visuels sera facilité, alors qu'il faut aujourd'hui six mois en moyenne pour renouveler des lunettes chez un ophtalmologiste. De nombreuses études ont montré que le recours accru aux orthoptistes pour obtenir des verres correcteurs était possible. Il permettra de lutter contre les déserts médicaux dans la filière ophtalmologique.
Le dispositif des haltes soins addiction prolongera l'expérimentation des salles de consommation à moindre risque. Il durera trois ans, avec des moyens augmentés, de manière à financer jusqu'à deux haltes supplémentaires par an. De beaux projets sont en cours de développement dans des régions confrontées à des difficultés importantes. La disposition tire le constat de la mission de l'Institut national de la santé et de la recherche médicale, selon laquelle une halte soins addiction réduit l'insécurité et l'insalubrité publiques, et renforce les capacités à accompagner des usagers de drogues, très éloignés de toute structure, dans un parcours de sevrage.
Le PLFSS vise également à généraliser la télésurveillance. Auparavant, les professionnels de santé n'étaient pas incités à suivre à distance les malades chroniques comme les insuffisants cardiaques, qui vivent avec des capteurs à domicile. À présent, ils seront rémunérés s'ils assurent le suivi de tels patients à distance, grâce au numérique.
D'autres mesures ont été annoncées par le Président de la République dans le cadre du Conseil stratégique des industries de santé (CSIS). Plus de 1 milliard d'euros supplémentaire sera consacré au remboursement des produits de santé, avec une approche exigeante pour mieux financer l'innovation, sécuriser les approvisionnements du marché français, continuer de responsabiliser les laboratoires en opérant des baisses de prix sur des médicaments qui ont été rentabilisés depuis des années, et encourager la fabrication de médicaments en France, tout en en tenant compte dans leur prix. De telles mesures faisaient suite à des amendements du groupe Les Républicains.
Nous élargirons la liste en sus, avec 300 millions d'euros supplémentaires, pour faciliter l'accès précoce aux traitements les plus innovants pour les Français dans tout le territoire. En votant le PLFSS 2022, vous autoriserez aussi les pharmaciens hospitaliers à fabriquer des médicaments d'intérêt thérapeutique majeur lorsque les laboratoires ne peuvent plus en fournir. Pendant la crise sanitaire, les hôpitaux sont parvenus à fabriquer des médicaments anesthésiques. Ils y seront autorisés hors crise, une fois le PLFSS voté.
Parmi les mesures figure également le remboursement intégral de la contraception jusqu'à 25 ans révolus, pour toutes les jeunes femmes. La contraception par préservatif a déjà fait l'objet d'un tel remboursement : les préservatifs masculins sont remboursables sur ordonnance, pour qui le demande. Nous mettons fin à une inégalité.
Une autre mesure à portée sociale forte a été prise, celle d'élargir la complémentaire santé solidaire à tous les bénéficiaires du revenu de solidarité active (RSA) et de l'allocation de solidarité aux personnes âgées, l'ancien minimum vieillesse. Le recours sera désormais automatique, ce qui supprimera le risque de non-recours aux droits en matière de complémentaire santé. La question revenait régulièrement dans les PLFSS précédents, de la part de la gauche. La disposition du PLFSS 2022 est imparable.
Enfin, un an après la création de la cinquième branche de la sécurité sociale, le PLFSS comporte en faveur de l'autonomie des mesures fortes, que Mme Brigitte Bourguignon vous présentera.
Nous avons fait le choix d'un texte court – une quarantaine d'articles –, débarrassé des dispositions trop technos ou trop complexes qui caractérisent parfois la fin de la législature. Toutes les mesures sont positives pour les Français ainsi que pour notre économie et tirent les leçons de la crise sanitaire. J'espère donc que ce dernier PLFSS de la législature fera l'objet d'un consensus national le plus large possible, au sein de la représentation nationale pour commencer.
L'examen du PLFSS est toujours un moment important pour notre démocratie mais aussi pour la commission des affaires sociales que j'ai eu le plaisir et l'honneur de présider trois années.
L'année dernière, à la même période, nous posions ensemble les fondations d'une politique nationale en matière de perte d'autonomie, en créant et en finançant la cinquième branche de la sécurité sociale.
Cette année, nous parachevons la réforme en transformant radicalement l'offre destinée aux personnes âgées en perte d'autonomie.
La réforme n'a qu'un seul objectif : respecter le souhait des personnes âgées de rester à leur domicile. Soyons tous modestes, la priorité donnée au soutien à domicile n'est pas une idée nouvelle. Depuis quinze ans, les gouvernements successifs en ont affirmé la nécessité. Pourtant, nos concitoyens n'en voient pas toujours la traduction dans leur quotidien. Je cite souvent des chiffres troublants : en 2010, 61 % des bénéficiaires de l'allocation personnalisée d'autonomie (APA) vivaient à domicile, contre 59 % aujourd'hui. Ainsi, malgré les professions de foi successives, les lois adoptées par les majorités précédentes, et la volonté exprimée par les personnes âgées de rester à leur domicile, l'action publique n'a pas su atteindre un tel objectif.
Derrière la brutalité de ces chiffres, ce sont autant d'épreuves pour nos concitoyens car la perte d'autonomie regarde toute la société – nous avons été et nous serons tous concernés. Trop souvent, l'histoire est la même : une chute dans le logement, une hospitalisation, des interventions, un temps de rééducation, dans le meilleur des cas ; face à la vulnérabilité nouvelle, se pose alors la question du retour à la maison et du recours éventuel à des aides à domicile. Cela semble compliqué et la qualité de la prise en charge toujours un peu incertaine. On se résout à placer son parent dans un établissement pour personnes âgées dépendantes (EHPAD), on se fait une raison : « ce ne sera pas si mal, il sera entouré », mais on se répète, des années après parfois, qu'il aurait pu peut-être rester chez lui plus longtemps si des solutions adaptées avaient existé.
Nos concitoyens n'acceptent plus que le maintien à domicile ne soit pas une réalité. Il en résulte une défiance à l'égard de l'action publique et du rôle du politique. C'est la raison pour laquelle il fallait changer de paradigme, et le faire dans l'urgence car la crise sanitaire a été une épreuve sans précédent pour les acteurs de l'autonomie. Du fait de l'accélération de la transition démographique, nous serons confrontés dans les années à venir à un défi collectif colossal. À l'urgence des besoins, je préfère répondre rapidement et concrètement à travers un texte budgétaire plutôt que de reporter la responsabilité sur le prochain gouvernement et de laisser la défiance s'installer.
Pour élaborer la réforme, nous sommes partis du quotidien des Français et des Françaises face à la perte d'autonomie. J'ai confiance dans notre capacité à changer de modèle et à répondre aux aspirations de nos concitoyens parce que notre réforme s'inspire de leur vécu.
Les structures offrant des services à domicile sont fragiles sur le plan économique. Les tarifs horaires sont souvent en deçà du coût de revient des services. Nous ne pouvons accepter plus longtemps dans notre République les disparités dans les interventions à domicile. Si le département doit rester un acteur de proximité de la perte d'autonomie, l'État doit garantir un financement identique des interventions partout sur le territoire national. Le PLFSS prévoit donc un tarif national minimal de 22 euros par heure d'intervention à domicile. Ce tarif plancher permettra un meilleur financement des interventions ainsi qu'une meilleure qualité de service pour les personnes accompagnées mais aussi pour les salariés.
En agréant l'avenant 43 de la convention collective de la branche de l'aide à domicile, l'État s'est engagé à revaloriser les métiers de l'aide à domicile, qui sont essentiels pour que les personnes âgées puissent rester chez elle. Grâce au financement de 200 millions d'euros que vous avez voté l'année dernière, l'État accompagne les départements pour augmenter de 13 à 15 % les salaires des aides à domicile du secteur associatif, soit près de 210 000 personnes. Les autres professionnels du domicile doivent aussi bénéficier d'une revalorisation : la hausse du financement par le biais de l'instauration d'un tarif national permettra aux employeurs commerciaux d'en accorder une à leur tour à leurs salariés.
Nous voulons également aller plus loin en allouant un financement complémentaire à la contractualisation entre départements et services à domicile. Je tenais à coconstruire cette nouvelle dotation, dite dotation de qualité, avec vous, avec toutes les fédérations de l'aide à domicile ainsi qu'avec les conseils départementaux pour garantir l'efficacité des financements dans les territoires. Cette dotation ne saurait être un outil ou un montant figé dans la loi et décidé depuis Paris : elle devra répondre aux besoins spécifiques des territoires et des personnes âgées qui y résident ; elle devra remplir des objectifs en matière de service public – par exemple des horaires élargis, le week-end notamment ou le repérage et la lutte contre l'isolement social des personnes âgées ; elle devra également financer des actions en direction des professionnels des services à domicile – des temps de coordination, d'échange et de supervision pour augmenter la qualité de vie au travail. Après avoir pris le temps de la concertation, je déposerai en séance publique un amendement visant à créer et à abonder cette dotation complémentaire.
L'instauration d'un tarif national et d'une dotation complémentaire a donc pour but de consolider les services et d'améliorer les interventions à domicile. Parallèlement, nous devons garantir à nos concitoyens une plus grande simplicité du système et une meilleure coordination des interventions. Pour ce faire, nous comptons réunir au sein d'une même structure les activités d'aide, d'accompagnement et de soins dont étaient chargées jusqu'à maintenant plusieurs structures différentes – services d'aide et d'accompagnement à domicile, services de soins infirmiers à domicile, services polyvalents d'aide et de soins à domicile. La création d'un interlocuteur unique interviendra dès 2022 – une dotation à la coordination entre services sera octroyée à cet effet. En 2023, et au plus tard 2025, tous les services à domicile devront proposer aussi des soins, ou, a minima, signer une convention avec une structure de soins du territoire. Les services uniques, dits services autonomie, bénéficieront dès 2023 d'un financement de l'activité de soin fondé sur le niveau de dépendance de la personne qu'ils accompagnent, ce qui n'est pas le cas aujourd'hui. La transformation profonde que propose la réforme répond au vécu de nos concitoyens.
Nous souhaitons aussi adapter les EHPAD pour leur permettre d'accueillir des personnes âgées dont la perte d'autonomie est de plus en plus avancée. À cette fin, il faut accompagner financièrement les établissements pour les soins spécifiques, notamment pour leur permettre de recruter des personnels spécialement formés, en particulier sur les enjeux liés à la maladie d'Alzheimer. Une enveloppe de 115 millions d'euros est donc prévue pour aider les établissements à faire face à ce défi.
Autre défi auquel ils sont confrontés : l'absentéisme des professionnels qui y travaillent. Certains prétendent que le recrutement de 100 000 professionnels permettrait de résoudre tous les problèmes des EHPAD, mais il ne sert à rien de financer des postes qui ne peuvent pas être pourvus. Les revalorisations prévues dans le cadre du Ségur de la santé pour lutter contre l'absentéisme, le plan métiers pour fidéliser les professionnels, ainsi que le financement de 10 000 postes supplémentaires : voilà comment nous répondons aux défis des EHPAD. Nous y répondons aussi en généralisant les astreintes d'infirmiers de nuit et en augmentant le temps de présence de médecins coordonnateurs dans tous les EHPAD – deux jours par semaine au moins. Nous y répondons, forts des acquis de la crise, en développant massivement les équipes mobiles d'hygiène et de gériatrie afin de renforcer la sécurité sanitaire en lien avec l'hôpital. Nous y répondons en leur confiant de nouvelles missions ; certains EHPAD deviendront des centres de ressources pour les professionnels de l'aide à domicile dans leur bassin de vie. Nous développons la capacité de projection à domicile des EHPAD pour éviter que les personnes âgées soient contraintes d'aller dans un établissement, tout en respectant les missions des services à domicile. L'accompagnement renforcé à domicile, que l'on appelle à tort « EHPAD hors les murs », sera aussi ouvert aux services à domicile. Enfin, nous répondons aux défis grâce aux investissements prévus par le Ségur et le plan de relance qui finance, à hauteur de 2,1 milliards d'euros, la rénovation, la modernisation et l'ouverture des EHPAD.
La réforme de l'autonomie que contient le PLFSS est ambitieuse : elle représente 400 millions de mesures nouvelles en 2022 et 1,3 milliard en 2025. Elle est responsable puisqu'elle est financée entièrement par les ressources que vous avez déjà allouées à la branche autonomie.
Je sais pouvoir compter sur votre enthousiasme dans l'examen du PLFSS qui est aussi le vôtre : nous nous sommes inspirés de nombreux travaux parlementaires et désormais nous passons à l'action.
Je remercie Olivier Dussopt pour sa contribution sur les crédits d'aide à la personne.
La protection sociale a été lourdement mise à contribution pendant la crise, en finançant, d'une part, une campagne de tests massive – nous avons à ce jour réalisé et donc financé plus de 135 millions de tests au plan national, avant que les règles de prise en charge évoluent en fin de semaine –, d'autre part la vaccination dont le résultat est à la hauteur de nos espérances et surtout de nos objectifs – plus de 50 millions de personnes sont vaccinées. C'est certainement le meilleur investissement possible tant pour la santé publique que pour l'économie, puisque la vaccination nous permet de mettre fin aux mesures de confinement et de couvre-feu.
Pendant la crise, nous avons préservé les hôpitaux grâce aux moyens supplémentaires votés dans les projets de loi de finances rectificatives mais aussi grâce au Ségur de la santé en vertu duquel un montant sans précédent de 10 milliards d'euros leur a été alloué, auquel s'ajouteront, comme l'a indiqué Olivier Véran, des mesures complémentaires au bénéfice des soignants, à hauteur de plus de 2 milliards d'euros.
Le Ségur et le plan de relance permettent aussi aux hôpitaux publics et au système de santé de se rénover et de se désendetter – un montant de près de 20 milliards d'euros sur cinq ans y est consacré –, ce qui représente une autre forme d'accompagnement structurel.
Le PLFSS prévoit pour l'ONDAM hospitalier un niveau rarement atteint, pour ne pas dire jamais, qui s'accompagne d'une méthode nouvelle : il n'y a pas de mesures d'économies inscrites dans le PLFSS ; les gains réalisés par les hôpitaux en matière d'efficience, à l'occasion de réorganisations, leur seront intégralement restitués afin qu'ils bénéficient du fruit de leurs efforts.
Si la sécurité sociale a pu le faire et peut continuer à le faire, c'est également parce qu'elle connaissait une relative bonne santé financière au début de la crise : nous envisagions en effet juste avant celle-ci un retour à l'équilibre du régime général et du Fonds de solidarité vieillesse (FSV) en 2023.
Être ainsi proches du but nous a donné une capacité de réaction et des marges pour répondre à la crise.
La trajectoire des finances sociales a évidemment été très fortement dégradée par les décisions : ainsi la branche maladie a dû prendre en charge des dépenses exceptionnelles, à hauteur de 18 milliards d'euros en 2020 et de 15 milliards en 2021, et a connu une perte de recettes liées à la baisse de l'activité économique – voire à son arrêt dans certains secteurs.
Toutes les mesures de dépenses décidées par l'État pour le compte de la sécurité sociale ont par ailleurs été compensées à l'occasion des projets de loi de finances rectificatives : cette perte de recettes n'est donc aucunement liée à un transfert entre le budget de l'État et celui de la sécurité sociale.
En 2021, le déficit du régime général et du FSV s'est amélioré par rapport à 2020, passant, selon nos dernières prévisions, de 38,7 milliards à 34,6 milliards d'euros, ce chiffre étant moins élevé que celui que nous anticipions il y a encore quelques mois, notamment en raison de l'amélioration de la conjoncture économique.
Ainsi, une croissance de 6 % permet à la sécurité sociale de voir ses recettes progresser de 6,3 milliards. La crise ayant également entraîné une augmentation des dépenses, à hauteur de 2,5 milliards, le solde prévisionnel s'en est trouvé amélioré en 2021, même s'il reste à un niveau extrêmement élevé : – 34,6 milliards.
En 2022, en raison de la croissance mais également parce que nous envisageons des dépenses liées à la crise sanitaire moins importantes que les deux années précédentes, nous espérons réduire fortement le déficit malgré une trajectoire financière très positive puisque l'ONDAM s'élève à 2,6 % et même à 3,8 %, avec le Ségur.
En outre, le PLFSS 2022 intègre une provision de 5 milliards d'euros afin de faire face aux conséquences financières de la crise du covid.
Le déficit pour 2022 devrait atteindre 21,6 milliards d'euros, soit une amélioration de 13 milliards par rapport à 2021.
Il a toutefois vocation à rester durablement à un niveau élevé, autour de 15 milliards d'euros en 2025, ce qui nous devrait nous amener à réfléchir à la manière de retrouver une trajectoire d'équilibre. Certes, il est trop tôt pour mettre en œuvre des mesures et des réformes structurelles de retour à l'équilibre. Ceci étant, nous devons déjà y réfléchir pour la branche maladie, en nous appuyant sur l'ensemble des leviers existants, par exemple en renforçant la pertinence des soins ou en révisant certains modes de rémunération – je pense au chantier de révision des nomenclatures et aux recommandations du Haut Conseil pour l'avenir de l'assurance maladie (HCAAM) à ce sujet –, une fois refermée la parenthèse de la crise.
Nous devons également nous interroger sur les règles de gouvernance des finances sociales. Le Gouvernement considère que la proposition de loi organique déposée par le rapporteur général Thomas Mesnier va dans le bon sens puisqu'elle permettra d'améliorer le pilotage global de la sécurité sociale, de l'inscrire dans une trajectoire pluriannuelle et de renforcer la solidarité interbranches, qui nous paraît l'une des pistes les plus importantes pour assurer ce pilotage et le redressement tout en faisant le lien entre les finances sociales et le reste des finances publiques.
Enfin, s'il faudra certainement réfléchir à des réformes structurelles qui devront concerner toutes les branches, notamment la branche vieillesse, les conditions ne sont pas encore réunies.
Si certaines réformes ont été reportées ou suspendues, nous n'avons pas cessé, malgré la crise sanitaire, de réformer et de transformer le système de protection sociale : ce PLFSS va en donner une nouvelle illustration puisque nous allons simplifier la vie des Français, notamment en généralisant en 2022 le crédit d'impôt instantané, donc en assurant la contemporanéisation de celui auquel ouvrent droit les services à la personne.
Il s'agit à la fois d'accompagner le développement du secteur des services, de lutter contre le travail informel mais aussi d'aider les ménages à disposer d'une meilleure trésorerie. Les particuliers employeurs pourront en effet bénéficier en temps réel et au moment du paiement des prestations du versement du crédit d'impôt correspondant à 50 % des sommes réglées.
Dès le 1er janvier 2022, les particuliers employeurs qui utilisent le chèque emploi service universel (CESU) + pourront bénéficier de ce versement contemporain. Dès le 1er avril de la même année, ceux d'entre eux qui passent par des structures intermédiaires pourront également en bénéficier.
L'entrée en vigueur de cette mesure ne se fera qu'en 2023 pour les bénéficiaires de l'APA et de la prestation de compensation du handicap (PCH) puisque nous devons trouver des modalités de fonctionnement et conventionner avec chacun des départements qui les gèrent.
Pour ce qui est de la garde d'enfants, elle n'interviendra, au travers de Pajemploi notamment, qu'en 2024 pour des raisons techniques, car nous ne voulons pas instaurer un système dont le fonctionnement ne serait pas tout à fait fiable.
Nous allons poursuivre le chantier d'unification du recouvrement, avec notamment le transfert en 2023 du recouvrement des cotisations retraite des professionnels libéraux de la Caisse interprofessionnelle de prévoyance et d'assurance vieillesse vers les unions de recouvrement des cotisations de sécurité sociale et d'allocations familiales.
Nous allons enfin mettre en œuvre l'intégralité des annonces faites par le Président de la République le 16 septembre dernier pour l'amélioration de la protection sociale des indépendants. Le projet de loi de finances dont l'examen commence tout à l'heure intègre également des dispositions concernant leur fiscalité. Un projet de loi spécifique permettra enfin d'avancer en matière de protection du patrimoine personnel.
Ce PLFSS tire évidemment les conséquences de la crise, entame une trajectoire de normalisation sans renoncer à aucune ambition ni à aucune de nos réformes structurelles de modernisation et de simplification de la vie des Français et des assurés sociaux.
Le cinquième et dernier PLFSS de la législature s'inscrit dans un contexte économique et financier bien meilleur que celui de l'année dernière.
Le cycle de bonnes nouvelles n'est peut-être pas terminé puisque le Haut Conseil des finances publiques considère même que les hypothèses de masse salariale du projet de loi sont « basses ». Envisagez-vous donc de réviser les projections macroéconomiques au regard des dernières prévisions disponibles ?
Loin de se contenter d'agrégats financiers abstraits, ce PLFSS 2022 est fidèle à la volonté transformatrice qui nous anime depuis 2017 ainsi qu'à notre détermination à simplifier la vie de nos concitoyens et celle de nos entreprises : je pense notamment aux indépendants mais aussi à l'accès aux droits avec la systématisation de la complémentaire santé solidaire pour les bénéficiaires du RSA.
La transformation du système de santé se poursuit, pour le rendre plus efficace, plus accessible et plus attractif, au travers de ce PLFSS 2022 comme des précédents. Je pense notamment à l'entrée dans le droit commun de la télésurveillance ou à la traduction des mesures du CSIS pour faire de la France une nation innovante et souveraine en santé.
Une mesure importante du même CSIS, attendue par tous les acteurs, ne figure pas dans ce PLFSS car elle est de nature réglementaire : il s'agit de l'élargissement de la liste en sus. Où en est-on ? Quand les textes réglementaires seront-ils publiés ?
Le PLFSS contient un grand nombre de mesures sur les médicaments. Il prévoit notamment la possibilité de substitution de médicaments biologiques par les pharmaciens d'officine. Cette possibilité avait déjà été prévue par la LFSS 2014 mais jamais mise en œuvre, faute de décret d'application. Pouvez-vous nous assurer que, cette fois, ils seront pris ?
Par ailleurs, où en est-on s'agissant des grossistes répartiteurs ? Certaines dispositions figurent dans ce PLFSS : en prévoyez-vous d'autres ?
Ce texte contient également des mesures de santé publique majeures, telle l'extension de la prise en charge de la contraception pour les jeunes femmes de moins de 25 ans que nous saluons, je crois, sur tous les bancs.
Il entend également faciliter l'accès aux soins visuels par l'ouverture aux orthoptistes d'une primo‑prescription de correction, mesure que je souhaite encadrer et accompagner.
Si beaucoup d'excellentes propositions figurent dans la copie du Gouvernement, le Parlement doit également être force de proposition : j'entends donner l'exemple.
Vous le savez, je me suis engagé, dans le cadre du Printemps social de l'évaluation, dans une évaluation de la réforme du régime social des artistes‑auteurs, en particulier les effets de leur affiliation sur l'ouverture de leurs droits sociaux.
De nombreux artistes‑auteurs subissent encore les effets de l'absence d'encaissement de cotisations d'assurance vieillesse par l'Association pour la gestion de la sécurité sociale des auteurs d'œuvres cinématographiques, musicales, photographiques et télévisuelles, ainsi que les écrivains, pendant parfois plusieurs dizaines d'années.
Ils bénéficient d'un système de rachat de leurs cotisations prescrites, dont les règles sont définies par une circulaire qui expire prochainement. Pouvez-vous nous dire si ce système sera reconduit et nous confirmer que le Gouvernement a bien l'intention de permettre à l'action sociale des caisses des artistes auteurs de soutenir les assurés dans le rachat de ces cotisations prescrites ?
Je salue tout particulièrement l'extension des accords du Ségur au secteur du médico-social et la revalorisation des services d'aide à domicile.
Alors que, depuis 2013, la branche accidents du travail et maladies professionnelles (AT-MP) du régime général était structurellement excédentaire, la crise sanitaire a largement affecté ses recettes, provoquant en 2020 un déficit inédit, à hauteur de 200 millions d'euros. Elle redeviendrait toutefois excédentaire en 2021 et, en 2022, son solde s'établirait à 1,4 milliard. Ses dépenses devraient continuer de croître dans les années à venir mais à un rythme moins soutenu que les recettes, lui permettant de dégager un excédent de l'ordre 2,5 milliards en 2025.
En 2022, les prestations relevant du champ de l'ONDAM seraient en hausse, portées par le dynamisme des indemnités journalières, contrairement aux prestations hors ONDAM qui seraient en légère baisse, surtout en raison de la diminution tendancielle des prestations en lien avec l'amiante. À ce sujet, j'aurais souhaité que vous nous donniez quelques éléments sur les actions destinées à lutter contre le non-recours au Fonds d'indemnisation des victimes de l'amiante. L'Inspection générale des affaires sociales préconisait la généralisation d'une expérimentation menée dans quelques caisses d'assurance maladie en Normandie et permettant d'aller au contact des personnes reconnues comme victimes de maladies professionnelles liées à l'amiante. Où en est-on ?
S'agissant des articles concernant directement la branche AT-MP, on peut se féliciter de l'amélioration de l'indemnisation des victimes de pesticides, prévue à l'article 50. Cet article permettra de mieux indemniser les salariés agricoles en outre-mer ainsi que les pathologies liées aux antiparasitaires vétérinaires. Il prolonge jusqu'au 31 décembre 2022 le dispositif permettant aux assurés de déposer des demandes d'indemnisation dans des délais dérogatoires au droit commun. Avec quels dispositifs de communication comptez-vous promouvoir encore davantage le recours au fonds d'indemnisation des victimes de pesticides ?
Pouvez-vous nous donner quelques éléments relatifs à l'indemnisation des victimes du chlordécone ? Le plan Chlordécone IV semble très bien engagée. Où en est-on de la création d'un tableau de maladie professionnelle relatif au cancer de la prostate associé à une exposition aux pesticides, dont le chlordécone ?
Je me réjouis que le Gouvernement ait choisi d'engager de nouvelles mesures ambitieuses en faveur du soutien à l'autonomie dans le cadre de ce dernier PLFSS de la législature.
Certains nous reprochaient l'an dernier d'avoir créé une coquille vide avec la cinquième branche de la sécurité sociale. Or force est de constater que, PLFSS après PLFSS, cette nouvelle branche prend forme et ne cesse de croître : l'objectif de dépenses pour 2022, fixé à 34,2 milliards d'euros, est en augmentation de plus de 2 milliards par rapport à l'objectif rectifié pour 2021, soit une hausse de 6 %. C'est un effort considérable !
Ces chiffres traduisent plusieurs mesures figurant au PLFSS. Tout d'abord, l'article 29 consacre les accords issus de la mission conduite par Michel Laforcade au cours du premier semestre. Une grande partie des personnels du secteur médico-social bénéficiera d'une hausse de 183 euros par mois, ce qui représente un effort supplémentaire de 500 millions chaque année. Cette mesure était très attendue et les discussions avec les fédérations vont se poursuivre dans les semaines à venir pour améliorer notamment l'attractivité des métiers de ce secteur. Pourriez-vous nous en dire davantage à ce propos ?
Par ailleurs, je tiens à saluer les mesures prises en faveur des services à domicile, là encore tout à fait inédites. Après avoir adopté l'an dernier les revalorisations salariales qui ont permis d'amorcer le virage domiciliaire, nous voterons cette année la réforme de la tarification des services à domicile, notamment l'instauration d'un tarif plancher. Madame la ministre déléguée chargée de l'autonomie, j'aimerais en savoir davantage sur la dotation complémentaire que vous avez évoquée, notamment sur les critères qui permettront d'y accéder.
En ma qualité de rapporteure pour la famille, je me réjouis à double titre du contenu du PLFSS que vous venez de présenter.
L'automatisation de l'intermédiation du paiement des pensions alimentaires est mon premier motif de satisfaction. C'est un aboutissement logique, qui traduit notre ambition de lutter contre les impayés, dont les premières victimes sont les mères célibataires précaires. Celles-ci subissent encore trop souvent une double peine : la diminution de leur pouvoir d'achat du fait de la séparation et la charge que font peser sur elles les mauvais payeurs. Néanmoins, ce renforcement des missions des caisses d'allocations familiales (CAF) suppose des effectifs supplémentaires. Pouvez-nous nous confirmer que des moyens additionnels leur seront alloués dès l'année prochaine, sachant que le nouveau système s'appliquera alors aux décisions judiciaires de divorce ?
Je me réjouis en outre du retour de la branche famille à un niveau excédentaire, alors même qu'elle assume la charge des indemnités journalières dérogatoires instaurées en 2020 pour permettre la garde des enfants pendant le confinement. La branche renouerait ainsi avec un excédent qui s'établirait à 1,2 milliard en 2022 avant d'atteindre 5,4 milliards à l'horizon 2025.
Toutefois, cette trajectoire excédentaire contraste assez cruellement avec la stagnation de la natalité dans notre pays, déjà sensible avant la crise sanitaire : en 2019, il est né 60 000 enfants de moins qu'en 2014. Nous avons déjà engagé des réformes particulièrement ambitieuses : l'allongement du congé paternité, l'augmentation de la durée de versement du complément de libre choix du mode de garde pour les familles monoparentales, l'amélioration du congé maternité pour les travailleuses indépendantes. Je suis évidemment très fière de ce bilan, mais ne pensez-vous pas que la réflexion est désormais mûre pour engager à moyen terme une réforme du congé parental afin de mieux rémunérer sur une période plus courte ? Une telle réforme nous permettrait de concilier plusieurs des objectifs que doit viser une politique familiale moderne : le bien-être de l'enfant, l'amélioration du taux d'emploi des femmes, un meilleur partage des tâches familiales. Elle nous permettrait sans doute aussi d'apporter une première réponse aux inquiétudes concernant la natalité.
Ce dernier PLFSS de notre législature traduit une nouvelle fois une mobilisation exceptionnelle de la sécurité sociale face à la crise sanitaire et la volonté de transformer notre système social.
En ma qualité de rapporteur de l'assurance vieillesse, je souhaite tout d'abord revenir sur les enjeux financiers de notre système de retraite. En 2021, le solde attendu pour le régime général serait stable, et le déficit se situerait autour de 3,7 milliards d'euros, comme en 2020. La reprise de l'activité économique devrait permettre de réduire de 1 milliard ce déficit l'année suivante, grâce à une progression des recettes. Les dépenses atteindraient 257 milliards pour l'ensemble des régimes de base ; elles seraient elles aussi dynamiques, compte tenu de l'accélération de l'inflation que nous voyons poindre.
À ce propos, je relève que le Gouvernement a de nouveau décidé de préserver le pouvoir d'achat des retraités en maintenant l'indexation des pensions de retraite sur l'inflation, alors que les partenaires sociaux viennent de faire un choix différent s'agissant des régimes complémentaires : à partir du 1er novembre prochain, les pensions versées par l'AGIRC-ARRCO seront revalorisées de 1 %, au lieu de 1,5 % si elles suivaient l'inflation.
Concernant les mesures du volet retraites, je salue en particulier les dispositions en faveur des travailleurs indépendants. Les droits à la retraite des travailleurs les plus affectés par les restrictions sanitaires seront sécurisés grâce à un mécanisme qui leur permettra de valider autant de trimestres de retraite qu'au cours des années qui ont précédé la crise. Qui plus est, les professions qui n'étaient pas reconnues il y a quelque temps encore, comme les ostéopathes et les chiropracteurs, ainsi que les travailleurs indépendants ayant exercé à Mayotte et dont les cotisations n'ont pu être recouvrées en 2012 auront la possibilité de racheter des trimestres pour partir en retraite plus tôt et à taux plein. Je me félicite en outre de l'assouplissement du dispositif de cumul emploi-retraite pour les professionnels de santé, qui ont été particulièrement mobilisés.
Je tiens à saluer le contenu de ce cinquième et dernier PLFSS de la législature, à la fois ambitieux et réaliste. S'il demeure marqué par la crise sanitaire, des mesures structurelles en émergent bel et bien. Ainsi, aucune économie ne sera demandée l'année prochaine aux établissements de santé, et l'ONDAM hospitalier hors dépenses de crise augmentera de 4,1 %. Ce PLFSS permettra en outre de poursuivre et d'intensifier nos efforts en matière de transformation du système de santé, d'amélioration de la prévention et de l'accès aux soins, de soutien à la perte d'autonomie, d'aide aux familles monoparentales.
Les dispositions relatives aux recettes de la sécurité sociale sont centrales. Nous pouvons présager que la reprise de la croissance économique aura un impact positif sur les recettes, grâce à la fin progressive du recours à l'activité partielle et à la création d'emplois. Le volet recettes prévoit une mesure importante pour le pouvoir d'achat des particuliers employeurs : le versement en temps réel du crédit d'impôt et des aides sociales liées aux services à la personne. Il comprend en outre des mesures visant à améliorer la protection sociale des travailleurs indépendants, comme prévu dans le plan qui leur est dédié.
Dans son dernier rapport, la Cour des comptes préconise d'étendre le champ des LFSS aux régimes de retraites complémentaires et d'assurance chômage, tout en chaînant les objectifs annuels et pluriannuels à ceux des documents de cadrage des finances publiques. Cette recommandation soulève de nombreuses questions. Quels sont vos avis sur ce point ?
Concernant le soutien à la perte d'autonomie, le texte prévoit 3,5 milliards d'euros d'engagements nouveaux, consacrant ainsi les mesures engagées dès 2020 avec la création de la cinquième branche. L'extension des mesures du Ségur, les revalorisations salariales, l'évolution des missions des EHPAD, l'accélération du plan d'investissement du Ségur et la création du système d'information pour la gestion de l'APA – lequel devrait, selon moi, inclure la PCH – sont autant de progrès en la matière. Je regrette toutefois que les professionnels intervenant chez les particuliers employeurs ne soient pas intégrés dans le dispositif de soutien au domicile, car ils représentent 50 % de l'aide à la personne. J'ai déposé des amendements en ce sens ; j'espère qu'ils recueilleront votre aval.
Concernant la santé, le texte comporte plusieurs mesures phares améliorant l'accès aux soins et la prévention : la prise en charge de la contraception jusqu'à 25 ans, l'accès facilité à la filière visuelle, la généralisation d'expérimentations structurantes en matière de prévention, l'entrée de la télésurveillance dans le droit commun de l'assurance maladie. Soulignons en outre que ce PLFSS marque un engagement historique en faveur du secteur du médicament, avec plusieurs mesures favorisant l'innovation et un budget en hausse de 1 milliard, conformément aux annonces faites par le Président de la République en juin 2021.
L'an dernier, nous avions évoqué la tarification des transports bariatriques. Or le dossier reste en suspens, malgré l'urgence de la situation. Qu'en est-il du rapport qui devait être remis au Parlement ? Si un accord général a été conclu en décembre 2020, la Caisse nationale de l'assurance maladie (CNAM) et les organisations de transport poursuivent des négociations spécifiques sur les transports bariatriques. Où en sont-elles ?
Je me réjouis que notre commission entame les débats sur ce texte mercredi matin. Le groupe La République en Marche présentera plusieurs amendements sur les volets autonomie et santé.
Vous le comprendrez, le groupe Les Républicains ne fait pas du budget de la sécurité sociale et de ce PLFSS la même analyse que la majorité...
Ainsi que cela a été indiqué à la Commission des comptes de la sécurité sociale, ces comptes ne vont pas se redresser avant un certain temps. Le déficit des régimes de base et du FSV devrait s'établir à 38,7 milliards d'euros en 2020, à 34,6 milliards en 2021 et à environ 21,6 milliards en 2022, d'après ce que vient de nous indiquer M. le ministre délégué chargé des comptes publics. Autrement dit, malgré une reprise de l'activité – soyons positifs et souhaitons qu'elle soit aussi durable que possible –, le retour à la normale n'interviendra pas avant de nombreuses années. On a même évoqué, pour la fin de l'année 2025, un déficit qui serait encore de l'ordre de 15 milliards.
Les dettes dont la gestion est confiée à la Caisse d'amortissement de la dette sociale (CADES) s'accumulent. Qu'envisagez-vous à cet égard ? La CADES devra-t-elle reprendre une nouvelle partie de la dette sociale après 2033 ?
Qui plus est, vous n'avez pas de vision d'ensemble de l'avenir du système de santé. Vous arrosez à tout vent, mais vous ne prévoyez pas à ce stade – c'est votre droit – de véritables réformes structurelles. À quand de telles réformes ?
Pour le financement de la cinquième branche, ce sont les assujettis à la contribution sociale généralisée (CSG) et les départements qui seront mis à contribution, puisqu'une part importante du produit de la CSG sera transférée à la Caisse nationale de solidarité pour l'autonomie (CNSA).
S'agissant des revalorisations salariales des aides à domicile, les départements dénoncent une mesure qui pèsera sur leur budget, à hauteur de 600 millions environ. On évoque un tarif socle de 22 euros, alors que le tarif moyen en France se situe actuellement entre 24 et 25 euros.
Quant à la politique familiale, elle est totalement en panne. Les associations contestent le transfert d'une part des recettes de la branche famille vers les branches maladie et autonomie. Un tel transfert est illogique, à plus forte raison dans un contexte difficile pour les familles.
J'en viens à la réforme du financement des soins de suite et de réadaptation (SSR) et de la psychiatrie, qui concerne en particulier les établissements de santé. Il était prévu que les textes d'application soient publiés au cours du premier trimestre 2021. Où en sont-ils ?
Enfin, je souligne à mon tour que le dossier des transports bariatriques est toujours au point mort, alors même qu'un amendement a été voté à ce sujet en 2020.
Le PLFSS pour 2022 intervient dans le contexte particulier d'une crise sanitaire, économique et financière sans précédent. Mais le pays a tenu, et le système de santé, fortement mobilisé, a fait preuve d'une capacité d'adaptation qu'il ne faudra pas oublier. Nous devons apprécier les mesures prises, en particulier celles du Ségur, à l'aune de ce qu'ont fait les autres pays d'Europe.
Je souligne à mon tour, au nom du groupe Mouvement démocrate (MODEM) et démocrates apparentés, les importants efforts prévus, notamment la mobilisation de 2 milliards en faveur du personnel hospitalier. Les sages-femmes et les aides-soignants étaient en attente de telles mesures ; le secteur médico-social s'est senti oublié, mais cet oubli est désormais réparé.
Des avancées considérables ont été réalisées concernant la prise en charge de la contraception des femmes de moins de 25 ans, la définition d'un cadre pour la télésurveillance, la réforme de l'accès aux soins visuels, le remboursement des consultations de psychologues libéraux et la fixation d'un tarif plancher dans la branche autonomie. Les réformes structurelles tardent à arriver mais elles seront sans doute l'objet du prochain quinquennat.
Diverses améliorations sont encore attendues. S'agissant de la désertification médicale, êtes-vous prêts à assouplir le parcours de soins pour faciliter l'accès à des professionnels de santé ? Il n'y a pas de recette magique, le chemin à emprunter est celui des professions intermédiaires, qui ont montré qu'elles étaient capables d'intervenir à tout moment, des praticiens à diplôme hors Union européenne (PADHUE), de l'exercice mixte ville-hôpital qu'il convient d'encourager et des médecins adjoints dont il faut faciliter l'exercice.
Un plan pour le développement des soins palliatifs a été lancé en septembre. Cette ambition exigeante doit être affichée de façon plus concrète dans le PLFSS, avec une déclinaison régionale afin d'apporter une réponse territoriale.
La politique du médicament est la variable d'ajustement des PLFSS depuis de longues années. Une nouvelle politique tarifaire serait envisagée concernant les médicaments innovants. Il faut aller plus loin, en réarmant l'outil pharmaceutique français pour lutter contre l'ultra-dépendance de la France et l'Europe dans ce domaine. Êtes-vous prêts à nous suivre en utilisant le plan de relance dans ce but ?
Le pouvoir d'achat a globalement tenu durant la crise mais, la croissance étant de retour, nous souhaitons étudier avec Olivier Dussopt les moyens d'aller plus loin en matière d'intéressement et de participation.
La labellisation des hôpitaux de proximité peine à se traduire localement. Alors qu'il existe un fonds d'investissement très important pour les hôpitaux, il faudrait garantir, région par région, que le maillage entre centres hospitaliers régionaux universitaires (CHRU) et les petits centres hospitaliers généraux sera respecté.
Enfin, la télémédecine a montré son utilité majeure lors de la pandémie ; il convient de lui donner un cadre un peu plus formel.
Le PLFSS pour 2022 semble anticiper une sortie de la crise de la covid. Avec un déficit prévu de 21,4 milliards d'euros en 2022, contre 34,5 milliards en 2021 et 38,7 milliards en 2020, l'amélioration de la situation financière de la sécurité sociale paraît engagée. Nous mettons toutefois le Gouvernement en garde contre un retour de la rigueur budgétaire en matière de santé, en particulier à l'hôpital, alors que la covid sévit toujours et qu'une reprise épidémique ne peut être totalement écartée.
Le texte comporte des mesures que nous soutenons, comme la gratuité de la contraception des femmes jusqu'à 25 ans – même si nous aurions souhaité qu'elle aille au-delà – et la simplification de l'accès à la complémentaire santé solidaire pour les bénéficiaires du RSA et du minimum vieillesse. Cependant, le RSA n'est pas ouvert aux jeunes de 18 à 25 ans et n'est pas automatiquement versé aux personnes qui y sont éligibles. Le Gouvernement doit se pencher sur ces questions pour améliorer la couverture médicale des plus modestes. Nous saluons enfin l'instauration d'un prix plancher de 22 euros de l'heure pour les services de soins à domicile.
Toutefois, la situation critique de nos comptes sociaux résulte du choix politique du Gouvernement de faire supporter une partie substantielle du coût de la crise sanitaire à la branche maladie, désormais plongée dans un déficit durable, plutôt que d'y faire face avec le budget de l'État. Cela est tout sauf anecdotique, car la réponse aux urgences sanitaires relève de l'État et de la solidarité nationale. Or, en demandant à la solidarité professionnelle de supporter seule la charge de la dette covid, le Gouvernement exclut de facto de nombreux contributeurs de la participation à l'effort de guerre dont parlait le président Macron. C'est pourtant grâce au secours de la sécurité sociale que les multinationales, les actionnaires et les banques ont été sauvées et voient désormais leurs activités prospérer.
Nous alertons aussi sur la priorité que constitue la lutte contre la perte d'autonomie. Le PLFSS ne permettra pas de répondre au défi collectif du vieillissement de la population, la cinquième branche ne disposant pas de financements pérennes suffisants. Alors que les besoins de recrutements en EHPAD s'élèvent à 200 000 emplois supplémentaires pour atteindre le ratio d'un soignant par résident, le Gouvernement ne propose de créer que 10 000 postes en cinq ans : ce décalage est insatisfaisant.
Enfin, en 2022, l'ONDAM progresse de 3,8 %, une fois les dépenses exceptionnelles liées à la covid neutralisées – mais seulement de 2,3 % en tenant compte de l'inflation de 1,5 %. C'est très peu au regard des besoins de financement du Ségur de la santé. Quant à l'ONDAM hospitalier, son augmentation de 2,7 % n'est plus que de 1,2 % une fois l'inflation déduite, soit largement en dessous des 2 à 2,5 % nécessaires pour maintenir l'existant dans les hôpitaux, selon la Fédération des hôpitaux publics. L'ONDAM hospitalier se caractérise donc comme la poursuite, voire l'aggravation de la politique de fermeture de lits d'hôpitaux.
Avec 135 millions de tests et 50 millions de personnes vaccinées, l'État protecteur a parfaitement joué son rôle.
Pour la première fois, l'hôpital ne subira pas de baisse. Nous aurions toutefois aimé qu'un tel moratoire soit également appliqué au prix du médicament. Depuis plusieurs années, le secteur pharmaceutique supporte des baisses d'environ 1 milliard d'euros, ce qui le fragilise, comme la crise l'a démontré. Si le plan de relance permet à notre industrie pharmaceutique d'investir, un moratoire sur la baisse du prix du médicament lui permettrait peut-être de redevenir le leader qu'elle a été. Pourquoi encore tant de baisses ?
Après un long combat, les médicaments biosimilaires réapparaissent pour la première fois depuis 2014 dans le PLFSS. Toutefois, ils ne sont crédités que de 6 millions d'euros d'économies, alors que l'on peut en faire pratiquement 700 millions. Pourquoi ne pas aller plus vite dans ce domaine ?
Des efforts ont été faits concernant les grossistes répartiteurs, mais le compte n'y est pas tout à fait, notamment s'agissant des produits issus du froid. Pouvez-vous nous apporter des précisions sur ce sujet ?
La nouvelle tarification des transports bariatriques n'a toujours pas été adoptée alors que nous avons voté des amendements à ce sujet en 2020. De même, concernant les produits hybrides, votés en 2019, les décrets d'application ne sont pas encore publiés.
Votre plan concernant les soins palliatifs est ambitieux : comment se traduit-il dans les chiffres ?
Je déposerai un amendement concernant le tiers payant intégral dans le cadre du 100 % santé, dispositif voté l'année dernière mais qui, pour des raisons techniques, ne semble pas aboutir.
Je salue les progrès accomplis dans le domaine de l'autonomie. Je m'interroge toutefois sur l'évolution du tarif socle de 22 euros : pouvez-vous rassurer les départements sur une hausse éventuelle et sur ses modalités de prise en charge ?
La dotation complémentaire est une bonne nouvelle ; j'aimerais en savoir un peu plus sur ce sujet.
Concernant les EHPAD plateformes, d'autres structures pourraient-elles assumer ce rôle de plateforme dans les secteurs géographiques dépourvus d'EHPAD ?
L'action publique a sans doute failli pour faire du domicile un véritable enjeu : comment pouvons-nous avancer sur le sujet de l'adaptabilité du logement ?
Enfin, il faut accompagner les professionnels et particuliers employeurs dans les mesures que nous prenons dans le PLFSS pour ce secteur.
Je tiens tout d'abord à manifester le désarroi de mon groupe parlementaire face aux conditions d'examen de ce PLFSS. Nous n'avons eu que trente-six heures pour déposer nos amendements sur un texte aussi important, que le Gouvernement n'a pas jugé opportun de nous présenter avant l'expiration de ce délai. C'est irrespectueux de la représentation nationale, sans même parler des conditions de travail de nos collaborateurs.
Sur le fond, nous constatons avec inquiétude que le déficit de la sécurité sociale atteint 34 milliards d'euros, tandis que la dette sociale culmine à 166 milliards. Nous ne sommes pas les seuls à vous mettre en garde contre la dégradation continue des finances sociales. La Cour des comptes a souligné le risque qu'une partie des prestations sociales versées aujourd'hui repose sur les générations futures et que le déficit dépasse de manière permanente 10 milliards d'euros à partir de 2024. Notre groupe considère qu'il n'est pas responsable de faire reposer les politiques publiques sur les épaules de nos enfants, voire de nos petits-enfants.
Le virage domiciliaire est une aspiration des patients et des personnes âgées, mais c'est également une source considérable d'économies par l'allègement de la fréquentation des EHPAD et des hôpitaux.
Nous regrettons les insuffisances du texte en matière de prévention, car celle-ci participe du renforcement de la qualité des soins. En permettant une prise en charge plus en amont des pathologies, elle constitue une source formidable d'économies pour les finances sociales.
Le chapitre relatif à la lutte contre les fraudes aux prestations sociales est encore mince, car limité à un petit article. Nous ne pouvons pas nous en satisfaire et vous recommandons la lecture de l'excellent rapport d'enquête de nos collègues Pascal Brindeau et Patrick Hetzel sur ce sujet.
Pour ce qui concerne l'organisation de notre système de santé, nous avons besoin d'un grand acte de décentralisation avec l'instauration d'un objectif régional des dépenses d'assurance maladie (ORDAM), permettant de décliner les grandes orientations définies préalablement par l'État dans les territoires. J'en parle chaque année.
Enfin, nous regrettons l'absence de mesures fortes pour lutter contre les déserts médicaux. Il est plus que temps d'agir pour que chacun de nos concitoyens, partout sur le territoire, ait accès à un médecin. Or ce n'est pas l'ouverture du numerus clausus selon les modalités qui ont été votées qui permettra à elle seule d'assurer une meilleure répartition des jeunes médecins.
Sur tous ces sujets, et bien d'autres encore, le groupe UDI et indépendants présentera des amendements.
Avec Mme Bourguignon, ancienne présidente de cette commission, M. Dussopt, ancien parlementaire, et M. Véran, ancien rapporteur général, comme ministres pour défendre ce texte, on se serait attendu, au minimum, à ce que la représentation nationale soit respectée. Eh bien non ! C'est même pire que sous l'ère Buzyn.
Où est donc l'époque où la présidente Brigitte Bourguignon et le rapporteur général Olivier Véran demandaient que le texte soit déposé plus tôt ? Les auditions de ministres servent à éclairer la représentation nationale, à répondre à nos interrogations sur les textes pour que nous puissions les amender. Quel est l'intérêt de vous auditionner après l'expiration du délai de dépôt des amendements, si ce n'est de pouvoir dire que vous vous êtes prêtés à l'exercice ?
Le texte n'a été déposé que jeudi soir et il est totalement différent de la version qui avait fuité. Je profite de l'occasion pour féliciter les collaborateurs de groupe et de députés : ils ont réussi, entre jeudi soir et samedi midi, à déchiffrer un texte aussi complexe qu'un projet de loi de financement de la sécurité sociale et à préparer des amendements. Ces conditions de travail sont inacceptables. Elles témoignent d'un véritable mépris envers notre institution.
En plus, on apprend que, contrairement à ce qui était annoncé, vous ne prévoyez qu'une journée en commission pour débattre de nos amendements, et que le débat en séance sur le passe sanitaire est programmé à cheval sur deux jours. Dans ces conditions, nous ne pouvons que craindre un taux d'irrecevabilité insensé pour nos amendements – battrez-vous le record de l'année dernière ? C'est à craindre. En tout cas, l'organisation des débats n'augure rien de bon.
La démocratie fait la beauté de notre pays, et le débat fait celle de notre assemblée. De quoi avez-vous peur ? Que nous prouvions que votre politique a consisté à supprimer 5 700 lits en 2020, en pleine pandémie ? Que nous soulignions le fait que vous aviez prévu plus de déficit mais qu'en bons gestionnaires, vous avez préféré freiner les dépenses plutôt que d'effectuer celles qui auraient permis de répondre à la crise et à l'urgence sanitaire ? Que nous montrions que la fameuse reprise de la dette des hôpitaux est conditionnée à des plans budgétaires contraints, tandis que la fermeture des hôpitaux et la suppression de lits se poursuivent et que, sous couvert d'une grande rigueur budgétaire, vous prévoyez tout simplement une dégradation de l'ensemble de l'offre de soins ? Que nous disions que vous ne prenez en considération ni la démographie, ni le vieillissement des populations, ni l'évolution des maladies chroniques, ou encore que vous abandonnez le secteur de la psychiatrie, alors que les professionnels du secteur soulignent l'urgence ?
Je finirai mon propos en soulignant votre renoncement, votre trahison et vos mensonges à propos de la défunte loi consacrée au grand âge et à l'autonomie. Quatre ans de promesses, quatre ans de rapports, quatre ans de reports pour, en définitive, un seul article traitant des EHPAD dans ce PLFSS. Vous vous targuez d'annoncer l'embauche, d'ici à quatre ans, de 10 000 soignants supplémentaires, alors que Monique Iborra et moi-même, dans le rapport que nous avions présenté en mars 2018, préconisions de créer 210 000 postes en urgence, et ce ne serait-ce que pour arriver à un ratio minimal. Avez-vous si peu de respect pour nos aînés et pour le personnel des EHPAD ? Nous parlons de maltraitance envers les résidents de ces établissements, leurs familles et le personnel depuis 2017. Agissez et arrêtez de mentir sur vos actions !
Pour conclure, vos méthodes maltraitent les Français et leurs représentants. Nos concitoyens ne vous disent pas merci. Votre PLFSS est, hélas ! une triste farce qui ne répond ni aux enjeux ni à l'urgence du moment.
Nous examinerons effectivement le texte mercredi, mais si nous n'avons pas fini, nous ouvrirons le jeudi, bien entendu.
Après quatre années de compression des dépenses hospitalières enfin avouée, et en dehors du rattrapage prévu par le Ségur, soit plus de 4 milliards d'euros depuis 2017, vous avez enfin choisi de maintenir le niveau de l'année précédente. Cela ne permettra pas de réparer un hôpital en souffrance. Certes, cela marque une pause, mais ne casse pas l'engrenage des restructurations et des suppressions de lits, sous l'égide de groupements hospitaliers de territoire (GHT) dont le bilan est pour le moins mitigé. Environ 13 300 lits ont été supprimés depuis 2017, dont 5 700 en 2020, en pleine crise sanitaire. Quels sont donc vos plans, de ce point de vue, pour 2022 ?
Vous prévoyez une provision de 4,9 milliards d'euros pour absorber les frais de la crise sanitaire, qui n'est pas achevée. Or, l'année dernière, les réserves se sont avérées insuffisantes. Sur quelles prévisions sanitaires se fonde cette provision ?
Je ne peux que me féliciter, tout en regrettant un délai de latence singulièrement long, de voir étendues les mesures de rattrapage du Ségur – même si celles-ci sont insuffisantes – aux agents qui avaient été oubliés. C'était un choix intenable, qui n'a pas été sans effets. Ce n'est pas faute de vous avoir prévenus.
Le problème est que vous n'en tirez pas toutes les conséquences. Par exemple, vous vous entêtez à maintenir un système d'exonération qui est devenu la règle, et vous refusez d'envisager des recettes nouvelles pour financer une réponse à la hauteur des besoins. Les recettes de la branche maladie restent inférieures à leur niveau de 2018, alors que cette branche fait face à une explosion des dépenses. Il manque 21 milliards pour couvrir les dépenses de santé, soit l'équivalent de l'allégement des cotisations patronales d'assurance maladie ayant pris le relais du crédit d'impôt pour la compétitivité et l'emploi (CICE).
La sécurité sociale est confrontée à une crise de financement. Les exonérations se chiffraient à 68 milliards d'euros en 2019, soit un doublement en cinq ans, pour un résultat économique contestable, et ce alors que les inégalités de revenus s'accroissent et que les paradis fiscaux prospèrent.
Vous êtes coincés dans votre logique libérale : les efforts se concentrent uniquement sur les dépenses. La reprise économique ne suffira pas à couvrir le delta, car les besoins en matière de santé et d'autonomie, par exemple, sont avérés. Il en résulte un déséquilibre budgétaire qui servira sans doute, à l'avenir, à imposer de nouvelles coupes claires dans la protection sociale. J'ai vu ressurgir le fantôme fatigué de la réforme des retraites. Vous avez évoqué également des transferts à la CADES. La manœuvre est grossière : visiblement, vous préparez des régressions sociales. C'est donc un budget qui ne prépare pas correctement l'avenir.
Vous avez renoncé à la grande réforme de l'autonomie, tant annoncée. Loin des besoins identifiés dans le rapport Libault et le rapport Fiat-Iborra, vous présentez une hausse de 6 %, qui sera en grande partie absorbée par les revalorisations du Ségur en faveur du secteur médico-social. Les annonces vont globalement dans le bon sens, mais vous n'avez présenté qu'un échantillon : on est très loin du compte. Par ailleurs, la branche sera financée à 90 % par la CSG, c'est-à-dire par les salariés et les retraités, les employeurs ne contribuant qu'à hauteur de 6 % à travers la contribution de solidarité pour l'autonomie (CSA). Cela témoigne d'une fiscalisation croissante de la sécurité sociale.
Nous soutiendrons les mesures positives, telles que l'extension jusqu'à 25 ans de la gratuité de la contraception, la constitution de droits à la retraite pour les indépendants pendant les périodes où le covid a affecté leurs activités, ou encore l'accès facilité à la complémentaire santé. Mais il y a tant à rattraper ! En outre, les largesses toutes relatives que vous inspire la période électorale ne suffisent pas à impulser les changements d'orientation nécessaires.
En ce qui concerne l'extension de la liste en sus, la concertation a eu lieu, le Conseil d'État a été saisi fin août et le décret est en préparation. Le dispositif sera opérationnel le 1er janvier 2022.
La question des médicaments biosimilaires se pose effectivement depuis longtemps. La disposition inscrite dans un PLFSS lors d'une précédente législature n'avait pu être appliquée, car la concertation avait été insuffisante. Lors de la dernière LFSS, l'engagement a été pris de constituer un groupe de travail. Celui-ci s'est réuni. Les usagers ont été associés à la concertation. La liste de molécules substituables sera définie par arrêté pris sur avis de l'Agence nationale de sécurité du médicament et des produits de santé (ANSM). Ainsi, l'acceptabilité pour toutes les parties prenantes sera garantie. Nous avançons de façon plus modeste qu'en 2014, c'est vrai, mais cette fois nous progresserons.
S'agissant de l'extension de la gratuité de la contraception pour les jeunes femmes de moins de 25 ans, l'information a déjà beaucoup circulé. Nous avons informé les professionnels sur le site de l'assurance maladie en ligne (AMELI). L'information est également relayée par le numéro vert national sexualités, contraception, IVG. Nous passons aussi par le Planning familial, les services de protection maternelle et infantile (PMI), les associations et les centres gratuits d'information, de dépistage et de diagnostic (CEGIDD).
L'expérimentation conduite en Normandie dans trois caisses primaires d'assurance maladie (CPAM), dont l'objectif est d'aller au contact des personnes reconnues en maladie professionnelle liée à l'amiante, a bien fonctionné. Sa généralisation dans la région est en cours et, compte tenu des bons résultats obtenus, j'ai demandé que l'on généralise progressivement le dispositif sur l'ensemble du territoire national à compter de 2022.
Depuis 2020, nous avons multiplié les opérations de communication à propos du fonds d'indemnisation des victimes de pesticides. Un site internet spécifique a été créé pour informer et accompagner. Une campagne de sensibilisation des professionnels a également été lancée. Nous sommes en train de finaliser une campagne de communication globale dans les territoires antillais, sous l'égide des caisses générales de sécurité sociale (CGSS) et de la CNAM. Il apparaît en effet que le nombre de saisines est encore trop faible.
S'agissant de la création d'un tableau de maladie professionnelle relatif au cancer de la prostate associé aux pesticides, parmi lesquels le chlordécone, l'Agence nationale chargée de la sécurité sanitaire de l'alimentation, de l'environnement et du travail (ANSES) a rendu son rapport d'expertise collective en juillet dernier. Il conclut à un lien probable entre l'exposition aux pesticides et la survenue d'un cancer de la prostate. Tous les partenaires sociaux et toutes les commissions compétentes se sont saisis du sujet et se sont prononcés sur la création d'un tableau. Du côté des régimes agricoles, l'ensemble des organisations salariales et patronales ont donné leur accord de principe ; une nouvelle réunion a lieu demain pour avancer sur les modalités opérationnelles. En ce qui concerne le régime général, les travaux sont en cours. Il reste des divergences sur le principe d'un tableau. Les représentants d'employeurs souhaitent, par exemple, que soit menée une réflexion sur une meilleure prise en charge des cancers de la prostate par voie complémentaire et qu'une réflexion plus globale soit organisée sur la prise en charge des pathologies. Je suis attentivement la conclusion des différents travaux ; ensuite viendra le temps des arbitrages.
Nous avons déjà allongé le congé de paternité et amélioré le congé de maternité pour les travailleuses indépendantes et les exploitantes agricoles, grâce aux propositions des parlementaires de la majorité. Une réflexion plus générale a été engagée sur le congé parental dans le cadre des travaux de Christel Heydemann et de Julien Damon, mais les résultats ne sont pas assez mûrs pour déboucher sur des propositions dans le cadre de ce PLFSS. Le sujet fera peut-être l'objet de débats au cours de l'année ; quoi qu'il en soit, à terme, nous avancerons.
En ce qui concerne les moyens des CAF, soyez rassurée : nous avons augmenté de 420 le nombre d'équivalents temps pleins pour tenir compte des nouvelles missions qui leur incombent pour l'intermédiation du paiement des pensions alimentaires.
Une enveloppe de 5 millions d'euros est prévue pour le financement des transports bariatriques. Des négociations avec l'assurance maladie sont en cours pour la mise en place de nouveaux tarifs. À cause de la crise sanitaire, ces travaux ont été repoussés à 2022. Le rapport prévu ne pourra être remis qu'une fois les nouveaux tarifs déterminés, ce qui sera fait dans quelques mois.
S'agissant des complémentaires et du régime d'Alsace-Moselle, j'ai saisi le HCAAM de l'articulation entre assurance maladie obligatoire (AMO) et assurance maladie complémentaire (AMC).
Le financement des produits de santé augmente de 2,7 % dans le cadre de l'ONDAM, soit la plus forte hausse intervenue depuis que je suis en mesure de lire un PLFSS ; c'est 50 % de plus que la tendance de la décennie écoulée. Soutenir l'innovation, c'est aussi reconnaître que, quand un médicament a été exploité pendant quinze ans, que sa production ne coûte plus aussi cher qu'au début et que la recherche et développement (R&D) a été totalement rentabilisée, on peut se permettre de baisser son prix. Le système est équilibré. Nous mettons le paquet sur l'innovation, l'accès précoce et la réindustrialisation.
Les accords issus du CSIS ont été très bien accueillis : 80 % des cadres de l'industrie du médicament les ont signés, ce qui est une première.
En ce qui concerne les médicaments hybrides, nous avons pris note de la décision du Conseil d'État. Nous travaillons avec l'ANSM sur le sujet.
Pour ce qui est des grossistes répartiteurs, le Gouvernement vient de confirmer le lancement des travaux pour l'instauration d'un forfait pour les produits froids rémunéré à hauteur de 30 millions d'euros, lesquels s'ajoutent aux 30 millions de baisse de la taxe sur la vente en gros des spécialités pharmaceutiques. Cette mesure, prévue à l'article 4 du PLFSS, devrait permettre aux grossistes d'augmenter leurs marges de 30 millions. On n'a jamais fait autant pour cette profession, mais c'est un effort légitime car elle a été au rendez-vous durant toute la crise sanitaire.
S'agissant des soins palliatifs, 171 millions d'euros supplémentaires ont été accordés pour la période 2021-2024, afin de construire, en priorité, des structures en outre-mer ou dans certains territoires de la métropole qui en manquent cruellement.
Concernant la réforme du financement de la psychiatrie, le décret en Conseil d'État ayant été publié le 30 septembre dernier, elle devrait s'appliquer dès le 1er janvier prochain. Selon les estimations, près de 90 % des établissements sortent gagnants de cette réforme. Pour les autres, les pertes seront amorties durant quatre ans.
Par ailleurs, le décret relatif à la réforme des soins de suite et de réadaptation (SSR) devrait être publié d'ici à la fin de l'année. Les simulations ainsi que les garanties de financement prévues sont rassurantes, là encore.
Quant aux 5 000 lits prétendument fermés, rappelons que si la transformation d'une chambre double en chambre simple pour éviter la propagation d'un virus très contagieux conduit bien à fermer un lit, ce n'est pas un acte volontaire. Le lit n'est fermé que le temps de la pandémie, pour des raisons sanitaires. Il n'est pas destiné à le demeurer. En revanche, tous les projets destinés à moderniser ou créer des hôpitaux, notamment dans la région de Mme Fiat, s'accompagnent de réouverture de lits. Je mets d'ailleurs Mme Fiat au défi de me citer un seul dossier dans lequel nous demanderions la fermeture de lits en échange d'investissements. Je me suis moi-même assuré que cette logique-là était révolue.
Si nous devons réévaluer la trajectoire macroéconomique, nous le ferons au fil du texte, comme l'année dernière. Un projet de loi de finances rectificative sera déposé en fin de gestion et le Haut Conseil des finances publiques sera saisi. Nous réfléchissons, avec Bruno Le Maire, aux différentes hypothèses car, selon nombre d'organismes, la croissance pourrait dépasser nos prévisions et atteindre 6,25 %.
En outre, le Haut Conseil des finances publiques, saisi début septembre avant la publication des chiffres de l'emploi par l'INSEE, a considéré que notre prévision de masse salariale était basse.
Concernant les artistes-auteurs, nous sommes ouverts à la reconduction temporaire du dispositif de régularisation de cotisations prescrites après 2021. Il reste en effet des demandes. La durée de reconduction doit être fixée avec les acteurs, mais on pourrait envisager un délai d'un ou deux ans. Le Gouvernement est favorable à une mesure qui permettrait aux services de l'action sociale d'aider les artistes-auteurs à bénéficier du dispositif de régularisation des cotisations prescrites.
Par ailleurs, le Gouvernement n'est pas favorable à l'extension du périmètre des lois de financement de la sécurité sociale à l'UNEDIC et à la retraite complémentaire. Nous n'avons pas non plus prévu d'aller plus loin que la loi organique de 2020, par laquelle 136 milliards d'euros de dette sociale seront transférés à la CADES d'ici à 2023.
Il est paradoxal de parler de rigueur ou d'austérité quand l'objectif national de dépenses d'assurance maladie (ONDAM) passe de 2,6 % à 3,8%, pour tenir compte des dépenses du Ségur et de la provision de 5 milliards d'euros, ou encore quand nous n'imposons aucune économie aux hôpitaux mais qu'au contraire nous leur proposons de profiter des fruits des mesures de rationalisation ou d'efficience qu'ils pourraient prendre.
Concernant plus précisément cette provision de 5 milliards, 3,3 milliards financeront la vaccination, 1,6 milliard financera les tests dont la prise en charge est prévue. Nous espérons que la sortie de la crise sanitaire nous évitera de prévoir d'autres dépenses exceptionnelles. C'est une provision, non un plafond. Si elle s'avérait insuffisante, nous serions en mesure de la compléter.
Enfin, 1 milliard d'euro a été transféré de la branche famille vers la branche maladie afin de prendre en charge les indemnités journalières pour garde d'enfant pendant la crise sanitaire. Cette mesure relève de la solidarité entre les branches.
Plutôt que de lancer des polémiques à propos d'un projet de loi, l'on pourrait reconnaître, me semble-t-il, l'effort massif que nous faisons en matière d'autonomie et d'investissement dans les EHPAD, qui est salué par les professionnels eux-mêmes. Vous résumez la politique du grand âge au recrutement de soignants, que vous jugez insuffisant. C'est en avoir une vision déformée et ignorer que malgré les augmentations issues du Ségur, les freins au recrutement subsistent. Voyez-vous, je préfère que nous adoptions une méthode plus réaliste, en les déverrouillant progressivement et en rendant ces métiers attractifs.
De même, il n'est pas pertinent de dresser des généralités sur les taux d'encadrement dans les EHPAD, car chaque établissement est différent des autres. Dans certains, plus de la moitié des patients souffrent de la maladie d'Alzheimer. L'offre devra donc être adaptée à chaque territoire.
Les crédits de la branche autonomie augmentent de 6 % : comment est-il possible de juger insuffisant cet effort sans précédent ?
Concernant la rémunération des aides à domicile et l'avenant 43, l'Assemblée des départements de France, par la voix de François Sauvadet, est d'accord pour le respecter. Beaucoup de présidents de département l'ont d'ailleurs prévu lors du vote de leur budget. De surcroît, les départements ne sont pas laissés seuls face à cette charge. Cette année, la compensation destinée aux départements s'élève à 70 %. Elle s'établira à 50 %, de manière pérenne, dans les prochaines années.
Pour ce qui est du tarif-socle, la moyenne se situe entre 20 et 21 euros mais certains départements sont restés à 17, voire à 16 euros, d'où la nécessité d'harmoniser. Pour les rares qui sont bien au-dessus, nous verrons comment la dotation complémentaire pourra compenser cette charge, car il n'y a aucune raison de ne pas récompenser les départements qui auront été plus vertueux que les autres.
S'agissant de la dotation qualité, les critères n'ont pas été totalement définis mais il faudra tenir compte de l'amplitude horaire, des zones blanches et de la lourdeur des pathologies. Nous verrons ensemble si d'autres critères peuvent être retenus.
J'en viens aux particuliers employeurs. La complexité pour évaluer le tarif national tient à la nature du contrat, quasiment de gré à gré, qui les lie au salarié. Nous avons reçu la présidente de la fédération la plus importante et nous nous sommes engagés à travailler ce sujet avec eux, sans oublier celui du crédit d'impôt.
Ce PLFSS ambitieux et volontaire affiche, pour les établissements de santé, un ONDAM de 3,7 milliards d'euros en 2022, soit une augmentation de 4,1 %.
Cette hausse permet-elle de couvrir l'intégralité des surcoûts liés à la covid et de mettre en œuvre le Ségur de la santé – notamment les revalorisations salariales ? Permet-elle aussi la poursuite des transformations du système de santé, dont l'importance a été rappelée lors de la remise du dernier rapport de la Cour des comptes sur l'application des LFSS ? Cette transformation est indispensable du point de vue économique, mais aussi pour continuer à améliorer l'attractivité des métiers de la santé et la qualité de la prise en charge des patients
L'article 33 de la loi visant à améliorer le système de santé par la confiance et la simplification, dite loi Rist, fait monter l'inquiétude dans les établissements publics de santé. L'hôpital du Bailleul envisage de fermer, à partir du 15 octobre, ses services des urgences et de chirurgie ainsi que la maternité, rien de moins. Je partage les inquiétudes sur le mercenariat et sur les risques financiers, mais ne faudrait-il pas assouplir le cadre trop contraignant de ce dispositif ? Déposerez-vous un amendement en ce sens lors de la discussion de ce PLFSS ? Allez-vous donner prochainement des instructions aux directions des finances publiques, aux ARS et aux chefs d'établissement ?
Un chef de service masculin me faisait remarquer, non sans humour, qu'il était plus facile d'avancer sur la prostate que sur la santé des femmes. Je sais que ce sujet vous tient à cœur et que les nombreuses annonces en la matière seront suivies d'effet.
L'endométriose, qui touche entre 2 millions et 4 millions de femmes en France, est souvent à l'origine d'une infertilité. Le Gouvernement a-t-il l'intention de lancer rapidement une campagne massive d'information et de détection concernant cette maladie ?
Les sages-femmes ont bénéficié d'une revalorisation salariale et d'une meilleure reconnaissance de leurs compétences. Mais encore faut-il que les femmes sachent qu'elles sont leur premier recours de santé. Là encore, le Gouvernement envisage-t-il une grande campagne d'information pour faire mieux connaître et reconnaître leur métier ?
Parmi les mesures de ce PLFSS qui vont dans le bon sens, j'approuve particulièrement celles sur l'accès aux complémentaires santé et à la contraception. Cependant, cela ne va pas suffisamment loin.
Nous traînons comme un boulet les 136 milliards d'euros de dette covid, qui ont été transférés à la CADES et qui nous empêchent d'aller aussi loin que nous pourrions le faire. C'est le cas pour la revalorisation des professionnels de santé, notamment les sages-femmes. Les mesures qui ont été annoncées pour ces dernières ne sont pas suffisantes. Il faut augmenter davantage leur traitement et ne pas trop jouer sur les primes. Il faut aussi mieux prendre en compte la valeur universitaire de leur formation pour permettre la reconnaissance de carrières hospitalo-universitaires. Il s'agit aussi de leur permettre d'effectuer certains actes de pédiatrie.
Vous avez dépassé votre temps de parole. J'en suis désolée, mais il fallait en venir directement à votre question.
Comment va être mise en œuvre, d'ici à 2030, la mesure destinée à alléger la dette des hôpitaux prise dans le cadre du Ségur de la santé ? J'y suis très attentif pour les hôpitaux universitaires de Strasbourg, qui ont accumulé une dette importante car ils n'avaient pas fait appel au concours de l'État.
Je salue l'extension des complémentaires santé, mais comment s'assure-t-on que le coût global de la santé pour nos concitoyens demeure limité ?
Enfin, il faut trouver une solution pour le transport des patients obèses. Si le secteur ambulancier n'y parvient pas, il faudra que l'État s'en mêle.
L'application effective des mesures sur le terrain – le « dernier kilomètre » – progresse, notamment les financements du plan d'aide à l'investissement du quotidien dans les EHPAD. Mais on pourrait simplifier les procédures d'appel à projets menées par les ARS, souvent complexes et avec des délais de dépôt extrêmement courts.
Le manque de personnel conduit, dans certains départements, à des fermetures de lits de soins de suite et de réadaptation. Il y a vraiment urgence à tout essayer.
Après deux années difficiles au cours desquelles la priorité face à la pandémie a toujours été de sauver des vies, le rééquilibrage des comptes sociaux ne doit pas obérer l'accès effectif de tous aux soins. Je vous sais sensibles à une politique de santé efficiente et indissociable d'une éthique de santé publique.
Pourriez-vous préciser votre vision des territoires numériques de santé s'agissant de l'accès aux soins et des pertes de chances ? Dans mon territoire rural, à Chauny, nous attendons un appareil d'imagerie par résonance magnétique (IRM), utile pour la thrombolyse. Quel rôle souhaitez-vous pour la télésurveillance en matière de suivi des maladies chroniques ?
Les personnels de santé se sont appropriés l'article 51 de la LFSS de 2018, notamment pour la lutte contre l'obésité infantile. Pour les personnes âgées, pensez-vous étendre les idées qui en ont résulté aux chutes – responsables de 12 000 décès annuels et de 2 milliards d'euros de coût pour l'assurance maladie – et à l'accès aux soins dentaires, particulièrement en EHPAD ?
Dans le cadre des annonces du Président de la République relatives à la santé mentale, un entretien post-natal sera proposé le premier mois suivant l'accouchement, éventuellement suivi d'un second le troisième mois. Cet entretien sera remboursé par l'assurance maladie, ce qui implique que seuls les médecins et les sages-femmes pourront le conduire. Cette exclusivité pourrait pénaliser les services de la PMI, et donc les départements.
Ne serait-il pas envisageable de confier également ces entretiens à des infirmières puéricultrices ou à des psychologues, avec le même degré d'expertise et selon un protocole similaire à celui prévu pour les bilans de santé en école maternelle ? Une coordination est-elle prévue avec la médecine libérale, les sages-femmes libérales et la PMI ?
L'ONDAM est présenté hors conséquences de la crise de la covid et hors mesures du Ségur de la santé. Je le répète : sa hausse de 2,7 % est exceptionnelle. Lors de la précédente législature, son augmentation annuelle était comprise entre 1,7 et 1,8 %.
L'intérim médical est une question complexe, mais il faut passer à l'application de la loi. Ce week-end, j'ai consulté des directeurs d'hôpitaux et des présidents de commission médicale d'établissement (CME) : plus personne ne supporte qu'un hôpital soit obligé de payer 3 000 euros pour vingt-quatre heures de travail d'un médecin intérimaire, dans une forme de chantage à la fermeture. À un moment donné, il faut y aller. Vous en êtes tous conscients, puisque vous avez voté l'article 33 de la loi Rist.
La question est : à quel moment faut-il le faire, pour s'assurer que les effets de la mesure ne se cumulent pas avec ceux de l'obligation vaccinale et de la crise sanitaire ? Faudra-t-il appliquer cet article comme prévu, dès la fin du mois d'octobre, ou bien devons-nous nous accorder un peu de temps ? Je suis en train de l'évaluer. Ce n'est pas une question facile, mais je suis convaincu que nous devons avancer – et je sais que vous en êtes d'accord.
J'ai chargé deux professionnels d'une mission sur les causes de l'infertilité et sur l'accompagnement des parcours d'infertilité ; ils rendront leurs conclusions d'ici à la fin de l'année. C'est un sujet absolument fondamental.
J'avais également saisi des experts à propos de l'endométriose, sujet sur lequel le Président de la République a annoncé qu'il interviendrait. Au-delà d'une campagne d'information, nous nous orientons donc vers un grand plan destiné à améliorer le dépistage, le diagnostic et la prise en charge.
Je suis favorable à la proposition de Mme Bergé d'organiser une campagne d'information sur le rôle des sages-femmes à destination du public. Si vous y travaillez dans le cadre de ce PLFSS, je considérerai la question avec bienveillance, car c'est utile.
Plus généralement et sans revenir de manière exhaustive sur les actions menées en faveur des sages-femmes, je rappelle que leur revalorisation représente 100 millions d'euros par an, soit 360 euros nets mensuels supplémentaires et presque 4 500 euros nets par an. Personne ne dit que c'est trop, mais il n'y a pas d'autre exemple d'une telle augmentation de revenus dans la fonction publique. Des communiqués de presse de certains syndicats prétendent que nous aurions « du sang sur les mains ». Retrouvons le sens de la mesure ! L'effort consenti par la nation pour les professionnels de santé est absolument inédit.
J'ai réuni 8 500 sages-femmes en visioconférence pendant une heure pour discuter de leurs prérogatives. Lors de leur manifestation nationale, sept organisations syndicales différentes ont demandé des rendez-vous distincts pour exposer leurs revendications, non seulement différentes mais aussi parfois opposées. Mon cabinet les a reçues séparément. Je respecte profondément les organisations syndicales, mais je souhaite que la République soit respectée.
Comme je m'y suis engagé, des travaux sont menés sur la possibilité d'une sixième année d'études. Prétendre l'inverse dans des tracts syndicaux est erroné, voire mensonger. Nous avons créé le statut de sage-femme référente. Je me suis également engagé sur l'identification d'une filière médicale à part dans la fonction publique hospitalière ; une circulaire reconnaît le statut médical des sages-femmes au sein des hôpitaux.
En revanche, même s'il ne fait aucun doute que le travail d'une sage-femme est absolument remarquable, je répète que le statut de médecin hospitalier concerne un métier et des prérogatives différents, et toutes les professions médicales n'y correspondent pas. Je me suis engagé à travailler sur le statut de praticien hospitalier pour les sages-femmes, dont le coût serait d'environ 800 millions d'euros par an.
Je souhaite que les discussions reprennent dans un climat apaisé, afin que puissent être signés les accords conventionnels en discussion, notamment dans le secteur libéral. Faute de quoi on continuera à perdre du temps et les revalorisations salariales sur lesquelles je me suis engagé ne pourront pas avoir lieu dans les délais prévus, c'est-à-dire au 1er janvier 2022.
Le Ségur de la santé représente un assainissement financier de 188 millions d'euros pour les hôpitaux de Strasbourg, avec un grand plan d'investissement pour soutenir notamment la pharmacie et la restructuration de la psychiatrie. Je disposerai de l'ensemble des remontées des ARS sur les investissements et les reprises de dette des hôpitaux d'ici à la mi-octobre. Le Premier ministre aura l'occasion de communiquer sur l'effet de ce plan d'investissement massif pour l'hôpital.
J'ai bien noté les remarques sur la simplification des procédures pour les investissements du quotidien, et j'y souscris.
L'entretien post-natal est en quelque sorte le miroir de l'entretien prénatal précoce. Il s'agit de l'une des propositions de la commission des 1 000 premiers jours, qui est abordée dans le cadre des négociations entre les représentants des sages-femmes et l'assurance maladie sur l'avenant 5 à la convention nationale des sages-femmes. Ce qui nous ramène à mon propos précédent sur l'urgence de signer ce type d'accord, favorable aux sages-femmes mais aussi aux Françaises et aux familles.
Je retiens avec intérêt la proposition de M. Delatte au sujet de l'extension à la lutte contre les chutes des expérimentations menées dans le cadre de l'article 51. Je ferai prochainement des propositions dans le cadre du plan antichutes sur lequel nous travaillons, en complément des mesures figurant dans ce PLFSS, comme la garantie d'une place en EHPAD à la sortie d'un service des urgences.
La séance s'achève à quinze heures cinq.
Présences en réunion
Réunion du lundi 11 octobre 2021 à 13 heures
Présents. - Mme Stéphanie Atger, M. Joël Aviragnet, M. Didier Baichère, M. Belkhir Belhaddad, Mme Annie Chapelier, M. Guillaume Chiche, M. Paul Christophe, M. Dominique Da Silva, M. Marc Delatte, M. Pierre Dharréville, M. Jean-Pierre Door, Mme Jeanine Dubié, Mme Caroline Fiat, Mme Agnès Firmin Le Bodo, Mme Pascale Fontenel-Personne, Mme Perrine Goulet, M. Jean-Carles Grelier, Mme Monique Iborra, M. Cyrille Isaac-Sibille, Mme Caroline Janvier, Mme Fadila Khattabi, Mme Monique Limon, M. Sylvain Maillard, M. Thomas Mesnier, M. Thierry Michels, M. Bernard Perrut, Mme Michèle Peyron, Mme Claire Pitollat, M. Alain Ramadier, Mme Stéphanie Rist, Mme Nicole Sanquer, Mme Valérie Six, Mme Marie Tamarelle-Verhaeghe, Mme Isabelle Valentin, M. Boris Vallaud, Mme Michèle de Vaucouleurs, Mme Annie Vidal, M. Philippe Vigier, M. Stéphane Viry
Excusés. - Mme Justine Benin, Mme Carole Grandjean, Mme Claire Guion-Firmin, M. Jean-Philippe Nilor, Mme Nadia Ramassamy, M. Jean-Hugues Ratenon, Mme Hélène Vainqueur-Christophe
Assistaient également à la réunion. - Mme Aurore Bergé, Mme Stella Dupont